Malgré des publications récentes, Hyacinthe Rigaud demeure un célèbre inconnu. L'homme et son oeuvre ne se sont jamais libérés des jugements réducteurs et caricaturaux dont on les a embarrassés. A l'origine de ces erreurs d'appréciation, on achoppe toujours sur le portrait de Louis XIV en grand costume royal de 1701 : accomplissement de l'art de Rigaud, il en a paradoxalement faussé l'image, soit qu'il ait fait oublier tout le reste de la production, soit que celle-ci ait été assimilée, voire dévorée, par lui.

Fort de son exemple, on croit tout connaître de son créateur. Et pourtant, jusqu'à la soutenance de nos deux thèses (l'une dans le cadre de l'Ecole nationale des chartes en 1995, l'autre dans le cadre de l'Ecole pratique des hautes études en 2003), aucun travail d'ensemble n'avait été véritablement consacré à Hyacinthe Rigaud ; certains (George Van Derveer Gallenkamp, Georges de Lastic, Mary O'Neill) s'y étaient essayés, mais sans jamais aboutir. Largillierre et tout récemment François de Troy ont eu plus de chance grâce à Dominique Brême.

Il est vrai que la tâche a de quoi décourager : plus de mille cinq cents clients, des originaux où la part du maître est souvent équivalente à celle de ses collaborateurs, des répliques et des copies à foison. Quant à l'homme et à son entourage familial, on les connaît mieux depuis le travail pionnier de Claude Colomer.

Restait cependant à exhumer le document fondamental, sans lequel bien des aspects de la vie matérielle ou sensible du peintre continuaient à nous échapper : son inventaire après décès.

Louis XIV - 1701
Paris, musée du Louvre

© Ariane James-Sarazin pour tous les textes et les images de ce module.