L'hereu Just (XVIIe siècle)
L'hereu Just, dont la véritable appellation
patronymique est Jean-Michel Mestre, était un
pagès de Ballestavy qui se révolta, un des
premiers, contre la gabelle levée par Louis XIV dans le
Roussillon. Il ne tarda pas à se trouver à la
tête de bandes de rebelles formées dans le
Vallespir et connues en histoire sous le nom d'Angelets :
mais l'hereu Just n'agit toujours que sous les ordres de
Joseph de La Trinxeria, de
Prats-de-Mollo. Du 3 août 1667 au 30 juin 1668, des
assassinats multipliés furent commis par les
Angelets sur la personne des gabelous. Le Conseil
souverain lança un arrêt, le 21 juillet 1668, qui
déclara perturbateurs publics La Trinxeria et ses deux
lieutenants Damien Nohell et Jean-Michel Mestre, l'hereu
Just. On promit la somme de cent doubles d'or à
quiconque arrêterait un de ces trois chefs et cinquante
à celui qui apporterait leur tête aux magistrats du
Conseil souverain. L'annonce de l'arrivée prochaine en
Roussillon de nombreuses troupes, la promesse d'une amnistie
générale, l'offre de réductions sur les
prix du sel provoquèrent une détente des esprits
et la dispersion momentanée des bandes d'Angelets
vers les derniers jours de l'année 1668. Cette politique
de conciliation fut de courte durée. Les Angelets
reprirent leur campagne contre les gabelous après
neuf mois de trêve. Ce fut Jean-Michel Mestre, l'hereu
Just de Ballestavy, qui entra le premier en scène.
Secondé par un ancien compagnon d'aventures, il tua un
garde à Calmeilles le 3 septembre 1669, un
pagès de Céret le 11 octobre, un
deuxième garde à Fontcouverte le 11 novembre. Le
22 de ce mois, il brûla ensuite une maison. L'hereu
Just détroussa aussi bien les simples particuliers
que les officiers publics, se montra sur les grands chemins
comme dans les sentiers écartés, mais avec une
effronterie et une imprudence telles qu'il ne tarda pas à
être arrêté. Ce fut le bayle de
Prats-de-Mollo qui le fit prisonnier, le 22 janvier 1670. A
cette nouvelle, La Trinxeria et Nohell qui, jusqu'alors,
étaient demeurés tranquilles, entrèrent
à leur tour en campagne. Ils s'efforcèrent de
délivrer leur compagnon, mis sous les verroux, et firent
appel à leurs anciens soldats. Ils enfoncèrent les
portes de Prats-de-Mollo, avec leurs nouvelles cohortes, puis
s'emparèrent de la femme et des enfants du gouverneur et
sommèrent ce dernier, qui se tenait enfermé dans
l'église avec le bayle et les soldats, de leur livrer en
échange l'hereu Just. Lorsque l'échange eut
été effectué, les Angelets
redescendirent le Tech. Sur le parcours, leur bande grossit au
point que la troupe finit par être au nombre de quinze
cents rebelles. Les Angelets s'emparèrent
d'Arles-sur-Tech, en chassèrent la garnison,
tuèrent le bayle le 27 février 1670, et
arrivèrent le 31 mars sous les murs de Céret. Ils
pressèrent si vivement le siège de cette ville,
qu'ils allaient s'en emparer, lorsque Châtillon,
commandant des troupes du Roussillon, arriva et les obligea
à s'enfuir dans les montagnes. Chantilly avec deux mille
hommes vint aussi appuyer ce coup de force. Le 14 avril 1671, le
Conseil souverain condamna à mort par contumace La
Trinxeria, ses lieutenants et leurs complices. L'hereu
Just avec les Angelets avaient eu soin de mettre la
frontière entre eux et leurs juges.