Acte II

Acte IActe III

Scène 1
Marigni fils

 

MARIGNI fils, seul
Adélaïde ! ô ciel ! devais-je te revoir ?
Je n'ai fait qu'irriter mon affreux désespoir.
En m'aimant tu crois suivre un penchant légitime ;
O malheur ! notre hymen désormais est un crime.
Quel funeste secret il faut te révéler !
Ah ! je ne puis me taire et frémis de parler.
Expliquons-nous : l'honneur, le devoir, tout l'ordonne.
La reine en cet instant m'appelle au pied du trône ;
Protégeant notre hymen, vient-elle m'annoncer
Un destin qui jadis... Je la vois s'avancer.

 

Scène 2
La reine, suite, Marigni fils

 

LA REINE
Depuis longtemps je dois récompenser le zèle
D'un guerrier généreux et d'un sujet fidèle.
D'Adélaïde enfin soyez l'heureux époux...
Son bonheur désormais ne dépend que de vous.
Marigni, j'ai voulu vous l'annoncer moi-même.
Lorsque l'hymen m'offrit un nouveau diadème, J'acceptai (mais sans nuire à mes premiers sujets)
La gloire de régner sur le peuple français.
On exigeait en vain qu'une telle alliance
Asservît la Navarre aux destins de la Erance ;
Du sort de mes états mon coeur fut trop jaloux
Pour les abandonner au sceptre d'un époux *.
De leur bonheur futur sagement inquiète,
Je voulus par moi-même acquitter cette dette ;
Je régnai sans partage, et tous les Navarrois
Ont respecté, chéri la fille de leurs rois.
Leur honneur fait le mien, et je vous le confie ;
Conduisez auprès d'eux une épouse chérie,
Gouvernez en mon nom mes fidèles sujets,
Et qu'ils mettent mon choix au rang de mes bienfaits.

 











* Jeanne de Navarre gouvernait elle-même son royaume, quoique reine de France.

MARIGNI fils
Reine illustre ! la France, et la cour, et l'armée,
Retentiront toujours de votre renommée ;
Les Français triomphants, les ennemis vaincus,
Honorent votre gloire, admirent vos vertus.
Le peuple, dont vos soins adoucissent la peine,
Connaît à vos bienfaits que vous êtes sa reine ;
Votre sexe par vous montre l'art de régner ;
Vous savez à la fois combattre et gouverner.
Quel destin vous m'offrez ! quoi ! du haut de ce trône
Où la gloire s'assied, que la pompe environne,
Vos augustes regards descendent jusqu'à moi !
Disposez de mon zèle, et comptez sur ma foi...
Ah ! que ne puis-je, aimé d'une épouse chérie,
Seconder vos desseins, leur consacrer ma vie,
Faire régner pour vous les vertus et l'honneur ?
Mais je ne suis point né pour un pareil bonheur.

LA REINE
Qu'entends-je, Marigni ! votre refus m'étonne.
Quoi ! lorsque mes bontés vous rapprochent du trône,
Lorsque votre vertu servirait mes projets,
Vous dédaignez...

MARIGNI fils
                     0 reine !

LA REINE
                                         Expliquez-vous.
Quel motif ?

MARIGNI fils
                     Un secret...

LA REINE
                                         Ah ! parlez, je l'exige.

MARIGNI fils
Hélas! si vous saviez !

LA REINE
                     Je l'ordonne, vous dis-je.

MARIGNI fils
Eh bien ! connaissez donc mon désespoir affreux ;
Vous me plaindrez ; mon sort sera moins malheureux.
Du prince de Béarn j'aimai l'illustre fille ;
Je fus aimé, j'obtins l'aveu de sa famille.
Mais le roi (pardonnez si je m'en plains à vous)
Offrit Adélaïde aux voeux d'un autre époux.
Pouvais-je être témoin de ce triste hyménée,
Qui devait à jamais la rendre infortunée ?
Je déserte la cour, je m'exile soudain ;
Je m'éloigne et parviens aux rives du Jourdain ;
Au milieu des périls, que j'affronte avec gloire,
Je demande la mort et j'obtiens la victoire ;
Partout mon désespoir assurait mes succès.
Je guidais aux combats ces chevaliers français,
Qui, pour venger Sion, combattent l'infidèle :
Hélas ! ces chevaliers, pour honorer mon zèle,
Vainement de lauriers couronnent ma valeur,
La gloire est sur mon front, le deuil est dans mon coeur.
Séparé de mon père, absent de ma patrie,
Désespéré, pleurant une amante chérie,
Dans mes tristes regrets n'osant même en parler,
Je crus que Dieu lui seul pouvait me consoler.
On sait à quels devoirs les défenseurs du temple
Consacrent saintement leur vie et leur exemple ;
Parmi ces chevaliers je comptais des amis ;
Dans leurs rangs belliqueux je consens d'être admis,
Et bientôt un serment, funeste, irrévocable...

LA REINE
Irrévocable ! ô ciel !

MARIGNI fils
                    Epargnez un coupable.
Aux marches de l'autel prosterné chaque jour,
Je demandais à Dieu d'éteindre mon amour.
Insensé ! de mes pleurs baignant le sanctuaire,
Je tremblais que le ciel n'exauçât ma prière.
Cependant soutenu de secours étrangers,
L'ennemi tout à coup ramène les dangers,
Porte jusqu'en nos murs la flamme et le carnage.
Nos chevaliers au nombre opposent le courage ;
Vains efforts ! jour affreux ! nul n'accepte des fers.
La gloire a raconté nos illustres revers :
Je survis presque seul. Cette triste journée
A mes yeux tout à coup change ma destinee.
Je vois que les amis témoins de mes serments
Ont péri sous les coups des vainqueurs musulmans.
La flamme a dévoré les sacrés caractères
De mes serments écrits témoins dépositaires ;
Mon funeste secret n'est connu que de moi ;
Adélaïde encor me conservait sa foi.
De fidèles avis m'en donnaient l'assurance ;
Je pars au même instant, je vole vers la France.
Vous ferai-je l'aveu des transports d'un amant,
Du projet insensé de trahir mon serment ?
Déserteur de l'autel et chevalier perfide,
J'osais prétendre encore au coeur d'Adélaïde.
Tout servait à la fois et secondait mes voeux.
Je vois les templiers proscrits et malheureux.
Un généreux remords a ranimé mon zèle :
Au jour de leurs revers je leur serai fidèle ;
Et je ferai céder, malgré mon désespoir,
L'amour à la vertu, le bonheur au devoir.

LA REINE
Oui, le ciel vous appelle à servir l'innocence.
Des chevaliers proscrits vous prendrez la défense ;
Vous les assisterez dans leur pressant danger ;
Je les crois innocents, j'ose les protéger.

MARIGNI fils
Quoi ! vous-même... Pour moi quel exemple sublime !

LA REINE
Je me range toujours du parti qu'on opprime.
Vous me seconderez ; j'aurai soin cependant
Que vous ne hasardiez qu'un courage prudent.
Votre fatal secret vous appartient encore ;
Il faut qu'Adélaïde elle-même l'ignore ;
Il faut le taire au prince, à votrepère, à tous.
Je sais pour quel dessein le roi compte sur tous ;
J'apprends, mais en secret, que dans ce jour peut-être,
Tous seront arrêtés, chevaliers et grand-maître.
De ces braves guerriers on craint le désespoir,
Et de les arrêter on vous fait un devoir :
Ne refusez pas.

MARIGNI fils
                     Moi !

LA REINE
                                         Votre père a d'avance
Annoncé votre zèle et votre obéissance.

MARIGNI fils
Mon père vainement s'est engagé pour moi ;
Mes refus braveraient et mon père et le roi.

LA REINE
Vous livrez ces proscrits à la haine implacable !
Prévoyez donc leur sort.

MARIGNI fils
                     Qu'un autre en soit coupable.

LA REINE
Moi qui veux les sauver, je tremble, je frémis,
S'ils sont abandonnés à leurs vils ennemis.
Quand l'envie et la haine accablent l'innocence,
Lui refuserez-vous votre noble assistance ?
Ah ! combien j'applaudis ces mortels généreux
Qui, redoublant de zèle en des temps malheureux,
Des rigueurs de la loi ministres magnanimes,
Sans trahir le pouvoir consolent ses victimes !

MARIGNI fils
A ces infortunés je promets mon secours ;
Je puis, je dois pour eux sacrifier mes jours ;
Mais que des oppresseurs je paraisse complice !
Non, vous n'exigez pas ce cruel sacrifice.

LA REINE
C'est l'unique moyen de veiller sur leur sort ;
Pensez que d'autres mains les livrent à la mort.
Ils connaîtront par vous que je prends leur défense.
Faites dans leur prison descendre l'espérance.
Vous seul pouvez servir les desseins généreux
Que la vertu, l'honneur m'inspireront pour eux.
Je ne m'explique pas... Cédez, je vous l'ordonne.
S'il faut que leur prière arrive jusqu'au trône,
C'est vous seul, quel emploi digne de votre coeur !
C'est vous qui plaiderez la cause du malheur.
A détromper le roi moi-même je m'engage,
Et dans ce grand revers j'exige un grand courage.
Des mortels généreux vous craignez les mépris :
Leur estime est sacrée, et j'en connais le prix ;
Mais c'est de la vertu le dévoûment sublime,
Quand, pour faire le bien, nous perdons cette estime.
Non, vous n'hésitez plus.... Je vais auprès du roi,
Et mes ordres bientôt vous attendront chez moi.

 

Scène 3
Marigni fils

 

MARIGNI fils, seul
O ciel ! qu'exige-t-on ? Notre cause est commune ;
Nous sommes compagnons de gloire et d'infortune ;
Avec eux je devrais et combattre et mourir.
Mais la reine pourtant voudrait les secourir :
Que dis-je ? elle protège et leur vie et leur gloire :
Sa vertu m'a parlé, puis-je ne pas l'en croire ?
C'est trop délibérer, servons ces malheureux ;
Je cède à mon destin qui m'entraîne auprès d'eux.
Hélas ! pour secourir l'innocence opprimée,
Je donnerais mon sang... Donnons ma renommée.
O pénible vertu ! faudra-t-il en ce jour
Te sacrifier tout, gloire, espérance, amour ?...

 

Scène 4
Le ministre, Marigni fils

 

LE MINISTRE
Le monarque permet que ton hymen s'apprête ;
Sa présence et ses dons embelliront la fête.
Mérite, ô mon cher fils ! les bontés de ton roi ;
Que ton zèle soit digne et du trône et de moi.
Des templiers proscrits embrassant la défense,
Tu t'es rendu coupable au moins d'une imprudence ;
Mais je l'ai réparée, et le roi t'a permis
De servir ses projets contre nos ennemis.
Je crains leurs partisans, je crains le connétable :
On s'agite en faveur de cet ordre coupable ;
Il faut intimider et la cour et Paris ;
Nous voulons tout à coup enchaîner les proscrits,
Et de leur résistance éviter le scandale.
Expiant de mon fils l'imprudence fatale,
Je viens de demander et d'obtenir pour toi
L'honneur de diriger la vengeance du roi.

MARIGNI fils
O mon père !

LE MINISTRE
                     Obéis à cet ordre suprême :
Refuser c'est te perdre, et me perdre moi-même.

 

Scène 5
Les mêmes, le roi, le chancelier

 

LE ROI
Eh bien ! des templiers l'indomptable fierté
Fléchira-t-elle enfin devant ma volonté ?
Ou, par une coupable et vaine résistance,
Appellent-ils sur eux l'éclat de ma vengeance ?

LE MINISTRE
Moi-même j'ai rempli ce message important :
Tous se sont devant moi rassemblés à l'instant.
«Des lieux, leur ai-je dit, où brilla votre gloire,
Vous êtes à jamais bannis par la victoire,
Et depuis vos revers l'ordre n'existait plus.
Vous perdîtes vos droits quand vous fûtes vaincus.
Obéissez enfin, votre intérêt l'ordonne.
Accusés de trahir et l'autel et le trône,
Quand on peut vous livrer au glaive de la loi,
C'est vous justifier, que d'obeir au roi.
Un coupable refus vous perd, je vous l'annonce.»
Je ne vous parle point, sire, de leur réponse,
Ni des discours hautains qu'ils ont osé tenir ;
Il ne faut désormais songer qu'à les punir.

LE ROI
Non, je n'hésite plus. Leur fierté criminelle
Aux bienfaits du monarque est encore rebelle !

LE CHANCELIER
Ces refus insolents vous expliquent assez
De quels affreux périls nous étions menacés ;
Vous n'en avez que trop retardé la vengeance.

LE ROI
Je la dois à l'église, à l'Europe, à la France.
Partout les templiers menacent à la fois
Le bonheur des sujets, l'autorité des rois.
Voyez dans l'Aragon leur vigilante adresse
D'Alphonse vieillissant suborner la faiblesse ;
Des droits de sa couronne il les nomme héritiers *.
Quel orgueil enivrait ces superbes guerriers !
De la gloire des rois leur audace rivale,
Sous le dais, sur le trône eût assis le scandale,
Si le peuple, les grands, et le voeu de la loi
N'eussent créé contre eux un légitime roi.
Que les bienfaits publics aient excité leur zèle,
Tandis que leur bravoure attaquait l'infidèle,
Il le fallait alors. Leurs exploits glorieux
Détournaient de l'Europe un torrent furieux ;
Contre le musulman ils servaient de barrière.
Mais il a terrassé leur audace guerrière.
L'Orient reconnaît un vainqueur menaçant,
Et l'étendard sacré fuit devant le croissant.
Les nombreux templiers que la victoire exile
Espèrent dans l'Europe obtenir un asile.
On les verrait d'abord dociles et soumis ;
Mais bientôt relevant leurs projets ennemis,
Dès qu'ils auraient fondé les droits de leur puissance,
Ils s'armeraient encor de leur indépendance.







* Alphonse Ier, roi d'Aragon et de Navarre, se voyant sans postérité, avait, par son testament, nommé les templiers et les hospitaliers pour ses successeurs aux couronnes de Navarre et d'Aragon ; mais les deux nations se choisirent d'autres souverains.

LE CHANCELIER.
La thiare insultait au sceptre de nos rois ;
Comment ces chevaliers vengerent-ils vos droits ?
Le dirai-je ? en public, le faste de leur zèle
Par des discours pompeux servait notre querelle.
En secret leurs trésors, leur crédit redouté
Du pontife romain excitaient la fierté (1).





(1) Dans les débats entre Philippe-le-Bel et Boniface VIII, les templiers parurent prendre le parti du roi ; mais on les soupçonna d'avoir appuyé en secret l'audace du pape.

LE ROI
S'ils outrageaient ainsi l'honneur du diadème,
Dans leurs rites secrets l'audace et le blasphème,
Insultant l'éternel et méprisant ses lois,
Contre lui s'exerçaient à détrôner les rois.
L'Europe n'attendait qu'un signal, je le donne ;
Soudain les autres rois, s'ils sont dignes du trône,
Voudront punir le crime et venger leur affront :
Nul n'eût donné l'exemple, et tous l'imiteront (2).
                    (au Ministre)
Votre fils est-il prêt ? C'est avec confiance...









(2) Philippe-le-Bel provoqua par son exemple et par ses exhortations tous les autres princes de l'Europe à poursuivre les templiers.

LE MINISTRE
Du zèle de mon fils j'ai donné l'assurance ;
Je veillerai sur tout; je réponds du succès.

 

Scène 6
Les mêmes, un officier

 

L'OFFICIER
Sire, le connétable entre dans ce palais ;
Il demande l'honneur d'être admis.

LE ROI
                     Qu'il paraisse.

 

Scène 7
Les mêmes, hors l'officier

 

LE MINISTRE au roi
Au sort des templiers je sais qu'il s'intéresse.
Vous verrez à vos pieds leurs amis, leurs parents :
Quand les coups tomberaient même sur nos enfants,
L'intérêt de l'état commande qu'on punisse :
Intercéder pour eux, c'est être leur complice.

MARIGNI fils
Ah ! mon père, souffrez...

LE MINISTRE.
                     Vous, mon fils, suivez-moi ;
Je vous expliquerai les volontés du roi.
                     (Il sort et emmène son fils.)

 

Scène 8
Le roi, le chancelier, le connétable

 

LE CONNETABLE
Sire, vous permettrez qu'un serviteur fidèle
Vous offre en cet instant la preuve de son zèle.

LE ROI
Connétable, parlez.

LE CONNETABLE
                     Le chef de vos guerriers
Défendra devant vous l'honneur des templiers.
S'il faut juger de tous, sire, par le grand-maître,
Aucun d'eux n'est coupable, ils ne peuvent pas l'être.
A mes côtés souvent leur chef a combattu ;
Les ennemis et moi connaissons sa vertu.
Généreux à la cour, intrépide à l'armée,
Il jouit d'une illustre et digne renommée.
La haine le poursuit, mais il est innocent ;
J'oserais le défendre au prix de tout mon sang.
Daignez...

LE ROI
                     Je suis surpris, j'ai quelque droit de l'être :
Pour la première fois vous louez le grand-maître ;
Vous n'en aviez jamais parlé comme aujourd'hui.

LE CONNETABLE
Sire, ses actions parlaient assez pour lui.
Je sais qu'en cet instant on craint de le défendre,
Et j'aime à le louer, quand il ne peut m'entendre.
J'admirais le grand-maître au milieu des combats ;
Sire, je l'imitais et ne le vantais pas.
Mais il est malheureux, j'offre mon témoignage ;
J'atteste ses vertus, son zèle, son courage ;
Aucun de vos guerriers, capitaine ou soldat,
Plus que lui ne chérit et son prince et l'état.
Dois-je vous rappeler ses exploits honorables ?

 

Scène 9
Les mêmes, le ministre

 

LE MINISTRE
Sire, bientôt mon fils arrête les coupables.
Vous pouvez les livrer sans crainte et sans danger,
Au tribunal sacré choisi pour les juger.
Je vous promets la preuve et l'aveu de leurs crimes.

LE CONNETABLE
Ce sont des accusés et non pas des victimes ;
C'est donc aux seuls Français, ministres de la loi,
De venger, s'il le faut, la patrie et le roi.
On donnerait pour juge un prêtre inexorable !

LE ROI
Partout où ses regards rencontrent un coupable,
Le devoir de ce juge est de le condamner :
Les rois sont plus heureux, ils peuvent pardonner.
Ces guerriers insultaient notre sainte croyance ;
C'est à l'inquisiteur de juger cette offense.
Oui, lui seul doit punir ces horribles forfaits ;
C'est le voeu de la loi, c'est celui des Français.
Ces ministres sacrés, dont l'austère franchise,
Devant le souverain, parle au nom de l'église,
Ces premiers magistrats, dont l'éloquente voix
M'implore au nom du peuple ou m'expose ses droits,
Tous mes sujets enfin dénoncent de grands crimes.
Je cède et dois céder à ces voeux unanimes.
                     (au ministre)
L'inquisiteur m'attend et demande à me voir ;
Cen est fait : employons son terrible pouvoir ;
D'un parti criminel déconcertons l'audace.
                     (au connétable)
L'aveu des accusés peut seul obtenir grâce.

 

Scène 10
Le chancelier, le ministre, le connétable

 

LE CONNETABLE
C'est vous, dont les avis ont décidé le roi
A livrer ces guerriers au glaive de la loi !
Je vous le dis encore, ils ne sont pas coupables ;
De leur sort désormais vous êtes responsables.

LE MINISTRE
Comme vous, nous songeons an salut de l'état.
Vos avis prévaudront dans un jour de combat :
Elevé dans les camps, un guerrier magnanime
Refuse noblement de soupçonner le crime.

LE CONNETABLE
Ici je le soupçonne et veux le prévenir.
Craignez de l'achever ? on pourrait le punir.
Dans le champ de l'honneur il nous faut du courage,
Mais je vois qu'en ces lieux il en faut davantage :
Tel marche à l'ennemi sans être épouvanté,
Qui n'ose dans les cours dire la vérité ;
Moi, j'oserai la dire.
(Il sort.)

 

Scène 11
Le ministre, le chancelier

 

LE CHANCELIER
En vain il nous menace ;
Hâtons-nous, et bravons ses cris et son audace.

LE MINISTRE
Peut-être un même jour verra tous ces proscrits
Accusés, détenus, condamnés et punis.

 


Acte IHaut de la pageActe III