MENSA (τράπεζα par abréviation pour τετράπεζα)
Dans son sens primitif, ce mot (formé de metior) désignait une planche, une table servant à prendre des mesures de surface, à lever des plans ; mais ensuite on l'a employé dans un sens aussi général que notre mot table, sans distinction de surface ronde ou carrée, quoique la forme carrée soit impliquée naturellement quand on emploie le mot mensa tout seul, sans y ajouter aucune indication sur la forme particulière de table qu'on entend désigner. Voici les sens les plus caractéristiques de ce mot :
- Seul ou avec l'épithète escaria, il désigne une table à manger. Dans la plus haute antiquité, au moins chez les Romains, les tables à manger étaient carrées, portant sur le châssis, comme le montre la figure ci-jointe, qui représente, d'après une peinture du Virgile du Vatican, les compagnons d'Ulysse à table dans l'île de Circé. Mais, après l'invention des tables à manger de forme circulaire, la forme carrée fut généralement abandonnée, excepté dans les réfectoires de soldats, où on la conserva (Varro, L.L. V, 118).
- Mensa prima (πρώτη τράπεζα). Le premier service d'un dîner ; on l'apportait quelquefois sur un plateau que l'on plaçait sur la table (ferculum) ; d'autres fois on apportait la table même toute servie ; on la mettait devant les convives, et on la remportait quand avait disparu ce qu'elle offrait à l'appétit de ceux qui l'entouraient ; de là, les mots mensam ponere, auferre, tollere, removere, répondant à nos expressions servir, desservir le dîner (Ov. Met. XI, 19 ; Plaut. Truc.. II, 4, 13 ; Cic. Pis. 27 ; Virg. Aen. I, 216).
- Mensa secunda (δεύτερα τράπεζα). Le second ou dernier service d'un repas, composé de fruits, de confitures, de pâtisseries ; il répondait à notre dessert (Hor. Sat. II, 2, 121 ; Nep. Ag. 8 ; Cic. ad Att. XIV, 6 et 21 ; Cels. I, 2).
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- Mensa vinaria. Table à boire. Quand elle était ronde, comme dans la figure ci-dessus, qui représente une table de cette espèce, avec des coupes dessus, elle prenait le nom de cylibathum ou cilibantum (Varro, L.L. V, 121), distinction qui indique qu'on employait probablement aussi pour le même usage des tables carrées.
- Mensa vasaria. Table destinée à supporter les cruches, les burettes et autres vases employés dans le ménage. Ces tables étaient de deux espèces : les unes placées dans l'atrium, les autres dans la cuisine. Toutes deux néanmoins étaient également en forme de carré long ; chacune des deux espèces avait son nom particulier.
- Mensa delphica. Table employée comme meuble d'ornement.
- Mensa sacra. Table faite de marbre, d'or ou d'argent, servant en quelque sorte d'autel ; on la plaçait devant les statues des dieux, couverte du vin, des vases, des fruits et des viandes qu'on leur offrait dans la solennité du lectisternium, comme le représente la figure ci-jointe, d'après une lampe en terre cuite (Festus, s.v. ; Cic. N.D. III, 34 ; Virg. Aen. II, 764).
- Table ou étal sur lequel certains marchands, tels que les fruitiers, les volaillers, les pêcheurs, étendaient leurs denrées pour les vendre, dans les rues et les marchés (Hor. Sat. II, 4, 37). La figure représente un étal de cette espèce, couvert de légumes, de volailles et de poissons, dans le forum d'Herculanum, d'après une peinture découverte dans cette ville. Le marchand est assis à côté de son étal, tandis qu'une pratique tend une assiette sur laquelle va être déposé l'objet qu'elle a acheté ; les jarres placées à terre contiennent aussi des comestibles.
- Mensa lanionia. Billot de boucher, probablement analogue à celui dont ils se servent encore (Suet. Claud. 15).
- Mensa argentaria. Table ou comptoir d'un banquier, d'un changeur, sur lequel il tenait toutes prêtes les sommes d'argent dont il avait sans cesse besoin pour ses affaires (Donat. ad Terent. Ad. II, 4, 13 ; cf Hor. Sat. II, 3, 148). C'est à cet ancien usage que nos mots banquier et banqueroute doivent leur origine ; ils nous sont venus des Florentins, les principaux banquiers de l'Europe pendant le Moyen-Age. A cette époque, ils avaient l'habitude de placer leur argent, comme les anciens Romains, sur une table ou banc de bois (banco), derrière lequel ils étaient assis ; par suite, on les appelait banchieri. Si quelqu'un d'entre eux ne pouvait faire honneur à ses engagements, son comptoir était immédiatement brisé en moreaux, et il lui était interdit de continuer les affaires. C'est de cet usage du banc brisé (banco rotto) que vient le mot banqueroute. Les Grecs disaient de même anaskeuazein thn trapezan (Voyez Coray sur les Caractères de Théophraste, p. 189)
- Mensa publica. Comptoir public, ou banque publique, dont le capital, provenant des impôts, appartenait à l'Etat, et était déboursé pour les services publics (Cic. Flac. 19 ; Pis. 36).
- Plate-forme ou estrade élevée, sur laquelle étaient exposés en vente des esclaves (Apul. Met. VIII, p. 171 ; Apol. p. 432). Même sens que catasta.
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- Longue planche ou table plate, faisant partie des machines de guerre (Vitruv. X, 11, 6) ; mais comment était-elle employée, et quel rôle jouait-elle ? Il est difficile de s'en rendre compte. Voyez la figure au mot carroballista.
Illustration complémentaire | |
Mensa funéraire © Agnès Vinas |