Rues

  Aspect général Fontaines      
Aspect général  

Rue de Stabia

Les rues de Pompéi sont assez étroites ; leur plus grande largeur n'excède pas 7 mètres, y compris les trottoirs (1) ; beaucoup n'ont pas plus de 4 mètres, et je ne parle pas des ruelles plus étroites encore destinées aux seuls piétons ; mais il n'était pas nécessaire que les rues fussent aussi spacieuses que les nôtres, les chars étant en petit nombre et n'ayant pas plus de 1m 35 de voie, ainsi qu'il est facile de s'en convaincre par l'examen des ornières que les roues ont tracées dans le pavé (2). D'ailleurs cette disposition est conforme à l'opinion des anciens, car nous lisons dans Tacite, à l'occasion des embellissements de Rome : «Il en est cependant qui croient l'ancienne manière plus favorable pour la salubrité, parce que ces rues étroites et la hauteur des toits atténuaient l'influence du soleil ; au lieu que maintenant cet espace qui reste à découvert et que ne protège aucune ombre est en butte à toute l'ardeur de l'été» (3).

Les rues de Pompéi sont généralement régulières et tirées au cordeau, mais quelques-unes cependant font exception ; elles sont pavées de gros blocs de lave de forme polygonale, enchâssés les uns dans les autres et consolidés par des coins de fer des cailloux ou des morceaux de marbre ou de granit introduits entre les joints à coups de masse.

Un système différent était adopté pour les endroits où les voitures ne devaient pas passer ; ainsi le Forum et la large rue qui y aboutit, entre le temple de Jupiter et le Panthéon, étaient pavés de grandes dalles rectangulaires placées par lignes dans le sens de leur longueur, qui atteignait quelquefois 1m 20, sur une largeur de 0m 55.

Dans les rues, la chaussée, encaissée entre deux trottoirs élevés, margines, et munis de bornes, metae, devait former une espèce de torrent presque infranchissable pendant les mois de décembre et de janvier où les pluies tombent dans ce pays avec une si terrible abondance. Pour obvier à cet inconvénient, on avait ménagé, de distance en distance, des rangées de pierres ovales et saillantes entre lesquelles les roues des chars devaient passer (4) et qui permettaient de traverser les rues à pied sec et en outre dispensaient en tout temps de descendre des trottoirs, toujours plus élevés que les nôtres et atteignant parfois la hauteur de 50 centimètres. Quelquefois à l'entrée des ruelles inaccessibles aux voitures, ces pierres faisaient suite aux trottoirs sans interruption et formaient une sorte de pont sous lequel étaient ménagés des passages pour l'écoulement des eaux.

Les bornes et les pierres qui forment les bordures des trottoirs sont souvent, et surtout devant les boutiques, percées de trous qui servaient à attacher les chevaux.

Les principales rues découvertes jusqu'à ce jour sont : la Voie des Tombeaux ou faubourg Augusto-Felix, qui conduisait d'Herculanum à la porte de Pompéi ; la rue Consulaire ou Domitienne, qui lui fait suite dans la ville qu'elle traverse en partie du N.-O. au S.-E. ; la rue qui rencontre celle-ci à angle droit et qui sous les trois noms de rue des Thermes, de la Fortune et de Nola, se dirige du S.-O. au N.-E. jusqu'à la porte de Nola ; la rue des Augustales ou du Temple d'Auguste, qui est à peu près parallèle à la rue de la Fortune ; la rue des Orfèvres ou de la Fontaine d'abondance, devant le premier nom à la quantité de bijoux trouvés dans ses boutiques, et qui, partant à angle droit du côté oriental du Forum, longe l'édifice d'Eumachia ; et la rue du Forum, qui commence à l'angle N. du Forum, à côté du temple de Jupiter et vient, en séparant la rue des Thermes de celle de la Fortune, changer son nom en celui de Mercure et aboutir à la muraille septentrionale de la ville. Nous verrons que cette dernière était une des plus commerçantes de Pompéi ; enfin, du nord au sud se dirigeait la rue de Stabia, qui s'étendait de la porte du Vésuve à celle de Stabia.

Du côté du N.-E. on arrivait à Pompéi par la voie Popilienne, qui, traversant Nola, s'étendait jusqu'à Reggio ; enfin une troisième voie franchissait le Sarno et, se partageant aussitôt en deux branches, gagnait Stabia et Nuceria.


(1)  Chaque propriétaire était chargé de la confection et de l'entretien de ces trottoirs devant sa propriété ; aussi sont-ils formés de toute espèce de matériaux, tels que la pouzzolane, le ciment, l'opus signinum, la brique, les galets, l'asphalte, et même le marbre et la mosaïque. Cette différence peut servir encore aujourd'hui à reconnaître les limites des propriétés.

(2)  Le pavé était fort mal entretenu ; les dalles sont souvent bouleversées, et dans la rue de Stabia, l'une des plus fréquentées pourtant, j'ai mesuré des ornières qui n'avaient pas moins de 0m 20 de profondeur.

(3)  Annales, XV, 43.

(4)  «Ces pierres, dit avec raison Dyer, n'avaient pas beaucoup d'inconvénient pour les bigues ou chars à deux chevaux dont les roues passaient facilement dans les espaces vides ainsi que les chevaux librement harnachés».(POMPEII, 2e édit. 1868, p. 71.) Comment faisaient les chariots attelés d'un seul cheval ?