La bataille d'Actium


     


1. Présentation historique


Qui ?

D'un côté, Octave et Agrippa, son fidèle conseiller et grand général, avec 400 navires, et de l'autre, Marc-Antoine et Cléopâtre, avec 170 navires romains et 60 navires égyptiens.

Quand ?

Dans la journée du 2 septembre de l'année 31 av. J.-C.

Où ?

Dans le golfe Ambracique, au sud de l'île de Corfou en Grèce sur le littoral de la mer Ionienne



Comment ?

Après plusieurs mois de course-poursuite, Antoine et Cléopâtre se trouvent piégés dans le golfe Ambracique. La chaleur, la malaria et la soif les poussent à forcer le blocus d'Octave et à engager le combat.

 


Comme Antoine cherche à s'échapper du mur de navires que lui oppose Octave, le succès de son entreprise dépend de la présence d'un vent de poupe qui le poussera vers le large. Cependant, ce jour-là, le vent tarde à se faire sentir, et ce n'est qu'à midi que les navires d'Antoine peuvent commencer leur manoeuvre. Face à l'avancée de la flotte d'Antoine, les navires commandés par Agrippa (car Octave, piètre stratège, est resté au campement), reculent. Et Publicola, l'amiral d'Antoine, ne résiste pas, malgré les ordres de rester dans les rangs, et décide d'attaquer la flotte d'Agrippa qui semblait fuir. Le général en chef d'Octave choisit ce moment-là pour inverser le sens de marche de ses navires et déclencher le choc entre les deux flottes.

À ce moment précis de la bataille, rien n'est encore décidé. Mais Cléopâtre décide de suivre son plan initial de forcer le blocus et de rejoindre la haute mer. Et elle y parvient grâce au désordre et aux combats environnants. D'après ce que prétendra la propagande d'Octave, Marc-Antoine voyant son "amour" réussir à fuir vers le large, prend la décision de la suivre avec les quelques vaisseaux les plus proches de lui, et de s'enfuir lui aussi. 120 navires au total auront réussi à s'échapper.

Octave décide alors d'incendier le reste de la flotte d'Antoine qui est resté bloquée. 40 vaisseaux couleront et 12000 hommes mourront au cours de cette bataille. Pourtant, bien que vainqueur par le nombre d'ennemis tués, Octave n'a pas obtenu la victoire totale qu'il escomptait lors de cette bataille puisque ses deux grands ennemis, Marc-Antoine et Cléopâtre, auront réussi à s'enfuir avec 120 navires. 

Pourquoi ?

Marc Antoine, amoureux de la reine d'Égypte, a rompu l'accord de Brindes qui le liait à son rival. Il a répudié sa femme Octavie, soeur d'Octave, et préparé l'avènement d'un royaume oriental. Octave ayant fait ouvrir un testament que Marc Antoine avait imprudemment laissé à Rome, les Romains sont scandalisés d'apprendre que pour lui, l'héritage de César devait revenir à Césarion, le fils adultérin de l'ancien dictateur et de Cléopâtre. Là-dessus, Octave presse le Sénat romain de déclarer la guerre à Cléopâtre VII. Il ne dit rien d'Antoine, qui est encore influent à Rome, mais il se porte avec sa flotte au-devant de son rival. (Source : herodote.net)

 


2. La bataille dans les arts


Les textes

On trouve des témoignages de la bataille d'Actium d'abord chez les poètes contemporains de l'événement et partisans d'Octave-Auguste, surtout Virgile dans l'Enéide ou Horace dans les Odes ; par la suite, des oeuvres historiques vont prendre le relais, comme la Vie des Douze Césars de Suétone au chapitre dix-septième mais très brièvement : « Bientôt après, il le vainquit dans une bataille navale auprès d'Actium ; le combat se prolongea jusqu'au soir, et le vainqueur passa la nuit sur son vaisseau.» Plutarque dans les Vies parallèles, ou encore Eutrope dans l'Abrégé de l'Histoire romaine, où il consacre un chapitre à la bataille d'Actium et à la victoire d'Auguste au chapitre septième. On trouve une rapide allusion à Marc-Antoine dans "Octavien surnommé Auguste" de Sextus Aurelius Victor dans Des Césars. Tous ces témoignages montrent que la société romaine a été marquée par cette bataille et que ce fut un grand changement pour les Romains, car avec  la fin de la guerre civile, ils entraient dans la période du principat.

 

La numismatique

Ce type de denier a été frappé par Antoine avant la bataille d'Actium, afin de payer ses légions.

Ce denier a été frappé par Octave dans le but de commémorer la victoire d'Actium, après la bataille.

 

La sculpture

  • Bas-reliefs Medinaceli-Budapest dits « reliefs d'Actium »

    Ces plaques en marbre de Carrare en bas-relief sont extraites d'une série de sculptures se trouvant à l'origine dans un temple dédié au culte impérial d'Auguste. Ces bas-reliefs ont été découverts dans l'ancien royaume de Naples qui comprenait tout le sud de l'Italie, puis ont été séparés au fil du temps : certains se trouvent actuellement à Séville, et d'autres à Budapest.

    Ensemble de 3 plaques de marbres représentant la bataille d'Actium

     

    Représentation d'Apollon veillant sur Octave


    Sur la plaque n°1, assez ruinée, nous ne pouvons apercevoir qu'une représentation du dieu Apollon avec sa lyre, assis sur un rocher et devant un trépied. C'est lui qui assure la victoire au vainqueur, ici Octave.

     


     

    Le point d'impact entre les deux flottes se situe à la jonction des plaques n°1 et 2. L'action principale se trouve au premier plan sur lequel nous pouvons observer le choc entre les vaisseaux amiraux d'Octave, à gauche, et d'Antoine, à droite, tandis qu'une troisième galère est en train de couler.

    Nous pouvons déduire à qui appartient chaque bateau grâce aux figures de proue. En effet, sur la proue du navire d'Antoine est représenté un centaure symbolisant la décadence, la débauche et l'ivrognerie, trois défauts qu'Octave, dans sa propagande, assigne à son adversaire.

    De même, nous ne pouvons le voir sur la sculpture, mais selon de nombreuses sources écrites, la figure de proue du bâtiment de gauche était une représentation du monstre de Scylla.


     

  • Scènes de la vie de Cléopâtre

    Bassin en argent d'après une esquisse de Bernardo Strozzi - 1620-1625
    J. Paul Getty Museum - Los Angeles

     

    Ce bassin a été conçu d'après un esquisse de Bernardo Strozzi, elle-même inspirée d'un extrait de l'Enéide de Virgile, Livre VIII, vers 675 à 728, qui évoque différents moments clés de l'histoire de Rome dont la bataille d'Actium.

    Le bassin représente plusieurs scènes de la vie de Cléopâtre. Les quatre cartouches périphériques sont consacrés à Antoine : le triumvirat, la rencontre avec Cléopâtre, un banquet, et les instants qui suivent son suicide.

    La partie la plus spectaculaire, et la plus travaillée, en haut-relief, entoure le médaillon central consacré à la mort de Cléopâtre. L'artiste a représenté une scène de bataille furieuse, avec en arrière-plan la bataille d'Actium.

 

 

La peinture

 

Lorenzo A. Castro - La bataille d'Actium - 1672
National Maritime Museum - Greenwich


Ce tableau ne nous présente pas un conflit entre Octave et Antoine, mais entre Rome et l'Egypte. En effet, on ne peut distinguer les navires d'Octave de ceux d'Antoine. En revanche, nous pouvons voir le bateau d'une Cléopâtre défaillante fuyant face à la puissance de Rome. De plus, pour insister sur la puissance de la Ville éternelle et sur l'infériorité de l'Egypte, les navires romains sont bien plus grands que le navire amiral de Cléopâtre.

Le peintre nous montre aussi les pertes dramatiques subies au cours de cette bataille navale, en représentant au premier plan un bâtiment romain en train de sombrer avec tout son équipage.

 

Johann Georg Platzer - Antoine et Cléopâtre à la bataille d'Actium - 1730-1761
Huile sur cuivre de  mesurant 52x80 cm - English Heritage, The Wellington Collection, Apsley House


Nous ne pouvons remarquer que l'immense violence des combats lors de la bataille d'Actium. En effet, très peu de personnages peuvent être distingués parmi la cohue et l'enchevêtrement de corps et d'armes, à part trois  : l'homme habillé en bleu portant les attributs d'un chef de guerre au centre, un autre général un peu à droite du premier, et un troisième homme en bas à droite du tableau à l'allure fière. Tous trois sont mis en valeur par un lumière presque divine venue de la gauche du tableau. Cependant, aucun de ces hommes ne peut être identifié clairement. Il y a peut-être parmi eux Octave ou Antoine mais rien ne nous le prouve, ils pourraient tout aussi bien être des dieux. Quant à Cléopâtre, malgré le titre, elle difficilement identifiable sur cette oeuvre.

 

La bataille d'Actium dans l'Histoire de César et Cléopâtre- vers 1680
Tapisserie en laine et soie mesurant 400.6 x 359.5 cm
d'après un carton de Justus van Egmont tissée dans l'atelier de Willem van Leefdael à Bruxelles-
Art Institute of Chicago


Sur cette tapisserie, nous pouvons voir au milieu de la fureur des combats Octave à droite, attaquant Antoine au centre qui protège Cléopâtre tapie à gauche, abritée sous un baldaquin. Toute la violence de la scène est exprimée dans les effets de mouvements donnés par le peintre du carton, l'agitation des vagues et les regards fiévreux des combattants.

 

Agnes Pringle - Antoine et Cléopâtre fuient la bataille d'Actium - vers 1897
Laing art gallery


Ce tableau représente Antoine et un de ses généraux sur le navire amiral de Cléopâtre. Ce tableau représente la fuite des deux amants après le carnage que fut la bataille d'Actium. On peut observer que les deux perdants de la bataille sont placés aux extrémités du bateau. Antoine est abattu et honteux, alors que Cléopâtre, au contraire, sous son baldaquin, est digne, fière et reste altière quelles que soient les circonstances.

 

Le cinéma

Cleopatra de Joseph Leo Mankiewicz, tourné en 1963, raconte la vie de Cléopâtre ainsi que la grande bataille d'Actium entre Octave et Marc Antoine :

 


Les acteurs/actrices principaux sont :

Rex Harrison : Jules César
Richard Burton : Marc-Antoine
Elizabeth Taylor : Cléopâtre
Hume Cronyn : Sosigenes
Andrew Keir : Agrippa
Martin Landau : Rufio
Kenneth Haigh : Brutus
George Cole : Flavius

 

Le destin de Rome, docu-fiction de Fabrice Hourlier (2011)

 


Cet extrait nous raconte comment s'est déroulée la bataille d'Actium selon le point de vue des historiens. Contrairement à l'extrait précédent, le récit n'est pas romancé et cherche à cerner de plus près la vérité historique.

 

Pour conclure, malgré toute la propagande d'Auguste et toutes les œuvres inspirées par la bataille d'Actium, cet affrontement, bien que décisif pour l'issue de la guerre civile, n'a pas été aussi radical qu'on a pu l'affirmer. En effet, bien que la grande majorité de la flotte de Marc-Antoine ait été détruite, le « traître » et Cléopâtre ont réussi à s'échapper, et ce ne fut donc qu'une demi-victoire pour Octave.

Ainsi, de cet événement, les artistes et surtout les écrivains puis les cinéastes ont tiré une interprétation très romancée sur les ravages des passions. Le sang-froid du grand général de guerre qu'était Antoine aurait été ébranlé par l'amour fou qu'il portait à la reine égyptienne, et c'est cet amour qui l'aurait poussé à abandonner ses troupes. On peut en juger dans l'extrait vidéo du film de Mankiewicz, dont le scénario est fortement inspiré par la pièce de Shakespeare, Antoine et Cléopâtre.

Au final, nous pouvons tirer de cette étude que la moitié de l'épopée, de la propagande et du mythe fondés sur la bataille d'Actium est infondée.



Thibault T., 209 et Alexandre B.C, 1L