L'enlèvement de Perséphone


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Perséphone, la fille de Déméter, fut enlevée un jour où elle cueillait des narcisses en compagnie de ses amies les Nymphes. Hadès surgit alors des Enfers, sur son char tiré par des chevaux noirs. Il enleva Perséphone et, malgré la résistance de la jeune fille, il l'entraîna aux Enfers.


Non loin des murs d'Henna est un lac profond qu'on appelle Pergus. Jamais le Caystre ne vit autant de cygnes sur ses bords. Des arbres à l'épais feuillage couronnent le lac d'un berceau de verdure impénétrable aux rayons du soleil. La terre que baigne cette onde paisible est émaillée de fleurs. Là règnent, avec les Zéphyrs, l'ombre, la fraîcheur, un printemps éternel ; là, dans un bocage, jouait Proserpine. Elle allait, dans la joie ingénue de son sexe et de son âge, cueillant la violette ou le lis, en parant son sein, en remplissant des corbeilles, en disputant à ses compagnes à qui rassemblerait les fleurs les plus belles. Pluton l'apercoit et s'enflamme. La voir, l'aimer, et l'enlever, n'est pour lui qu'un moment. La jeune déesse, dans son trouble et dans son effroi, appelle en gémissant sa mère, ses compagnes, et sa mère surtout. Sa moisson de lis s'échappe de sa robe déchirée.

(Ovide, Métamorphoses, V, 385-399)


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Sarcophage de l'enlèvement de Perséphone
     
    L'enlèvement de Perséphone
  Sarcophage romain en haut-relief en marbre (détail)
  200-225 apr.JC
  The Walters Art Museum, Baltimore (Maryland)
   


Ce sarcophage romain en marbre datant du IIIe s. apr.JC raconte l'histoire de l'enlèvement de Perséphone. Les sarcophages romains étaient des sortes de tombeaux, en marbre généralement, où l'on déposait les morts. Plus le mort était issu d'une classe sociale élevée, plus le sarcophage était décoré et sculpté, souvent en haut-relief, ce qui coutait beaucoup plus cher parce que cette technique demandait beaucoup plus de travail que le bas-relief. Il n'était donc pas seulement fait pour les défunts, mais aussi pour la famille, afin de montrer ses richesses. C'est le cas de celui-ci, exécuté avec de nombreuses figures qui se détachent nettement du fond, et qui se déroule sur une longueur de plus de 2 mètres au total.

Les sarcophages avaient deux principaux thèmes : l'enlèvement et le repos. C'est pourquoi le rapt de Perséphone est représenté sur un grand nombre d'entre eux, plus spécialement destinés à des femmes, sans qu'il s'agisse nécessairement de jeunes vierges. Mais tous déploraient une mort percue comme soudaine et prématurée.

Ce sarcophage illustre parfaitement le texte d'Ovide cité ci-dessus. Nous pouvoir voir Perséphone enlevée par Hadès sur son char, avec l'aide d'Hermès et de Cupidon, fils d'Aphrodite, dieu de l'amour. A l'extrême gauche, Déméter assiste impuissante à l'enlèvement de sa fille. Athéna court après le char, mais sans pouvoir l'arrêter. Le géant Encelade est au pied du char et surgit de la terre pour accueillir Hadès et Perséphone. Hermès messager des dieux vole au dessus de leurs têtes.

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L'enlèvement de Perséphone

  L'enlèvement de Perséphone
     
 
L'enlèvement de Perséphone
Le Bernin (1598-1680)
Groupe de marbre en ronde bosse
1621-1622
Villa Borghese, Rome


A seulement 24 ans, Gian Lorenzo Bernini a commencé à sculpter en 1621 le rapt de Perséphone, une grande sculpture en marbre en ronde bosse de 2,50 m de haut et de style baroque. Ce style est apparu au XVIe siècle en Italie et prend fin au XVIIIe siècle. La sculpture baroque est caractérisée par le dynamisme et le mouvement, les corps forment des courbes et des spirales. Ces sculptures produisent souvent une impression de grand réalisme.

Hadès, dieu des Enfers, est en train d'enlever Perséphone, non sans violence. Il est grand et musclé. Perséphone, quant à elle, est représentée petite et correspondant aux normes de beauté du XVIIe siècle, bien en chair. Ce contraste permet de montrer l'impuissance de Perséphone face au dieu des morts. Cette œuvre exprime beaucoup de violence : l'empreinte des doigts d'Hadès dans la chair de Perséphone montre la lutte qu'ils mènent, et produit un étonnant effet de réalisme. Perséphone repousse la tête d'Hadès, mais elle sait que c'est désespéré, Cerbère est prêt à lui dévorer les pieds et une larme coule sur sa joue.

L'opposition des deux corps forme une spirale. Perséphone représente la nature, l'innocence et la jeunesse, et Hadès les morts et l'obscurité. Cette sculpture est donc baroque autant par son violent dynamisme que par le contraste de son symbolisme.


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L'enlèvement de Perséphone

Simone Pignoni est un peintre et sculpteur italien né et mort à Florence. Il appartient à la période baroque, qui en peinture est caractérisée par la présence de couleurs chaudes, des contrastes de lumière, l'impression de mouvement et par des personnages très expressifs.  
L'enlèvement de Proserpine
Simone Pignoni  (1611-1698)
Peinture à l'huile sur toile
Vers 1650
Musée des Beaux-Arts de Nancy


Ce tableau représente le moment où Perséphone, fille de Déméter, est empoignée par Hadès, dieu des morts. Elle a des fleurs à la main, car dans la mythologie, elle était en train de cueillir des narcisses lorsqu'Hadès l'enlève. Elle a la peau très blanche, signe de pureté, et porte une robe bleue, couleur de la virginité. 

Hadès, quant à lui, a la peau très foncée, presque noire, car c'est le dieu des morts ; les flammes de l'enfer brulent derrière lui, mais la lumière du tableau ne vient pas de là : elle émane de Perséphone.

Ce contraste permet de marquer la différence entre la vie et la mort. C'est une technique caractéristique du baroque, qui se nomme le clair-obscur. Elle consiste à donner l'illusion des reliefs en jouant sur la lumière et en accentuant les contrastes. Il n'y a aucun élément anecdotique dans ce tableau : on ne peut le comprendre que si on connaît l'histoire, aucun indice ne vient nous aider. Tout le reste du tableau est noir, ce qui permet de marquer le désespoir de la fille de Déméter : elle se voit déjà en enfer.


Blanche B., 217


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