Pline l'Ancien - Histoire naturelle, VI, 24, 10

Les habitants se plaisent beaucoup à la pêche, surtout des tortues, dont la carapace couvre des familles entières, tant on en trouve de grandes. Une vie de cent ans y est ordinaire. Voilà ce qu'on sait de Taprobane [Ceylan].

Strabon - Géographie, XVI, 14

Les Chélonophages profitent des dimensions énormes des chéloniens ou tortues de ces parages et avec leurs écailles se font des abris, voire même des embarcations.

Pline l'Ancien - Histoire naturelle, IX, 12 et 13

XII. (X.) La mer des Indes produit des tortues d'une telle grandeur (XXXII, 4), que l'écaille d'une seule suffit pour former le toit de cabanes habitables ; la navigation des îles de la mer Rouge se fait particulièrement avec ces écailles, qui servent de barques. On les prend de beaucoup de manières, mais surtout quand, s'élevant à la surface des flots avant midi, moment de la journée qui leur plaît, elles flottent sur la mer tranquille, avec le dos tout entier hors de l'eau. Ce plaisir de respirer librement leur cause un tel oubli d'elles-mêmes, qu'elles laissent dessécher leur carapace par l'ardeur du soleil, et dès lors elles ne peuvent plus s'enfoncer ; elles surnagent malgré elles, et sont une proie facile pour le pêcheur. On dit aussi qu'elles vont à terre de nuit pour paître, et qu'elles mangent avec avidité : fatiguées, elles retournent le matin à la mer, et s'endorment sur la surface de l'eau ; le bruit de leur ronflement les trahit. Alors les pêcheurs arrivent tout doucement à la nage, trois pour une tortue ; deux la retournent sur le dos, le troisième lui passe un lacs dans cette position, et plusieurs hommes placés sur le rivage la tirent à terre. Dans la mer de Phénicie, on les prend sans aucune difficulté : à une époque réglée, elles viennent en nombre immense dans le fleuve Eleutherus. La tortue n'a pas de dents ; mais les bords de la bouche sont tranchants, la mâchoire supérieure se fermant sur l'inférieure comme le couvercle d'une boîte. Dans la mer, elle vit de coquillages, et a les mâchoires d'une telle dureté qu'elle brise des pierres ; à terre, elle vit d'herbes. Elle pond des oeufs semblables à ceux des oiseaux, au nombre de cent ; elle les enfouit hors de l'eau, les recouvre de terre, foule et aplanit la place avec la poitrine, et les couve pendant la nuit. Les oeufs éclosent au bout d'un an. Quelques-uns pensent que les tortues couvent leurs oeufs des yeux, et en les regardant ; que les femelles refusent l'accouplement jusqu'à ce que le mâle leur ait mis sur le dos quelque fétu. Chez les Troglodytes, les tortues ont des cornes configurées comme les branches d'une lyre ; ces cornes sont larges, mais mobiles, et l'animal s'en sert comme de rames en nageant : on donne le nom de chélyon (VI, 34, 4) à cette écaille, qui est très belle, mais fort rare ; car les rochers aigus effrayent les Chélonophages, et les Troglodytes, sur le littoral desquels elles arrivent, les adorent comme sacrées. Des tortues de terre, dont l'écaille est connue pour cette raison sous le nom de chersines dans l'industrie, se trouvent aussi dans les déserts de l'Afrique, là où les sables sont le plus dépourvus d'eau : on pense qu'elles se nourrissent de rosée. Aucun autre animal n'y vit.

XIII. (XI.) Carvilius Pollion (XXXIII, 51), homme prodigue et ingénieux à inventer des raffinements de luxe, est le premier qui ait imaginé de tailler l'écaille de tortue en lames (XVI, 84), et d'en revêtir les lits et les buffets.

Pline l'Ancien - Histoire naturelle, XVI, 84, 3

La partie centrale des arbres est la plus veinée ; et plus on se rapproche de la racine, plus les veinures sont petites et flexueuses. C'est de là qu'a pris naissance ce luxe qui consiste à couvrir un arbre avec un autre, et à rendre un bois vil plus précieux en lui donnant une enveloppe étrangère. Pour faire qu'un seul arbre se vendît plusieurs fois, on a imaginé de le diviser en lamelles. Ce n'est pas assez, on s'est mis à teindre les cornes des animaux, à fendre leurs dents, à orner le bois avec de l'ivoire, et puis à l'en couvrir. Enfin, on est allé chercher des matériaux jusque dans la mer : on a fendu l'écaille de tortue, et, sous le règne de Néron, on est parvenu, par une invention monstrueuse, à la dépouiller de son apparence propre par des teintures, et à la vendre plus cher en lui faisant imiter le bois. C'est ainsi qu'on enrichit les lits, c'est ainsi qu'on veut éclipser le térébinthinier, avoir un faux citre plus précieux que le citre, et simuler l'érable. Tout à l'heure le luxe n'était pas satisfait du bois ; maintenant il transforme en bois l'écaille de tortue.

Pline l'Ancien - Histoire naturelle, IX, 65, 1

On se fait un jeu de dépenser, de doubler les combinaisons, et de falsifier de nouveau ce qui était déjà une falsification des choses naturelles. Ainsi on colore l'écaille de tortue (XVI, 84).

Juvénal - Satires, XIV, 303-308

Acquises au prix de pareilles épreuves, les richesses coûtent, à les conserver, plus de soucis encore et plus de crainte. C'est une misère que la garde d'une grosse fortune. Le richissime Licinus tient tout prêts des seaux à incendie, il fait veiller, chaque nuit, une cohorte d'esclaves, plein d'angoisse pour son ambre jaune, ses statues, ses colonnes de marbre phrygien, son ivoire, ses larges incrustations d'écaille.

Martial - Epigrammes, IX, 60, 9-10

Après avoir pris quatre fois la mesure d'un lit à six places, incrusté d'écaille, il se désole de ce qu'il n'est pas assez grand pour sa table de citronnier.

Martial - Epigrammes, XIV, 87

Recevez ce lit garni d'écaille et arrondi en demi-lune ; il est de huit places ; viennent les amis.

Juvénal - Satires, XI, 90-96

Quand chacun craignait les Fabius, le rude Caton, les Scaurus, les Fabricius, quand le censeur lui-même redoutait la sévérité de son collègue, personne ne considérait comme chose sérieuse et d'importance de savoir quelle tortue, nageant dans les flots de l'Océan, décorerait un lit superbe et prestigieux pour les descendants des Troyens. Les lits étroits offraient leurs flancs sans ornement.

Virgile - Géorgiques, II, 458 sqq

O trop fortunés, s'ils connaissaient leurs biens, les cultivateurs ! Eux qui, loin des dscordes armées, voient la très juste terre leur verser de son sol une nourriture facile. S'ils n'ont pas une haute demeure dont les superbes portes vomissent tous les matins un énorme flot de clients venus pour les saluer ; s'ils ne sont pas ébahis par des battants incrustés d'une belle écaille, ni par des étoffes où l'or se joue [...] ; du moins un repos assuré, une vie qui ne sait point les tromper, riche en ressources variées [...]

Ovide - Métamorphoses, II, 737

Il y avait, situées à l'écart dans la maison, trois chambres ornées d'ivoire et d'incrustations d'écaille.