Etienne Arago (1802-1892)
Né à Perpignan le 9 février 1802,
il était le dernier frère de
François Arago. Il fit ses études au
collège de Perpignan, dirigé alors par un
ecclésiastique, et à l'école de
Sorèze, et vint ensuite à Paris où
il fut admis comme préparateur de chimie
à l'Ecole polytechnique. Mais il se livra
bientôt tout entier à son goût pour
les lettres et surtout pour le théâtre. Il
s'était associé aux premiers travaux de
Balzac, et avait composé avec lui
L'héritière de Birague, histoire
tirée des manuscrits de dom Rago, ex-prieur des
bénédictins, mise au jour par ses deux
neveux (Paris, 1822, 4 vol. in-12) ; dom Rago
n'était autre qu'Etienne Arago. Cet ouvrage
obtint peu de succès ; les collaborateurs se
séparèrent et Arago devint
vaudevilliste. |
Base de données
Mémoire
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La plupart de ces pièces ont eu du succès et
plusieurs sont restées au répertoire. Parmi les
vaudevilles et comédies mêlées de couplets,
nous mentionnerons : Stanislas, ou la suite de Michel et
Christine, 1822 ; Un Jour d'embarras, 1824 ;
l'Anneau de Gygès, 1824 ; l'Amour et la
Guerre, 1825 ; le Compagnon d'infortune ou les
Prisonniers, 1825 ; C'est demain le treize ou le
Sentiment et l'Almanach, 1826 ; Gérard et
Marie, 1827 ; les Quatre Artistes ou les Lettres et les
Portraits, 1827 ; la Fleuriste, 1827 ; le Cousin
Frédéric ou la Correspondance, 1829 ; le
Prix de Folie, 1834 ; les Malheurs d'un joli
garçon, 1834 ; Théophile ou Ma
Vocation, 1834 ; les Pages de Bassompierre, 1835 ;
le Démon de la nuit, 1836 ; Arriver à
propos, 1836 ; le Cabaret de Lustucru, 1838 ; les
Mémoires du diable, 1842 ; Brelan de
troupiers, 1843 ; Une Invasion de grisettes, 1844 ;
etc. Citons encore, dans un autre genre : le pauvre Arondel
ou les trois talismans, vaudeville-féerie en deux
actes, 1828 ; 27, 28 et 29 juillet, tableau
épisodique des trois journées, 1830 ; les
Chemins de fer, vaudeville-revue composé à la
mécanique, avec les couplets faits à la vapeur,
1833 ; Paris dans la comète, revue-vaudeville,
1836. Dans le genre mélo-dramatique, il a composé
le Pont de Kehl ou les Faux témoins, 1824 ; Lia
ou une Nuit d'absence, 1826 ; l'Avocat, 1827 ; la
Fille du portier, 1827 ; Mandrin, 1827. Les
pièces qui se rapprochent le plus de la comédie
proprement dite, sont : Départ, séjour et
retour, 1827 ; Madame Dubarry, 1831 ; la Vie de
Molière, 1832 ; Casanova au fort
Saint-André, 1836 ; les Maris vengés,
1839. Son oeuvre principale est une comédie en cinq actes
et en vers, les Aristocraties, jouée en 1847 au
Théâtre-Français.
En 1829, Etienne Arago avait acquis de M. de Guerchy le
privilège de la direction du Vaudeville. L'exploitation
de cette scène ne l'enrichit pas ; l'incendie du
théâtre acheva sa ruine, le privilège fut
donné à un autre en 1840, et le directeur
déclaré en faillite avec un passif de 246.393
francs. Il a, plus tard, au prix d'épargnes et de
constants sacrifices, payé tous ses créanciers
pour obtenir une pleine réhabilitation (juin 1872).
Mêlé, sous la Restauration, à la
polémique de ce qu'on appelait la petite presse, il avait
été rédacteur de la Lorgnette et de
l'ancien Figaro. Après avoir quitté le
Vaudeville, il donna au Siècle des nouvelles
signées de divers pseudonymes, notamment de celui de
Jules Verney. En 1841, il fut un des fondateurs de la
Réforme, et jusqu'en 1848 il concourut activement
à la rédactions politique de ce journal. Il y
publia un roman historique, les Bleus et les Blancs,
tableau pittoresque des guerres vendéennes, qui n'a paru
en volume que beaucoup plus tard, 1862, 2 vol. in-18. Il fit
aussi la critique théâtrale.
Dès l'âge de vingt ans, Etienne Arago
s'était jeté dans toutes les luttes politiques. Il
était entré de bonne heure dans la Charbonnerie.
Le 27 juillet 1830, il ferma les portes du Vaudeville, distribua
sur les barricades toutes les armes qui étaient en
réserve dans le garde-meuble de son théâtre,
paya de sa personne durant les trois jours et, le 29 juillet,
fut à l'Hôtel-de-Ville un des aides-de-camp de La
Fayette. Il fut au nombre des délégués
envoyés auprès de Louis-Philippe par la jeunesse
républicaine. Lieutenant d'artillerie dans la garde
nationale, il fut compromis, avec MM. Guinard,
Godefroy-Cavaignac et la plupart de ses amis, dans 1es
événements de 1832 et de 1834. Il put se
soustraire aux poursuites de la police et se cacha quelque temps
dans un coin de la Vendée, puis il revint concourir
à l'évasion des détenus de
Sainte-Pélagie que devait juger la Cour des Pairs. Dans
la campagne des banquets réformistes de 1847, il suivit
la ligne politique de M. Ledru-Rollin et, pendant les
journées de février, il parut en armes au poste
où les engagements furent le plus vifs. Dans
l'après-midi du 24, il s'était emparé de
l'hôtel des Postes et installé à la place du
directeur général. Il en conserva les fonctions,
jusqu'à la fin de la présidence du
général Cavaignac. C'est alors qu'il consentit
à retarder de quelques heures le départ des
courriers qui portèrent en province le compte rendu de la
séance du 25 novembre 1848 et la réponse de
l'Assemblée constituante aux accusations dirigées
contre le général Cavaignac. C'est sous son
administration que fut appliqué en France l'usage des
timbres-poste à 20 centimes.
Etienne Arago avait été élu, le 23 avril
1848, représentant du peuple à l'Assemblée
constituante par le département des
Pyrénées-Orientales ; il y vota ordinairement avec
la gauche. Après l'élection du 10 décembre,
il fit une opposition très vive à la politique de
l'Elysée et signa la mise en accusation du
président et des ministres à l'occasion du
siège de Rome. Il ne fut point réélu
à l'Assemblée législative. Au 13 juin 1849,
il se plaça à la tête des gardes nationaux
qui répondirent à l'appel de la Montagne. La
haute-Cour de Versailles le condamna par contumace à la
peine de la déportation. Il avait pu se réfugier
en Belgique. Le 2 décembre 1851, à la nouvelle du
coup d'Etat, il essaya de rentrer en France jusqu'à
Valenciennes. Bientôt après, il organisa à
Bruxelles un comité de secours pour les
émigrés. Le gouvernement français obtint
son expulsion à la suite de ses articles dans la
Nation sur les vainqueurs et les vaincus des guerres
civiles. Après s'être arrêté en
Angleterre, en Hollande, à Genève, sans trouver
nulle part une entière hospitalité, il alla
habiter Turin où il reprit ses travaux littéraires
jusqu'à sa rentrée en France, en 1859. En 1862 (15
août), sa démission de la Société des
gens de lettres, à proposde prétendues
libéralités de M. Mirès envers quelques
écrivains, eut un certain éclat.
Les événements de 1870 lui rendirent un
rôle. Nommé maire de Paris par le Gouvernement de
la Défense nationale, il s'efforça d'assurer
l'ordre pour mieux établir la République ; il se
signala par son activité dans les divers services
municipaux intéressant la défense et provoqua une
souscription publique pour la fabrication des canons. Il ouvrit
immédiatement les écoles communales laïques
aux familles de la banlieue réfugiées dans la
ville. A la journée du 31 octobre, il présida la
réunion des maires et, pour arrêter les
progrès de l'émeute, il crut pouvoir promettre au
nom du Gouvernement des élections municipales à
bref délai ; cette promesse donna lieu à de
bruyants débats. Etienne Arago se démit de ses
fonctions de maire quelques jours après. Il les avait
exercées sans vouloir toucher de traitement.
Nommé, le 17 novembre, commissaire général
des monnaies, il refusa cet emploi comme une sinécure.
Aux élections du 8 février 1871, il fut élu
représentant à l'Assemblée nationale dans
les Pyrénées-Orientales par 18.870 voix, mais il
jugea que «sa vieillesse devait refuser cette
tâche», et il donna sa démission.
Après avoir rempli encore à cette époque
une mission extraordinaire en Italie, il rentra dans la vie
privée. Il eut à se défendre auprès
de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale
contre les accusations du général Ducrot à
l'occasion de la journée du 31 octobre, et leur opposa le
plus énergique démenti. Dans les derniers jours de
février 1878, il fut nommé archiviste de l'Ecole
des Beaux-Arts. Quelque temps après, il fut nommé
conservateur du musée du Luxembourg. Il n'a pas
abandonné ses fonctions, jusqu'à sa mort, survenue
le 7 mars 1892.
A la suite des événements qui l'avaient
éloigné de France, Etienne Arago publie : Spa,
son origine, son histoire, ses environs et ses jeux,
poème en sept chants, Bruxelles, 1851, in-16,
poésie ; Une voix de l'exil, Genève, 1860,
in-18 ; les Postes en 1848, 1867, in-8°;
l'Hôtel de Ville au 4 septembre et pendant le
siège, réponse à M. le comte Daru et
aux commissions d'enquête parlementaire, 1874, in-18. Il a
achevé, dit-on, des comédies de caractère
et préparé le recueil de ses Souvenirs. En 1865,
il s'était chargé du feuilleton
théâtral de l'Avenir national.