François de Fossa (1726-1789)

Il naquit à Perpignan le 21 juillet 1726. Son père, qui était inscrit comme avocat au barreau du Conseil souverain du Roussillon, lui avait inspiré, avec le goût des études juridiques, l'amour de son honorable profession. Avec un tel maître, les progrès du jeune Fossa dans la science de la jurisprudence furent si rapides qu'à l'âge de dix-huit ans à peine, il disputait une chaire de droit civil dans l'Université de sa ville natale. Elle lui aurait même été adjugée, s'il avait eu l'âge requis. Deux ans après, en 1746, le talent supérieur qu'il déploya dans un autre concours pour l'obtention de la chaire de droit canonique, lui mérita la faveur spéciale d'une dispense d'âge pour l'occuper. François Fossa devint en peu de temps l'oracle du barreau perpignanais : on rapporte même que d'Aguesseau le comptait au nombre des plus éminents jurisconsultes du royaume. En 1759, il était doyen de la faculté de droit et recteur de l'Université où il donnait ses doctes leçons. Ses cours manuscrits témoignent d'une connaissance approfondie du droit ecclésiastique ; l'exposé est sobre et lumineux ; l'ex-pression claire, élégante même ; le fond imprégné des idées gallicanes, propre à plaire aux esprits du temps.

Mais il y avait en Fossa comme une double personnalité : le professeur était un véritable érudit en matière d'histoire locale. Ses connaissances étaient très étendues et son jugement des plus sûrs. Ces rares qualités déterminèrent les savants auteurs de l'Art de vérifier les dates à solliciter sa coopération à ce grand ouvrage. Fossa se montra digne d'un tel choix par les mémoires qu'il fournit sur la chronologie des comtes de Roussillon, de Cerdagne, de Besalu et d'Empories. Un procès long et retentissant, commencé dès 1738, entre les nobles et les bourgeois honorés de Perpignan, engagea Fossa, défenseur des premiers, dans d'interminables recherches très précieuses pour l'histoire du pays. Il en consigna le résultat dans les Observations historiques et critiques sur le droit public de Catalogne et de Roussillon. Cet ouvrage, édité à Perpignan en 1770, était une réplique aux Recherches historiques sur la noblesse des citoyens honorés de Perpignan et de Barcelone publiées par l'abbé Xaupi, sept ans auparavant. Loin de se rendre aux raisons de son contradicteur, Xaupi refit son livre, et il en publia une seconde édition en 3 volumes, l'année 1776. Fossa ne fit pas attendre la réponse. Elle parut l'année suivante sous le titre Mémoire pour l'ordre des avocats de Perpignan. Cette dernière oeuvre, au dire de M. Brutails, «dénote des qualités maîtresses. de la puissance de travail, de la subtilité, la pratique des affaires... Mais à côté de ces avantages, on trouve de graves imperfections : Fossa est un érudit plutôt qu'un savant, un plaideur bien plus qu'un historien ; il n'a pas le sens historique du droit ; il cherche avant tout à prouver sa thèse, même en modifiant un peu la portée des documents». Un autre mémoire de Fossa intitulé Réponse pour le marquis d'Oms au mémoire du sieur Berteau (sur les eaux de sa seigneurie de Suréda) parut en 1777, à Perpignan.

Mais les écrits qu'il a mis au jour ne constituent que la mineure partie de ceux qui sont sortis de sa plume. Le doyen de la faculté de droit avait tracé l'esquisse et rédigé le recueil diplomatique d'une Histoire du Roussillon qui est demeurée inédite. Il avait encore écrit un volumineux traité sur le Franc-alleu de Roussillon et de Catalogne. Fossa ne mit la dernière main à cet important travail qu'an bout de vingt années consacrées à la recherche et à la lecture d'un millier de chartes, dont la plupart des originaux n'existent plus de nos jours. Il en avait envoyé une superbe collection au dépôt des chartes du roi, à Paris. Fossa comptait au nombre des membres de l'Académie des Belles-Lettres de Barcelone. Louis XVI l'avait anobli, et il avait reçu encore de ce monarque le cordon de Saint-Michel. Homme de lettres, jurisconsulte consommé, Fossa fut encore un admirable philanthrope. Son nom paraît sur la liste des administrateurs de l'hôpital Saint-Jean, durant une longue période de vingt-six ans (1758-1784). Fossa mourut à Perpignan, le 6 août 1789, dès les premiers jours de la Révolution.

Archives communales de Perpignan, GG. 189. - Annuaire de 1834. - Mémoires de Jaume. - Brutails, Etude sur la condition des populations rurales du Roussillon (préface). - Abbé Torreilles, L'Université de Perpignan.