Cérès
H. Roux, Herculanum et Pompéi, tome
IV,
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La grande et majestueuse nourrice du genre humain,
Cérès, est représentée ici sous
une forme noble et imposante. Elle tient de la main droite un
candélabre d'ivoire orné d'une espèce de
torsade, et porte de la main gauche une corbeille de joncs
pleine d'épis et d'autres produits de la terre,
qu'elle a fait germer avec une inépuisable et
généreuse fécondité. Il y a de la
langueur dans ses yeux, de la vivacité dans son teint
; sa belle chevelure blonde est arrangée avec art et
rappelle les boucles dorées qui flottent d'ordinaire
sur les épaules d'Apollon. Son front est
couronné d'une guirlande d'épis attachée
avec un rang de perles qui se divise sur le derrière
de la tête et tombe sur chacune de ses épaules.
Cet ornement a été donné aussi à
une demi-figure de Cybèle qui fait partie du
musée du Capitole, et à une tête
colossale de la même divinité. A ce sujet on a
pensé que les types primitifs de Cybèle et de
Cérès peuvent bien avoir reçu pour
couronne, non point des rangs de perles, mais des guirlandes
faites de glands, la première nourriture des hommes
suivant les auteurs de l'antiquité, et que dans la
suite le luxe, peu respectueux pour les traditions
sacrées, remplaça la guirlande de glands par
des rangs de perles. Notre figure est couverte par une
tunique violette qui lui descend jusqu'aux pieds
chaussés de blanc ; par-dessus la tunique une draperie
blanche et transparente est agencée en guise de
peplum, et se replie sur elle-même à la hauteur
du sein, de manière à imiter par ses plis
nombreux un large collier. Une auréole, symbole des
divinités les plus importantes, entoure sa tête
et accroît la majesté de son visage. Nous
n'aurons pas besoin, pour justifier le nom que nous donnons
à cette figure, de rappeler l'histoire si connue des
aventures de Cérès, de ses longues migrations
à la recherche de Proserpine, des enseignements
qu'elle donna aux hommes pour la culture des champs et la
récolte des fruits, de l'éducation
mystérieuse de Triptolème, etc. Cette
légende se reproduit à tous les esprits et
à tous les souvenirs à la vue des
trésors que notre figure porte dans une corbeille de
joncs et sur les tresses de ses blonds cheveux, à la
vue enfin de la longue torche qui tient lieu ici des pins
séculaires allumés aux flammes de l'Etna,
lorsque la mère malheureuse parcourut la Sicile pour
retrouver sa fille.
Cette peinture sur fond rouge peut se passer d'éloges.
C'est la louer assez de dire qu'elle est un des plus beaux
monuments livrés aux artistes par les fouilles qui
furent opérées dans la maison de Castor et de Pollux,
fertile en beautés de tous les genres.
Commentaire de M. L. Barré dans l'édition d'Herculanum et Pompéi mentionnée ci-dessus.