Education d'Achille par Chiron
H. Roux, Herculanum et Pompéi, tome
IV,
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La figure de ce centaure ne marque point une extrême
jeunesse ; et d'ailleurs les anciens ont habituellement
représenté les fils d'Ixion comme portant sur
leur visage l'insigne de la virilité : Kai
lasiên Kentauros echôn phrissousan
upênên / Et le Centaure à la barbe
touffue (1).
Zeuxis même a peint de cette manière
l'époux de sa centauresse (2). C'est donc par un
caprice, qui, du reste, n'est point sans autre exemple (3),
que notre artiste a fait le sien absolument imberbe. Ses
cheveux, semblables à la crinière d'un cheval,
sont tellement hérissés et en désordre
que certains critiques ont pu supposer qu'il avait des
cornes, comme ce centaure qui poursuivit Vénus dans
l'île de Chypre (4) : mais une inspection plus
attentive de la peinture originale fit reconnaître
l'exactitude de notre dessin.
Le thyrse qu'il porte sur son épaule gauche, et le
cymbalum suspendu à ce thyrse, font
reconnaître dans notre centaure un serviteur de Bacchus
: cette circonstance ne l'empêcherait pas d'être
le même que le Centaure céleste, qui est aussi
le sage Chiron (5) : car ce personnage astronomique est
représenté quelquefois avec une outre et un
thyrse (6).
La partie du monstre qui appartient au cheval est
revêtue d'une robe bai clair, circonstance qui
s'accorde peu avec l'épithète de flavus,
blond, donnée à Chiron par Ovide (7), à
moins que le poète, en employant ce mot, n'ait
été guidé par le rhythme du vers
plutôt que par la tradition.
Notre centaure enseigne à un jeune homme l'art de
jouer de la lyre : de la main droite, il guide les doigts de
son élève, tandis qu'il le soutient de la
gauche. Ceci se rapporte encore mieux à Chiron,
précepteur d'Achille : et cet attribut n'est point,
comme on pourrait le présumer, en désaccord
avec les emblèmes bachiques : car si Orphée,
l'inventeur de la lyre, fut déchiré par les
Bacchantes, le fils de Jupiter lui-même punit ses
nymphes (8) ; et ce fut par Orphée que les
mystères dionysiaques furent apportés de
l'Egypte en Grèce (9).
La draperie qui flotte derrière le dos du centaure, et
celle qui passe sur les deux épaules du jeune homme
pour retomber sur ses flancs, sont toutes deux de couleur
violette.
(1) Nonn., Dionys., XIV, 265.
(2) Lucien.,
Zeuxis.
(3) Mus. Rom., t. I, sect. 1, tav. 52.
(4) Nonn., Dionys., V, 615.
(5) Ovid., Fast., V, 379 ; Hygin., Astr. poet.,
II, 38.
(6) Hygin., Astr. poet., III, 37 ; Proclus.
(7) Loc. cit.
(8) Ovid., Met., XI, fab. 2.
(5) Diod., I, 23.
Commentaire de M. L. Barré dans l'édition d'Herculanum et Pompéi mentionnée ci-dessus.