Perséphone, reine des Enfers
Après l'accord de Zeus et d'Hadès, Perséphone devient la reine des Enfers, même si elle n'est pas réellement consentante. Mais c'est une reine qui partage le pouvoir considérable et terrifiant de son mari, gardée par le chien Cerbère.
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Une kylix est un vase peu profond et évasé utilisé pour déguster du vin. Au centre de celle-ci, noire partout ailleurs, est représentée une scène entre Perséphone et son mari, au royaume des Enfers. Ces deux personnages se trouvent dans une situation de banquet.
Hadès tient dans sa main gauche une corne d'abondance (qui symbolise la richesse et l'abondance). Il est bon de préciser qu'Hadès est également surnommé Ploutos, ce qui signifie < le riche > en grec (à cause des millions d'âmes dont il est riche) et qui justifie la représentation de cette corne d'abondance.
Dans sa main droite, on remarque ce qui est probablement une coupe à boire du vin : il s'agit donc d'une sorte de mise en abyme (une kylix dans une kylix). Ce choix de représenter le couple des Enfers au fond d'une coupe à boire du vin rappelle à la personne qui s'en sert ce qui l'attend lorsqu'elle mourra.
Perséphone, elle, semble tenir un petit objet que certains interpréteront comme un grain de grenade, en référence aux six grains qu'elle a eu la faiblesse de déguster pendant son séjour aux Enfers après son enlèvement, et qui lui ont valu de devoir y séjourner pendant six mois de l'année. Peut-être cette scène représente-t-elle ce moment où se joue son destin.
Ce vase de style classique a été exécuté grâce à la technique de la céramique à figures rouges : il est très précis, on remarque les détails sur le mobilier ainsi que sur les plis de la robe de Perséphone et sur la coupelle tenue dans la main d'Hadès. La frise autour de la scène est très travaillée. Le travail de la technique à figures rouges permet un dessin d'une finesse incomparable.
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Ce cratère monumental est l'un des chefs d'œuvre de la céramique grecque, par la richesse baroque de sa décoration, le nombre de ses figures, et les informations qu'il nous donne sur la représentation que se faisaient les Grecs de l'au-delà.
Il représente en effet le moment où Orphée (que l'on remarque avec sa cithare à gauche du temple central), descendu aux Enfers pour récupérer sa femme Eurydice, joue de la musique pour essayer d'émouvoir le dieu et la déesse des Enfers. Son chant est tellement émouvant qu'il bouleverse tous les habitants de l'Hadès, en particulier ceux qui subissent leur châtiment dans le Tartare, Sisyphe, Tantale et d'autres.
Au centre de la composition, en plein milieu de la panse du cratère, se trouve un baldaquin blanc à colonnes ioniennes, qui figure le palais du dieu et de la déesse des Enfers. Sur le mur du fond, pendent deux roues de char, qui peuvent rappeler de quelle manière Perséphone fut enlevée par son futur époux.
On reconnait Perséphone à gauche, par sa torche, sa couronne, ses vêtements, ainsi que ses nombreux bijoux : elle paraît comme une véritable reine. Elle semble émue et se tourne vers son mari pour lui demander d'accorder à Orphée la grâce qu'il demande. Ce faisant, elle se rappelle son propre destin, et semble vouloir accorder à Eurydice, au moins pour quelques années de vie supplémentaire, la chance dont elle bénéficie elle-même de pouvoir remonter périodiquement à la lumière du jour.
Assis sur son trône magnifiquement décoré, un sceptre dans la main gauche et une couronne sur la tête, Hadès est le seul qui puisse décider du sort de cet humain descendu vivant chez lui et qui lui demande de relâcher une âme pour la faire remonter chez les vivants. On peut donc interpréter le mouvement de la main du dieu, en face de Perséphone, comme une approbation. Les deux époux, cette fois amoureux, se regardent.
La technique de ce cratère est bien plus sophistiquée que celle de la kylix classique : il appartient à une époque baroque, à la fin de la grande période des figures rouges, à un moment de l'évolution de cette technique où les peintres en céramique, influencés par les peintres à fresque, sont capables de remplir des surfaces plus importantes et travaillent donc souvent sur des cratères très larges, pour des compositions de grande ampleur. Ils peuvent alors choisir des sujets beaucoup plus importants, nécessitant de nombreux personnages, qu'ils différencient en jouant sur des différences de plans complexes et beaucoup plus de couleurs.
Sur chaque personnage, les détails peuvent aussi être beaucoup plus précis : c'est le cas par exemple de Perséphone : sa robe est beaucoup plus détaillée que celle de la kylix, les plis du tissu sont plus précis, de petites touches blanches figurent des perles ou de l'ivoire sur ses nombreux bijoux.
Les personnages paraissent donc plus réalistes, mais c'est au prix d'une certaine surcharge : les visages dessinés ont une moindre précision et les lignes ne sont pas aussi stylisées, ni peut-être aussi élégantes que celles de la grande période classique.
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Ce buste sculpté dans le marbre représente Perséphone qui, après son mariage avec les Enfers, est devenue la Déesse sans attributs et même sans visage, ce qui explique ce voile qui lui recœuvre en grande partie le visage et laisse seulement apparaître ses yeux. Le travail de sculpture est très minutieux : la finition au niveau du voile qui recœuvre Perséphone donne l'impression d'un vrai tissu sur lequel il y aurait des plis.
Plusieurs mythes font référence à ce voile que porte la déesse des Enfers. Le premier dit que Perséphone cacherait son visage selon son lieu de vie (Enfers ou surface de la terre) ; un autre dit que déesse des ombres, elle ne montrerait son visage qu'à ceux qui la rejoignent. En tout cas, le fait de ne pas voir le visage de la déesse peut effrayer.
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Gortyne était une cité du sud de la Crète, dans laquelle a été édifié au Ier s. apr.JC le seul temple égyptien de l'île, dédié à Isis et Sérapis, dont les statues sont actuellement conservées au musée d'Heraklion. Il s'agit d'un curieux exemple de syncrétisme, puisque ces deux divinités sont à l'évidence le couple infernal, Hadès et Perséphone.
C'est la présence entre les deux personnages de Cerbère, le chien aux trois têtes gardien des Enfers, qui les identifie sans doute possible.
Mais ces deux statues présentent des caractéristiques culturelles non seulement gréco-romaines, par leur coiffure et leurs vêtements, mais aussi égyptiennes : ainsi dans sa main droite, Perséphone tient un instrument de musique égyptien, le sistre, qui l'identifie à Isis, la déesse sour et épouse d'Osiris, le dieu des morts. Dans le monde gréco-romain, Isis est souvent assimilée à Déméter ou Perséphone. De son côté, Hadès tient dans la main gauche un grand sceptre. Il présente les mêmes traits que le dieu hellénistique Sérapis, une figure amalgamant les traits d'Hadès, Apis et Osiris et vénérée d'abord à Alexandrie, puis dans tout le bassin méditerranéen. Il est barbu, et porte sur la tête un kalathos, une sorte de corbeille évasée. On a l'impression que ce roi des Enfers regarde vers le sol, comme pour surveiller son royaume. |
Victoire L., 211