La scolarité du petit Charles
Le 1er novembre 1833, le petit Charles Contejean, âgé de 9 ans, est scolarisé à l'école élémentaire française intégrée au collège de Montbéliard. Au cours de ses huit années d'école, Contejean est un élève moyen, voire parfois mauvais selon les disciplines. Seuls le Latin et la Chimie trouvent grâce à ses yeux. Il redouble même la 5e classe. Plus grave est son comportement vis-à-vis de la hiérarchie ; tout comme ses deux frères, Charles accumule les sanctions et les punitions pour manquement à la discipline. Les trois frères Contejean sont en fait de fieffés garnements ! Contejean est nommé bachelier en lettres en août 1841.
Des débuts laborieux
En 1842, il tente un diplôme d'études supérieures à St Pétersbourg, en Russie, tout en étant précepteur. Il rentre à Montbéliard en 1846, où il trouve un emploi de commis à la Sous-Préfecture…de l'autre côté de sa rue, en face de sa maison ! Mais cela ne dure pas longtemps. En 1846 ou 1847 Contejean part une première fois pour Paris où il trouve du travail dans une usine de chimie, qu'il ne garde que quelques mois. En effet, en février 1848 Contejean a pris une part active à la Révolution et aurait été renvoyé au pays... avec un morceau du trône de Louis-Philippe !
Contejean reprend des études
En 1852, Contejean est un des pères fondateurs de la Société d'Emulation, tout en étant le premier conservateur du Musée. En 1853, Contejean obtient à 29 ans son second bac, dans la filière scientifique cette fois, toujours à Montbéliard. Cela lui ouvre les portes de la faculté de Besançon. Il y obtient sa Licence et passe brillamment sa thèse de géologie en 1859. Il est docteur ès-sciences.
Contejean le voyageur
Depuis le 1er février 1860 et jusqu'au 29 septembre 1862, Contejean est préparateur de géologie au Muséum National d'Histoire Naturelle de Paris, qu'il quitte en fin d'année 1862, pour un poste de professeur de Physique au Lycée Impérial d'Angers.
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Cette étape est très courte : 23 jours très exactement, du 29 septembre au 21 octobre 1862. Il se retrouve ensuite à Toulouse du 25 octobre 1862 au 29 mars 1864, où il est chargé des cours de physique et de chimie au lycée Impérial, puis se rend à Clermont-Ferrand où le 29 mars 1864, il est nommé professeur suppléant de la chaire d'histoire naturelle à la faculté des sciences. Il va y passer sept mois et deux jours.
Poitiers : 25 ans de sa vie dédiés à la science (1865-1890)
Une nouvelle fois, Contejean déménage et se
rend maintenant à Poitiers où il a obtenu un
poste de professeur suppléant de géologie
à la Faculté des sciences. Il revient à
Montbéliard durant l'été 1866 pour une
joyeuse raison ; en effet, le 25 août, il épouse
Sophie Louise Boissard, née le 31 janvier 1831, dans
cette même ville. Cette même année, il
devient tout d'abord chargé du cours d'histoire
naturelle à partir du 16 octobre 1866 et enfin
professeur titulaire de 1ère classe le 31
décembre 1866. En 1867 les Contejean annonce la
naissance de leur fille Louise le 7 juin à
Poitiers.
C'est bien évidemment la période la plus riche
d'un point de vue scientifique. Il aborde de manière
approfondie la classification des mammifères, dans ce
qui restera comme un de ses rares travaux en zoologie. Par
contre, en 1874, il publie Eléments de
géologie et de paléontologie (750 pages)
qui fut pendant de nombreuses années le livre de
chevet de tous les étudiants français dans ces
matières. Ces travaux généraux ne
l'empêchent pas de continuer ses études sur le
climat et sur la botanique du Pays de Montbéliard.
Enfin en 1876, il écrit le Glossaire du patois de
Montbéliard.
Chevalier de la légion d'honneur
Le 14 juillet 1880, Charles Louis Contejean, professeur à la Faculté des Sciences de Poitiers, est nommé chevalier de la légion d'honneur, suite au rapport du Ministre de l'Instruction Publique.
La réalisation de son rêve de jeunesse
De 1882 à 1888, Charles Contejean réalise cinq longs et grands voyages pour l'époque : en 1882, il se rend sur le Vésuve puis en Sicile ; en 1883, il retourne à Naples pour se rendre compte des dégâts occasionnés par un tremblement de terre sur l'île d'Ischia ; en 1884, il traverse la Méditerranée pour visiter les ruines de Carthage et se rendre dans le désert algérien ; en 1886, il parcourt le Portugal en 8 jours et, enfin, en 1888, il réalise son rêve d'enfant : visiter l'Orient. Via Venise, Vienne, Budapest et Bucarest, il passe plusieurs jours à Constantinople (Istanboul aujourd'hui), puis visite la Grèce et ses fabuleux vestiges (Athènes, Corinthe, Olympie).
Sa seconde vie à Montbéliard (1890 à 1900)
En 1890, Charles Contejean, tout nouveau retraité de 65 ans, rentre à Montbéliard après 28 ans d'absence, entrecoupés de retour chaque année pour les vacances. D'après le remembrement de cette année-là, il habite au 43 rue de Besançon. C'est pendant cette période qu'il finalise enfin son œuvre de toujours : l'herbier de la flore de Montbéliard. Aujourd'hui encore, son Herbier du Pays de Montbéliard et son catalogue font autorité.
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C'est aussi pendant cette période qu'il
échange de nombreux courrier avec sa petite cousine
Adèle Carl (1861-1942), fille de son regretté
cousin Louis Carl (1821-1890), avec qui il avait usé
les bancs du collège de Montbéliard (au
contraire de Charles, Louis était un brillant
élève et d'un comportement
irréprochable). Adèle est pour Contejean une
deuxième fille dont il se sent très
proche.
Jusqu'au bout, et avant de quitter définitivement
Montbéliard pour partir habiter chez sa fille et son
gendre à Paris, Charles Contejean continue sa
collaboration active pour la SEM dans les domaines botanique,
climatologique et archéologique.
Sa seconde vie à Paris (1900 à 1907)
Au cours de cette année 1900, Contejean,
âgé et avec une santé qui diminue
progressivement, ne supporte plus de se languir de sa
famille. Il décide en accord avec ses enfants
d'habiter chez eux au 9 rue Monttessuy à Paris, dans
le 7e arrondissement, à deux pas du Champ de Mars et
de la toute nouvelle tour métallique construite par
Gustave Eiffel.
C'est en 1902 que Charles Contejean publie ses deux derniers
articles scientifiques : les 106e et 107e d'une longue
carrière riche et diversifiée de près de
50 ans et qui a débuté en 1853 avec la
publication de Remarques sur la dispersion des plantes
vasculaires relativement aux roches sous-jacentes, dans les
environs de Montbéliard aux Actes des
Sociétés helvétiques des Sciences
Naturelles de Porrentruy. Ces deux derniers articles,
publiés dans les Mémoires de la SEM -
« Le climat de Montbéliard » et
« Un dernier mot sur la flore de
Montbéliard »- sont les symboles des deux
sciences dont il n'a pu faire carrière et qui ont
été ses deux passions : la climatologie et la
botanique.
La mort de Charles-Louis Contejean
Le mercredi 13 février 1907, Charles Louis
Contejean décède au domicile de sa fille
à Paris ; il est âgé de 82 ans, 4 mois et
29 jours d'une vie presque entièrement
consacrée à la science universelle et à
la valorisation de son petit pays d'origine. Il a
décidé de se faire incinérer, technique
récente et depuis peu autorisée par la loi
(1887) mais pas par la religion. C'est un dernier pied-de-nez
de ce vénérable républicain,
anti-bonapartiste et anti-clérical, aux institutions
et préjugés en tout genre, aux
règlements et aux principes desquels il n'a jamais pu
se plier. Il est inhumé le dimanche 17 février
à Montbéliard. Sa mort est douloureusement
ressentie dans le Pays de Montbéliard, où il
était un personnage connu et reconnu.
En 1943, le Conseil Municipal de Montbéliard donne le
nom de Charles Contejean à la rue anciennement des
Jardins.
En 1982, son Glossaire est republié et enrichi
par la SEM.
Hélas, en 1992, sa tombe, où se trouvaient ses
parents et son épouse, faute d'entretien depuis de
nombreuse années, a été détruite
et la concession ré-attribuée...
Merci à M. Thierry Malvesy, responsable des collections d'Histoire Naturelle au Muséum Cuvier du Musée du Château des Ducs de Wurtemberg, qui nous a aimablement communiqué cet article et la documentation sur les Carnets de Voyages de Contejean.