Avant de publier en 1909, dans son Répertoire de reliefs grecs et romains, une précieuse série des dessins de la colonne Trajane, Salomon Reinach avait fait paraître en 1886 une petite monographie intitulée La Colonne Trajane au musée de Saint-Germain, éditée chez Ernest Leroux à Paris en 1886.

Sans être, et de loin, aussi complet que la monographie de W. Froehner sur la même question, ce petit opuscule peut tout de même rendre quelques services.

Il est très peu illustré ; aussi l'accompagnerons-nous de photographies personnelles représentant le moulage de la partie inférieure de la colonne, conservé dans les fossés du Musée de Saint-Germain.

I

S'il fallait mesurer l'importance d'une oeuvre de sculpture au nombre des personnages qu'elle représente, à l'abondance des renseignements dont elle enrichit l'archéologie et l'histoire, la colonne Trajane, avec ses bas-reliefs peuplés de 2.500 figures, devrait occuper le premier rang parmi les restes de la statuaire antique. On a dit avec raison qu'elle était pour la vie militaire des Romains ce que Pompéi rendue à 1a lumière est pour leur vie civile (1). Encore, si l'on voulait pousser la comparaison, tournerait-elle à l'avantage de la Colonne. Car Pompéi, c'est, après tout, une ville de province, une ville plus qu'à moitié grecque par l'art et les moeurs, tandis que les bas-reliefs qui enlacent la colonne Trajane sont des oeuvres purement romaines d'inspiration, et les légions de pierre qui se déroulent sur sa spirale sont la grande armée de l'empire, l'armée de Trajan. Les informations que nous pouvons dériver de leur étude sont d'autant plus précieuses que l'époque de Trajan n'a pas trouvé d'historien ; du moins n'avons-nous conservé sur ce grand règne que des abrégés écrits sans talent et d'une désespérante sécheresse (2). La colonne parle là où les chroniques se taisent, et ce tombeau impérial vérifie la parole du poète italien :

Parlan le tombe ove la storia e muta.

La colonne Trajane, en effet, est à la fois un monument de victoires et un tombeau : sa base est une chambre sépulcrale où les restes du grand empereur ont reposé. Mais, chose singulière, l'inscription gravée sur le piédestal, et qui se lit encore, ne mentionne pas cette double destination : elle rappelle un travail tout pacifique dont la colonne devait rester le témoin. Voici la traduction de ce texte, qui n'a rien de commun, assurément, avec la fière dédicace que Napoléon Ier a fait graver sur la colonne de la place Vendôme, cette imitation en bronze de la colonne en marbre de Trajan : «Le Sénat et le peuple romain à l'empereur César, fils du divin Nerva, NERVA TRAJAN, Auguste, Germanique, Dacique, souverain pontife, revêtu de la puissance tribunice pour la dix-septième fois, imperator pour la sixième, consul pour la sixième, père de la patrie ; afin de marquer la hauteur de la montagne qu'on a déblayée pour construire de si magnifiques monuments» (3).

Sauf les surnoms de Germanique et de Dacique (4), rien, dans cette dédicace, ne rappelle les victoires de Trajan. Si les bas-reliefs avaient péri et que l'inscription seule eût subsisté, nous nous ferions une idée singulière de la colonne Trajane. L'historien Dion Cassius (5) se contente de dire que l'empereur fit élever dans le forum une très grande colonne, à la fois pour lui servir de tombeau et pour marquer l'importance des travaux auxquels le nivellement de la place avait donné lieu. Quelle leçon à l'adresse des archéologues qui ont l'audace de vouloir restituer d'après les textes des monuments qui ont disparu à tout jamais ! Ces travaux du forum de Trajan avaient été, en vérité, un prodige, et l'empereur Constance eut raison de dire, deux siècles plus tard, lorsqu'il fit son entrée triomphale dans Rome, que les hommes ne feraient plus rien de semblable (6). L'ensemble se composait d'un arc de triomphe qui donnait accès à une place immense entourée d'une colonnade et dont le milieu était occupé par une statue équestre de Trajan. Plus loin s'élevait la basilique Ulpienne, avec son pavé de marbre phrygien et ses cinq nefs ; au delà, la colonne Trajane, fièrement dressée entre deux bibliothèques consacrées l'une à la littérature grecque et l'autre à la littérature latine. Pour obtenir l'emplacement nécessaire à ces édifices, l'architecte impérial, Apollodore de Damas (7), avait dû faire disparaître toute une colline qui s'étendait entre le Quirinal et le mont Capitolin (8), et cette butte, suivant la dédicace que nous avons citée, avait, comme la colonne, plus de quarante mètres de hauteur ! Il faut remonter aux temps de l'ancienne Egypte et de l'Assyrie pour trouver les modèles d'aussi gigantesques travaux ; la dédicace de la colonne, dans son apparente modestie, respire la fierté de la nature vaincue.

De toutes ces magnificences, la colonne seule est restée debout. Les invasions et le moyen âge l'ont respectée. Parmi les barbares qui saccagèrent Rome et les factieux qui l'ensanglantèrent, il ne se trouva point de déboulonneur. Si le tombeau de l'empereur fut violé (9), si sa statue en bronze doré, qui surmontait la colonne, fut jetée à terre et fondue (10), on ne songea point à abattre le pilier où respiraient de si glorieux souvenirs. Le christianisme même semble l'avoir pris sous sa protection. On raconte que le pape saint Grégoire, au sixième siècle, obtint de Dieu la grâce de Trajan à la condition qu'il ne demanderait plus pareille faveur pour aucun païen. «Pardonne-lui, dit le rituel grec, comme tu as pardonné à Trajan par l'intercession de Grégoire». Une légende pieuse, formée de bonne heure, entourait son nom d'une auréole de bonté. Il avait rendu justice à une pauvre veuve qui l'implorait, au moment où il sortait de Rome à la tête de son armée (11).

Et Dante, se faisant l'écho de cette tradition populaire, accorde une place à l'empereur romain dans le sixième ciel de son paradis (12).

Au dixième siècle, l'emplacement du forum était occupé par un vaste couvent dont la colonne Trajane était le clocher. Propriété de l'église Saint-Nicolas ad Columpnam, elle fut donnée en 1162 à l'abbaye de Saint-Cyriac (13) et le Sénat romain défendit, sous peine de mort, d'endommager un des plus beaux ornements légués par la Rome impériale à la ville sainte (14). Cette défense fut certainement respectée, car la violation du tombeau et la destruction de la statue, dues à la cupidité et non pas au fanatisme, remontent à une époque bien antérieure. Raphaël, Jules Romain, Polydore de Caravage, copièrent les bas-reliefs de la colonne et s'en inspirèrent dans leurs tableaux (15). Un peu plus tard, en 1536, le pape Paul III Farnèse débarrassa la base des décombres qui s'étaient amoncelés à l'entour (16). Restait à faire disparaître les maisons modernes avoisinantes, pour rendre au chef-d'oeuvre mal entouré la majesté de l'isolement. Ce fut le mérite du pape Sixte-Quint, en 1587, servi par un habile architecte, Domenico Fontana. Nous possédons encore les comptes des travaux qui furent exécutés à cette occasion (17) et dont le plus utile, après le déblaiement des abords, fut la construction d'un mur de pourtour destiné à protéger l'édifice. Sixte-Quint fit ouvrir le piédestal et constata que le tombeau était vide : l'intérieur fut muré pour augmenter la résistance du support. Sur le faîte de la colonne, à la place de la statue de Trajan, on plaça une statue en bronze doré de saint Pierre et l'on frappa une médaille commémorative portant cette belle légende : Exaltavit humiles «Il a élevé les humbles». Avec cette médaille se termine l'histoire de la colonne. Elle est restée telle que Sixte-Quint l'a laissée, si ce n'est que Napoléon, de 1812 à 1814 (18), a fait de nouveau éloigner les terres qui menaçaient d'envahir le piédestal.

Quinze ans auparavant, elle avait couru un grand danger. Après le traité de Tolentino, qui mit les richesses de Rome à notre merci, le général Pommereul conçut l'idée singulière de transporter à Paris la colonne Trajane, en lui faisant descendre le Tibre, remonter le Rhône et la Saône, puis descendre la Seine, afin que le monument des victoires romaines devînt le piédestal d'une statue de la Liberté (19). Heureusement, Napoléon ne fut pas séduit par ce projet : c'est à l'étranger qu'il demanda la matière de la colonne Vendôme, mais il laissa la colonne de Trajan sur le forum. Le dernier Napoléon fut mieux inspiré encore. Sans enlever une pierre à l'original, il en fit don aux riverains de la Seine, sous la forme de moulages qui permettent aujourd'hui de l'étudier à Saint-Germain bien mieux qu'on ne peut le faire à Rome même.

Le pont de Trajan sur le Danube
Grand bronze (Cohen, Monnaies romaines, n° 419)
Cliché emprunté à l'Histoire des Romains de M. Duruy, t. IV, p. 753

II

Ce n'est pas, en effet, au pied d'un pilier de quarante mètres que l'artiste ni l'archéologue sont à même d'en apprécier les détails (20). Raphaël et ses contemporains avaient la ressource de monter sur les toits des maisons voisines ; mais, ces maisons disparues, on ne pouvait plus voir que l'ensemble et les trophées sculptés sur le piédestal. Aussi reconnut-on de bonne heure la nécessité de rendre les bas-reliefs accessibles, soit par des moulages, soit par des gravures. L'initiative appartient encore à la France. Le roi François Ier était un admirateur de Trajan : il obtint même, dit-on, du sultan Soliman II qu'on arrachât une des piles du pont de Trajan sur le Danube afin d'en faire étudier la structure (21). En 1541, il envoya le Primatice en Italie, avec la mission d'acheter des objets d'art et de mouler les plus belles sculptures, y compris le sépulcre de Trajan. L'architecte Vignole se chargea de ce dernier travail; mais, effrayé bientôt par la dépense, il se contenta de faire reproduire quelques parties de la colonne qu'il expédia à Fontaibleau où elles ont péri (22).

Le projet fut repris en 1665 par Louis XIV, ou plutôt par Colbert. Le premier directeur de l'Ecole française de Rome, Charles Errard, fit surveiller et mena à bonne fin le moulage du monument tout entier. La colonne Trajane devint un des sujets d'entretien de la cour, comme on le voit par le journal de voyage du cavalier Bernin, qui vint en France en 1665 (23). Chantelou, l'historiographe du cavalier architecte, qui s'était occupé lui-même de faire mouler quelques morceaux de la colonne (24), rapporte à ce propos une anecdote plaisante. Le Bernin parlait d'une proposition bizarre qu'il avait soumise au pape, consistant à transporter la colonne Trajane sur la place où est la colonne Antonine et à construire de part et d'autre des fontaines monumentales. Le nonce Roberti demanda si cette colonne était un bel ouvrage. Bernin répondit que c'était l'oeuvre d'un des plus grands hommes qui aient été. Sur quoi M. le nonce demanda si on l'appelait Trajane à cause de Troie, ce qui, ajoute Chantelou, fit rire la compagnie (25). Bernin causa plusieurs fois de la colonne avec Colbert et redit au surintendant l'admiration qu'elle inspirait à Michel-Ange, qui lui attribuait la supériorité de l'école romaine dans l'exactitude du dessin (26).

Les moulages, achevés en 1670, ne furent pas tous expédiés en France. Quelques-uns se sont perdus, d'autres existent à la Villa Médicis, à l'Ecole des beaux-arts de Paris et au musée de Leyde (27). Par suite de circonstances que nous ignorons, ce travail coûteux ne donna pas les fruits qu'on en attendait (28).

Mais entre temps, les dessinateurs et les graveurs s'étaient mis à l'oeuvre : c'est à eux que l'on doit les premières reproductions qui ont fait connaître la colonne Trajane. En 1576, parurent cent trente planches gravées par Villamena et précédées d'une nofice de l'Espagnol Alphonse Chacon (29) : les dessins avaient été exécutés par Jérôme Muziano, surintendant des travaux du Vatican et fondateur de l'Académie de Saint-Luc. Cette publication, dédiée à Philippe II, «compatriote de Trajan», ne sembla pas suffisante à Pietro Santi Bartoli, élève du Poussin et antiquaire pontifical. Pendant que l'on moulait la colonne pour Louis XIV, il profita des échafaudages élevés tout autour pour retoucher les dessins de Muziano. Des planches gravées par lui, avec plus d'habileté que d'exactitude, furent réunies en un volume somptueux dédié à Louis XIV : «il Traiano della Francia», qui porte la date de 1672 (30). Le commentaire, dû à Bellori, n'est guère qu'un abrégé de celui de Chacon, excellent pour son époque et qui servit également de base au savant traité de Raphaël Fabretti, publié en 1683 (31). Montfaucon inséra les planches de Bartoli avec des extraits du livre de Fabretti dans son Antiquité expliquée.

Après Bartoli, l'étude directe des bas-reliefs subit un temps d'arrêt prolongé ; ni les dessins à trop petite échelle de Morell, publiés en 1752 (32), ni les belles planches de Piranesi, qui donnent seulement la vue d'ensemble et le piédestal (1770) ne marquent un progrès sur les entreprises antérieures (33). Une nouvelle ère pour la colonne Trajane ne commence qu'en 1861, lorsque Napoléon III, occupé de son Histoire de César, donna ordre de la mouler tout entière. Il était question alors de dresser sur une des places de Paris la première réplique complète du monument de Trajan. Comme le plâtre ne supporte pas les intempéries, on fit reproduire les moulages par la galvanoplastie à l'usine d'Oudry, et on les exposa au Louvre dans l'été de 1864 ; malheureusement, les épreuves venues de Rome ont été détruites par ce travail, à l'exception de 94 morceaux qui sont conservés à l'Ecole des beaux-arts et à Saint-Germain. L'idée de reconstituer la colonne à Paris avait été abandonnée, car elle serait devenue un simple objet de curiosité, inaccessible aux études des archéologues. Les épreuves galvanoplastiques, qui subsistaient seules, étaient un encombrement pour le Louvre : on les transporta, en 1870, dans les caves du pavillon Daru, puis dans les magasins du musée gallo-romain de Saint-Germain, qui n'en exposa qu'un petit nombre de spécimens. En 1876, des surmoulages de ces épreuves furent pris par M. A. Maître pour le musée de Kensington, où la colonne Trajane a été exposée dans son ensemble (34), alors que les savants français ne pouvaient encore en connaitre que des morceaux.

Ce qui manquait chez nous, c'était un emplacement favorable, à la fois, spacieux, bien éclairé et protégé contre les mauvais plaisants. Cet emplacement a été trouvé et l'on ne saurait en imaginer de meilleur. Depuis l'achèvement des façades nord et est du château de Saint-Germain, les fossés de Charles V, transformés en jardins, sont devenus disponibles. C'est là que la colonne Trajane va être reconstituée en huit tronçons, dont aucun ne dépassera la hauteur du mur qui sépare le fossé du parterre, en sorte que l'on pourra, sans même pénétrer dans les fossés, étudier de près tous les détails des bas-reliefs. Comme les fossés ne sont pas ouverts pendant la nuit et que la surveillance y est toujours facile, nos précieux moulages n'auront rien à craindre des hommes ; une mince plaque de zinc, placée au-dessus de chaque tronçon, les préservera contre la pluie sans les masquer à la vue. Les travaux d'installation, commencés au mois de mai, seront fort avancés dans les premières semaines de l'automne ; déjà les reliefs du piédestal sont installés contre le mur du fossé, où l'on peut lire, entre les Victoires qui l'encadrent, la dédicace du Sénat et du peuple romain (35).

Les moulages de la Colonne, photographiés en 1864, ont été reproduits par la phototypie dans quatre énormes in-folio, publiés de 1872 à 1874 par MM. Froehner et Arosa (36). C'est un ouvrage de grand luxe, fort coûteux, difficile à manier et où la phototypie en couleur a donné de médiocres résultats. Heureusement pour le public studieux, qui n'achète guère les in-folio, M. Froehner avait publié, dès 1865, une notice substantielle dans le format in-8°, contenant la meilleure étude d'ensemble que l'on possède sur notre monument (37). Ce volume est accompagné de gravures qui ne donnent que les scènes principales de la Colonne et dont l'exécution est très peu satisfaisante. Il resterait donc, après avoir exposé les bas-reliefs, à les faire connaître par de bonnes héliogravures, dans l'intérêt des archéologues et des artistes. En attendant que ce travail nécessaire trouve un éditeur, la direction du musée de Saint-Germain a fait monter dans un meuble à volets, placé sur le palier du premier étage, d'admirables épreuves photographiques d'après les moulages en plâtre (38). Désormais, ceux qui ne connaitront pas la colonne Trajane ne pourront s'en prendre qu'à eux-mêmes : elle vaut une heure de déplacement et une promenade.

III

Statue de Trajan cuirassé
Statue en marbre de Paros,
trouvée à Gabies
Cliché emprunté â l'Histoire des Romains
de M. Duruy, t. IV, p. 823

La conquête de la Dacie par Trajan a produit des résultats durables. La Roumanie lui doit son nom, la langue et la civilisation roumaines leur caractère. Ce fut une guerre sans merci, mais qui fut suivie d'une paix féconde où des colonies romaines, transplantées sur les bords du Danube, se mêlèrent à ce qui restait des vaincus et les assimilèrent (39). Comme Carthage, comme l'Asie, comme la Gaule, la Dacie, à la veille de perdre son indépendance, trouva un défenseur intrépide pour lutter et succomber avec elle. Mais nous connaissons Annibal, Mithridate, Vercingétorix, et nous ne savons presque rien de ce Décébale (40) qui, après avoir vaincu deux généraux romains et fait payer tribut à Domitien, soutint une guerre de cinq ans contre Trajan et finit par se donner la mort pour ne pas se rendre au vainqueur. La Colonne est une chronique lapidaire de cette lutte si obscure pour nous, si claire pour les contemporains qui pouvaient lire les mémoires de Trajan (41), mais qui, avec toutes ses insuffisances et toutes ses lacunes, nous offre du moins une image vive et saisissante de l'histoire d'une conquête en cent vingt-quatre tableaux.

A l'époque impériale, les palais des empereurs, les villas des grands et des riches, se peuplaient de statues enlevées à la Grèce, ou de copies plus ou moins libres d'oeuvres célèbres dues au ciseau des artistes gréco-romains. Ces sculptures, qui remplissent aujourd'hui les musées de l'Europe, ne sont romaines que par la date où le marbre a été extrait de la carrière : l'originalité, le caractère national leur font défaut. Il en est autrement des bas-reliefs historiques qui décorent les arcs de triomphe et la colonne Trajane (42). Ceux-ci peuvent bien avoir été sculptés par des Grecs (43), mais c'est le sentiment romain qui les a inspirés. De là leur intérêt pour l'histoire de l'art, dont ils marquent un développement nouveau et une phase originale. Sans doute, ces récits de guerre avaient leur prototype dans les sculptures de certains monuments de l'époque macédonienne, destinés à célébrer les triomphes des successeurs d'Alexandre ; mais il suffit de comparer les bas-reliefs de la colonne Trajane à ceux que l'on a découverts à Pergame pour apercevoir toute la différence qui les sépare. Eumène, vainqueur des Galates, élève un autel où est représentée la lutte des dieux contre les géants : Trajan, vainqueur des Daces, fait sculpter sur sa colonne triomphale l'exacte représentation des luttes qu'il a soutenues. Légionnaires et barbares, auxiliaires numides ou cataphractaires sarmates (44), tous paraissent sous le costume qui leur est propre, sans aucun mélange d'idéalisme ni d'allégorie. Si les dieux interviennent, c'est à titre de personnifications locales, on dirait presque de légendes explicatives : tel le Danube aux traits de Neptune (45), la Nuit voilée qui préside à une rencontre (46) ou Jupiter tonitrualis qui déchaîne un orage (47). La seule divinité proprement dite est la Victoire, qui inscrit le triomphe de Rome sur un bouclier (48).

A l'exception de cette scène unique, les hommes sont partout au premier plan. C'est le même réalisme qui inspirait les artistes de l'Egypte et de l'Assyrie lorsqu'ils retraçaient, sur les parois des palais et des temples, les expéditions militaires de leurs rois (49) : l'art romain, dans ce qu'il a de personnel, semble presque un retour vers les anciennes traditions de l'Orient. Heureusement, les leçons de la Grèce ne sont jamais oubliées, et le style de la colonne Trajane n'a rien de commum avec la sécheresse monotone des annales sculptées de Khorsabad ou de Thèbes. C'est la distance de la chronique à l'histoire, du récit qui énumère les faits à celui qui les rend sensibles et vivants. Les motifs figurés sur la colonne Trajane sont d'une variété infinie : passages de rivières, marches, navigations, conseils de guerre, combats, assauts, incendies, interrogatoires de prisonniers, sacrifices, négociations, revues, tous les épisodes s'y succèdent sans fatiguer l'attention. Ils sont l'image de la vie militaire dans toute sa complexité, sous tous ses aspects majestueux ou terribles. Les scènes douces et touchantes ne font pas non plus défaut. Voici des blessés auxquels on prodigue des soins, les Daces pleurant sur leur jeunesse moissonnée, Trajan prenant sous sa protection, après une victoire, les princesses captives et leurs enfants.

L'empereur est partout : il est représenté plus de cinquante fois sur la colonne, et bien que son image ait disparu du faite qu'elle couronnait, il est encore vrai de dire avec le poète :

Trajan domine encor les champs que de Tibère
Couvrent les temples abattus.
(50)

Chef de l'armée et grand pontife, soldat et prêtre, tantôt il combat et tantôt il sacrifie. Sa taille est d'ordinaire plus grande que celle des soldats qui l'entourent ; mais il vit avec eux et partage toutes leurs épreuves, le plus souvent à pied, maniant lui-même le timon de son navire, inspectant les travaux de fortification, marchant en tête de ses légionnaires, auxquels il montre le chemin de son bras tendu (51). Le peu que nous ont dit les auteurs est d'accord avec le témoignage des sculptures : Trajan n'était pas seulement le chef, mais le premier des soldats de son armée.

L'artiste de la colonne n'a pas été injuste pour les vaincus : il montre leur résistance héroïque, leur mépris de la mort, leur ardeur au suicide lorsqu'ils sont menacés de la servitude. Décébale, pressé par les cavaliers romains, tombé blessé au pied d'un arbre, se frappe de son glaive recourbé. Sa mort marque la fin de la guerre, et l'indépendance des Daces périt avec lui.

Au point de vue de l'art et du style, plus exigeants que l'archéologie et l'histoire, les bas-reliefs de la colonne Trajane prêtent à des critiques sérieuses. Surchargés de figures, admettant la multiplicité des plans, représentant des détails de paysage ou des édifices avec une disproportion choquante ou une perspective défectueuse, ils s'éloignent autant que possible du beau style des bas-reliefs grecs et marquent la confusion totale de la peinture et de la sculpture, erreur de goût qui se montre déjà dans les oeuvres de la plastique alexandrine et que toute la Renaissance italienne a partagée. Mais le siècle des Antonins n'est pas celui de Périclès, et l'art de la colonne Trajane paraît encore admirable quand on la compare à la colonne Antonine, postérieure de quelques années seulement. Si Raphaël et Michel-Ange ont considéré ces bas-reliefs comme des chefs-d'oeuvre, c'est qu'ils ne connaissaient pas encore le Parthénon et la pure lumière de l'art attique ; mais nous qui sommes plus heureux à cet égard, et tant de fois moins privilégiés à d'autres, avons-nous le droit de juger bien sévèrement ce que Michel-Ange et Raphaël ont admiré ?

Statue représentant un prince dace captif
Musée de Naples, n° 213
Cliché emprunté à l'Histoire des Romains
de M. Duruy, t. 1V, p. 732

DESCRIPTION DES BAS-RELIEFS

Dans le meuble à volets placé sur le palier du premier étage, les photographies d'après les moulages de la colonne sont réparties entre quarante-une feuilles ; quatre planches à échelle plus réduite, exécutées directement d'après l'original à Rome, représentent les faces du piédestal (D, E, F, G). On a fixé de part et d'autre contre le tour l'assemblage des photographies à grande échelle faites d'après le moulage de la base, et que leurs dimensions ne permettaient pas d'introduire dans les volets du meuble.

Les planches A, B, C, qui ouvrent la série, reproduisent :

A) Une vue d'ensemble de la colonne, d'après la publication de Bartoli (voyez plus haut) ;

B) Une vue de l'état actuel de la colonne, surmontée de la statue de Saint-Pierre par Torrigiani ; au fond, à gauche, l'église S. Maria di Loreto, construite en 1507 ; à droite, l'église S. Nome di Maria, élevée en 1683. Au-dessus, sur la même planche A, on a placé la photographie d'un buste de Trajan, dont l'original est au musée du Vatican. Cet excellent portrait aidera à reconnaître l'empereur dans les scènes un peu confuses des bas-reliefs.

C) Les photographies de deux bustes trouvés à Rome et actuellement au musée du Vatican. Ce sont des prisonniers daces, remarquables par leurs traits accusés, leur type énergique, presque farouche, que l'on retrouve encore aujourd'hui chez leurs descendants, les paysans roumains.

La colonne Trajane, construite en marbre de Paros, a cent pieds romains de hauteur (52) sans compter le piédestal et le dôme (en partie moderne) qui couronne le chapiteau. Cent pieds romains équivalent à 29m,626. La hauteur totale de la colonne dans son état actuel est de 38 m,221.

Il est à remarquer que la spirale qui porte les sculptures va en s'élargissant vers la partie supérieure. Un escalier de cent quatre-vingt-cinq marches est taillé à l'intérieur de la colonne et reçoit la lumière par quarante-trois petites ouvertures.

Des études poursuivies en 1833, sous la direction de M. Semper, ont fait penser que les bas-reliefs portaient des traces de peinture et de dorure. La dorure était appliquée sur les figures, probablement sur les armes et sur les cuirasses ; les fonds et les détails des paysages étaient revêtus de couleurs sombres, où paraît avoir dominé le bleu. Mais ces résultats sont loin d'être établis avec certitude : à vrai dire, ils sont même absolument contestés (53).

La description des scènes commence naturellement par le bas de chaque feuille, sur la gauche du spectateur. Il a quelquefois paru nécessaire, dans notre texte, de réunir à une planche le commencement ou la fin de la planche suivante, pour ne pas scinder en deux parties la description d'une même scène. Nous indiquons entre parenthèses les numéros des planches correspondantes dans le grand ouvrage de M. Froehner (54).

Les différents épisodes sont souvent séparés par des troncs d'arbres : ailleurs, ils se suivent sans délimitation apparente. L'indication des armes fait parfois défaut, le mouvement général des figures suffisant à préciser leur action.


D. Face sud du piédestal (F. pl.3-8). Au-dessus de la porte, deux Victoires ailées soutiennent un cadre où est gravée l'inscription traduite plus haut. De part et d'autre, trophées d'armes prises sur les Daces et leurs alliés (55).

E. Face ouest du piédestal (F. pl.9-13). Boucliers, cuirasses et armes diverses.

F. Face nord du piédestal (F. pl.19-23). Boucliers, cuirasses et armes diverses.

G. Face est du piédestal (F. pl.14-18). Boucliers, cuirasses et armes diverses.

Aux quatre angles du piédestal, aigles légionnaires tenant des guirlandes de laurier.

© Agnès Vinas

I (F. 26-31) Sentinelles romaines, gardant des tourelles fortifiées sur le bord du Danube. Deux soldats aident à décharger des barques contenant des approvisionnements, du blé, du fourrage, du bois, des tonneaux. On voit les remparts de Viminacium (Kostolatz en Serbie), quartier général de la VIIe légion Claudienne. A droite, le Danube personnifié, qui se montre favorable aux Romains (56) en soutenant de la main droite un des bateaux du pont jeté sur le fleuve (pl. II, à gauche). - Printemps de 101 ; Trajan avait quitté Rome le 25 mars.

© Agnès Vinas

II (F. 31-34) L'empereur et son armée traversent le Danube sur un pont de bateaux, coupé par l'île d'Ostrova. Trajan marche en avant de ses officiers, suivi des porte-étendards; il est précédé de son cheval de guerre, que l'on conduit à la main. - A peine débarqué sur le rivage de la Dacie, Trajan tient un conseil de guerre ; il est assis sur un suggestus formant tribune. [La tête de l'empereur a été brisée.]

© Agnès Vinas

III (F. 35-37) Trajan offre le premier sacrifice, consistant en un taureau, un mouton et un porc (suovetaurilia). La toge ramenée sur la tête, il a le costume et l'attitude du grand pontife. - L'empereur, debout sur une plate-forme avec deux lieutenants, donne l'ordre de lever le camp. Au milieu du bruit, un esclave, portant un égouttoir ou un crible, a été renversé par sa mule, qui baisse les oreilles avec malice (57). - L'empereur harangue ses troupes. - Il fait construire un camp retranché par les légionnaires et vient lui-même surveiller les travaux (pl. IV).

© Agnès Vinas

IV (F. 38-41) Un pont relie cette première forteresse à une seconde, qui est en cours de construction. Plus loin, un retranchement circulaire. Trois éclaireurs paraissent sur un autre pont jeté sur une petite rivière, où un soldat puise de l'eau. - Les légionnaires sont occupés à abattre des chênes, pour se procurer des poutres. - Nouvelle forteresse, près d'une rivière, dont Trajan surveille la construction : un soldat, une poutre à la main, est agenouillé devant lui. Au fond, une mule, portant une selle espagnole.

V (F. 42-45) On amène devant l'empereur un prisonnier ou un espion dace. - Les Romains jettent un pont sur un affluent du Danube. - Construction d'un poste fortifié, derrière lequel on voit cinq chevaux tenus à la main par leurs cavaliers. - L'empereur envoie en reconnaissance des éclaireurs à cheval.

© Agnès Vinas

VI (F. 46-49) L'armée romaine s'avance à travers un pays boisé, en abattant les arbres. - La première bataille s'engage (bataille de Tapae) ; Trajan et ses lieutenants dirigent les opérations. Les Romains ont de l'infanterie et de la cavalerie ; les Daces, de la cavalerie seulement. On reconnaît un auxiliaire germain à son costume, qui laisse le torse à découvert jusqu'à la ceinture. Un soldat romain tient entre ses dents les cheveux de la tête d'un ennemi, trophée qui lui vaudra une récompense. Le combat a lieu pendant un orage, indiqué par la présence de Jupiter-Fulminant dans un nuage, qui lance la foudre contre les Daces.

© Agnès Vinas

VII (F. 49-53) Les Daces recueillent et soignent leurs blessés. - L'empereur, monté sur une colline, fait mettre le feu aux huttes et aux retranchements des Daces, où l'on aperçoit une rangée de têtes décharnées plantées sur des pieux et un étendard à l'emblème du serpent (58). - L'armée dace bat en retraite : les Romains la poursuivent et passent une rivière à gué. - Une ambassade dace arrive au camp et l'empereur lui donne audience (59).

© Agnès Vinas

VIII (F. 53-57) [La scène commence à droite de la pl. VII] Le reste de l'armée est en fuite, poursuivie par les Romains qui mettent le feu aux maisons. On voit un vieillard s'efforçant d'échapper avec un enfant qu'il conduit (60). Plus loin est une caverne pleine de bestiaux égorgés. - Des femmes daces avec leurs enfants, appartenant peut-être à la famille royale, sont prisonnières des Romains : Trajan leur promet sa protection. - Les cavaliers daces profitent de l'absence de l'empereur, revenu à Rome, pour attaquer un poste romain en traversant la glace d'une rivière ; mais la croûte se rompt sous leur poids et ils sont engloutis. - Un autre poste romain se défend contre une attaque de l'infanterie dace, que secondent trois cavaliers Sarmates couverts de cuirasses en écaille (61). Trois Daces essaient de pratiquer une brèche dans le mur à l'aide d'une grosse poutre de bois, munie à l'extrémité d'une masse de fer en forme de tête de bélier.

ICI SE TERMINE LA PREMIERE CAMPAGNE

L'armée romaine, dans un port bien fortifié, peut-être sur le Danube, se prépare, vers le printemps de 102, à une nouvelle campagne. Des bateaux de charge embarquent des convois de provisions.

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IX (F. 57-61) Suite des préparatifs de départ. L'empereur harangue ses troupes. Un navire à deux rangs de rameurs précède un transport chargé de chevaux. Trajan s'embarque dans une birème qu'il gouverne lui-même, adossé à une sorte de pavillon. - Il harangue de nouveau l'armée sur le rivage et s'avance dans l'intérieur du pays. - Il charge au galop, à la tête de ses troupes. Deux cavaliers romains, sans doute des éclaireurs, viennent à sa rencontre.

X (F. 61-64) La mêlée s'engage. Les Romains ont pour adversaires des cataphractaires (cuirassiers) sarmates, alliés de Décébale (62). Le combat dure jusqu'au milieu des ténèbres, comme l'indique un gracieux buste de la Nuit, qui paraît au-dessus des rochers (63). Un chef dace, reconnaissable à son bonnet de feutre, se donne la mort pour échapper à l'esclavage. - Les Romains reçoivent la soumission de vieillards, de femmes et d'enfants daces ; ils s'occupent, sous les yeux de l'empereur, à élever un retranchement. On garrotte les prisonniers daces.

XI (F. 64-68) Soins donnés aux blessés par les Romains. Trajan, au dire de Dion Cassius, déchira ses propres habits parce que l'on manquait de linge pour panser les blessés. - L'armée se remet en marche. Une bataille générale s'engage, sous les yeux de l'empereur, auquel on amène un prisonnier dace. Les Romains lancent des flèches à l'aide de leurs catapultes transportées sur des chariots (64). Les Daces sont mis en fuite, laissant le sol couvert de morts et de blessés.

XII (F. 68-72) L'empereur harangue ses troupes (les chevaux de l'empereur occupent la droite de la pl. XI), et leur distribue des récompenses. Un soldat, heureux d'être décoré, tombe plein de joie dans les bras d'un camarade. Un autre vient baiser les mains de Trajan, assis sur un escabeau. On aperçoit des prisonniers daces gardés à vue dans un retranchement. Plus loin, à l'intérieur d'une bourgade dace, trois prisonniers romains sont torturés par des femmes, qui les brûlent avec des brandons. - Trajan, sur le bord d'une rivière, reçoit la soumission ou accepte l'alliance de deux chefs barbares.

XIII (F. 72-76) [Rattacher à cette planche la dernière scène de la pl. XII.) Trajan, à la tête de ses troupes, passe une rivière sur un pont de bateaux. Il occupe un fort abandonné par les Daces. - L'empereur donne des instructions à ses troupes. - Devant une place puissamment fortifiée, il reçoit des ambassadeurs daces qui viennent demander la paix. - On abat des arbres pour construire un retranchement.

XIV (F. 76-79) Trajan offre un sacrifice solennel (suovetaurilia) et harangue ses troupes. - L'armée s'avance à travers un pays boisé en abattant des arbres. On voit les têtes de deux ennemis, sans doute des espions, plantés sur des lances en avant d'un retranchement.

XV (F. 79-84) Trajan à cheval traverse une rivière sur un pont et fait mettre le feu à une bourgade ennemie. Les Daces battent en retraite. - Les Romains construisent un camp fortifié. - Un chef dace vient faire sa soumission. - L'armée avance, suivie d'une file de chariots.

XVI (F. 84-88) Vue d'un camp fortifié romain. - Sous les yeux de l'empereur, la cavalerie auxiliaire numide, conduite par Lusius Quietus (65), se précipite contre l'ennemi. Les cavaliers numides, suivant l'habitude de leur pays, montent sans selle ni bride. Les Daces sont mis en fuite et gagnent la forêt.

XVII (F. 88-91) Construction d'un retranchement romain. Au premier plan, on voit une catapulte sur un chariot traîné par des mulets. - Trajan reçoit deux princes daces, envoyés de Décébale. - Les négociations ont échoué et une nouvelle bataille s'engage dans la forêt, en avant de grandes piles de bois coupé.

XVIII (F. 92-96) Les Daces abattent des arbres pour construire un retranchement sur une colline. - Les Romains avancent et construisent un retranchement ; l'empereur reçoit et interroge un prisonnier. - Les Daces sont attaqués de nouveau et refoulés dans leurs retranchements.

XIX (F. 97-100) Les Romains emportent les retranchements d'assaut en formant la tortue, c'est-à-dire en se protégeant contre les traits à l'aide de leurs boucliers. - L'empereur est debout sur un rocher ; on lui apporte les têtes de deux Daces. - L'armée romaine s'avance vers la capitale des Daces, Sarmizegetusa (Varhély, en Transylvanie) et engage une nouvelle bataille. Les Daces sont vaincus. - Trajan surveille la construction de retranchements.

XX (F. 101-105) Construction d'une nouvelle forteresse auprès d'une source. - Trajan, assis sur une tribune élevée, reçoit la soumission de Décébale, qui vient demander la paix à genoux, en compagnie de princes daces qui joignent leurs prières aux siennes, après avoir déposé leurs armes. - Les Daces détruisent les fortifications de Sarmizegetusa. - Une longue suite de femmes, de vieillards et d'enfants, avec leurs troupeaux, retournent dans le pays d'où ils ont été chassés par la guerre. (Cette scène comprend l'extrême gauche de la pl. XXI.)

XXI (F. 106-107) Trajan harangue ses troupes victorieuses. - La Victoire, entourée de trophées, inscrit sur un bouclier le nouveau triomphe de Rome (66).

FIN DE LA PREMIERE GUERRE DACIQUE (1O2)

XXII (F. 108-113) [Rattacher à cette planche la partie supérieure de droite de la planche XXI). La guerre recommence au printemps de 105. Embarquement et départ des troupes romaines, peut-être à Ancône sur l'Adriatique. La présence de dauphins indique ici la mer et non le Danube (67). - Trajan aborde dans une ville bien fortifiée, où l'on vient d'offrir un sacrifice en son honneur. - Il est reçu avec des démonstrations de fidélité, et une multitude d'hommes, de femmes et d'enfants lui fait escorte.

XXIII (F. 114-117) Nouvelle scène de sacrifice. Trajan offre lui-même un troisième sacrifice dans un autre port où il vient de prendre terre et où l'on aperçoit un théâtre en demi-cercle. - Les Romains débarquent, peut-être sur la côte d'Istrie.

XXIV (F. 118-121) [Ajouter à cette planche les quatre figures à gauche de la suivante.] L'armée se met en marche, précédée de la cavalerie que conduit l'empereur à cheval. - Des paysans viennent à sa rencontre et implorent sa protection. - Trajan offre un sacrifice, au milieu d'un grand concours de peuple.

XXV (F. 122-124) On abat des arbres pour construire des retranchements. Les Daces se fortifient de leur côté derrière une triple enceinte.

XXVI (F. 125-127) Une forteresse romaine est attaquée par les Daces, qui sont défaits, et se réfugient dans leurs retranchements (pl. XXV). - Une seconde attaque n'est repoussée que grâce à l'arrivée de Trajan, qui accourt à la tête de la cavalerie romaine pour tourner l'ennemi.

XXVII (F. 127-131) [Rattacher à cette planche la scène de droite de la planche XXVI.] Trajan offre un sacrifice. - Les Romains ont construit un pont colossal avec des piles en maçonnerie sur le Danube, entre Turnu-Severin et Kladova (Feth-Islam) (68). - Auprès d'une ville romaine, où l'on remarque un théâtre, Trajan reçoit la soumission de tribus indigènes. - L'armée traverse une rivière. Trajan marche à la tête de ses troupes.

XXVIII (F. 132-136) [Rattacher à cette planche l'extrémité gauche de la pl. XXIX.] L'empereur à cheval atteint une ville fortifiée, où l'on offre un sacrifice en son honneur. - Il officie lui-même dans un sacrifice solennel (suovetaurilia) - L'empereur harangue ses troupes.

XXIX (F. 136-139) Trajan préside un conseil de guerre et donne l'ordre de se mettre en marche. - Il précède l'armée qui traverse un ravin. On voit des chariots portant les boucliers des soldats et les vivres, traînés par des chevaux et des mulets.

XXX (F. 140-143) Les Romains s'avancent sur deux colonnes à travers un terrain escarpé. Les auxiliaires gaulois sont reconnaissables à leurs saies, les archers orientaux à leurs casques pointus et à leurs tuniques pendantes. - On fait halte à un poste fortifié construit sur un rocher ; les soldats du train vont récolter la moisson et surveillent les mulets. - Sur le sommet d'un rocher s'élève une forteresse dace, où l'on aperçoit cinq princes, coiffés de bonnets en feutre, qui semblent tenir conseil et se livrer à une discussion violente.

XXXI (F. 144-146) Une mêlée s'engage. Les Romains, vainqueurs après une lutte acharnée, fortifient leur camp. - Ils attaquent la principale forteresse du roi dace (69), construite sur le sommet d'un rocher, et essayent de l'escalader avec des échelles, sous une pluie de pierres et de traits.

XXXII (F. 147-151) [Joindre à cette planche la fin de la planche XXXI et le commencement de la pl. XXXIII] L'empereur tient conseil. Le rocher occupé par les Daces est couvert de machines de guerre à trois roues et paraît impraticable. L'attaque se porte sur un autre point ; elle s'appuie sur un retranchement ou agger que les Romains construisent en abattant des arbres.

XXXIII [moins le premier tiers à gauche.] (F. 152-155) Trajan reçoit une ambassade qui vient demander la paix. - Les Daces mettent le feu à une grande ville pour ne pas la livrer aux Romains. Un vieillard quitte sa maison en pleurant, un jeune homme tombe expirant entre les bras de ses amis.

XXXIV (F. 155-159) [Joindre à cette planche la première section de la pl. XXXV.] Réunis autour d'un chaudron qui contient un breuvage empoisonné, les chefs daces en remplissent leurs coupes et se donnent la mort. Une foule de Daces s'enfuient épouvantés. - Trajan arrive et reçoit la soumission d'un groupe de barbares.

XXXV (F. 160-163) [Joindre à cette planche la première partie de la suivante.] L'empereur distribue des provisions de blé aux légionnaires, qui les emportent dans des sacs. - Il harangue les troupes qui l'acclament. - Les Romains élèvent de nouveaux retranchements.

XXXVI (F. 164-167) [Joindre à cette planche le commencement de la suivante.] Trois chefs daces viennent implorer la clémence de Trajan. - Les troupes romaines traversent une rivière sur un pont. - Les Daces abandonnent une forteresse devant laquelle sont accumulées des quantités de bois et attaquent un poste romain sur un rocher. Une lutte opiniâtre s'engage.

XXXVII (F. 168-170.) Les Daces battent en retraite et paraissent découragés. - Trajan, debout sur une tribune, harangue les légionnaires ; trois soldats du train conduisent des mulets chargés de vases d'argent. Ce sont les trésors de Décébale, ensevelis par ses ordres dans le lit de la rivière Sargetia et découverts grâce au témoignage d'un prisonnier romain.

XXXVIII (F. 171-175) [Ajouter à cette planche le commencement de la suivante.] Décébale et les princes daces sont poursuivis par les Romains. Le roi (?), tombé blessé au pied d'un arbre, se donne la mort ; un autre chef immole un compagnon pour le soustraire à la servitude. - Trajan reçoit la soumission d'un prince dace, d'autres se présentent dans l'attitude de suppliants. - La cavalerie romaine continue la poursuite à travers les montagnes : le sol est jonché de morts (pl. XXXIX).

XXXIX (F. 176-178) Un prince dace, renversé au pied d'un arbre, se défend contre des cavaliers romains. - Des fantassins garrottent les prisonniers daces et emmènent des enfants en captivité. - La tête de Décébale est apportée au camp romain.

XL (F. 179-183) [Joindre à cette planche le début de la suivante]. L'infanterie romaine continue à faire des prisonniers. Au fond, on voit des animaux divers, un boeuf sauvage (?), un cerf, un sanglier, qui symbolisent la nature farouche de la contrée. - La dernière forteresse dace est prise. Le buste de la Nuit paraît au-dessus de l'horizon.

XLI (F. 183-186) Les Romains mettent le feu à une ville. Les Daces abandonnent avec leurs troupeaux les forteresses occupées par les Romains : vieillards, femmes et enfants prennent tristement la route de l'exil (1O7 après J.-C.).

La Dacie province romaine
Grand bronze (Cohen, Monnaies romaines, n° 332)
Cliché emprunté à l'Histoire des Romains
de M. Duruy, t. IV, p. 756


(1) Duruy, Histoire des Romains, t. IV, 1882, p.759.

(2) Le Panégyrique de Trajan, par Pline le Jeune, est antérieur aux guerres de Dacie (septembre 100) ; ce n'est d'ailleurs qu'une amplification de rhéteur. L'historien Gibbon a eu raison d'écrire : It is sincerely, to be lamented that whilst we are fatigued with the disgustful relation of Nero's crimes and follies, we are reduced to collect the actions of Trajan from the glimmerings of an abridgement, or the doubtful light of a panegyric.

(3) Corpus inscriptionum latinarum, t. VI, n° 960. L'inscription est de l'an 113 après J.-C.

(4) Trajan porte le titre de Germanique depuis l'an 97 (Eckhel, Doctrina nummorum, t. VI, p. 412). Il prit celui de Dacicus en 102, après la première campagne contre les Daces (Dion, LXVIII, 10, 2).

(5) Dion Cassius, LXVIII, 16.

(6) Voy. Ammien Marcellin, XVI, 10.

(7) Ce même Apollodore est l'auteur du pont de pierre jeté sur le Danube, qui est représenté sur la colonne Trajane (pl. XXVII). Le forum de Trajan fut achevé en 113. Voy. sur l'état actuel des ruines, Middleton, Ancient Rome in 1885, Londres, 1886.

(8) C'est la portion du mont Capitolin qui est actuellement occupée par l'église d'Aracaeli.

(9) Les cendres de Trajan avaient été déposées à l'intérieur du soubassement dans une urne d'or. (Eutrope, VIII, 2).

(10) On dit que la tête en bronze, trouvée aux pieds de la colonne, faisait partie, au XVIe siècle, de la collection du cardinal Della Valle. Elle avait plus de deux pieds de hauteur. Depuis Chacon, cette tête paraît avoir disparu et l'on n'en trouve plus aucune mention. (Winckelmann, Storia delle arti, éd. Fea, t. III, p. 372). - La colonne, surmontée de la statue, est représentée sur plusieurs monnaies de Trajan. (Froehner, La colonne Trajane, in-fol., t. I, p. 17.)

(11) On trouve déjà cette légende dans la vie de Grégoire le Grand par Paul le Diacre. L'esprit de la tradition est ici d'accord avec les témoignages historiques : aucun empereur n'a été plus humain que Trajan, aucun n'a plus fait que lui pour l'entretien et l'éducation des enfants pauvres. Voy. E. Desjardins, Les Antonins d'après l'épigraphie, dans la Revue des Deux Mondes du 1er décembre 1874. Trajan est le premier empereur qui ait reçu le surnom d'Optimus «très bon».

(12) Dante, Purgatorio, X, v. 73, et Paradiso, XXI, V. 13.

(13) Plus tard Santa Maria in Via Lata.

(14) Voy. Gregorovius, Geschichte der Stadt Rom im Mittelalter, t. I, page 470 et t. III, page 572 ; Winckelmann, Storia delle arti, éd. Fea, t. III, p. 355. Le décret du Sénat est daté du 27 mars 1162. On y lit les phrases suivantes : Ut est ad honorem ipsius ecclesiae et totius populi romani integra et incorrupta permaneat dum mundus durat, sic ejus stante figura. Qui vero eam minuere temptaverit, persona ejus ultimum patiatur supplicium. u

(15) Témoignage de Chacon, confirmé par le Bernin. On trouve des figures imitées de celles de la Colonne dans les Batailles de Constantin, l'Attila et les Loges de Raphaël. Dès 1506, Raphaël Maffei de Volterra parle des dessins faits, d'après la colonne Trajane, par le peintre Jacopo de Bologne, qui avait imaginé une machine permettant d'étudier de près tous les bas-reliefs. (Müntz, Raphaël, 2° éd., 1886, p. 606.)

(16) Winckelmann, Storia delle arti, éd. Fea, t. III, p. 378. Vers 1540, la colonne Trajane avait un gardien spécial, qui touchait 4 ducats par mois. (Müntz, Raphaël, p. 616). Une vue de la Colonne, après les travaux de Paul III et antérieurement à la restauration de Sixte-Quint, est gravée dans le recueil de Duperac, I vestigi dell' antichità di Roma, éd. de Rome, 1653 (p1.33). On y voit la Colonne au milieu d'une tranchée quadrangulaire creusée autour de sa base ; la face sud du piédestal est gravement mutilée à gauche. Le socle de la statue, au sommet, n'est pas entouré d'une balustrade ; c'est là qu'aboutit, par une porte basse, l'escalier intérieur.

(17) Fea, dans sa traduction de Winckelmann, Storia delle arti, t. III, p. 381.

(18) A cette époque fut déblayé le forum de Trajan, sous la direction de l'architecte Valadier, le comte de Tournon étant préfet du département du Tibre.

(19) Froehner, op. laud., t. I, p. 19.

(20) Dans l'antiquité, comme le fait observer M. Pollen (A Description of tbe Trajan column, p. 91), on pouvait étudier les bas-reliefs de la colonne en se plaçant à l'étage supérieur de la Basilique, peut-être même en se tenant aux fenêtres des deux bibliothèques.

(21) Engel, Commentatio de expeditionibus Trajani ad Danubium, Vienne, 1794, cité par Froehner, La colonne Trajane, in-8, p. vi. Voir, sur les restes du pont de Trajan, Duruy, Histoire des Romains, t. IV, 1882, p. 753 ; Froehner, La colonne Trajan, in-8, p. 132, et plus bas, note à la pl. XXVII.

(22) Barbet de Jouy, les Fontes du Primatice, p. 12 ; Froehner, La colonne Trajane, in-8, p. VI, et in-fol. t. I, p. XIX. Les creux que François 1er avait fait venir de Rome servirent après sa mort à la construction d'une écurie à Fontainebleau.

(23) Cf. Ludovic Lalanne, Journal du Voyage du Cavalier Bernin en France, par M. de Chantelou, publié d'après le manuscrit de l'Institut. Paris, 1885.

(24) Journal du Voyage, p. 140 et 249.

(25) Journal du Voyage, p. 40.

(26) Ibid., page 249 : «Le Cavalier a dit que ç'avait été la source d'où tous les grands hommes avaient tiré la force et la grandeur de leur dessin. Il a répété ce qu'avait dit Michel-Ange, quand il vit la Danaé du Titien, que si ces hommes-là (parlant des Vénitiens) eussent su dessiner, l'on ne regarderait pas leurs ouvrages à eux, mais aussi qu'il n'y avait qu'à Rome où il y eût une colonne Trajane».

(27) Froehner, op. laud., in-8, p. v1.

(28) Les creux envoyés à Paris par Errard servirent à l'exécution de moulages qui furent exposés au Louvre dans les premières années du XVIIIe siècle. M. Froehner (op. laud., in-fol., t. I, p. XIX), mentionne une tradition d'après laquelle ces creux auraient servi, sous le premier Empire, à combler la cour carrée du Louvre.

(29) D'autres éditions de ces planches ont été données en 1585 et 1616.

(30) Une autre édition, avec préface de Carlo Fea, parut à Rome en 1813.

(31) Raphaelis Fabretti, de Columna Trajani syntagma, Roma, 1683.

(32) Dans l'ouvrage intitulé : Thesauri Morelliani numismata, Amsterdam.

(33) On a publié en 1877 (Paris, Didot, 1 vol. in-4°) une restauration de la colonne Trajane faite à Rome en 1788 par l'architecte Percier. Les planches, gravées avec beaucoup de soin, comprennent une vue d'ensemble du monument, les détails du chapiteau et ceux du piédestal. La notice imprimée en tête n'a aucune valeur.
(34) Le moulage de la colonne, en deux tronçons, est placé dans la cour du sud-est au musée de South-Kensington. Voyez John Hungerford Pollen, A Description of the Trajan column, London, 1894.

(35) Ecrit au mois de juin 1886.

(36) Froehner, La colonne Trajane, d'après le moulage exécuté à Rome en 1861-1862, reproduite en phototypographie par Gustave Arosa. Paris, 1892-1894. 220 planches imprimées en couleur et nombreuses vignettes. L'ouvrage a été tiré à 200 exemplaires.

(37) Froehner, La colonne Trajane, Paris, 1865, in-S. Voir aussi la critique judicieuse que De La Berge a faite de ce livre dans la Revue Critique de 1866, p. 51 et 117 (27 janvier et 20 février).

(38) Les clichés, dont on trouvera les numéros sur le meuble à volets, sont la propriété de l'administration des beaux-arts, à laquelle les musées et les Sociétés savantes peuvent s'adresser pour obtenir des épreuves.

(39) Voy. Duruy, Histoire des Romains, t. IV, 1882, p. 755-759. La Dacie devint une Italie nouvelle, Tsarea Roumanesca. Il y a 1200 mots simples, dans la langue roumaine actuelle, qui appartiennent au vieux fond latin.

(40) Il faut peut-être dire le Décébale et non Décébale, ce nom étant, suivant plusieurs érudits, un appellatif comme Pharaon ou Brennus.

(41) Ces mémoires sont perdus et il n'en reste qu'une phrase conservée par le grammairien Priscien : Inde Berzobim, deinde Aizi processimus. latin.

(42) Sur le style de ces bas-reliefs, voyez Philippi, Ueber Roemiscbe Triumphalreliefe, dans les Mémoires de l'Académie de Saxe, t. VI, p. 278 sqq. (1872), et une excellente page de Wolters, Gypsabgüsse antiker Bildwerke, p. 765.

(43) On attribue parfois nos bas-reliefs à l'architecte du forum de Trajan, Apollodore ; c'est une hypothèse qu'aucun texte ne justifie. Ils sont probablement l'oeuvre de plusieurs artistes inégalement doués travaillant sous la direction d'un sculpteur qui avait donné l'esquisse de l'ensemble.

(44) Planches VI, VIII et XVI.

(45) Planche I.

(46) Planche X et XL.

(47) Planche VI.

(48) Planche XXI.

(49) L'empereur Auguste avait déjà imité les souveverains orientaux en faisant graver la longue inscription, connue sous le nom de Testament d'Auguste, où il raconte l'histoire de sa vie.

(50) Victor Hugo, Ode à la statue d'Henri IV. - Les sculpteurs des bas-reliefs ont retracé de préférence les épisodes où l'empereur intervient personnellement : de là, quelques scènes plusieurs fois répétées, telles que les sacrifices et autres cérémonies officielles ; de là, aussi, l'omission de faits de guerre importants dus aux lieutenants de l'empereur. Voyez De la Berge, Essai sur le règne de Trajan, p. 39.

(51) Voir les planches II, III et Ix, qui confirment sur ces points les éloges de Pline, Panégyrique, X, XIV, LXXXI.

(52) De là son nom de Columna centenaria. La colonne Trajane était donc une sorte d'étalon métrique, et l'on en a tiré parti pour déterminer la valeur exacte du pied romain. Voyez Canina, Ricerche sul valore delle antiche misure, etc., Rome, 1853 ; Aurès, Etude des dimensions de la colonne Trajane, Nîmes, 1863 ; Hultsch, Griechische und römische Metrologie, 2e édit., 1882, p. 93.

(53) Voyez à ce sujet Francke, Geschichte Trajans, p. 188 ; Bulettino dell' Instituto, t. V, p. 92 ; T. VIII, p. 39 ; Froehner, La colonne Trajane, in-8, p. 55.

(54) Le commentaire de la publication in-folio marque un progrès notable sur celui de l'édition in-8. Toutefois, il nous a été impossible d'accepter toutes les explications proposées par le dernier éditeur de la Colonne. Nous avons aussi fait usage du commentaire de M. Hungerford Pollen, A description of the Trajan column, London, 1874.

(55) Quelques armes, notamment les cuirasses, ressemblent aux objets analogues en usage dans l'armée romaine. M. Pollen pense que les armes daces et romaines sont mêlées dans les bas-reliefs du piédestal.

(56) M. Wolters fait erreur en considérant le Danube comme irrité de l'audace des Romains (Gypsabgüsse antiker Bildwerke, p. 763). Le dieu paraît surpris, mais son attitude est bienveillante.

(57) Nous adoptons l'interprétation de M. Pollen (The Trajan column, p. 114), de préférence à celle de M. Froehner (in-8, p. 79), fondée sur un passage de Dion, qui voit dans cet esclave «un messager des Bures apportant une missive écrite sur un grand champignon poreux». Pour l'attitude de la mule, cf. Horace (Sat. I, 9, zo) : Demitto auriculas, ut iniquae mentis asellus. Il y a peut-être dans cet épisode une allusion à quelque incident presque comique qui n'avait pas semblé sans importance aux contemporains, mais dont les textes que nous avons conservés ne parlent pas.

(58) Les huttes des Daces, comme l'a observé M. Froehner, ressemblent aux constructions des villages lacustres de la Suisse. (Musée de Saint-Germain, salle IV.)

(59) Il y a peut-être deux ambassades successives.

(60) Ce groupe présente une analogie frappante avec une réplique partielle du groupe des Niobides (le fils de Niobé et son pédagogue), découvert à Soissons et aujourd'hui au musée du Louvre.

(61) Voir la note à la pl. X.

(62) M. de La Berge a prouvé, contre l'opinion de M. Froehner (éd. in-8, p. 102), que les cavaliers cuirassés ne sont pas des Parthes, mais des Sarmates. M. Froehner a tacitement accepté cette correction dans l'édition in-fol., p.10 et 12.

(63) Séléné est souvent représentée ainsi sur les sarcophages gréco-romains.

(64) Voir les modèles de catapultes dans la salle R du musée de Saint-Germain, à l'entresol. Ce sont de grandes arbalètes.

(65) Sur ce personnage, voir Borghesi, Oeuvres, I, p. 501. «C'était un seigneur, Maure de nation, des pays qui n'étaient point sujets aux Romains. S'étant néanmoins mis dans la cavalerie romaine, il avait été cassé avec ignominie pour quelque méchante action. Cependant Trajan, ayant besoin de Maures contre les Daces, reçut ce prince qui se vint offrir de lui-même avec ceux de sa dépendance. Il fit des merveilles dans cette guerre et encore plus dans la seconde expédition de Trajan contre les Daces». (Tillemont, Histoire des Empereurs, t. II, p. 173.)

(66) L'attitude de cette figure est la même que celle de la Victoire en bronze découverte à Brescia, dont le musée du Louvre possède un moulage (Labus, Museo Bresciano, t. I, pl. 38-40). Elle rappelle aussi notre Vénus de Milo.

(67) Observation judicieuse de M. Froehner, que les critiques de M. Dierauer (Beitraege zu einer kritischen Geschichte Trajans, 1868, p. 86) n'ont pas affaiblie.

(68) Sur les restes de ce grand travail, voyez Aschbach, Mittheilungen der K. K. Centrakommission, Vienne, 1858, et le rapport de M. L. Lalanne en 1819, cité par M. Duruy, Histoire des Romains, t. IV, p. 754.

(69) Il est probable que cette ville est Sarmizegetusa (Varbély), connue dans la campagne précédente (pl. XIX.)