L'apprenti-sorcier de Goethe (détail) - Gravure sur bois colorisée d'après un dessin de Ferdinand Bardt - 1880





Der Zauberlehrling

Mon vieux maître sorcier

Pour une fois s’est absenté :

Désormais, les esprits vivront

Comme je l’aurai décidé.

Ses formules, ses travaux,

Ses pratiques, bref je sais tout !

Et soutenu par les esprits,

Je ferai des miracles inouïs.

 

Coulez, coulez, ô flots !

Répandez-vous en abondance !

Coulez ! Coulez !

Préparez-vous pour notre bain.

 

Viens aussi, vieux balai,

Mets ces hardes sur toi.

Tu as été longtemps valet :

Accomplis donc ma volonté.

Dresse-toi sur tes jambes

Et relève la tête, enfin ;

Cours, cours et prend un seau

Dans chacune de tes mains.

 

Coulez, coulez, ô flots !

Répandez-vous en abondance !

Coulez ! Coulez !

Préparez-vous pour notre bain.

 

Regardez-moi ce vieux balai :

Jusqu’au ruisseau il s’affaire,

Il se jette dedans

Et me revient en un éclair !

Qu’il est obéissant !

 

Mais… il le fait une seconde fois !

L’eau déborde et la cuve est remplie.

Écoute-moi, balai ! Cela suffit !

Tu es doué mais il suffit, je crois !

La formule… je l’ai oubliée !

La formule qui fait

Que le balai redevienne balai.

Ah ! il court et rapporte de l'eau

Toujours et encore.

Cent fleuves vont sur moi

Prendre leur rude essor.

- Non ! c’est insupportable !

Il me faut l’arrêter.

Il est devenu dur et tyrannique,

Je suis terrorisé.

Quant à ses yeux… quel regard diabolique !

Rejeton de l’Enfer,

Veux-tu donc inonder

La maisonnée entière ?

Du seuil jusqu’à la porte,

Des flots, des flots en affreuses cohortes.

Balai maudit, tu es têtu !

Mais tu n'es qu'un bout de bois !

Sois raisonnable, veux-tu ?

 

Je m’en vais te saisir de près,

Puis te couper en deux :

J’ai une hache fort aiguisée.

Revoilà ce coureur de chemins :

Je vais tomber sur toi et te détruire,

Ô infâme lutin !

Un bruit vient de retentir !

Ma lame t’a occis !

J’ai été fort précis !

Ouf, maintenant je respire.

 

Malheur ! Malheur !

Les deux morceaux se dressent.

Et ce sont là de nouveaux serviteurs.

Au secours, au secours, puissances supérieures !

De nouveau ils courent puiser !

L’eau pénètre la salle et l’escalier :

C’est le déluge complet.

Seigneur, je viens te supplier.

 

Voici revenir le vieux sorcier.

Mon maître, quelle misère,

Je ne puis me défaire

De ces esprits que je viens d’éveiller.

 

« Va dans ton coin, balai, balai !

Écoute bien ton maître et tu n'en as qu'un seul !

Que tout cela soit terminé ! »


Traduit de l’allemand par Philippe Renault






Kerstin Höckel - Der Zauberlehrling - 2014 - Schulfilm Online