Richard Westall - La déesse Rome apparaissant à Jules César au bord du Rubicon - 1793- Collection particulière





Ut ventum est parvi Rubiconis ad undas,
ingens visa duci patriae trepidantis imago
clara per obscuram vultu maestissima noctem,
turrigero canos effundens vertice crines,
caesarie lacera nudisque adstare lacertis
et gemitu permixta loqui : « Quo tenditis ultra ?
quo fertis mea signa, viri ? Si jure venitis,
si cives, huc usque licet. » Tunc perculit horror
membra ducis, riguere comae, gressumque coercens
languor in extrema tenuit vestigia ripa [...]

Quand on parvint aux ondes du petit Rubicon,
Une figure immense de la patrie tremblante lui apparut,
Pâle dans la nuit obscure, le visage consterné,
Les cheveux blancs tombant de sa tête ornée de tours,
La coiffure dénouée et les bras nus, et elle prononça
Ces mots mêlés de gémissements : « Où allez-vous ?
Où portez-vous mes enseignes, soldats ? Si à bon droit
vous venez, en citoyens, là est la limite permise. »
Alors un frisson d'horreur parcourut les membres du chef,
Ses cheveux se dressèrent, et entravant sa marche
Une paralysie retint ses pas sur la rive opposée.

Fonte cadit modico parvisque impellitur undis
puniceus Rubicon, cum fervida canduit aestas
perque imas serpit valles et Gallica, certus
limes, ab Ausoniis disterminat arva colonis.

Le Rubicon couleur de pourpre a une source modeste
et roule de faibles eaux quand l'été brûlant s'embrase,
et il serpente au fond des vallées et, limite bien nette,
il sépare les territoires de la Gaule de ceux de l'Ausonie.

Tum vires praebebat hiems, atque auxerat undas
tertia jam gravido pluvialis Cynthia cornu
et madidis Euri resolutae flatibus Alpes.

Mais alors, l'hiver lui donnait de la puissance, et ses eaux
avaient gonflé des pluies de la troisième lune,
et des glaces des Alpes fondues par les souffles humides de l'Eurus.

Primus in obliquum sonipes opponitur amnem,
excepturus aquas ; molli tunc cetera rumpit
turba vado faciles jam fracti fluminis undas.

On place d'abord la cavalerie en travers de la rivière,
pour freiner le courant ; le reste de l'armée, par un gué praticable, peut alors facilement fendre les eaux
de la rivière maintenant brisée.

Caesar ut adversam, superato gurgite, ripam
attigit, Hesperiae vetitis et constitit arvis :
« Hic, ait, hic pacem temerataque jura relinquo.
Te, Fortuna, sequor. Procul hinc jam foedera sunto.
Credidimus fatis : utendum est judice bello ! »

César, une fois franchi le tourbillon, atteignit la rive opposée de l'Hespérie et s'arrêta sur les terres interdites :
« C'est ici que j'abandonne la paix et les droits profanés.
C'est toi, Fortune, que je suis ; adieu désormais les traités.
J'ai fait confiance aux destins, à la guerre de juger ! »