Inscriptions




I. POUR UNE OFFRANDE A APOLLON

Ces roses couvertes encore de rosée et ce serpolet touffu sont destinés aux Muses. Je réserve pour toi seul, ô puissant Apollon ! ces lauriers au noir feuillage ; c'est une couronne de laurier que la ville de Delphes a placée sur ton front. Ce bouc pétulant qui ronge les jeunes rameaux de l'odorant térébinthe arrosera ton autel de son sang.

II. SUR DAPHNIS

Le blond Daphnis, qui modulait sur sa flûte des airs champêtres, a offert au dieu Pan une flûte sonore, une houlette, un javelot, la peau d'un faon et la panetière où jadis il portait les fruits de son jardin.

III. SUR LE MÊME

Ô Daphnis ! Tu dors sur un lit de feuillage, tu livres au repos tes membres fatigués ; mais déjà les pieux sont dressés pour tendre les filets sur la montagne. C'est toi que poursuivent Pan et l'aimable Priape dont le front est couronné de lierre safrané. Ils s'approchent ensemble de ta grotte. Fuis, fuis vite, et renonce au sommeil qui engourdit les sens.

IV. VOEU A PRIAPE

Chevrier, en passant par ce hameau qu'ombragent des chênes touffus, tu trouveras une nouvelle statue de bois de figuier encore revêtu de son écorce : c'est celle de Priape ; elle est sur un socle à trois pieds, elle n'a point d'oreilles, et cependant ce dieu peut accomplir les mystères de Vénus. La statue est dans une enceinte sacrée, et du milieu des rochers s'élance sans jamais tarir une source ombragée de lauriers, de myrtes, de cyprès et d'une vigne sauvage dont les rameaux s'étendent çà et là. Les merles printaniers y répètent leurs chansons, et les rossignols aux ailes d'or tirent de leurs gosiers des sons mélodieux. Arrête-toi dans ce lieu, prie l'aimable Priape de me délivrer de mon amour pour Daphnis, et dis-lui que je vais lui sacrifier un beau chevreau. S'il m'exauce, je lui immolerai trois victimes : une génisse, un bouc et un agneau encore renfermé dans ma bergerie. Daigne ce Dieu m'être propice !

V. A UN JOUEUR DE FLÛTE

Au nom des Nymphes de ces bois, veux-tu me jouer sur ta double flûte un air doux et ravissant ? Je t'accompagnerai de ma cythare, et le pasteur Daphnis tirera de son chalumeau des sons mélodieux. Asseyons-nous donc sous ce chêne touffu, derrière cet antre frais, et nous éveillerons le dieu Pan, protecteur des bergers.

VI. A THYRSIS,
Dont un loup a dévoré la chèvre bien-aimée

Infortuné Thyrsis ! Que gagneras-tu à baigner tes yeux de larmes éternelles ? Ta chèvre, cet animal si beau, ta pauvre chèvre n'est plus, elle est descendue aux sombres bords : un loup cruel l'a dévorée. C'est en vain que tes chiens remplissent l'air de leurs tristes hurlements. A quoi servent tes pleurs, puisqu'il ne te reste ni os, ni cendre de cette chèvre chérie ?

VII. POUR LA STATUE D'ESCULAPE

Le fils de Péon, le divin Esculape, est arrivé à Milet chez Nicias, ce docte médecin qui, tous les jours dépose de nouvelles offrandes sur son autel. Il a fait élever à ce dieu cette statue de cèdre odorant, pour laquelle il avait promis à Aétion une riche récompense. Le sculpteur a épuisé toutes les ressources de son art dans ce chef-d'œuvre.

VIII. POUR LA STATUE DES MUSES

Ô déesses ! Le musicien Xénoclès vous a élevé cette statue de marbre, monument de la reconnaissance. Chacun dira : « Dans la gloire que lui ont acquise ses talents, Xénoclès n'a pas oublié celles qui l'inspirèrent.»

IX. POUR UN TRÉPIED
Offert à Bacchus par Damotélès

C'est à toi, Bacchus, le plus aimable des Immortels, que le chorège Damotélès a offert ce trépied surmonté de ta statue. S'il était modeste dans son enfance, devenu homme, il fut honorable, ne se permettant jamais rien que de décent et de beau.

X. POUR UNE STATUE DE VENUS-URANIE

Cette Vénus n'est point la Vénus populaire, c'est la Vénus-Uranie. La chaste Chrysogone l'a placée dans la maison d'Amphiclès, à qui elle a donné plusieurs enfants, gages touchants de sa tendresse et de sa fidélité. Le premier soin, tous les ans, de ces heureux époux est de vous invoquer, puissante déesse, et en récompense de leur piété, tous les ans vous ajoutez à leur bonheur. Ils prospèrent toujours, les mortels qui honorent les dieux.

XI. POUR LA STATUE D'ANACRÉON

Etranger, fixe attentivement tes yeux sur cette statue, et de retour chez toi, tu diras : « J'ai vu dans Théos la statue d'Anacréon, le plus brillant poète de l'Antiquité.» Ajoute : « Et le plus grand ami de la jeunesse,» et en ce peu de mots, tu auras dépeint cet homme illustre.

XII. SUR ÉPICHARMUS

Epicharmus, inventeur de la comédie, était Dorien, et c'est en Dorien qu'il a écrit. Ô Bacchus ! en l'absence du poète, les Syracusains, empressés de lui rendre leurs hommages, lui ont élevé une statue d'airain dans leur ville célèbre. Il fit un noble usage de ses grandes richesses et donna à la jeunesse d'excellents avis. Rendons-lui grâce de ses bienfaits.

XIII. POUR LA STATUE D'ARCHILOQUE

Voyageur, arrête et considère Archiloque, ce poète ancien qui inventa le vers iambique et dont la juste renommée a pénétré du couchant à l'aurore. Apollon et les Muses l'aimèrent d'amour tendre. Il était ainsi harmonieux dans ses vers qu'habile à les chanter sur sa lyre.

XIV. POUR LA STATUE DE PISANDRE,
ème sur Hercule

Voilà Pisandre de Camire qui, le premier des poètes anciens, chanta le magnanime fils de Jupiter, vainqueur du lion de Némée, et ses glorieux travaux. Le peuple de Syracuse lui a élevé cette statue d'airain pour rendre son nom célèbre dans tous les âges.

XV. SUR THÉOCRITE LUI-MÊME

Il est un autre Théocrite de Chios. Moi, je suis le Théocrite de Syracuse, auteur de ce livre, fils de Praxagoras et de l'illustre Philina. Jamais je ne me suis paré des dépouilles d'autrui.

XVI. SUR LA GÉNÉROSITÉ DE CAÏCUS

Cette table est ouverte à tous, étrangers ou citoyens. Pour le rang, que la raison en soit juge. Les autres choisissent leurs convives : Caïcus offre la nuit même à tous ceux qui en désirent les riches produits que lui envoient les climats divers.