Dès le lendemain matin, l'étranger s'occupa de
l'affaire qu'il n'avait pu terminer plus tôt, à
cause des événements de la veille. On eût pu
le voir sur le Forum, aux environs des arcades de Janus,
s'enquérir activement d'une certaine personne. Il la
découvrit enfin, et ils se dirigèrent tous deux
vers un sale petit bureau situé au-dessous du Capitole et
sur la montée appelée le Clivus Asyli. On
mit à jour d'antiques volumes, qui furent parcourus
colonne par colonne jusqu'à la date du huitième
consulat de Dioclétien Auguste et du septième de
Maximien Hercule Auguste (A.D. 303). Là on trouva
quelques notes qui renvoyaient à de nouveaux documents.
D'autres parchemins, non moins poudreux et
numérotés, furent sortis de la poussière,
et on déroula celui qui portait le chiffre correspondant
au renvoi. Le résultat de cet examen parut grandement
satisfaire les deux parties.
«C'est la première fois de ma vie, dit le
propriétaire de cet antre, que je vois une personne qui
s'est parfaitement libérée à mon
égard revenir, après quinze ans, pour
vérifier le payement de sa dette. Vous êtes sans
doute chrétien, seigneur ?
- Oui, certes, par la miséricorde de Dieu.
- C'est ce que je pensais. Adieu, seigneur, je serai
enchanté de vous obliger, au même taux raisonnable
que mon père Ephraïm, maintenant dans le sein
d'Abraham. - I1 faut avouer que voilà un grand sot pour
sa peine, et je lui en demande bien pardon», ajouta-t-il
lorsque l'étranger fut trop loin pour l'entendre.
Ce dernier s'éloigna d'un pas léger et d'un
visage plus souriant qu'à son arrivée, et se
rendit directement à la villa de la voie Nomentane.
Après avoir encore prié dans la crypte, le cœur
soulagé, il s'adressa immédiatement au fossoyeur,
comme s'ils ne s'étaient jamais séparés
:
«Torquatus, puis-je parler à la noble Fabiola ?
- Certainement, répondit-il ; venez par
ici.»
Ni l'un ni l'autre ne firent allusion, en marchant, au
passé ni aux événements survenus depuis
leur séparation. Ils semblaient instinctivement
comprendre que tous ces souvenirs devaient être
effacés de la mémoire des hommes, comme ils
l'étaient déjà de celle de Dieu. Ce
jour-là et la veille, Fabiola était restée
chez elle, espérant voir revenir le pèlerin. Elle
était assise près de la fontaine, et Torquatus, la
désignant du doigt à son compagnon, se
retira.
A la vue du visiteur si longtemps attendu, elle se leva et fut
saisie d'une inexprimable émotion en sa
présence.
«Madame, dit-il avec une profonde humilité et une
véritable simplicité, je n'aurais jamais
osé me présenter devant vous, si la justice,
autant que la gratitude, ne m'en eussent fait une
obligation.
- Orontius, répondit-elle, est-ce ainsi que je dois vous
appeler ? - Il fit un signe affirmatif. - Vous n'avez d'autre
obligation envers moi que celle de la charité mutuelle
qui nous est recommandée par notre grand
Apôtre.
- Je sais que ce sont là vos sentiments. Si,
malgré mon indignité, j'ose venir vous trouver, ce
n'est point pour de vils motifs, mais afin de remplir un devoir
sacré. Je n'ignore pas quelle reconnaissance je vous dois
pour la bonté et la tendresse que vous avez
prodiguées à celle qui m'est plus chère
maintenant qu'aucune soeur ne peut l'être sur la terre, et
de quelle façon vous vous êtes acquittée
envers elle des devoirs d'affection que je négligeais
moi-même.
- C'est précisément à cause de cela,
interrompit Fabiola, qu'elle vint dans ma maison, et fut l'ange
de ma vie. Souvenez-vous, Orontius, que Joseph ne fut vendu par
ses frères qu'afin d'être le sauveur de sa
race.
- Vous avez trop d'indulgence, reprit le pèlerin, pour
le plus indigne pécheur. Je ne vous remercierai donc pas
de votre charité envers celle qui vous en a si richement
récompensée. Ce matin seulement j'ai appris avec
quelle générosité vous aviez agi à
l'égard de celui qui n'y avait aucun droit.
- Je ne vous comprends pas, observa Fabiola.
- Je vais tout vous expliquer, continua le pèlerin.
Depuis plusieurs années j'appartiens à une de ces
communautés d'hommes, en Palestine, qui vivent au milieu
du désert, séparés du monde, et passent la
moitié du jour et même de la nuit à chanter
les louanges de Dieu, à se livrer à la
contemplation et aux travaux manuels. La pénitence
sévère pour nos fautes passées, le
jeûne, l'humiliation, la prière : tels sont les
grands devoirs de notre vie d'expiation. Avez-vous
déjà entendu parler de ces communautés ?
- La renommée de Paul et d'Antoine
n'est pas moindre en Occident qu'en Orient,
répondit-elle.
- J'ai vécu avec le plus célèbre disciple
de ce dernier, soutenu par son grand exemple et par les
consolations qu'il m'a prodiguées. Une seule
pensée me troublait, et m'empêchait d'avoir la
confiance de mon salut, même après des
années d'expiation. Avant de quitter Rome, j'avais
contracté une lourde dette, que l'accumulation
d'intérêts exorbitants eût fait monter
à une somme effrayante. Cette dette, ayant
été contractée volontairement, ne pouvait
être éludée. Je n'étais qu'un pauvre
cénobite (1),
vivant à grand'peine du produit des nattes que je
tressais avec des feuilles de palmier et des maigres herbes que
produit le sable du désert. Comment m'était-il
possible de m'acquitter ?
Il me restait encore un moyen. Je pouvais m'offrir à mon
créancier pour être son esclave, travailler pour
lui, endurer patiemment ses coups et ses méprisants
reproches, ou bien me laisser vendre à son profit ; car
je suis encore vigoureux. Dans l'un et l'autre cas, l'exemple de
mon Sauveur m'encourageait et me soutenait. Quoi qu'il en soit,
j'étais prêt à abandonner tout ce que je
possédais, moi-même enfin.
Je suis allé ce matin au Forum chercher le fils de mon
créancier, et examiner ses comptes ; j'ai appris que vous
aviez éteint ma dette. Noble Fabiola, je deviens donc
votre esclave au lieu d'être celui du Juif.» Et il
s'agenouilla humblement à ses pieds. «Levez-vous,
levez-vous, dit Fabiola, se détournant pour verser des
larmes ; vous n'êtes pas mon esclave, mais un frère
bien-aimé dans le Seigneur.»
Puis, le faisant asseoir à côté d'elle,
elle ajouta :
«Orontius, j'ai une grande faveur à vous demander.
Racontez-moi ce qui vous a déterminé à
embrasser si courageusement ce nouveau genre de vie.
- Je vous satisferai aussi brièvement que possible. Je
m'enfuis de Rome, vous le savez, pendant une triste nuit,
accompagné d'un homme...» La voix lui manqua.
«Je sais, je sais de qui vous voulez parler, Eurotas,
interrompit Fabiola.
- Lui-même, la plaie de notre maison, l'auteur de toutes
mes souffrances et de celles de ma soeur chérie. A
Brindes nous fumes obligés de fréter un navire
à grands frais pour nous rendre à Chypre. Nous
entreprîmes le commerce et quelques autres
spéculations, mais sans succès. Une
malédiction nous suivait dans toutes nos entreprises.
Notre capital diminuant, il nous fallut passer dans un autre
pays. Arrivés en Palestine, nous nous frxàmes pour
un certain temps à Gaza. La misère bientôt
vint nous y trouver ; chacun nous tournait le dos sans que nous
puissions savoir pourquoi ; ma conscience m'avertissait que la
marque de Caïn était sur mon front.»
Orontius s'arrêta un instant, vaincu par les larmes, et
reprit en ces termes :
«Enfin toutes nos ressources étant
épuisées, comme il ne nous restait plus que
quelques joyaux d'un assez grand prix, et dont Eurotas, je ne
sais pour quelle raison, ne voulait point se séparer, il
me pressa d'adopter l'odieux métier de
dénonciateur de chrétiens; car une furieuse
persécution venait de s'élever. Pour la
première fois de ma vie je me révoltai contre ses
ordres et refusai d'obéir.
Un jour il me pria de me promener avec lui hors des portes de
la ville : nous errâmes assez loin et nous
atteignîmes une délicieuse oasis, au milieu du
désert. C'était une vallée étroite,
verdoyante et ombragée de palmiers. Un ruisseau limpide,
sortant d'un rocher en haut du vallon, la parcourait d'un bout
à l'autre ; l'endroit paraissait inhabité. On
n'entendait pas d'autre bruit que le murmure de l'eau.
Nous nous assîmes afin de prendre un peu de repos. Le
temps était venu, me dit-il, oit nous devions prendre
ensemble l'épouvantable résolution de ne pas
survivre à la ruine de notre famille. C'est là que
nous devions mourir ; les bêtes sauvages
dévoreraient nos corps, et personne n'apprendrait la
triste fin des derniers survivants de notre race.
En me parlant ainsi, il tira de son sein deux flacons
d'inégale dimension, me tendit le plus grand, et avala le
contenu du plus petit.
Je refusai de le prendre et je lui reprochai
l'inégalité des doses; mais il me répondit
qu'il était vieux et que j'étais jeune, et
qu'elles étaient proportionnées à la
vigueur de nos corps. Je refusai de nouveau, ne voulant pas
mourir ; il me saisit alors avec la force d'un géant,
tandis que j'étais assis sur le sol, il me renversa sur
le dos en criant : «Nous devons périr
ensemble». Et il me versa de force le contenu de la fiole
dans le gosier jusqu'à la dernière goutte.
Je perdis aussitôt connaissance, jusqu'au moment
où je me réveillai dans une caverne et demandai
à boire d'une voix affaiblie. Un vieillard
vénérable, à barbe blanche, approcha de mes
lèvres un vase de bois.
«Où est Eurotas ? lui dis-je.
- Voulez-vous parler de votre compagnon ? reprit le vieux
moine.
- Oui, repris-je.
- Il est mort», fut la réponse. J'ignore par
quelle fatalité ce malheur arriva, mais je bénis
Dieu de tout mon cœur de m'avoir épargné.
Ce vieillard était Hilarion, natif de Gaza, qui,
après avoir passé bien des années au
désert avec saint Antoine, était revenu cette
année même (A.D.403) dans son pays pour y
établir la vie des cénobites et des ermites ; il
avait déjà réuni plusieurs disciples. Ils
vivaient dans des cavernes peu éloignées,
prenaient leurs repas à l'ombre des palmiers, et
trempaient leur chétive nourriture dans l'eau de la
fontaine.
Leur charité envers moi, leur douce
piété, leur sainte vie, gagnèrent mon cœur
à mesure que je recouvrais la santé. Je compris la
sublimité de la religion que j'avais
persécutée, et rappelai dans mon esprit les
instructions de ma mère chérie et les bons
exemples de ma soeur. Cédant à la grâce, je
confessai (2) mes fautes
aux pieds du ministre de Dieu, et je reçus le
baptême la veille de Pâques.
- Nous sommes alors doublement frères, et même des
enfants jumeaux de l'église ; car je naquis le même
jour à l'éternelle vie. Que comptez-vous faire
maintenant ?
- Je repartirai ce soir. J'ai accompli le double but de mon
voyage. Le premier était d'éteindre ma dette ; le
second était de déposer une offrande sur la tombe
d'Agnès. Vous vous souvenez, ajouta-t-il en souriant, que
votre excellent père me trompa sans le vouloir en me
disant qu'elle convoitait les bijoux que je portais alors sur
moi, dans ma ridicule sottise. Je résolus donc,
après ma conversion, de lui offrir le plus beau qui
restait à Eurotas. Je le lui ai apporté.
- Avez-vous tout ce qui est nécessaire pour votre voyage ? demanda timidement Fabiola.
- Je suis abondamment pourvu, répondit-il, grâce
à la charité des fidèles. J'ai des lettres
de l'évêque de Gaza, qui me procureront partout la
nourriture et le logement. Néanmoins j'accepterai
volontiers de votre part, en qualité de disciple de
jésus-Christ, un peu d'eau et un morceau de
pain.»
Se levant tous deux, ils s'avançaient vers la maison,
lorsqu'une femme traversa précipitamment un massif
d'arbustes et tomba à leurs pieds en criant :
«Oh ! sauvez-moi, chère maîtresse,
sauvez-moi ! il me poursuit pour me tuer ! »
Fabiola reconnut dans cette pauvre créature son ancienne
esclave Jubala : ses cheveux gris en désordre et toute sa
personne annonçaient la plus extrême misère.
Elle lui demanda de qui elle voulait parler.
«De mon mari, répondit-elle ; voilà
longtemps qu'il me traite avec la plus indigne cruauté,
aujourd'hui il a redoublé de brutalité. Oh ! sauvez-moi de sa vengeance !
- Il n'y a aucun danger ici, dit Fabiola ; ma pauvre Jubala,
vous paraissez bien malheureuse. Il y a très longtemps
que je ne vous ai vue.
- Hélas ! noble dame, pourquoi serai-je venue vous
raconter tous mes malheurs ! Oh ! comment ai-je quitté
votre maison, où j'aurais pu rester si heureuse ! Avec
vous, avec Graïa et la bonne Euphrosyne, qui n'est plus de
ce monde, j'aurais appris à devenir meilleure en
embrassant le christianisme !
- Quoi ! y avez-vous réellement songé, Jubala ?
- Oui, depuis longtemps ; au milieu de mes chagrins et de mes
remords, j'ai vu combien les chrétiens étaient
heureux, même ceux qui avaient été aussi
criminels que moi. Et parce que j'en parlais ce matin à
mon mari, il m'a frappée et menacé de me tuer.
Mais, Dieu merci, grâce aux instructions d'une amie, je
connais la doctrine chrétienne.
- Depuis combien de temps êtes-vous en butte à ces
mauvais traitements, Jubala ? demanda Orontius, à qui son
oncle en avait parlé.
- Aussitôt que je lui eus raconté, peu de temps
après mon mariage, les propositions que m'avait faites
auparavant un étranger, au teint basané,
nommé Eurotas. Oh ! quel misérable c'était ! livré aux plus odieuses passions qu'il assouvissait
sans aucun remords. Un de mes plus pénibles souvenirs est
lié à sa personne.
- Comment cela ? demanda Orontius avec une vive
curiosité.
- Voici. A son départ de Rome, il me pria de lui
préparer deux poisons narcotiques : le premier,
destiné à un ennemi, s'il pouvait s'en emparer,
était mortel ; le second n'occasionnait qu'un
évanouissement de quelques heures, et devait lui servir
à lui-même en cas de besoin. Lorsqu'il vint les
chercher, j'allais précisément lui expliquer que,
contrairement aux apparences, la petite fiole contenait un
poison violent et très concentré, tandis que la
grande ne renfermait qu'une dose fortement étendue d'eau
et plus faible. Mon mari survint alors, en proie à un
accès de jalousie, et me jeta hors de la chambre. Je
craignis qu'Eurotas ne commit une méprise et ne fût
la cause involontaire de la mort de quelqu'un.»
Fabiola et Orontius se regardèrent silencieusement
étonnés de la justice des vues de la Providence ; un cri de Jubala les fit tressaillir. Ils furent saisis
d'horreur en apercevant une flèche trembler dans son
sein. Tandis que Fabiola la soutenait dans ses bras, Orontius
regarda derrière lui et aperçut à travers
une barrière une grimaçante et noire figure. Un
instant après on vit un Numide s'éloignant de
toute la vitesse de son cheval, son arc tendu au-dessus de
l'épaule, à la manière des Parthes, et
prêt à transpercer ceux qui tenteraient de le
poursuivre. La flèche avait passé inaperçue
entre Fabiola et Orontius.
«Jubala, dit Fabiola, désirez-vous mourir
cliétienne ?
- Oui, de tout mon cour, répondit-elle.
- Croyez-vous à un seul Dieu en trois personnes ?
- Je crois fermement tout ce que l'Eglise enseigne.
- Et en Jésus-Christ, qui est né et mort pour
racheter nos péchés ?
- Oui, je crois tout ce que vous croyez.» La
réponse devenait moins distincte.
«Hâtez-vous, hâtez-vous, Orontius,»
cria Fabiola en lui montrant la fontaine.
Déjà il était au bord du bassin, et revint
aussitôt les deux mains pleines d'eau, qu'il versa, en
prononçant les paroles du baptême, sur la
tête de la pauvre Africaine ; au moment où elle
expira, les eaux régénératrices se
mêlèrent au sang de l'expiation.
Après ce triste et consolant spectacle, ils
entrèrent à la maison et donnèrent des
instructions à Torquatus au sujet de la sépulture
de cette catéchumène purifiée par un double
baptême.
Orontius fut frappé de l'ordre et de la
simplicité qui régnaient dans l'intérieur
de la maison, et qui contrastaient fortement avec le luxe et la
splendeur d'autrefois.
Son attention fut tout à coup arrêtée dans
une des salles à la vue d'une magnifique chasse ou
coffret orné de perles, mais voilé par une riche
draperie qui n'en laissait voir que l'encadrement. Il s'approcha
plus près, et lut l'inscription suivante :
CECI EST LE SANG DE LA BIENHEUREUSE MIRIAM,
REPANDU PAR DES MAINS CRUELLES
Le visage d'Orontius se couvrit d'abord d'une pâleur
mortelle, puis d'une vive rougeur. Il chancela.
Fabiola s'en aperçut, et, s'approchant de lui avec une
franche bonté, posa la main sur son bras et lui dit d'un
ton plein de douceur :
«Orontius, il y a ici de quoi nous faire rougir tous
deux, mais non désespérer.»
En disant ces paroles elle tira le rideau. Orontius
aperçut sur un plateau de cristal l'écharpe
brodée qui avait joué un si grand rôle
pendant sa vie et celle de sa soeur. Sur cette écharpe
étaient posées deux armes aiguës, dont le
sang avait rouillé la pointe. L'une d'elles, qu'il
reconnut, était son propre poignard ; l'autre lui
semblait être un de ces instruments de vengeance
féminine, avec lesquels les dames romaines frappaient
leurs esclaves pour les punir.
«Nous avons tous les deux, par une blessure involontaire,
répandu le sang de notre soeur que nous honorons comme un
ange du ciel. Pour moi, c'est en ce jour funeste, qui lui a
fourni l'occasion de montrer sa vertu, que j'ai senti l'aurore
de la grâce se lever dans mon cœur. Qu'en pensez-vous,
Orontius ?
- Et moi aussi, depuis l'instant où je la traitai avec
tant de cruauté et où elle me donna un si bel
exemple d'héroïsme chrétien, je sentis la
main de Dieu s'appesantir sur moi, et je marchai vers la
pénitence et le pardon.
- Il en est toujours ainsi, conclut Fabiola ; l'exemple de
Notre-Seigneur a fait des martyrs, et l'exemple des martyrs nous
conduit au Seigneur. Leur sang adoucit nos cœurs, seul il les
purifie et crie à Dieu miséricorde ; le sang d'un
Dieu nous l'obtient. Puisse l'église, en ses jours de
paix et de victoire, n'oublier jamais ce qu'elle doit à
l'époque des martyrs ! Pour nous, nous lui devons la vie
spirituelle. Que ceux qui ne la connaîtront que par la
tradition en retirent les mêmes fruits de
miséricorde et de grâce.
Ils s'agenouillèrent et prièrent longtemps et en
silence devant ces précieuses reliques.
Puis ils se séparèrent pour ne plus se revoir
ici-bas.
Après un certain nombre d'années qui
s'écoulèrent pour Orontius dans toute la ferveur
de la pénitence, un petit tertre verdoyant dans le vallon
proche de Gaza, à l'ombre des palmiers, marqua l'endroit
où il dormait le sommeil du juste.
Fabiola consacra aussi les longues années d'une sainte
vie aux oeuvres de charité et alla reposer en paix
à côté d'Agnès et de Miriam.
(1) On appelait
ainsi les religieux qui vivaient en
communauté. |
|
(2) La confession
se faisait en particulier avant la réception du
baptême. (Voyez Bingham, Origines, XI, VIII,
§ 11) |