CORONA (στέφανος, κορωνίς)

Couronne ou guirlande faite de fleurs, de feuilles, etc, réelles ou artificielles, portée comme ornement sur la tête, mais non pas comme une couronne, dans le sens que nous attachons à ce mot, c'est-à-dire comme emblème de la royauté ; car chez les anciens, un diadème (diadema) tenait la place de la couronne moderne. Il y avait une grande variété de ces couronnes : on les distinguait par la différence de la matière ou par le dessin sur lequel elles étaient faites, et on les employait principalement comme récompense de la vertu publique ou comme ornement dans les fêtes. C'est sous ces deux divisions que les principales coronae sont énumérées dans les paragraphes qui suivent.


  1. Corona triumphalis. Couronne triomphale ; il y en avait trois espèces différentes.

    (1). Guirlande de feuilles de laurier sans les baies (Aul. Gell. V, 6, 1 ; Plin. H.N. XV, 39), portée par le général pendant son triomphe, ainsi qu'on le voit dans le buste ci-joint d'Antonin, d'après une pierre gravée. Comme on estimait que c'était la plus honorable des trois, on l'appelait expressément laurea insignis (Liv. VII, 13).
(2). Couronne d'or, imitant les feuilles du laurier, et tenue au-dessus de la tête du général pendant le triomphe par un officier public (servus publicus, Juv. X, 41), nommé à cet effet, et de la manière qu'on voit dans la gravure ci-jointe, prise d'un bas-relief de l'arc de Titus, qui représente cet empereur sur son char de triomphe, dans le triomphe qui lui mérita la conquête de Jérusalem, et une figure ailée de la Victoire, faisant poétiquement l'office de l'agent public.


(3). Couronne d'or, de valeur considérable, mais simplement envoyée au général auquel avait été décerné un triomphe (Plut. Paul. Aemil. 34), par les différentes provinces ; aussi est-elle expressément nommée provincialis (Tertull. Coron. Mil. 13).
  1. Corona ovalis. Guirlande de myrte portée par un général qui avait obtenu l'honneur d'une ovation (Aul. Gell. V, 6 ; Festus, s.v.)
  1. Corona oleagina. Couronne de feuilles d'olivier, donnée aux soldats aussi bien qu'à leurs chefs, et récompense de ceux dont le concours ou les avis avaient fait obtenir un triomphe, quoiqu'ils ne fussent pas eux-mêmes présents à l'action (Aul. Gell. V, 6).
  1. Corona obsidionalis. Couronne de gazon et de fleurs sauvages, d'où son autre nom de graminea (Liv. VII, 37). Elle était faite sur le lieu où une armée romaine avait été assiégée, et offerte par cette armée au chef qui était venu à son secours et l'avait délivrée. Quoiqu'aucune n'eût moins de prix par elle-même, elle était regardée comme la plus honorable de toutes les récompenses militaires et la plus difficile à obtenir (Aul. Gell. V, 6 ; Festus, s.v. ; Plin. XXII, 4).
  1. Corona civica. Couronne civique, guirlande de feuilles de chêne avec les glands, offerte au soldat romain qui, dans une bataille, avait sauvé la vie d'un camarade et tué son adversaire. Dans l'origine, elle était offerte par le camarade délivré ; plus tard, elle le fut par l'empereur (Plin. H.N. XVI, 3 ; Aul. Gell. V, 6 ; Tac. Ann. XV, 12). La gravure ci-jointe est prise d'une peinture de Pompéi, et représente un jeune guerrier orné de la couronne civique.
  1. Corona muralis. La couronne murale, décorée des tours et des tourelles d'un rempart, et donnée comme prix de la valeur au soldat qui escalade le premier les murs d'une ville assiégée (Liv. XXVI, 48 ; Aul. Gell. V, 6). On connaît le caractère de cette couronne par les représentations de la déesse Cybèle, à qui elle est attribuée par les poètes et les artistes comme symbole de sa suprématie sur les cités de la terre (Lucret. II, 607-610 ; Ov. Fast. IV, 219). Le specimen est pris d'un bas-relief trouvé dans un sépulcre près de Rome.
  1. Corona castrensis ou vallaris. Couronne d'or ornée de palissades (vallum) et donnée au soldat qui les avait escaladées le premier et qui avait frayé un chemin pour pénétrer dans le camp de l'ennemi (Aul. Gell. V, 6 ; Val. Max. I, 8, 6). Il n'en existe pas de specimen authentique.
  1. Corona classica, navalis ou rostrata. Couronne d'or faite pour imiter les éperons des vaisseaux (rostra) et offerte à l'amiral qui avait détuit une flotte ennemie, et peut-être aussi au matelot qui avait été le premier à l'abordage d'un vaisseau ennemi (Paterc. II, 81 ; Virg. Aen. VIII, 684 ; Plin. H.N. XVI, 3 et 4 ; Aul. Gell. V, 6). Elle est représentée dans la gravure ci-jointe sur la tête d'Agrippa, d'après une médaille de bronze.
  1. Corona radiata. Couronne décorée tout autour de rayons en saillie, et attribuée proprement aux dieux ou aux héros déifiés ; de là vint qu'elle fut généralement prise par les emperereurs romains ou par quelques autres personnes qui se paraient des attributs de la divinité (Stat. Theb. I, 28). On en voit le caractère dans la gravure ci-jointe, où elle est portée par Auguste, d'après une des pierres précieuses de Marlborough.
  1. Corona pactilis, plectilis ou plexilis. Guirlande de fête, portée simplement comme ornement sur la tête et composée de fleurs naturelles avec les feuillles attachées aux tiges par lesquelles on les entrelaçait, comme on le voit dans la gravure ci-jointe, qui représente la personnification du Printemps d'après un bas-relief en marbre (Plin. H.N. XXI, 8 ; Aul. Gell. XVIII, 2 ; Plaut. Bacch. I, 1, 37).
  1. Corona sutilis. Guirlande d'ornement pour la tête, faite de fleurs détachées de leur tige et cousues ensemble. C'était celle que portaient les Salii dans leurs fêtes, et d'abord elle était composée de fleurs de tout genre ; mais plus tard elle le fut seulement de roses : on en choisissait les plus belles feuilles et on les cousait ensemble (Plin. H.N. XXI, 8). Elle est représentée dans la figure ci-jointe sur la tête d'une impératrice romaine, d'après une pierre gravée.
  1. Corona natalitia. Guirlande de laurier, de lierre ou de persil, que les Romains avaient l'habitude de suspendre à la porte d'une maison où un enfant venait de naître, de la même façon que les Hollandais y mettent une rosette de ruban en pareille occasion (Bartholin, de Puerp. p.127 ; cf Juv. Sat. IX, 85).
  1. Corona longa. Longue guirlande ou feston de fleurs pendant sur le cou et sur la poitrine, de la même façon que le rosaire, qui en tire probablement son origine, puisque le rosaire est encore appelé la corona par les Italiens modernes ; mais chez les Grecs et les Romains il semble avoir été plus particulièrement employé comme ornement de fête pour décorer les maisons ainsi que les personnes (Ov. Fast. IV, 738 ; Cic. Leg. II, 24).

La gravure ci-jointe est prise d'une sculpture en ivoire de la galerie de Florence ; on suppose qu'ellle représente Marc-Antoine dans le costume d'un compagnon de Bacchus : c'est trait pour trait la description que Cicéron fait de Verrès avec une couronne sur la tête et une guirlande au cou : Ipse autem coronam habebat unam in capite, alteram in collo (Verr. II, 5, 11).

  1. Corniche, ou membre saillant dont on se servait pour décorer les murs, soit pour en couronner le haut, soit pour faire des divisions d'ornement sur la surface (Vitruv. V, 2 ; VII, 3, 4 ; Plin. H.N. XXXVI, 59).
  1. Membre particulier de la corniche qui couronne un entablement au-dessous du toit ; il est encore appelé par les architectes la couronne.
    C'est le membre particulier qui a une face large et plate ; il est placé entre la sima recta au-dessus et le cymatium ou filet au-dessous, du milieu duquel il s'avance avec hardiesse (Vitruv. IV, 3, 6). Les architectes romains, différents en cela des nôtres, semblent n'avoir pas eu de mots pour exprimer collectivement tous les membres dont une corniche est composée ; par conséquent, ils ne regardaient pas la corniche comme une partie de l'entablement qui formât un tout, mais comme plusieurs membres distincts, qui sont toujours énumérés séparément, tels que sima, cymatium in summo, corona, cymatium in imo : toutefois Hesychius se sert du grec korônis dans un sens collectif, équivalent à notre mot corniche.