MANES
Ombres des morts. Les anciens eux-mêmes paraissent avoir attaché à ce mot une idée vague et mal définie, de sorte qu'il n'est pas aisé de déterminer d'une manière précise son sens véritable. Voici pourtant l'interprétation qui semble donner le résultat le plus satisfaisant. On croyait qu'à la dissolution des corps, les âmes des hommes étaient changées en esprits, qui continuaient à exercer uns influence sur leurs descendants ; les unes devenaient des génies bienfaisants, appelés Lares, les autres des esprits malfaisants, nommés Larvae. Mais comme les survivants ne pouvaient savoir lequel de ces deux sorts avait été assigné aux âmes de leurs parents morts, ils faisaient usage de l'expression manes comme d'un mot indéterminé, qui ne désignait pas l'une des deux conditions à l'exclusion de l'autre, et les comprenait toutes deux. Cependant la répugnance superstitieuse des anciens pour tout ce qui sonnait mal, pour tout ce qui était de mauvais présage, les conduisait généralement à attacher à ce mot une idée favorable. Eu conséquence, dans le plus grand nombre de cas, il est employé pour désigner des génies bienfaisants, qui sont supposés résider sous terre, dans l'empire des morts, et auxquels il est permis de revenir trois fois par an sur la terre visiter leur postérité avec les traits et le costume qu'ils portaient pendant la vie. Ainsi, dans le Virgile du Vatican, l'esprit d'Anchise, quand il rencontre Enée aux enfers, est représenté en costume troyen ; et dans le même ouvrage, Hector, quand il apparait à Enée, porte le même vêtement, et les mots Hectoris manes sont écrits sur la figure. Dans ce cas, aussi bien que dans d'autres, ce mot manes est employé pour désigner l'esprit d'un individu ; on s'en sert aussi pour désigner les régions souterraines où habitaient les manes, que l'on regardait aussi comme des divinités inférieures ; c'est à cause de cela que, dans les inscriptions funéraires, ils portent presque toujours le titre de Dii manes (Apul. de Deo Socr. p. 689 ; Augustin. C.D. IX, 11. Cf. Serv. ad Virg. Aen. III, 63 ; Festus, s.v.; Isidor. Orig. VIII, 11, 100 ; Yirg. Aen. IV, 427 ; Georg. I, 243).
Illustration complémentaire | |
L'ombre d'Anchise aux Enfers prend congé d'Enée et de la Sibylle devant les portes de corne et d'ivoire |