VII - Fragments
Carte Spruner (1865) |
1. Cinéas parle d'une ville du nom de Dodone en Thessalie, d'où le hêtre fatidique et l'oracle de Jupiter auraient été plus tard transportés en Epire
(Etienne de Byzance, au mot Dôdonê).
2 La ville de Scotussa, dans la Pélasgiotide, fut le siège primitif de l'oracle ; mais quelques furieux mirent le feu à l'arbre sacré et l'oracle fut
transporté à Dodone. Comme celui d'Ammon en Libye, il ne s'exprimait point par des mots, mais au moyen de certains signes. Peut-être le vol des trois colombes
était-il sujet à quelque anomalie étrange et est-ce là ce que les prêtresses observaient et ce qui leur dictait leurs prédictions. Mais d'un autre
côté l'on prétend que, dans la langue des Molosses et des Thesprotes, le mot peleiai signifie vieilles femmes et le mot peleioi vieillards, de
sorte que les fameuses péléiades ou colombes pourraient bien ne pas avoir été des oiseaux, mais simplement les vieilles femmes chargées de desservir le
temple. (Exc. Vat.)
3. Dans la langue des Thesprotes et des Molosses vieilles femmes se dit peleiai et vieillards peleioi, et ces mots se retrouvent avec le même sens dans la langue des
Macédoniens, dans le nom de Péligones par exemple qu'ils donnent à leurs magistrats et qui équivaut à celui de Gérontes (Anciens) que les
Lacédémoniens et les Massaliotes donnent aux leurs. Or, c'est de là, dit-on, que serait venue la fable des colombes ou péléiades du chêne de Dodone
(Exc. Vatic.)
4. On dit souvent [d'un bavard] : c'est «le chaudron de Dodone». Voici quelle est l'origine de ce proverbe. On voyait dans le temple de Dodone une chaudière
dédiée par les Corcyréens et servant de piédestal à une statue armée d'un fouet d'airain. Ce fouet se composait de trois chaînes auxquelles
pendaient des osselets, et, pour peu que le vent les mît en mouvement, ces osselets venaient frapper contre le vase et produisaient un son tellement prolongé qu'on avait le temps
de compter jusqu'à quatre cent dans l'intervalle de la première à la dernière vibration. De là cette autre forme du même proverbe : «Ecoutez le
fouet des Corcyréens». (Exc. Pal.)
5. La Paeonie, située à l'E. des pays que nous venons de décrire et à l'O. des montagnes de la Thrace, s'étend au N. de la Macédoine et donne
accès en ce pays, mais par une route qui, après avoir traversé les villes de Gortynium et de Stobi, aboutit [au S. à un étroit défilé], au fond
duquel coule le fleuve Axius, ce qui rend l'entrée de la Macédoine aussi difficile du côté de la Paeonie qu'elle peut l'être du côté de la
Grèce, où le cours du Pénée, dans la vallée de Tempé, lui sert également de boulevard. Ajoutons que la Paeonie touche à la
frontière méridionale des Autariates, des Dardaniens et des Ardiaeens et qu'elle se prolonge même [de ce côté] jusqu'au Strymon. (Exc. Vatic.)
6. L'Haliacmon va se jeter dans le golfe Thermaeen. (Exc. Vat.)
7. L'Orestide est une contrée spacieuse, de laquelle part une grande chaîne de montagnes qui s'étend jusqu'au Corax en Aetolie, voire même jusqu'au Parnasse, et que
bordent, indépendamment des Orestes et des Tymphaeens, les différents peuples grecs établis en dehors de l'isthme sur les flancs du Parnasse, de l'Oeta et du Pinde. Prise
dans son ensemble, cette chaîne de montagnes porte la dénomination de mont Poeum ; mais elle se divise en plusieurs parties, dont chacune a son nom. On assure que de ses sommets
les plus élevés on découvre à la fois la mer Egée et les golfes Ambracique et Ionien. Pour moi, j'ai idée qu'on exagère, d'autant que le mont
Ptéléum, qui entoure le golfe d'Ambracie et qui se prolonge d'un côté jusqu'à la mer de Corcyre et de l'autre jusqu'à la mer de Leucade, ne laisse pas
que d'avoir une élévation considérable. (Exc. Vatic.)
8. Corcyre était anciennement florissante et en possession d'une puissante marine ; mais de terribles guerres et le gouvernement de ses tyrans la ruinèrent, et, plus tard, quand
les Romains l'eurent appelée de nouveau à la liberté, elle ne sut pas en faire un louable usage et s'attira ce mot injurieux devenu proverbe : «Corcyre est libre ;
ch... où tu veux». (Exc. Palat.)
9. Il existe un proverbe injurieux qui montre à quel degré d'abaissement était tombée la pauvre Corcyre après ses longues guerres. (Exc. Vatic.)
10. De toute l'Europe il ne nous reste plus à décrire que la Macédoine avec la partie adjacente de la Thrace jusqu'à Byzance, et la Grèce avec les îles
qui en dépendent. Par le fait, la Macédoine elle-même appartient à la Grèce, mais, pour nous conformer à la nature des lieux et à la
configuration du pays, nous avons cru devoir la distraire du reste de la Grèce pour la réunir de préférence à la partie de la Thrace qui lui est contiguë
et qui s'étend jusqu'à l'entrée de l'Euxin et à la Propontide. - Un peu après, Strabon recule les limites de la Macédoine jusqu'à
Cypsèles et à l'embouchure de l'Hèbre ; puis il construit un vaste parallélogramme dans lequel la Macédoine se trouve comprise tout entière. (Exc.
Vatic.)
11. La Macédoine a pour limites, au couchant, le littoral de l'Adriatique ; au levant, une ligne parallèle à la côte et qui n'est autre que le méridien passant
par les bouches de l'Hèbre et la ville de Cypsèles ; au nord, une autre droite qu'on peut concevoir passant par les monts Bertiscus, Scardus, Orbélus, Rhodope et Hoemus,
car ces montagnes ne sont à proprement parler qu'une même chaîne qui va directement de l'Adriatique à l'Euxin et forme de tout ce qu'elle laisse au midi
(c'est-à-dire de la Thrace et de la Macédoine, de l'Epire et de l'Achaïe) une immense péninsule ; enfin au sud la voie Egnatienne, la partie du moins qui est comprise
entre Dyrrhachium et Thessalonique et dont la direction générale se maintient au levant : d'où il suit que la forme de la Macédoine se rapproche autant que possible
de celle d'un parallélogramme. (Exc. Palat.)
12. La Macédoine actuelle s'appelait primitivement Emathie et cet autre nom lui est venu de Macédon, l'un des anciens chefs du pays. Il y avait aussi une ville appelée
Emathie sur le bord de la mer. Sa population dans le principe se composait d'Epirotes et d'Illyriens, mais surtout de Bottiéens et de Thraces. Les Bottiéens, originaires de
Crète, à ce qu'on croit, devaient leur nom à Botton, qui était le chef qui les avait amenés ; quant aux Thraces, ils se divisaient en plusieurs tribus : les
Pières, qui occupaient tout le canton nommé Piérie et les environs de l'Olympe, les Paeons qui habitaient les bords de l'Axius et le district appelé du nom de ce
fleuve Amphaxitide ; les Edons enfin et les Bisaltes qui possédaient le reste du pays jusqu'au Strymon. De ces deux derniers peuples, le second ne portait pas d'autre nom que celui de
Bisaltes ; mais, parmi les Edons, on distinguait les Mygdons, les Odons et les Sithons. Toutes ces tribus subirent le joug des Argéades et des Chalcidiens de l'Eubée. Ce fut
surtout dans la Sithonie que se répandirent les Chalcidiens de l'Eubée : ils y bâtirent jusqu'à trente villes. Plus tard, il est vrai, ils s'en virent
expulsés, mais ils se rassemblèrent alors pour la plupart dans la seule ville d'Olynthe. On les appelait habituellement les Chalcidiens de la Thrace. (Exc. Vatic.)
12. L'ethnique de Botteia se forme avec l'iota (Bottiaios), témoin Strabon dans son septième livre. Mais le nom même avait été emprunté du
Crétois Botton. (Etymolog. Magn., p. 206, 6.)
13. C'est le Pénée qui sépare de la Thessalie et de la Magnésie la Macédoine inférieure ou maritime et l'Haliacmon qui sépare celle-ci de la
Haute-Macédoine ; puis le même fleuve, l'Erigon, l'Axius et d'autres encore séparent la Haute-Macédoine de l'Epire et de la Paeonie. (Exc. Vatic.)
14. Le littoral de la Macédoine se divise en deux parties, l'une qui court au S. depuis le fond du golfe Thermaeen et la ville de Thessalonique jusqu'au promontoire Sunium, et l'autre
qui se prolonge vers l'E. jusqu'à la Chersonnèse de Thrace, ces deux lignes faisant ensemble un angle qui correspond au fond du golfe Thermaeen. De ces deux parties de la
côte de Macédoine ainsi dirigées en sens contraires la première que nous avons indiquée est aussi celle que nous décrirons d'abord. Or, remontons-la
à partir du cap Sunium, nous voyons se déployer au-dessus, dans l'intérieur, l'Attique et la Mégaride jusqu'au golfe Crissaeen ; puis vient la côte de
Béotie qui longe l'Eubée, tandis que le reste du pays se dirige au couchant parallèlement à l'Attique. Strabon fait remarquer plus loin que la voie Egnatienne qui
part du golfe Ionien aboutit aussi à Thessalonique. (Exc. Vatic.)
15. De ces différentes bandes ou zones parallèles nous prendrons d'abord celle qui se trouve comprendre le cours inférieur du Pénée et de l'Haliacmon. Le
Pénée descend du Pinde et traverse la Thessalie de l'0. à l'E. Il baigne les anciennes villes des Lapithes, quelques-unes aussi des Perrhèbes, et finit par atteindre
Tempé, grossi des eaux de plusieurs rivières et notamment de l'Europus. Cette rivière est la même que le poète désigne sous le nom de Titaresius,
apparemment parce qu'elle prend sa source au mont Titarius, qui se rattache à l'Olympe juste au point où cette chaîne commence à former la limite entre la
Macédoine et la Thessalie. Sous le nom de Tempé l'on désigne une vallée étroite comprise entre l'Olympe et l'Ossa. Une fois engagé dans ce
défilé, le Pénée court encore l'espace de quarante stades, ayant à sa gauche l'Olympe, qui est la plus haute montagne de toute la Macédoine, et
à sa droite l'Ossa, qui se trouve encore plus près peut-être de son embouchure. A droite également du Pénée et non loin de ses bouches, est bâtie
Gyrtôn, ville à la fois perrhébique et magnète et ancienne résidence des rois Pirithoüs et Ixion. Puis à une centaine de stades de Gyrtôn est
la ville de Crannôn. On pense que, dans le passage de l'Iliade (XIII, 301) tô men ar'ek Thrêkês (De même que ces deux divinités quand elles
s'élancent du fond de la Thrace, etc.), les Ephyres et les Phlégyes ne sont autres que les habitants de Crannôn et de Gyrtôn. - De l'autre côté du
Pénée est la Piérie. (Exc. Valic.)
16. Le fleuve Pénée qui coule dans la vallée de Tempé descend du Pinde, traverse toute la Thessalie, notamment le pays des Lapithes et celui des Perrhèbes,
reçoit l'Europus, qui est la même rivière que le Titaresius d'Homère, puis sert de séparation entre la Macédoine au N. et la Thessalie au S. Quant
à l'Europus, il prend sa source dans le Titarius, montagne contiguë à l'Olympe. L'Olympe, comme on sait, appartient à la Macédoine, tandis que l'Ossa, comme le
Pélion, appartient à la Thessalie. (Exc. Palat.)
17. Au pied de l'Olympe, sur les bords du Pénée, s'élève Gyrtôn, ville à la fois perrhébique et magnète, et ancienne résidence des
rois Pirithoüs et Ixion ; et à une centaine de stades de Gyrtôn, est la ville de Crannôn. Or, on s'accorde à penser que, dans le passage de l'Iliade
so'ri,) tô men ar'ek Thrêkês, le nom d'Ephyres désigne les habitants de Crannôn et celui de Phlégyes les habitants de Gyrtôn. (Exc.
Pal.)
18. Comme le dit Strabon, la ville de Crannôn est à 100 stades de Gyrtôn. (Etienne de Byzance, au mot Krannôn).
19. Homolion, ville située en Macédoine dans le canton de Magnésie : Strabon, 7e livre. (Etienne de Byz., au mot Omolion)
20. La ville de Dium, au pied de l'Olympe, n'est pas située sur le rivage même du golfe Thermaeen, il s'en faut de sept stades environ. Elle a dans son voisinage le bourg de
Pimplée, où résidait Orphée. (Exc. Pal.)
21. Dium est au pied de l'Olympe et a dans son voisinage le bourg de Pimplée, le même où, suivant Strabon, résidait Orphée. Strabon ajoute que cet imposteur,
Cicone d'origine, après avoir vécu des métiers de musicien, de devin et de mystagogue ambulant, se crut appelé à de plus hautes destinées, devint chef
de parti, acquit de l'ascendant et fut au moment de voir tout le pays accepter son autorité, mais périt sous les coups de plusieurs conjurés qui prévoyaient de sa
part quelque piège ou quelque violence. - Ici auprès se trouve aussi Libèthres. (Exc. Vatic.)
22. Les anciens devins exerçaient en même temps le métier de musiciens. (Epit.)
23. Après Dium, viennent les bouches de l'Haliacmon, puis Pydna, Méthone, Aloros, le fleuve Erigon et le fleuve Ludias. Le fleuve Erigon prend sa source chez [les Deuriopes]
Triclares, traverse le pays des Orestes et le territoire de Pella, laisse cette ville à gauche et se réunit à l'Axius. Quant au Ludias, il passe à Pella même
et peut être aisément remonté jusque-là depuis la mer, c'est-à-dire sur un espace de 120 stades. Méthone, située dans une position
intermédiaire entre Pydna et Aloros, est à 40 stades de la première et à 70 stades de la seconde. Aloros occupe le fond même du golfe Thermaeen et passe pour
appartenir à la Bottiée, tandis que Pydna demeure attribuée à la Piérie. Pella est située dans la basse Macédoine, demeure primitive des
Bottiéens. On en avait fait naguère le trésor de la Macédoine. Philippe, qui y avait été élevé, l'agrandit considérablement. Elle
a sa citadelle bâtie dans le lac Ludias. Ce lac, d'où sort le fleuve de même nom, est alimenté par un bras dérivé de l'Axius. L'Axius, à son tour,
débouche dans la mer entre Chalastra et Therma. Sur ses bords on remarque une place dont l'assiette est très forte ; on la nomme aujourd'hui Abydôn, mais c'est bien
l'antique Amydôn que cite Homère et qui avait envoyé ces braves Paeoniens au secours de Troie (Iliade, II, 849) :
«Ils viennent de la lointaine Amydon et des bords du majestueux Axius».
C'est bien la même ville aussi que détruisirent les Argéades. (Exc. Vatic.)
24. Les eaux de l'Axius sont troubles et pourtant il est fait mention dans Homère des «belles eaux de l'Axius», mais peut-être s'agit-il là des eaux de la source
Aea, qui se déversent dans l'Axius et qui sont en effet merveilleusement pures et limpides, auquel cas le passage d'Homère, tel qu'on le lit aujourd'hui, serait évidemment
altéré. Passé l'Axius, et àune distance de 20 stades, on rencontre Echédoros, puis, 40 stades plus loin, ou atteint Thessalonique, ville fondée par
Cassandre, et, avec Thessalonique, la voie Egnatienne. Le nom que Cassandre donna à cette ville nouvelle était celui de sa femme, laquelle était née de Philippe,
fils d'Amyntas ; et il la peupla des habitants de vingt-six petites villes de la Cruside et des bords du golfe Thermaeen, qu'il avait détruites, et qui se trouvèrent ainsi fondues
en une seule cité. Thessalonique est la capitale de la Macédoine actuelle. Du nombre des villes réunies étaient Apollonie, Chalastra, Therma, Garescus, Aenea et
Cissus. A propos de Cissus, qui empêcherait de rattacher à cette ville «le Cisséen» dont parle Homère (Iliade, XI, 222) et qui avait
élevé le jeune Iphidamas ? «Un Cisséen l'avait nourri...» (Exc. Vat.)
25. Passé Dium, on arrive à l'Haliacmon, fleuve qui se jette dans le golfe Thermaeen. Puis, à partir de ce fleuve, commence la côte de Piérie, qui
s'étend au N. le long du golfe jusqu'à l'embouchure de l'Axius. On y remarque la ville de Pydna, bientôt suivie des villes de Méthone et d'Aloros, comme celles- ci le
sont des deux rivières de l'Erigon et du Ludias. On peut remonter le Ludias jusqu'à Pella même, à 120 stades de la côte. Méthone est à 40 stades
de Pydna et à 70 d'Aloros. Pydna, avons-nous dit, appartient à la Piérie. Quant à Aloros, elle dépend déjà de la Bottiée. C'est dans la
plaine de Pydna que les Romains remportèrent sur Persée cette victoire qui mit fin à la monarchie macédonienne, et, dans la plaine de Méthone, en faisant le
siège de cette place, que Philippe, fils d'Amyntas, eut l'oeil droit crevé par un trait de catapulte. (Exc. Palat.)
26. Pella ne fut longtemps qu'une très petite ville, mais Philippe qui y avait été élevé l'accrut considérablement. Elle a pour couvrir ses approches
un lac, d'où sort le fleuve Ludias, et qu'alimente un bras dérivé de l'Axius. Puis vient l'Axius même, qui forme la séparation entre la Bottiée et
l'Amphaxitide, et qui, après avoir reçu l'Erigon, vient déboucher [dans le golfe Thermaeen] entre Chalastra et Therma. Sur les bords de l'Axius s'élève une
place qu'Homère appelle Amydôn, et d'où il fait venir ces vaillants Paeoniens qui figurent parmi les auxiliaires de Troie (Iliade, II, 849) :
«Ils ont été amenés de la lointaine Amydôn, des bords mêmes du majestueux Axius».
Suit un vers ainsi conçu :
«De l'Axius dont les belles eaux couvrent et remplissent Aea»
Or les eaux de l'Axius sont troubles et il n'y a de belles eaux dans le pays que celles d'une source qui s'échappe d'Amydôn pour venir se jeter dans le fleuve ; on propose donc la correction que voici,
«De l'Axius, qui se grossit de ces belles eaux d'Aea»,
d'autant que ce n'est pas l'Axius qui se déverse dans la fontaine Aea, mais bien celle-ci qui se déverse dans l'Axius. (Exc. Palat.)
27. A l'Axius succède la ville de Thessalonique, l'ancienne Therma. Cassandre, son fondateur, lui donna le nom de sa propre femme, née de Philippe, fils d'Amyntas, et lui annexa
toutes les petites villes des environs, Chalastra, Aenea, Cissus et plusieurs autres. C'est de cette ville de Cissus, tout porte à le supposer, qu'était le héros Iphidamas
dont parle Homère et qu'il nous montre élevé par les soins du Cisséen, son aïeul, en Thrace, ou, comme nous dirions aujourd'hui, en Macédoine. (Exc.
Palat.)
28. C'est par ici également qu'il faut chercher le mont Bermius, demeure primitive des Briges, peuple thrace, dont une partie passa en Asie et y échangea son nom contre celui de
Phryges ou Phrygiens. Après Thessalonique, la côte du golfe Thermaeen continue jusqu'au promontoire de Canastreeum, véritable presqu'île qui fait face à celle
de Magnésie : la presqu'île même se nomme Pallène, et l'isthme qui n'a que cinq stades de largeur est coupé par un fossé. Sur cet isthme
s'élève une ville, ancienne colonie de Corinthe et bien connue sous le nom de Potidée, mais appelée aujourd'hui Cassandria du nom de ce même roi Cassandre qui
l'a relevée de ses ruines. Le périple de cette presqu'île est de 750 stades. Plus anciennement encore, toute cette contrée se serait nommée Phlégra et
aurait été occupée, suivant certains mythographes, par une race de géants, ou, suivant une, tradition plus vraisemblable, par un peuple barbare et impie, qu'Hercule
extermina, comme il revenait de prendre Troie et qu'il traversait ces parages pour regagner ses foyers. Enfin les mêmes lieux auraient été témoins de la fureur
sacrilège des femmes Troyennes, lorsqu'elles mirent le feu aux vaisseaux grecs, pour n'avoir pas à servir les femmes de leurs nouveaux maîtres. (Exc. Vatic.)
29. La ville de Bertha est située sur les dernières pentes du mont Bermius. (Ibid.)
30. La presqu'île de Pallène, sur l'isthme de laquelle est située la ville de Cassandria (l'ancienne Potidée), s'appelait primitivement Phlegra et avait eu pour
premiers habitants les géants de la fable, race violente et impie, exterminée par Hercule. Elle compte aujourd'hui quatre villes : Aphytis, Mendé, Scioné et
Sané. (Ibid.)
31. Olynthe était à soixante-dix stades de Potidée. (Exc. Vatic.)
32. Mécyperne, port et arsenal d'Olynthe, est située dans le golfe Toronéen. (Epit.)
33. Près d'Olynthe, dans un fond, est le lieu appelé Cantharolethron. On le nomme ainsi parce que tout canthare ou escarbot (et il y en a beaucoup dans les environs) tombe mort du
moment qu'il y pénètre. (Ibid.)
34. Au delà de Cassandria, la côte du golfe Toronique continue jusqu'au Derris, autre cap qui s'avance en face du Canastraeum, et forme avec lui le susdit golfe. A l'E. de ce cap
Derris, et juste à la même hauteur s'avance la double pointe de l'Athos et c'est dans l'intervalle que s'étend le golfe Singique, ainsi nommé de l'ancienne ville de
Singus, dont on voit encore les ruines sur ses bords. Au delà de Singus, sur l'isthme même de l'Athos, s'élève une autre ville, Acanthe, qui doit son origine à
des colons Andriens et dont on donne souvent le nom au golfe lui-même. (Exc. Vatic.)
35. En face du cap Canastrum, qui termine la presqu'île de Pallène, et dans le voisinage du Côphos-limén, s'avance le promontoire Derris : le golfe compris entre les
deux caps est le golfe Toronaeen. A l'E., maintenant, du Derris s'avance la pointe du mont Athos, qui termine à son tour le golfe Singitique. La mer Egée nous offre donc six
golfes se succédant du S. au N. et espacés entre eux comme il suit : le golfe Maliaque, le golfe Pagasitique, le golfe Thermaeen, le golfe Toronaeen, le golfe Singitique et le
golfe Strymonique ; et six caps, le Posidium entre les golfes Maliaque et Pagasitique ; au N. de celui-ci le Sépias; puis le Canastrum à l'extrémité de la
presqu'île de Pallène, le Derris ensuite, enfin les deux pointes de l'Athos, le Nymphaeum sur le golfe Singitique et l'Acrathus sur le golfe Strymonique, avec le mont Athos entre
deux et l'île de Lemnos à l'E. de l'Athos. Au N. de ladite montagne, le golfe Strymonique est terminé par la ville de Néapolis. (Epit.)
36. Acanthe est une ville maritime située dans le golfe Singitique, près du fossé de Xerxès. L'Athos compte cinq villes, Dium, Cléones, Thyssus, Olophyxis et
Acrothoüs, cette dernière dans la région même du sommet. L'Athos est une montagne en forme de mamelon, mais très haute et très pointue, de sorte que les
habitants du sommet voient le soleil se lever trois heures plus tôt que les habitants de la côte. Le périple de la presqu'île depuis la ville d'Acanthe jusqu'à
celle de Stagire, où est né Aristote, est de 700 stades. De Stagire dépendent le port et l'îlot de Capros ; puis viennent les bouches du Strymon, suivies de
Phagrès, de Galepsus et d'Apollone, qui toutes trois méritent le nom de villes ; enfin l'embouchure du Nestus, fleuve qui forme la frontière entre la Macédoine et la
Thrace : du moins en était-il ainsi du vivant de Philippe et de son fils Alexandre, qui avaient changé l'ancienne délimitation. Mais il y a encore d'autres villes sur le
golfe Strymonique, notamment Myrcinus, Argilus, Drabescus et surtout Daton, qui, indépendamment d'un territoire riche et fertile, possède des chantiers de construction navale et
d'abondantes mines d'or, si bien que son nom est passé en proverbe et qu'on dit communément un Daton de biens : c'est le proverbe Agathides agathôn sous une autre
forme. (Epit)
37. Il y a d'abondantes mines d'or à Philippes, ville moderne bâtie sur l'emplacement de Crénides, dans le voisinage du mont Pangée. Le mont Pangée contient
lui-même des mines d'or et d'argent, et, non seulement le mont Pangée, mais toute la contrée située au delà comme en deçà du Strymon
jusqu'à la Paeonie, où l'on prétend que 1a charrue rencontre encore souvent des pépites d'or. (Ibid.)
38. L'Athos est une montagne en forme de mamelon, mais si élevée que les habitants du sommet, qui commencent leurs labours avec le lever du soleil, ont déjà eu le
temps de se fatiguer quand le premier chant du coq éveille les populations de la côte. C'est dans cette presqu'île que la tradition fait régner le Thrace Tamyris,
connu comme un rival d'Orphée. On y voit les vestiges de l'ancien canal ou fossé d'Acanthe, creusé, dit-on, par Xerxès à travers l'isthme de l'Athos et
destiné à recevoir les eaux de la mer et à permettre aux vaisseaux le passage direct depuis le golfe Strymonique. Toutefois Démétrius de Scepsis doute qu'on
ait jamais navigué dans ce canal : il convient que sur un espace de dix stades l'isthme est formé de bonne terre facile à creuser, et qu'il a été
creusé là effectivement un canal de la largeur d'un plèthre ; mais il fait remarquer que l'isthme présente ensuite, sur une longueur d'un stade environ, un plateau
rocheux d'une grande élévation et que cet obstacle aura suffi à empêcher de pousser le canai jusqu'à la mer ou tout au moins de lui donner assez de profondeur
pour qu'il ait jamais été navigable. Il ajoute qu'Alexarque, fils d'Antipater, bâtit justement sur ce point Uranopolis, ville de trente stades de circuit. Quant à la
population primitive de la presqu'île, elle se composait de Pélasges de Lemnos, et se trouvait répartie dans les cinq petites villes de Cléones, d'Olophyxus,
d'Acrothoi, [de Dium et de Thyssos]. Après l'Athos commence le golfe Strymonique, et il se prolonge jusqu'à l'embouchure du Nestus, fleuve qui, du temps de Philippe et
d'Alexandre, formait la limite de la Macédoine. Pour plus d'exactitude cependant, nous dirons qu'il y a un promontoire, celui sur lequel est bâtie Apollonie, qui correspond
à la presqu'île de l'Athos et forme avec elle le golfe Strymonique. Une fois dans le golfe, la première ville qu'on rencontre après le port des Acanthiens est
Stagire, aujourd'hui déserte, mais qui compta naguère parmi les colonies. Chalcidiennes et vit naître Aristote ; puis vient le port de Stagire, Capros, avec une petite
île de même nom ; on atteint ensuite le Strymon, et, en remontant ce fleuve l'espace de vingt stades, on arrive à Amphipolis, ville bâtie sur le même emplacement
où les Athéniens avaient fondé leur colonie d'Ennea Hodi ou des Neuf voies. Suivent, enfin, Galepsus et Apollonie, villes ruinées jadis par Philippe.
(Exc. Vatic.)
39. De l'embouchure du Pénée à la ville de Pydna, Strabon compte [3]20 stades. Quant à la côte au delà du Strymon, elle nous offre Néapolis,
dépendance de Daton, et Daton elle-même avec ses riches campagnes, son lac, ses fleuves, ses chantiers et ses mines d'or si productives, ensemble de biens qui a rendu son nom
proverbial, car l'expression d'un Daton de biens équivaut à cet autre proverbe Agathides agathôn. Dans la contrée au delà du Strymon, la côte et
le canton de Daton sont occupés par les Odomantes, les Edones et les Bisaltes, peuples en partie autochthones, en partie originaires de la Macédoine, et sur lesquels
régnait Rhésus. On trouve aussi les Bisaltes dans l'intérieur au dessus d'Amphipolis et jusqu'à Héraclée : ils occupent là toute cette riche
vallée arrosée par le Strymon, lequel prend sa source chez les Agrianes du Rhodope sur les confins de la Parorbélie, district de la Macédoine, dont dépend
encore la vallée intérieure d'Idoméné, avec ses villes de Callipolis, d'Orthopolis, de Philippopolis et de Garescus. Bergé, gros bourg situé à
200 stades environ en amont d'Amphipolis, est encore sur le territoire des Bisaltes. En remontant, au N. d'Héraclée et par la rive droite du Strymon, jusqu'à ces gorges
étroites que franchit le fleuve, on a à gauche la Paeonie, le district de Doberus, et à droite toute la région du Rhodope et de l'Haemus. En deçà du
Strymon, sur le bord même du fleuve, est la ville de Scotusse ; celle d'Aréthuse est riveraine du lac Bolbé. On comprend toutes les populations riveraines de ce lac sous la
dénomination générale de Mygdons. L'Axius n'est donc pas le seul fleuve qui prenne sa source en Paeonie, le Strymon en vient également : il commence chez les
Agrianes, traverse le territoire des Maedes et des Sintes et forme dans sa partie inférieure la séparation entre les Bisaltes et les Odomantes. (Exc. Vatic.)
40. Le Strymon prend sa source chez les Agrianes, montagnards du Rhodope. (Epit.)
41. Les Paeoniens sont, pour certains auteurs, une simple colonie Phrygienne, et, pour d'autres, la souche même de cette grande nation. Mais alors ces derniers reculent les limites de la
Poeonie jusqu'à la Pélagonie et à la Piérie ; ils ajoutent que la Pélagonie s'appelait primitivement Orestie, qu'Asteropaeus, l'un des chefs que la Paeonie
envoya au secours d'Ilion, nous est donné, non sans vraisemblance, pour un fils de Pélégon et que les Paeoniens eux-mêmes sont quelquefois désignés sous
le nom de Pélagons. (Exc. Vatic.)
42. Astéropée, qu'Homère nous donne comme fils de Pélégon, passe dans l'histoire pour un prince originaire de la Paeonie en Macédoine ; et c'est
là, sans nul doute, ce qui l'aura fait qualifier par Homère de fils de Pélégon, les Paeoniens ayant eux-mêmes porté primitivement le nom de
Pélagons. (Epit.)
43. Par la même raison qu'ils appellent titanisme le chant sacré des Thraces, et cela, d'après l'invocation ou refrain de leurs peeans, les Grecs ont quelquefois
appelé Titans les Paeoniens. (Exc. Vatic.)
44. Les Paeoniens paraissent avoir occupé de tout temps une grande partie des pays qui composent la Macédoine actuelle ; c'est ainsi qu'on les voit très anciennement
assiéger Périnthe et dominer sur toute la Crestonie, sur toute la Mygdonide et sur le territoire des Agrianes jusqu'au mont Pangée. Au-dessus du golfe Strymonique,
au-dessus de la côte comprise entre la ville de Galepsus et l'embouchure du Nestus, se trouvent la ville et le territoire de Philippes. Cette ville, appelée primitivement
Crénides, ne fut longtemps qu'une localité sans importance ; mais elle s'est considérablement accrue depuis la défaite de Brutus et de Cassius. (Ibid.)
45. La ville actuelle de Philippes a commencé par s'appeler Crénides. (Epit.)
46. En face de cette partie de la côte sont les deux îles de Lemnos et de Thasos. Franchissons le canal de Thasos, au delà nous trouvons Abdère avec tous les souvenirs
mythologiques que ce nom réveille. C'était ici notamment que résidait Diomède, le roi des Thraces-Bistons. Quant au Nestus, son lit ne suffit pas toujours à
le contenir, il déborde parfois et couvre tout le pays de ses eaux. La première ville après Abdère est Dicée, qui se trouve bâtie au fond d'un golfe. Un
port en dépend et juste au-dessus règne le lac Bistonis, qui peut bien avoir deux cents stades de circuit. Comme la plaine est ici complètement basse et que son niveau est
même inférieur à celui de la mer, on a prétendu qu'Hercule, dans son expédition pour enlever les chevaux de Diomède, avait craint d'être
écrasé par la cavalerie de l'ennemi, qu'il avait alors creusé un fossé depuis la côte et procuré l'irruption dans la plaine des eaux de la mer, et qu'il
avait ainsi assuré sa victoire. L'emplacement du palais de Diomède se reconnaît aujourd'hui encore et le nom moderne de Cartera-comé en rappelle la forte et
inexpugnable assiette. Au delà du lac Bistonis, qui coupe ici et interrompt la côte, se succèdent les villes cicones de Xanthée, de Maronée et d'Ismarus. Cette
dernière, appelée actuellement Ismara, est tout près de Maronée, tout près aussi de l'ouverture du lac Ismaris, lequel se décharge à la mer par
un cours d'eau appelé [...]. Thasioncéphales est une petite localité située à peu près sur le même point. Au-dessus de cette partie de la
côte habitent les Sapéens. (Exc. Vatic.)
47. Topira se trouve dans le voisinage d'Abdère et da Maronée. (Ibid.)
48. Les Sinti, anciens habitants de l'île de Lemnos, étaient Thraces d'origine, de là vient que leur nom dans Homère a la forme Sinties.
«Des Sinties me recueillent...» (Epit.)
49. Passé le Nestus, à l'E., on rencontre la ville d'Abdère, ainsi nommée en mémoire du héros Abderos, qui périt dévoré par les
chevaux de Diomède. Vient ensuite la ville de Dicée, située non loin d'Abdère et juste au-dessous du grand lac Bistonis, puis celle de Maronée.
(Epit.)
50. La Thrace comprend en tout vingt-deux peuples et peut encore, malgré son extrême épuisement, mettre sur pied une force de 15,000 cavaliers et de 200,000 fantassins. A
Maronée succèdent la ville d'Orthagorie, l'âpre côte de Serrium, la petite place de Tempyra, qui dépend de l'île de Samothrace, et le Fossé [de
Salé], juste en face de Samothrace et d'Imbros, cette dernière île étant située, comme on sait, près de Samothrace, deux fois plus près que
Thasos. Du fossé de Salé part la plaine de Doriscus dont se servit Xerxès pour faire le dénombrement de son armée. Puis vient l'Hèbre avec
Cypsèles, à [2]20 stades en amont de l'embouchure. La limite de la Macédoine, suivant Strabon, arrivait jusque-là, quand elle fut conquise par les Romains une
première fois sur Persée et plus tard sur le faux Philippe. Paul-Emile, vainqueur et maître de Persée, réunit l'Epire à la Macédoine et partagea
le tout en quatre districts, celui d'Amphipolis, celui de Thessalonique, celui de Pella et celui de Pélagonie. Les peuples qui bordent l'Hèbre sont les Corpiles, les Brènes
en amont des Corpiles, et finalement les Besses, car on ne peut remonter le fleuve plus loin. Tous ces peuples sont adonnés au brigandage, mais surtout les Besses, que Strabon donne pour
voisins aux Odryses et aux Sapéens. Bizyé, qui suit, servit autrefois de résidence aux rois des Astes. Sous le nom d'Odryses, certains auteurs comprennent l'ensemble des
peuples qui habitent au-dessus du littoral entre l'Hèbre et Cypsèles d'une part et Odessus de l'autre ; telle était, suivant eux, l'étendue des Etats d'Amadocus, de
Kersoblepte, de Bérisade, de Seuthès et de Cotys. (Exc. Vatic.)
51. Le fleuve de Thrace appelé aujourd'hui Rhegina est l'ancien Erginos. (Exc. Palat.)
52. Iasion et Dardanus étaient deux frères habitant l'île de Samothrace ; mais, Iasion ayant été frappé de la foudre pour avoir offensé
Cérès, Dardanus quitta l'île, vint fonder au pied de l'Ida la ville de Dardanie et fit connaître aux Troyens les mystères de la Samothrace. Strabon ajoute
qu'avant de s'appeler Samothrace l'île s'était appelée simplement Samos. (Ibid.)
53. Maint auteur affirme que les dieux adorés dans l'île de Samothrace n'étaient autres que les Cabires, sans pouvoir cependant rien nous dire de positif sur les Cabires
eux-mêmes, non plus que sur les Cyrbantes et sur les Corybantes, non plus que sur les Curètes et les Dactyles Idéens. (Exc. Vatic.)
54. A l'entrée de l'Hèbre, lequel débouche à la mer par deux bras, et déjà dans le golfe Mélas, s'élève la ville d'Aenos, colonie
de Mitylène et de Cumes, et plus anciennement d'Alopéconnèse ; puis vient le cap Sarpédon, suivi à son tour de la Chersonnèse de Thrace, laquelle se
trouve former à la fois la Propontide, le golfe Mélas et l'Hellespont. La Chersonnèse s'avance effectivement dans la direction de l'Euronotus (autrement dit au S.-S.-E.)
assez loin pour que la côte d'Europe ne soit plus séparée de la côte d'Asie, entre Sestos et Abydos, que par un étroit canal de sept stades, et, dans ce long
parcours, elle est bordée, à gauche, par la Propontide, et à droite, par le golfe Mélas. Hérodote et Eudoxe pensent que ce golfe a emprunté son nom
d'un simple ruisseau, le Mélas, l'un des cours d'eau qui s'y jettent, et le même qui, au dire d'Hérodote, ne put suffire à étancher la soif de l'armée
de Xerxès. La Chersonnèse est fermée par un isthme de quarante stades, dont la ville de Lysimachie, ainsi nommée du roi, son fondateur, occupe la centre. A l'une des
extrémités de l'isthme sur le golfe Mélas est Cardie, la plus grande des villes de la Chersonnèse, colonie de Milet et de Clazomènes, accrue plus tard de
colons athéniens. A l'autre extrémité, sur la Propontide, est la ville de Pactyé. Puis à Cardie succèdent Drabus et Limnae, suivies
d'Alopéconnèse, qui est la vraie limite du golfe Mélas. Vient ensuite le grand promontoire de Mazusie et, au fond d'un golfe, Elaeûs, avec le Protesilaeum qui
se trouve à quarante stades du cap Sigée en Troade, et qui est à peu de chose près le point le plus méridional de la Chersonnèse : la distance
jusque-là, depuis Cardie, est d'un peu plus de 400 stades. Quant au reste du périple jusqu'à l'autre extrémité de l'isthme, il représente une distance
un peu plus forte. (Exc. Vatic.)
55. La Chersonnèse de Thrace forme trois mers : au N. la Propontide, au levant l'Hellespont et au midi le golfe Mélas, qui reçoit un cours d'eau appelé
également le Mélas. (Epit.)
56. L'isthme de la Chersonnèse renferme trois villes : 1° Cardie, sur le golfe Mélas ; 2° Pactyé, sur la Propontide ; 3° Lysimachie, dans l'intérieur. Sa
longueur est de 40 stades. (Ibid.)
57. Le nom de ville Elaeûs est masculin ; celui de Trapezûs l'est peut-être bien aussi. (Exc. Palat.)
58. En continuant au delà d'Elaeûs le périple de la Chersonnèse, on ne tarde pas à atteindre l'entrée de la Propontide, autrement dit le canal
étroit où l'on fait généralement commencer l'Hellespont. Et une fois dans ce canal, on remarque un premier cap appelé par les uns Cynossema (le tombeau de la
chienne) et par les autres Hécabessema (le tombeau d'Hécube), parce qu'on n'a en effet qu'à le doubler pour apercevoir sur la côte le tombeau de cette
princesse ; puis viennent Madytos, la pointe Sestiade, juste en face de laquelle fut établi le pont de Xerxès, et enfin Sestos même. D'Elaeûs au Zeugma ou Pont de
Xerxès, on compte 170 stades ; on en compte 80 de Sestos à Aegospotami, petite ville, aujourd'hui ruinée, où tomba, dit-on, le fameux aérolithe durant les
guerres médiques. Suivent Callipolis, qu'un trajet de quarante stades seulement sépare de Lampsaque et de la côte d'Asie, Crithoté, petite ville en ruines,
Pactyé, Macrontichos, Leucé-acté, Hiéron-oros, Périnthe, colonie de Samos, et Sélybrie. Au-dessus de cette partie de la côte, dans
l'intérieur, les points remarquables sont Silta et le Hiéron-oros, objet de vénération dans tout le pays, dont il est en quelque sorte la citadelle ou l'Acropole. De
ses flancs découlent des ruisseaux d'asphalte, qui se déchargent dans la mer sur le point de la côte le plus rapproché de l'île de Proconnèse, laquelle
n'est plus là qu'à 120 stades du continent. Cette île, comme on sait, possède de riches carrières de marbre blanc, très utilement exploitées. A
Sélybrie succèdent encore les fleuves Athyras et [Ba]thynias ; puis vient Byzance elle-même et le reste de la côte jusqu'aux Roches Cyanées. (Exc.
Vatic.)
59. De Périnthe à Byzance, il y a 630 stades. Artémidore, lui, compte 3,100 stades depuis l'Hèbre et Cypsèles jusqu'à Byzance, ou plus exactement
jusqu'aux Roches Cyanées. En tout, depuis Apollonie sur le golfe Ionien, jusqu'à Byzance, la longueur est de 7,320 stades. Polybe compte 180 stades de plus, par la raison qu'il
fait le mille romain de huit stades et un tiers. Quant à Démétrius de Scepsis, dans son commentaire sur le Dénombrement de l'armée troyenne, il ne
compte que 600 stades pour la distance de Périnthe à Byzance, tout comme pour la distance de Périnthe à Parium. Le même auteur donne à la Propontide
1400 stades de longueur et 500 stades de largeur, et à l'Hellespont 7 stades de largeur dans sa partie la plus étroite avec 400 stades de longueur.(Ibid.)
60. Les auteurs ne s'accordent pas tous sur l'étendue à donner à l'Hellespont ; Strabon constate même à cet égard une grande diversité
d'opinions. Les uns, par exemple, comprennent sous ce nom la totalité de la Propontide, les autres une partie seulement, la partie en deçà de Périnthe. D'autres font
empiéter l'Hellespont même sur la Mer Extérieure, sur les parages de la mer Egée et du golfe Mélas, et encore ne le font-ils pas tous de la même
façon, car les uns ne retranchent de la Mer Extérieure que ce qui s'étend du promontoire Sigée à Lampsaque et à Cyzique, Parium ou Priape, tandis qne
les autres en détachent encore tout l'intervalle du promontoire Sigée au cap Sigrium, sur la côte de Lesbos. Enfin, certains auteurs n'hésitent pas à prolonger
l'Hellespont jusqu'à la mer de Myrtos, se fondant sur ce que dit Pindare dans ses Hymnes, que le vaisseau qui ramenait Hercule de Troie dut, en traversant le canal qui porte le
nom de la vierge Hellé, et au moment d'entrer dans la mer de Myrtos, reculer devant le souffle contraire du zéphyre et rétrograder sur Cos. On invoque de même
l'autorité d'Homère pour établir qu'il faut étendre le nom d'Hellespont à toute la mer Egée jusqu'au golfe Thermaeen et aux parages de la Thessalie et
de la Macédoine. Homère, en effet, a dit (Iliade, IX, 360) :
«Et demain, dès l'aurore, pour peu que tu le veuilles, pour peu que le coeur t'en dise,
tu verras mes vaisseaux impatients flotter vers les eaux poissonneuses de l'Hellespont».
Et le passage suivant n'est pas moins explicite :
«(Piros), l'Imbraside, qui était venu d'Aenos» (Iliade, IV, 520),
car Piros commandait aux Thraces
«Que de ses flots rapides enserre l'Hellespont»,
ce qui revient à dire, ce semble, que tous ceux qui suivent se trouvent en dehors de l'Hellespont. Or, Aenos est située dans l'ancienne Apsynthide (la même contrée
qu'on appelle aujourd'hui la Corpilique) et ce qui lui fait suite au couchant est la côte des Cicones. (Ibid.)
61. Tétrachorites : les Besses par exemple, dans le septième livre de Strabon. On les trouve aussi qualifiés de tétracomes. (Etienne de Byzance au mot
tetrachôritai.)
62. Car [Strabon] dans le septième livre de sa géographie, nous dit avoir connu Posidonius, le philosophe stoïcien [dont nous avons souvent parlé], comme d'un ami,
d'un familier de Scipion, le vainqueur de Carthage. (Athénée, 1. XIV, p. 657,f.)