Hadrien

© Agnès Vinas

VI. Defuncto Trajano, Aelius Hadrianus creatus est princeps ; sine aliqua quidem voluntate Trajani, sed operam dante Plotina, Trajani uxore. Nam eum Trajanus, quanquam consobrinae filium, vivus noluerat adoptare. Natus et ipse Italicae in Hispania ; qui, Trajani gloriae invidens, statim provincias tres reliquit, quas Trajanus addiderat ; et de Assyria, Mesopotamia et Armenia revocavit exercitus, ac finem imperii esse voluit Euphratem. Idem de Dacia facere conatum amici deterruerunt, ne multi cives Romani barbaris traderentur ; propterea quod Trajanus, victa Dacia, ex toto orbe Romano infinitas eo copias hominum transtulerat, ad agros et urbes colendas. Dacia enim diuturno bello Decebali viris fuerat exhausta.

VI. Après sa mort, Elius Hadrien fut élu empereur, grâce à l'adresse de Plotine, épouse de Trajan ; car cet empereur, bien loin d'y avoir contribué, n'avait pas voulu, de son vivant, l'adopter, quoiqu'Hadrien fût le fils de sa cousine germaine. Hadrien était né, comme lui, à Italica en Espagne. Jaloux de la gloire de son prédécesseur, il abandonna aussitôt trois provinces que ce prince avait ajoutées à l'Etat ; il rappela de l'Assyrie, de la Mésopotamie et de l'Arménie les armées romaines, et il voulut que l'Euphrate fût la limite de l'empire. Il eût renoncé de même à la Dacie ; mais ses amis l'en empêchèrent, en lui disant que c'était livrer aux barbares une foule de citoyens romains ; parce que Trajan, après la conquête de la Dacie, y avait fait passer, de toutes les parties de l'empire, une quantité innombrable de colons, pour en cultiver les terres et en habiter les villes, dépeuplées par les longues guerres de Décébale.

VII. Pacem tamen omni tempore imperii sui habuit, semel tantum per praesidem dimicavit ; orbem Romanum circumiit ; multa aedificavit. Facundissimus Latino sermone, Graeco eruditissimus fuit ; non magnam clementiae gloriam habuit ; diligentissus tamen circa aerarium et militum disciplinam. Obiit in Campania, major sexagenario, imperii anno XXI, mense X, die XXIX. Senatus ei tribuere noluit divinos honores : tamen cum successor ipsius Titus Aurelius Fulvius Antoninus hoc vehementer exigeret et universi senatores palam resisterent, tandem obtinuit.

VII. Hadrien fut en paix tout le temps de son règne, et un de ses lieutenants fit la seule guerre qui troubla cette paix. Il parcourut le monde romain, et y laissa un grand nombre d'édifices. Il s'exprimait en latin avec beaucoup d'éloquence, et il savait le grec à fond. Il ne laissa qu'une faible renommée de clémence ; mais il veilla soigneusement aux intérêts du trésor public et au maintien de la discipline militaire. Il mourut dans la Campanie, plus que sexagénaire, après un règne de vint et un ans dix mois et vingt-neuf jours (Ap. JC. 138). Le sénat ne voulut pas lui décerner les honneurs divins ; mais Titus Aurélius Fulvius Antonin, son successeur, le demanda avec instance, et, malgré le refus unanime des sénateurs, il finit par l'obtenir.