XIX - Caius Marcius Coriolan (an de Rome 260 à 265)

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Caius (1) Marcius, surnommé Coriolan, de Corioles, ville des Volsques, dont il s'était emparé, ayant été invité par Postumius à choisir la récompense qu'il désirait pour ses exploits, choisit seulement un cheval et un prisonnier, qui avait été son hôte, donnant en cela une preuve de sa valeur et de son respect pour l'hospitalité. Pendant son consulat (2), une grande disette se faisant sentir à Rome, on fit venir de la Sicile une provision considérable de blé. Dans cette circonstance, il fit en sorte que le peuple n'en pût obtenir qu'à un prix très élevé. Son intention était de le forcer, par ce traitement injuste, à cultiver la terre au lieu de se livrer à des mouvements séditieux. Ajourné, pour cette raison, par le tribun Décius (3), à comparaître devant le peuple, il se retira chez les Volsques. Animé de l'esprit de vengeance, il souleva ces peuples contre les Romains (4), et de concert avec leur chef Attius Tullus, il les conduisit jusqu'à quatre milles de Rome (5). En vain ses concitoyens lui envoyèrent des députés (6) pour le fléchir. Véturie, sa mère, et Volumnie, sa femme (7), accompagnées d'un grand nombre de dames romaines, eurent seules ce bonheur. Les Volsques, irrités de ce qu'il avait ainsi terminé la guerre, le tuèrent, peu de temps après, comme un traître (8). On éleva, dans l'endroit où il s'était laissé fléchir (9), un temple à la Fortune des femmes.


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(1)  Arntzen écrit Cneius sur la foi de ses manuscrits. J'ai adopté Caius, parce que Schott veut cette dernière leçon d'après les anciennes éditions, et que je la trouve dans l'édition ad usum delphini, dans celles de Pitiscus et de Juncker, et dans celle de Florus, cum motis variorum, in-8°. Amst. 1692.

(2)  Les fastes capitolins ne font pas mention du consulat de C. Marcius. Il n'était encore que sénateur. Ce fut pour se venger du refus du peuple, lorsqu'il avait demandé la dignité consulaire, qu'il se déclara si constamment son ennemi.

(3)  Tite-Live et Plutarque disent Sicinius ; Denis d'Halycarnasse écrit Décion.

(4)  Pendant que les grands jeux se célébraient à Rome, Tullus persuada aux consuls qu'il était à craindre que les Volsques n'excitassent une sédition dans la ville. Alors un crieur public leur ordonna d'en sortir. Irrités de cet affront, ces peuples prirent les armes.

(5)  Suivant Tite-Live, il s'avança jusqu'aux fosses cluiliennes, à cinq milles de Rome, environ deux lieues.

(6)  0n lui envoya trois députations. La première reçut une réponse insolente. Elle retourna au camp, et fut encore mal reçue. Les prêtres des dieux, revêtus de leurs habits, ne réussirent pas mieux.

(7)  Plutarque nomme sa femme, Veturie, et sa mère Volumnie. Valérie était à la tête des dames romaines.

(8)  Suivant Fabius Pictor, auteur très ancien, loué par Tite-Live, Coriolan parvint jusqu'à la vieillesse, et mourut de mort naturelle. Il ajoute que ce Romain avait coutume de dire que l'exil était la peine la plus rigoureuse pour un vieillard.

(9)  J'ai pensé que l'adverbe ibi signifiait l'endroit même où les dames romaines avaient fléchi Coriolan.