Homère raconte dans l'Iliade (VII 273-312) le duel entre Ajax fils de Télamon et Hector, qui se prolonge jusqu'au soir sans vainqueur ni vaincu ; les deux héros se séparent alors chevaleresquement en échangeant des cadeaux ; et dans le chant XV (696-747), il évoque la bataille près des nefs : les Troyens pourraient détruire la flotte grecque si Ajax ne résistait vigoureusement. Avec une belle contaminatio, les auteurs de la littérature tardo-latine et médiévale créent la péripétie d'une reconnaissance entre les deux héros (on pense à la comédie alexandrine et romaine !) : Ajax obtient du généreux Hector, son cousin (car sa mère Hésione et Priam étaient frères), un cadeau incroyable : la retraite des Troyens qui malgré leur victoire épargnent les nefs grecques.


Homère, Iliade, VII, 273-305

Et, avec leurs épées, ils allaient se blesser de près, si les hérauts, ministres de Zeus et des hommes, n'étaient venus, l'un au nom des Troyens, l'autre au nom des Achéens vêtus de bronze, Talthybios et Idaios, sages l'un et l'autre. Entre les deux combattants ils étendirent leur sceptre ; puis parla le héraut Idaios, bien inspiré et sage : « Cessez, chers enfants, de lutter et de combattre. Tous deux, vous êtes aimés de Zeus assembleur de nuées, tous deux bons piquiers : cela, nous le savons tous. Déjà la nuit est complète, et il est bon d'obéir à la nuit ». Ajax fils de Télamon répondit : « Idaios, c'est Hector qu'il vous faut inviter à parler ; c'est lui qui a provoqué au combat tous les plus vaillants. Qu'il commence, et moi, certes, je le suivrai dans ce qu'il fera ». Le grand Hector au casque scintillant répondit : « Ajax, puisqu'un dieu t'a donné la taille, la force et la sagesse, et que, par ta lance, tu surpasses tous les Achéens, maintenant cessons le combat et le meurtre pour aujourd'hui ; plus tard nous combattrons encore, jusqu'à ce qu'une divinité décide, et donne à l'un des peuples la victoire. La nuit est déjà complète, et il est bon d'obéir à la nuit. Ainsi tu réjouiras tous les Achéens, près des vaisseaux, et surtout tes parents et tes compagnons ; et moi, dans la grande ville du roi Priam, je réjouirai les Troyens et les Troyennes au voile traînant, qui, en priant pour moi, pénétreront là où les dieux sont assemblés. Mais donnons-nous l'un à l'autre des présents glorieux, afin que chacun dise, chez les Achéens et chez les Troyens : Certes, ils se sont battus pour la discorde qui dévore le coeur, mais ils se sont séparés d'accord et amis ». Ayant dit, il donna son épée à clous d'argent, avec le fourreau et le baudrier bien coupé ; Ajax donna son ceinturon, brillant de pourpre.

Iliade, XV, 696-747

De nouveau, un âpre combat eut lieu près des vaisseaux. Vous auriez dit des soldats frais et infatigables se rencontrant face à face à la guerre, tant ils se ruaient à la bataille. Et, en combattant, voici ce qu'ils pensaient : les Achéens se disaient qu'ils n'échapperaient pas au malheur, mais périraient ; et les Troyens espéraient chacun, en leur coeur, incendier les vaisseaux, et tuer les héros achéens. Eux donc, voilà ce qu'ils pensaient, debout les uns contre les autres. Et Hector toucha la poupe du vaisseau coureur de mer, beau, rapide sur les flots, qui avait porté Protésilas à Troie et ne le ramena pas dans sa patrie. Autour de ce vaisseau, Achéens et Troyens se massacrèrent de près. Ils n'attendaient plus, des deux côtés, l'élan des flèches, ni des javelots. Tout près les uns des autres, du même coeur, avec des haches tranchantes, avec des cognées, ils se battaient, avec de grandes épées et des lances à deux piques. Beaucoup de poignards, beaux, la poignée garnie de ligatures noires, tombaient, les uns des mains, les autres des épaules des combattants. Le sang ruisselait sur la terre noire. Hector, quand il eut saisi la proue, ne la lâcha plus, et, l'aplustre dans les mains, il criait aux Troyens : « Apportez le feu, et en même temps, serrés, poussez le cri de guerre. C'est maintenant que Zeus nous donne un jour qui paie toutes nos peines, celui de prendre les vaisseaux qui, venus ici malgré les dieux, nous ont causé bien des maux, par la faute de nos Anciens qui, quand je voulais combattre à la poupe des vaisseaux, moi-même m'arrêtaient, et retenaient les troupes. Mais si, alors, Zeus à la voix puissante faussait nos sentiments, maintenant, lui-même, il nous excite et nous pousse ». Il dit, et eux s'élancèrent plus vivement contre les Argiens.

Ajax ne tenait plus ferme, il était forcé par les traits ; il recula un peu, croyant mourir, vers un banc de sept pieds, et quitta le tillac du vaisseau bien équilibré. Là, il resta debout, à l'affût ; et toujours, armé de sa pique, il écartait les Troyens des vaisseaux, tous ceux qui y portaient le feu infatigable ; et toujours aussi, en criant terriblement, il invitait les Danaens : « Amis, héros Danaens, serviteurs d'Arès, soyez hommes, amis, rappelez-vous votre vaillance impétueuse. Pensons-nous avoir du secours à l'arrière, ou quelque mur plus fort, pour défendre les hommes du fléau? Il n'y a pas, à proximité, de ville munie de remparts qui puisse nous défendre, notre peuple reprenant courage. Dans la plaine des Troyens strictement cuirassés, nous voilà acculés à la mer, loin de notre patrie. En nos mains est la lumière du salut, non dans notre mollesse au combat ». Il dit, et, plein d'ardeur, il poussait droit sa pique aiguë. Tout Troyen qui se portait vers les vaisseaux creux avec le feu ardent, pour plaire à Hector qui l'y excitait, Ajax le blessait, le recevant avec sa longue pique. Douze, devant les vaisseaux, furent, de près, blessés par lui.


L'épisode est repris par l'auteur inconnu de l'Ilias Latina :

Stringebant iterum gladios, cum fessus in undas
coeperat igniferos Titan immergere currus
noxque subire polum : iuxta mittuntur, utrosque
qui dirimant a caede viros ; nec segnius illi
deponunt animos. tum bello maximus Hector
'quae te terra virum, qui te genuere parentes ?
viribus es proles generosa atque inclita' dixit.
at contra se ferre parat Telamonius Aiax :
'Hesiona de matre vides Telamone creatum,
nobilis est domus et fama generosa propago'.
Hector, ut Hesionae nomen casusque recordans,
'absistamus' ait, 'sanguis communis utrique est'
et prior Aeaciden aurato munerat ense
inque vicem, quo se bellator cinxerat Aiax,
accipit insignem vario caelamine balteum.


Et voici ce qu'en font successivement Darès, Joseph of Exeter, Dictys, Benoît de Sainte-Maure et Guido delle Colonne :

Daretis De excidio Troiae, 19

Postero die Hector exercitum ex urbe educit, et instruit. Agamemnon contra clamore magno occurrit : praelium acre et iracundum fit : fortissimus quisque in primis cadit. Hector Patroclum occidit, et eum spoliare parat. Merion eum ex acie ne spoliaretur eripuit. Hector Merionem persequitur et occidit. Quem cum similiter spoliare uellet, aduenit suppetias Mnestheus, Hectoris femur sauciat : saucius quoque multa millia occidit : et perseuerasset Achiuos mittere in fugam, nisi obuius illi Aiax Telamonius fuisset ; cum quo dum congrederetur, cognouit eum esse de sanguine suo, erat enim de Hesiona sorore Priami natus. Quo pacto Hector a nauibus ignem remoueri iussit, et utrique se inuicem munerauerunt, et amici discesserunt. Postero die Graiugenae inducias petunt.

Le jour suivant, Hector fit sortir ses Troyens de leurs remparts,et les rangea en bataille. Agamemnon marche contre lui, en faisant pousser de grands cris à ses soldats : alors commence un combat furieux et acharné. Dans ce premier choc, périssent plusieurs vaillants guerriers : Hector tue Patrocle de sa main ; déjà il se disposait à le dépouiller, lorsque Mérion accourt et enlève le cadavre du champ de bataille; il est poursuivi à son tour et mis à mort par le vainqueur de Patrocle, qui s'apprête à le dépouiller lui-même. Mnesthée survient et blesse Hector à la cuisse. Quoique blessé, le prince troyen donne la mort à plusieurs milliers de Grecs, et sans doute il les aurait mis tous dans une déroute complète, si Ajax, fils de Télamon, n'était venu s'opposer à sa victoire et l'attaquer lui-même. Pendant qu'ils se livrent un terrible combat, Ajax dont Hésione, soeur de Priam, était la mère, reconnaît Hector pour être de son sang. Ils cessent alors de se porter des coups ; Hector empêche qu'on ne mette le feu aux vaisseaux ennemis ; ils se font des présents l'un à l'autre, et se retirent en se donnant des marques d'une amitié réciproque.

Dictys Cretensis Ephemerides belli Troiani II, 42 sqq.

XLII. Iisdem fere diebus Barbari, nostris per conditionem hiemis quietis, nihilque hostile suspicantibus, parauere eruptionem ; queis Hector dux atque audendi auctor factus, omnes copias instructas armis cum luce simul porta educit, ac protinus cursu pleno ad naues tendere atque inuadere hostes iubet. At Graii infrequentes tum incuriosique ab armis, turbari, simul et a fugientibus, quos primus hostis incesserat, quo minus arma caperent impediri; tum caesi multi mortales : iamque fusis qui in medio fuerant, Hector ad naues progressus, ignem in proras iacere, ac saeuire incendiis occoeperat: nullo nostrorum auso resistere ; qui territi atque improuiso tumultu exsangues, genibus Achillis, auxilium renuentis, tamen aduoluebantur : tanta repente mutatio animorum nostros atque hostes incesserat.

Dans le même temps les Barbares, s'apercevant que les Grecs se fiaient trop sur la saison et paraissaient ne craindre aucun mouvement hostile, se préparèrent à tomber sur eux. Hector avait conçu ce projet et s'en était réservé l'exécution. Il fait donc sortir de la ville, au point du jour, toutes ses troupes bien armées, et leur donne l'ordre de courir sans s'arrêter jusqu'aux vaisseaux des Grecs, et de charger vigoureusement l'ennemi. Notre avant-garde, peu nombreuse et en désordre, est bientôt mise en fuite, et ceux que les Troyens avaient repoussés, fuyant à la hâte, empêchent les autres de prendre les armes. Dans cette confusion, il périt beaucoup de monde, et le corps d'armée fut facilement enfoncé. Alors Hector s'avance jusqu'aux vaisseaux, lance des torches ardentes et y met le feu : personne n'osait lui résister (61). Les nôtres, au contraire, pâles et tremblants à l'aspect d'un danger si pressant, venaient en foule se jeter aux pieds d'Achille, qui leur refusait ses secours, tant était grand et subit le changement qui s'était opéré dans le coeur des Grecs et des Troyens.

XLIII. Interea Aiax Telamonius adueniens, cognito apud naues Hectore, magna armorum specie ibidem apparuit, ac dein mole sua urgens hostem, multo sudore ad postremum nauibus extra uallum detrudit. Tum iam cedentibus acrior insistens, Hectorem, qui aduersus eum promptus steterat, ictum immani saxo, ac mox consternatum deiicit. Sed eum concurrentes undique plurimi multitudine sua tectum, bello atque Aiacis manibus eripiunt, seminecemque intra muros ferunt, male prospera eruptione aduersus hostes usum. Caeterum Aiax saeuior ob ereptam e manibus gloriam assumptis iam Diomede, et cum Idomeneo, Aiace altero, territos dispersosque sequi; ac fugientes nunc telo eminus prosternere, modo apprehensos obterere armis, prorsus nullo, qui in ea parte fuerat, intacto. Inter quae tam trepida Glaucus Hippolochi, Sarpedon atque Asteropaeus, ad morandum hostem paulisper ausi resistere, mox uulneribus grauati locum amisere : queis uersis, Barbari nullam spem reliquam salutis rati sine rectoribus, nequeusquam certo ordine palantes, effusique ruere ad portas, eoque arcto et properantium multitudine impedito ingressu, quum super alium alius ruinae modo praecipitarentur, superuenit cum supradictis ducibus Aiax. Tum magna uis Barbarorum trepida impeditaque inter se caesa extinctaque : in queis Priami filiorum Antiphus et Poliites, Pammon, Mestor, atque Euphemus Troezenius dux egregius Ciconum.

Ex ce moment arrive Ajax. Apprenant qu'Hector attaquait la flotte, il se présente à lui avec toutes ses forces, l'atteint, le presse de toutes parts, et le repousse, quoique avec beaucoup de peine, depuis les vaisseaux jusqu'au-delà des retranchements. Ensuite, devenu plus entreprenant à mesure que les Troyens se retiraient, il lance une pierre énorme sur Hector, qui s'était promptement opposé â lui, l'en frappe et le renverse à terre. Les Troyens accourent en grand nombre, couvrent ce prince de leurs armes, l'arrachent à la fureur d'Ajax, et le portent mourant dans la ville, et désespéré d'avoir si mal achevé une expédition si heureusement commencée. Ajax, de son côté, se voyant enlever sa proie, n'en devient que plus furieux. Il prend avec lui Diomède, Idoménée, l'autre Ajax, poursuit les Troyens épouvantés, et tantôt perçant les fuyards de ses traits, tantôt les écrasant sous le poids de ses armes, il ne laisse échapper aucun de ceux qui se présentent à ses coups. Dans cette déroute, Glaucus, fils d'Hippoloque, Sarpédon et Astéropée, qui avaient osé lui résister quelques instants, accablés eux-mêmes de blessures, sont forcés de quitter le champ de bataille. Leur fuite ne laissait aux Barbares aucune espérance : ceux-ci, abandonnés de leurs chefs, couraient cà et là sans tenir de route certaine, et se précipitaient tous à la fois vers les portes. Dans ces passages étroits, encombrés par la multitude, ils montaient les uns sur les autres et s'étouffaient mutuellement Ajax arrive avec ses compagnons. Alors des milliers de Barbares tombèrent sous nos coups; de ce nombre furent Antiphus et Polités, fils de Priam, Pammon, Mentor et Euphémus de Trézène, chef des Ciconiens.

XLIV. Ita Troiani paulo ante uictores, ubi aduentu Aiacis fortuna belli mutata est, uersis ducibus paenas luere militiae inconsultae : ac postquam aduentante uespera, signum nostris receptui datum est, uictores laetique ad naues regressi, mox ab Agamemnone coenatum deducuntur. Ibi Aiax conlaudatus a rege, donis egregiis honoratur : neque reliqui duces facta gestaque uiri silentio remittunt : quippe singuli extollentes uirtutem, memorare fortia facta, euersas ab eo tot Phrygiae ciuitates, abductasque praedas, et ad postremum in ipsis nauibus aduersum Hectorem egregiam pugnam, liberatasque igni classes. Neque cuiquam dubium, quin ea tempestate, tot egregiis ac pulcherrimis eius facinoribus, spes omnes atque opes militiae in tali uiro sisterentur. Caeterum proras duarum nauium, quibus illatus ignis eam partem tantummodo consumpserat, Epios breui restituit. Tumque Graeci rati post malam pugnam Troianos ulterius nihil hostile ausuros, quieti ac sine terrore egere.

Ainsi les Troyens, d'abord victorieux, payèrent bien cher leur attaque inconsidérée, lorsque l'arrivée d'Ajax et la fuite de leurs chefs eurent changé la face du combat. Comme la nuit approchait, le signal de la retraite fut donné et les vainqueurs retournèrent pleins de joie à leurs vaisseaux. Bientôt les chefs sont invités à souper par Agamemnon. Là, en présence de tous, ce prince complimenta Ajax et le combla de riches présents. Les autres chefs ne cessaient de rappeler les hauts faits de ce brave guerrier. Tant de villes prises et renversées par lui dans la Phrygie; un butin immense apporté dans le camp; une victoire éclatante remportée sur Hector lui-même à la vue des vaisseaux; enfin la flotte entière arrachée aux flammes par son courage. Tous, sans difficulté, mettaient en ce grand homme toutes leurs espérances, et ne doutaient pas que le succès de la guerre présente ne reposât entièrement sur lui. Cependant Epéus eut bientôt rétabli les deux proues de navires sur lesquelles le feu d'Hector avait porté, et qui seules avaient été endommagées; et les Grecs, persuadés qu'après un pareil échec, les Troyens n'oseraient plus rien entreprendre, se renfermèrent dans leur camp, sans rien craindre de la part de l'ennemi.

On voit bien que Dictys, comme d’habitude, suit à peu près Homère. Au contraire, les imitateurs médiévaux de Darès, notamment ceux qui sont philotroyens, répètent son récit en soulignant la noblesse chevaleresque d’Hector et la valeur d’Ajax.

Josephus Iscanus, Daretis Ylias, V 267-275

(Hector) Infensus poscitque faces atque hoste repulso
Igne rates populante premit. Subit obvius Aiax
Iam tandem erumpens et apertis Hectora campis
270 Irato mucrone petit. Trux ridet Herinis
Cognatum lucrata nefas, at concita cecos
Errores aperit Pietas nec passa furentes
Communes declarat avos. Illi arma facesque
Sponte relicturi galeas ad mutua laxant
275 Oscula mutatisque petunt tentoria parmis.


Benoît de Sainte-Maure, Roman de Troie en prose, 112.

Si com Hector reconut son cousin, fils de Exiona, la seror le roi Priant, qui estoit en l'ost de Grèce.

Dit vos ai ça en arieres quoment Priant avoit une suer qui fu prise quant Troie fu destruite et son père mort. Et Thalamon de Salemine, si come dit vos avons, si en ot un fil qui Thalamon fu apellé, bons chevaliers de grant manière et hardi. Si se reconurent en la bataille lui et Hector et se firent grant joie. Si li pria moût Hector que il venist en la cité por veoir son grant parenté, mais il ne li otria pas. Et quant il furent une pièce conjoï ensemble, celui pria Hector que il feïst sa gent retraire, quar chascun jor i porons a ce venir. Hector li respondi : « Biau cousin, je en ferai vostre plaisir, tout que moût m'en soit grief; quar ceste gens nos ont fait moût grant domage, quar il ont tout nostre pais destruit, et si ne sevent pas por quoi. Mais je croi que a la fin il seront destruit et honis, car li drois est nostre et le tort est leur ». Ensi départi la bataille sans plus faire, quar ja voloient il les nés alumer, que nul contredit n'i avoit ; mais de ce n'avront il ja mais loisir, quar se Fortune eusse volu, celui jors estoit tous lor travail finis. Aï ! Dieuz, comme fait a doloir celé jornee, quant par issi petit d'achoison remest lor délivrance ! Por coi je croi que Fortune avoit envie de lor hautesse.

Guido delle Colonne, Historia Troiana, XV

Sic successit infelici Hectori illo die, in quo cum potuisset de suis hostibus in multa gloria obtinere triumphum, dum per acies discurreret persequendo hostes suos, qui, tamquam deuicti, ab eius et alorum Troyanorum facie fugiebant. Ex parte Grecorum obuius sibi uenit Exione filius, sobrinus eius, filius Thelamonis, qui Thelamonius Aiax proprio nomine dicebatur et qui in uirtute bellandi ipsum hostiliter est aggressus, cum fuerit uir in uiribus multum potens et fortissimus preliator. Committitur ergo durum prelium inter duos tam fortes, sed dum inter se bellando mutuo loquerentur, agnouit Hector illum esse filium amite sue et sibi linea sanguinis esse coniunctum. Quare Hector multum exinde factus letus, depositis armis, in multa sibi est affeccione blanditus, placere sibi in omnibus spondet, et monet ipsum et rogat ut ad Troyam ueniat inspecturus amplam sui generis parentelam. At ille negans et saluacionem suorum Grecorum et sue patrie non obmittens rogat Hectorem ut, si tanta affeccione ducitur erga eum, faciat et procuret quod Troyani amplius eo die bellare desistant et quod Grecos fugientes amplius non sequantur sed ut Troyani ad urbem redeant, Grecis eo die in pace dimissis. Annuit infelix Hector. Quare incontinenti, emisso tubete sonitu, omnes Troyanos retrocedere et a bello desistere facit et mandat. Iam Troyani in Grecorum naues ignem inmiserant, iam omnes naues finaliter excussissent, sed ad uocem et mandatum ducis eorum omnes totaliter destiterunt et multo dolore commoti ad ciuitatem redeunt et ingrediuntur in ipsam. Et ista fuit tam leuis causa quare Troyani illo die ab obtentu eorum uictorie cessauerunt, ad quam postea nunquam potuerunt, fatis contradicentibus, peruenire.


Merci au professeur Francesco Chiappinelli, auteur de l'Impius Aeneas, de nous avoir fourni ces textes.
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