Homère, dans l'Odyssée (XI, 134-137), faisait prononcer par Tirésias une obscure prophétie sur la mort d'Ulysse :

« Pour toi, la mort te viendra hors de la mer, très douce :
elle te prendra quand tu seras affaibli par une vieillesse opulente ;
autour de toi, tes peuples seront prospères. Voilà ce que je te prédis en toute vérité ».

Dès le Cycle, poètes et écrivains paraissent l'avoir oubliée. Seuls nous restent les témoignages de Proclus et d'Eustathe sur un poème intitulé la Télégonie ; d'un point de vue poétique, il n'avait pas grande importance, mais prenait pour la mythologie un relief tout à fait particulier. On y chantait le meurtre d'Ulysse par Télégonus, le fils qu'il avait eu de Circé, et qui, comme Oedipe, le tuait et le reconnaissait trop tard. Mais l'auteur Eugammon parlait aussi des amours de Callidice et Ulysse et, entre autres arguments dignes des poètes alexandrins, du mariage de Télémaque et Nausicaa.

Proclus - Chrestomathie, Telegoniae enarratio

Après les Nostoi, il y a l'Odyssée d'Homère ; ensuite, les deux livres de la Télégonie d'Eugammon de Cyrènes, qui contiennent ces faits. Les prétendants sont ensevelis par leurs proches et Ulysse, après avoir sacrifié aux Nymphes, part pour l'Elide contrôler ses troupeaux. Il est hébergé chez Polyxène, Agamède et Augias. Puis en navigant vers Ithaque il fait les sacrifices indiqués par Tirésias. Puis il arrive chez les Thesprotes et épouse la reine Callidice. Puis éclate la guerre entre les Thesprotes et les Briges, et Ulysse en prend le commandement. Alors Arès met en fuite les soldats d'Ulysse, défendu par Athéna : Apollon les sépare. Mais après la mort de Callidice, le pouvoir passe à Polypète, le fils d'Ulysse, qui revient à Ithaque ; en même temps Télégonus, qui naviguait à la recherche de son père, débarque en Ithaque et saccage l'île. Ulysse arrive à la rescousse, mais est tué par son fils qui ignore qui il est. Télégonus, lorsqu'il se rend compte de sa faute, porte à sa mère Circé le corps de son père, Télémaque et Pénélope : elle les rend immortels, Télégonus s'unit à Pénélope, et Télémaque à Circé.

 

Eustathe 1796, 35

Aristote dans sa Constitution d'Ithaque (fr. 463) et Hellanique (fr. 141) disent que Nausicaa, fille d'Alcinous, épousa Télémaque et engendra Perseptolis. Et quelques-uns profitent de ces contes-ci. Ulysse eut comme fils de Circé, selon Hésiode, Agrius et Latin ; comme fils de Calypso, Télégone et Télédame ; comme fils de Pénélope, Télémaque et Arcésilas... L'auteur des Retours, Colophon, dit que Télémaque épousa ensuite Circé, et Télégonus, fils de Circé, épousa à son tour Pénélope.

 

Hygin - Fables, 127 - Telegonus

Telegonus Vlixis et Circes filius missus a matre ut genitorem quaereret, tempestate in Ithacam est delatus, ibique fame coactus agros depopulari coepit ; cum quo Vlixes et Telemachus ignari arma contulerunt. Vlixes a Telegono filio est interfectus, quod ei responsum fuerat ut a filio caueret mortem. quem postquam cognouit qui esset, iussu Mineruae cum Telemacho et Penelope in patriam redierunt, in insulam Aea[e]am ; ad Circen Vlixem mortuum deportauerunt ibique sepulturae tradiderunt. eiusdem Mineruae monitu Telegonus Penelope[n], Telemachus Circen duxerunt uxores. Circe et Telemacho natus est Latinus, qui ex suo nomine Latinae linguae nomen imposuit ; ex Penelope et Telegono natus est Italus, qui Italiam ex suo nomine denominauit.

Au deuxième siècle, d'une façon très amusante, Lucien faisait confesser à Ulysse son regret de ne pas avoir accepté l'immortalité près de Calypso. Celle dont il jouissait dans l'île des Bienheureux, après avoir été tué par Télégonus, lui paraissait beaucoup plus ennuyeuse :

Lucien, Véritable histoire, II 35

Ὀδυσσεὺς Καλυψοῖ χαίρειν. Ἴσθι με, ὡς τὰ πρῶτα ἐξέπλευσα παρὰ σοῦ τὴν σχεδίαν κατασκευασάμενος, ναυαγίᾳ χρησάμενον μόλις ὑπὸ Λευκοθέας διασωθῆναι εἰς τὴν τῶν Φαιάκων χώραν, ὑφ´ ὧν ἐς τὴν οἰκείαν ἀποπεμφθεὶς κατέλαβον πολλοὺς τῆς γυναικὸς μνηστῆρας ἐν τοῖς ἡμετέροις τρυφῶντας? ἀποκτείνας δὲ ἅπαντας ὑπὸ Τηλεγόνου ὕστερον τοῦ ἐκ Κίρκης μοι γενομένου ἀνῃρέθην, καὶ νῦν εἰμι ἐν τῇ Μακάρων νήσῳ πάνυ μετανοῶν ἐπὶ τῷ καταλιπεῖν τὴν παρὰ σοὶ δίαιταν καὶ τὴν ὑπὸ σοῦ προτεινομένην ἀθανασίαν. ἢν οὖν καιροῦ λάβωμαι, ἀποδρὰς ἀφίξομαι πρὸς σέ.

« Ulysse à Calypso, salut !
Sachez qu'aussitôt après vous avoir quittée, sur le radeau que je m'étais construit, j'ai fait naufrage, et que, sauvé à grand'peine par Leucothée, je suis arrivé chez les Phéaciens, qui m'ont reconduit dans ma patrie, où j'ai trouvé ma femme entourée d'une foule de prétendants qui mangeaient mon bien. Je les ai tués tous, et j'ai fini par périr moi-même de la main de Télégone, ce fils que j'ai eu de Circé. Je suis à présent dans l'île des Bienheureux, me repentant fort d'avoir quitté la vie que je menais près de vous, et l'immortalité que vous m'aviez offerte. A la première occasion, je m'échapperai et j'irai vous retrouver ».



Nous ne savons pas comment ni surtout dans quelle mesure le Cycle est arrivé à Darès et Dictys, mais il est évident que ces deux rhéteurs dont l'oeuvre en latin est assez tardive ont vécu dans la période hellénistique ou romaine. Certes, ils en savaient beaucoup plus que nous. Darès, on l'a déjà vu, arrête son récit au départ des Grecs vainqueurs de Troie sans rien dire des Retours ; au contraire, Dictys dédie à cet argument et à la Télégonie le VIème livre de ses Ephémérides, et Benoît de Sainte-Maure et Guido delle Colonne en suivent les traces. Leur récit de la mort d'Ulysse est particulièrement dramatique, riche de psychologismes et amplifications. Peut-être pour des raisons morales ne parlent-ils point des amours « incestueuses » entre Pénélope et Télégonus, Circé et Télémaque, qui concluaient le Cycle. D'autre part, le songe prémonitoire d'Ulysse a sans doute une couleur érotique ambiguë...

Voici ce qu'ils disent à propos du mariage...

Dictys, Ephemerides belli Troiani, l. VI , 6

Neque multo post precibus atque hortatu Ulissis, Alcinoi filia Nausica Telemacho denubit [...] Telemacho ex Nausica natum filium Ulisses Ptoliporthum appellat.

Peu de temps après, à la prière d'Ulysse, Nausicaa, fille d'Alcinoüs, fut accordée en mariage à Télémaque. [...] Ulysse donna le nom de Ptoliporthe au fils de Télémaque et de Nausicaa.

Benoît de Sainte-Maure, Roman de Troie en prose, passim

66. Puis fist tant Ulixés que li roys Alceon dona sa fille Nanfica a Thelamacum son fil : si en fu fez li mariages et furent molt bons amis ensemble et plus s'entr'amerent d'ilec en avant que il n'avoient onques fet ; et fu en son pais puis lonc tans en pés... Et en ce tans meismes conçut Nanfica la fame Thelemacum un fill qui ot non Polifebus, par qui sa ligniee fu puis molt essauciee, si com vos orroïz ci aprés.

Guido delle Colonne, Historia destructionis Troiae, XXXIII passim

Et in tantum cum rege tractauit Anthenore [Faute évidente pour Alcinous] quod Thelamacus Nausicam, filiam regis Anthenoris, duxit in uxorem. Celebrantur igitur nupcie Thelamachi in multorum sollempnitatibus gaudiorum...

... et du meurtre d'Ulysse par Télégonus :

Dictys, Ephemerides belli Troiani, passim

[6,14] Per idem tempus Ulixes territus crebris auguriis somniisque aduersis, omnes undique regionis eius interpretandi somnia peritissimos conducit : hisque refert inter caetera, uisum sibi saepius simulacrum quoddam, inter humanum diuinumque uultum formae perlaudabilis, ex eodem loco repente edi : quod complecti summo desiderio cupienti sibi porrigentique manus, responsum ab eo humana uoce, sceleratam huiusmodi coniunctionem, quippe eiusdem sanguinis atque originis : namque ex eo alterum alterius opera interiturum. Dein uersanti sibi uehementius cupientique causam eius rei perdiscere, signum quoddam mari editum interuenire uisum : idque secundum imperium eius in se iactum, utrumque disiunxisse. Quam rem cuncti qui aderant uno ore exitialem pronunciant, adduntque caueret ab insidiis filii. Ita, suspectus patris animo, Telemachus agris qui in Cephalenia erant relegatur, additis ei quam fidissimis custodibus : praeterea Ulixes secedens in alia loca abdita semotaque quantum poterat somniorum uim euitare nitebatur.

Dans le même temps, Ulysse, épouvanté par de sinistres présages et par des songes effrayants, appela les plus habiles devins de son île pour les consulter à ce sujet. Il leur rapporta que, plusieurs fois pendant son sommeil, une ombre d'une beauté parfaite, réunissant à la fois les formes d'un dieu et celles d'un mortel, se présentait tout-à-coup à sa vue, et sortait toujours du même endroit ; qu'au moment où il se préparait à l'embrasser, et qu'il lui tendait les bras, elle lui parlait en ces termes : « Nous ne pouvons nous embrasser puisque, sortis d'une même origine, l'un de nous doit donner là mort à l'autre ». Lorsqu'il voulait s'approcher d'elle pour en savoir davantage, une lance, sortie tout-à-coup du sein de la mer, venait, par l'ordre de l'ombre, se placer entre eux, et les séparait aussitôt. A ce récit, tous ceux qui étaient présents pensèrent que ce songe lui présageait la mort, et l'engagèrent à se mettre en garde contre les embûches de son fils. Ainsi Télémaque, devenu suspect à son père, fut conduit, par ses ordres, dans l'île de Céphalénie, et confié à des personnes sûres qui veillaient sur lui ; Ulysse, de son côté, se retira dans une profonde solitude, croyant fuir l'effet de cette vision qui le tourmentait.

[6,15] Per idem tempus Telegonus, quem Circe editum ex Ulixe apud Aeacam insulam educauerat, ubi adoleuit, ad inquisitionem patris profectus, lthacam uenit, gerens manibus quoddam hastile, cui summitas marinae turturis osse armabatur, scilicet insigne insulae eius in qua genitus erat : dein edoctus ubi Ulixes ageret, ad eum uenit. Ibi per custodes agri patrio aditu prohibitus, ubi uehementius perstat, et e diuerso repellitur, clamare occipit, indignum facinus prohiberi se a parentis complexu. Ita credito Telegonum ad inferendam uim regi aduentare, acrius resistitur, nulli quippe compertum, esse alterum etiam Ulixi filium : at iuuenis ubi se uehementius et per uim repelli uidet, dolore elatus multos custodum interficit aut grauiter uulneratos debilitat. Quae postquam Ulixi cognita sunt, existimans iuuenem a Telemacho immissum, egressus lanceam quam ob tutelam sui gerere consueuerat, aduersum Telegonum iaculatur. Sed postquam huiusmodi ictum iuuenis casu quodam intercipit, ipse in parentem insigne iaculum emittit, infelicissimum casum uulneri contemplatus. At ubi ictu eo Ulixes concidit, gratulari cum fortuna, confiterique optime secum actum quod per uim externi hominis interemptus, parricidii scelere Telemachum carissimum sibi liberauisset. Dein reliquum adhuc retentans spiritum, iuuenem percunctari, quisnam, et ex quo ortus loco, qui se domi belloque inclitum Ulixem Laertae filium interficere ausus esset. Tunc Telegonus cognito parentem esse, utraque manu dilanians caput, fletum edit quam miserabilem, maxime discruciatus ob illatam per se patri necem. Itaque Ulixi, uti uoluerat, nomen suum atque matris, insulam quoque in qua ortus esset et ad postremum insigne iaculi ostendit. Ita Ulyxes ubi uim ingruentium somniorum animo recordatus est, uulneratus ab eo, quem minime crediderat, triduo post mortem obiit, senior iam, prouectae aetatis, neque tamen inualidus uirium.

Dans le même temps, Télégone, fils d'Ulysse et de Circé, qui avait été élevé dans l'île d'Ea par sa mère, étant parvenu à l'adolescence, partit pour chercher son père et arriva à Ithaque. Il était armé d'une pique dont la pointe était formée d'un os de tourterelle marine, pour indiquer l'endroit où il avait pris naissance. Instruit du lieu où se retirait Ulysse, il s'y rendit. Là les gardes s'opposèrent à ce qu'il approchât du roi, et comme il persistait avec fermeté dans sa résolution, ils le repoussèrent avec violence. Télégone leur dit alors qu'il était étonnant qu'on l'empêche de jouir de la présence de son père. Alors les gardes croyant qu'il arrivait pour tuer le roi, lui résistèrent encore davantage. Tous en effet ignoraient qu'Ulysse eût un autre fils que Télémaque. Le jeune homme se voyant repoussé, et obligé d'abandonner son dessein, se précipite sur les gardes, en abat quelques-uns à ses pieds et en blesse plusieurs autres. Dès qu'Ulysse eut été instruit de ce qui se passait, pensant bien que ce jeune homme était envoyé par son fils, il s'avança aussitôt contre lui, et voulut le frapper de la lance qu'il portait ordinairement pour sa propre sûreté. Mais Télégone évita adroitement le coup, et le perça à l'instant de la sienne à un endroit où la blessure était mortelle. Ulysse se sentant frappé, rendit grâce à la fortune, et s'avoua trop heureux de mourir de la main d'un étranger, et de pouvoir par là affranchir du crime de parricide Télémaque, qui avait toujours été l'objet de son amour. Rappelant ensuite un faible reste de vie, il demanda à son assassin quel pays l'avait vu naître, lui qui avait osé tuer Ulysse, fils de Laërte, si célèbre par sa rare prudence dans les conseils et par sa valeur dans les combats. Télégone reconnaissant alors ce héros, fait retentir l'air de ses gémissements, se déchire le visage de douleur, et se trouve le plus malheureux des hommes d'avoir été lui-même le meurtrier de son père. A la prière d'Ulysse, il lui apprit son nom et celui de sa mère, et dans quelle île il avait reçu le jour : il lui montra aussi ses armes. Ainsi Ulysse, blessé par celui qu'il était loin de redouter, reconnut la vérité de ses songes et des prédictions des devins, et mourut trois jours après, conservant toujours dans un âge avancé la vigueur de la jeunesse.

Benoît de Sainte-Maure, Roman de Troie en prose, 70 sqq

Si m'en vueil orendroit a tant taire et vos conteré d'une merveilleuse aventure qui avint a Ulixés.

71. Il avint en ce tans que Ulixés songa un merveilleux songe, et si vos diré quel. Une nuit li vint devant lui en avision que il veoit une merveilleuse persone, si comme il li sembloit en dormant, tant bele et tant gracieuse comme nul pointre porroit mielz ymage faire ne deviser. Et si estoit en semblance et en figure d'ome, mes de biauté il trespassoit nature d'ome, mes bien pooit estre des dex. Et li sembloit que il avoit si grant volenté que c'estoit merveilles de lui acoler et enbracier et li tendoit les braz tant comme il pooit ne n'amoit riens tant comme lui, si comme il li en fesoit le semblant. Et il li refesoit autresi, car molt le desirroit prés de lui por sa grant biauté et por l'amour que il li mostroit. Et adés s'entre-tendoient les braz et s'esforçoient d'entr'aprochier li uns de l'autre tant comme il poaient par semblant, et si ne s'entrepoaient en nule maniere entretouchier. Et si sembloit a Ulixés que celui portoit, sus le fer d'une lance que il tenoit, une petite tourete ouvree de .II. poissons de mer salee, qui estoit a merveilles noble et cointe, dont il estoit molt esbahiz et trop se merveilloit que ce voloit dire, et li pria molt que il li deist que ce senefioit. Et lors li dist cil au departir tout en plorant a granz lerrnes que ce estoit demostrance vraie et aperte d'empire, et que li uns par l'autre feniroit, et plus ne li en dit. Et ainsi fu Ulixés toute la nuit, et quant il se resveilla, si fu molt esbahiz et chut en grant pensee comment il porroit savoir que ceste avision voloit et que ele pooit senefier. Si manda par tout et fist venir touz les sages homes qu'il pot savoir, et les devins et ceuls qui savoient des ars, et leur dist toute s'avision et leur pria tant comme il onques plus pot que il se preissent garde que ce pooit senefier, « et celui qui m'en dira la certeineté sera mes amis a touz jorz mes, et avra dou mien sa plaine volenté ». Et lors li distrent il tuit : « Ulixés, nos nos somes bien pris garde et bien en creons noz livres qui nos enseignent et nos font certain de ce que tu nos as conté, que tu saches de voir que tes filz t'ocirra et morras par lui. Et ce est la droite senefiance de ce que tu as veu en l'avision de ton songe en dormant ».

72. Quant Ulixés ot oy l'exposition de son songe, si se pensa que il s'en cheviroit bien. Si fist panre Thelemacum son fil, et le fist mener en un chastel sus la mer, loing de gent, qui avoit non Thesemala ; et le fist si fort enfergier que c'estoit merveilles, et garder de cels ou il mielz se fioit; et commanda bien que il ne feust nul qui a lui parlasi ne ne venist : « Et lors, dist il, n'avré ge garde de lui ». Et il distrent que il feroient son commandement tres bien puis que il le voloit. Et si n'avoit il riens ou monde que il tant amast que son pere l'avoit ainsi sanz reson fet enprisonner et mestre en fers et en buies, et dist que molt grant tort li fesoit, car onques n'avoit envers lui pansé mal ne de riens qui feust mespris. Si en furent tuit cil dou pais esbahiz, et molt en tindrent grant parole quant ce fesoit a son enfant. Puis fist Ulixés un rnanoir faire loing de gent molt grant et molt fort, et dist que il metroit toute la poine que il porroit a soi garder de s'avision, que molt se doutoit encore de l'exposition que li devin li avoient esclose. Et quant li manoirs fu fez, si mist gardes a chascune entree et leur fist jurer au mielz qu'il onques pot que nul, quel que il feust, ne parent ne ami tant feust prochien, ne lesseroient passer la porte, et il distrent que nul ne la passeroit ja mes tant que il le commanderoit. Et lors fu il avis a Ulixés que il ne doutoit mes nul encombrier. Si avint que la reyne Cirtés qui demora enceinte de Ulixés quant il se parti de lui, et ot un enfant qui fu apelez Thelegonus, qui estoit en l'aage de XX. ans. Si pria et fist tant a sa mere par biau parler que il enquist qui ses peres estoit, et se ele savoit ou il estoit, et ele li dist que Ulixés l'avoit engendré, qui estoit molt bons chevaliers, « mes molt me corroceras, biax filz, se tu i vas ; car il ne te vit onques, si ne te connoistra. - Dame, dist il, sachiez que ge i vueil aler ». Si s'esmut l'enfant por aler querir Ulixés son pere, car il voloit savoir qui il estoit et de quel lignage. Et quant la reyne Cyrté vit que ele ne le porroit retenir, se li enseigne quele voie et quel chemin il doit tenir, et li prie que tost s'en vieigne et que ill i salue Ulixés son dru et son ami de par lui plus de C. foiz. Si firent molt grani plor et li uns et li autres au departir, et plusors foiz se pasma Cirtés d'ire et de duel quant ele vit que Thelegonus n'en feroit riens ne por priere que ele li feist, ne por mal que il li veist endurer. Si fu bien voirs que il se mist au chemin tout seul sanz compaignie, mes bien fu appareilliez comme noble vassal et de bone lignee, et porta avec lui une petite cooleste ouvree a .II. poissons de mer que sa mere li bailla, et ce estoit tant solement por demostrer le signe de la connoissance de son pais, car il estoit en costume que nul n'issoit de son pais se il ne portoit le seing d'ou de la contree ou il estoit nez, ou de la ou demoroit, que il estoit morz et ocis la ou il aloit.

Et icelui portoit il, car ce estoit li signes dou pais aus .II. reynes qui estoit molt bien conneuz en maintes terres.

73.Quant Thelegonus se fu partiz de Cyrté la reyne sa mere por aler querir Ulixés son pere, il erra tant et chemina que il vint en Akaye, et ilec enquist il molt et demanda quel part il porroit trouver Ulixés. Et pluseurs li ont bien enseignié la ou il estoit, dont il fu molt liez et joieux, et torna maintenant cele part tant qu'il vint bien prés de la porte, mes ceuls qui la porte gardoient le virent venir, et li alerent a l'encontre a l'issue, et li demanderent ou il aloit et que il voloit, et il dist que il voloit entrer leanz et parler a Ulixés, et il li distrent que il n'i enterroit ne que a lui ne parleroit, et il leur dist : « Seigneurs, ne faites mie ce, mes lessiez moi aler veoir Ulixés mon chier pere qui leans est, si le servirai si com ge doi faire, ne il n'est nus qui me deust desfendre par droit ne par reson que ge ne deusse aler veoir mon pere ou il seroit ; et trop grant villenie me feriés se vos ne me lessiés entrer, car bien a II. mois que ge ne fine d'errer por querir et veoir le, et onques ne le vi, dont il me fet mal, mes dés ore mais le connoistrai et servirai si con ge doi ». Et il li distrent que ce estoit por neant que il aloit parlant, que il n'i metroit ja les piez ne li pié lui. Si en fu Thelegonus molt corrociez et pansis en lui meismes que il en porroit faire, et les recommenca de rechief a prier par pluseurs foiz molt humblement et leur dist : « Vraiement, seignors, vos me faites ce que il vos plest, mes onques mais genz ne firent greigneur outrage qui a un bachelier qui est venuz de lointeing royaume por veoir son pere, et ne le volez mie lessier parler a lui, tant solement que l'eust veu et bezié et acolé ». Et cil dient et jurent que lui ne autres n'i enterra, et que Ulixés n'ot onques fil que Thelemacus. Adonc leur jure il quancque il puet que il est ses fiz, et il ses peres, n'onques de rien ne l'en voldrent oÿr ne escouter, ainz le feroient malement en disant lui grant villenies et boutoient en sus de la porte. Et quant Thelegonus vit que ne par priere ne autrement ne le voloient lessier entrer, si en feri si l'un dou poing que il l'abati tout mort a terre, et puis en rua .II. en l'eve des fossez. Si leva li criz et la noize molt grant, et saillirent avant assez et d'uns et d'autres qui la noize oyrent et le cri. Et lors vint il a l'un de bout, et li toli s'espee, et feri a tort et a travers, de ça et de la, et les empira malement et en ocist plus de XV. sanz ce que mainz en navra qui n'avoient pooir d'aux aydier. Et fist tant par sa proesce que il passa le pont et entra enz par mi la porte, mau gré que il en eussent touz, navrez et si senglanz que li sans li coroit dou cors a granz ruz, et en avoit le visaige tout couvert. Et ce n'estoit mie de merveille que mainz cops i reçut et mainz en dona si comme ill i parut.

74.Quant Ulixés oy la noize et le cri qui si grant estoit par son ostel, si fu molt esbahiz et se merveilla trop que ce pooit estre, et cuide que Thelemacus son fil qu'il avoit fet enprisoner oit fet venir celui por lui ocirre. Si sailli sus, et prinst une lance fort et roide dont li fers ert trenchanz et bien acerez, et vient droit vers Thelegonus lance tendue, et le fiert res a res des costez, et le fet tout senglant ; et sachiez que se il ne feust ganchiz, que il l'eust ocis. Lors sezi Thelegonus la lance a .II. mains touz forsenez et plains d'ire et en vet ferir Ulixés son pere par mi le cors a mort, dont ce fu grant doleur (mes itele estoit s'aventure), et gizoit ilecques touz ensenglantez. Si tinst son esperit tant comme il poi, et avoit grant joie, selonc ce que il li estoit, que les auguremenz et les songes et les devineurs erent mençonjables, et ne queroit mes plus savoir mes que il veist l'ore que ses filz Thelemacus ne feust corpables de sa mort. Adonc dist Ulixés : « Diz moi, vassal, qui es tu ne de quel terre, ne qui sont ti parent, qui as Ulixés ocis qui a esté pluseurs foiz en tant mainz biaux estours et en tantes mortiex batailles, et tant granz periux de mer et d'ailleurs, dont ge suis eschapez sanz morir, et orendroit me covient morir par toi ? Certes ge sui molt liez de ce que ge voi que mes filz Thelemacus n'a mie ce fet, et que tuit cil sont menteor qui distrent que mes filz m'ocirroit et que ge morroie par lui ». Et quant Thelegonus oÿ qu'il avoit ocis son pere, si se pasma de duel et dist : « Ha, Ulixés, biax douz peres, ge suis Thelegonus vostre fil que vos engendrastes en la reyne Cyrthés que vos tant amastes ». Et lors li mostra il les enseignes dou pais ou il fu nez, et dist que mes ne queroit il plus vivre aprés lui, puis que son pere avoit ainsi ocis et mis a la mort; si commence a faire merveilleux errant duel et chiet de rechief a terre devant lui touz paumez. Et adonc cognut Ulixés que ce estoit voirs de son songe et que verité li avoient cil qui espont li orent, mes molt en estoit corrociez, et puis que la destinee estoit itele, il li covenoit a soffrir, volsist ou non. Et quant il vie que il s'afinoit, si prist son fil Thelegonum et le beza plus de cent foiz en un raandon, et le conforta molt bonement dou grant duel que il avoit, et li dist sanz point de requeste que iceste ouvre li feust tantost pardonee des dex que il li pardonoit. Aprés refist venir Thelemacus son fil qui estoit enprisonez par son commandement, li quiex savoit ja tout l'afaire ; si vint tel duel fesant de son pere comme merveilles et eust ocis Thelegonus son frere, se ne feust pour son pere dont il avoit poour qu' i n'en feust iriez plus que il estoit. Maintenant qu'il furent ambedui devant lui, si fist la pés et l'acordance d'ax deus, et leur commanda, si chier comme il l'amoient et de tel pooir com il avoit sor aux, que bone pés et bone voillance d'ilec en avant a toz jorz mes feust entre leur .II., et que li uns gardast l'autre et sauvast a son pooir en touz lieus, que il le voloit, et il distrent que si feroient il. Et quant ce fu dit et ostroié, si s'en ala li esperiz de lui, et ainsi fu morz Ulixés.

75. Quant Ulixés fu morz, molt le plorerent et plaindrent touz ceuls dou paÿs et merveilleux grant duel en fesoient, mes au duel que Thele-macus et Thelegonus demenoient ne se porroit nul acomparer, car il fesoient et disoient tant de regrez que il n'est si dur cuer qui les oyst, qui pas se poist tenir de plorer de pitié. Molt fu Ulixés enseveliz a grant honeur, et en fu enportez molt honoreement en Akaye ; et la fu enoinz et enbaumez, et fu mis en un merveilleux riche tombel; et ilec refu molt plaint et plorez de tout. Si reçut Thele-macus l'empire et fu coronez aprés son pere, et puis vesqui il bien .IIIIxx. ans, et fu sages et droituriers et de granz proesces. Si demora o lui Thelegonum son frere .II. ans et plus, et le tint en grant chierté, et molt le commanda servir et honorer a toz; et manda les meilleurs mires dou pais et fist mestre toute la greignor cure que il onques pot en ses plaies guerir, et puis aprés le fist il chevalier. Si ot en lui tant de proesces que molt en estoit prisiez et loez, si issirent de lui maint bon hoir qui puis furent molt prisiez et redoutez. Et quant il s'en volt aler en son pais, se li bailla de compaignie et d'avoir tant comme il en volt. Et ainsi s'en rala Thelegonus en son pais molt honorablement, mes trop estoit corrociez en cuer dou fait de son pere, et oublier ne le pooit. Quant sa mere Cyrthé le vit, qui tant longuement l'avoit desirré et regreté, si en ot molt grant joie. Et si savoit ele bien comment il avoit ouvré, mes por la demore que il fesoit avoit toz jorz poor qu'il ne feust morz; si oublia assez tost son corouz puis que ele l'ot prés de lui. Mes toutevoies ne pooit ele oublier Ulixés que tant avoit amé, ne ne fast puis tant comme ele vesqui que auques touz les jorz ne le plorast. Assez vesqui par reson Thelegonus, car il tint son royaume en bonne pès LX. ans et plus, et molt conquist de richeces et essauça son regne.

Guido delle Colonne, Historia destructionis Troiae, XXXIII passim

[Incipit liber vltimus de morte Vlixis]

De narranda igitur morte Vlixis, obmissis ad presens aliis, presentis hystorie stilus acuitur. Quare narrat et dicit quod Vlixes quadam nocte dormiebat in lecto suo et soporatus talem de se uidit in suo sompno uisionem. Videbatur enim sibi uidere quandam ymaginem iuuenilis forme tante mirabilis speciei quod ymago non putaretur humana sed pocius diuina pre nimia pulchritudine forme sue. Videbatur eciam sibi ultra modum appetere ymaginem illam posse tangere et eam suo cogi tenaciter in amplexu, sed illa suos uitabat amplexus et eum uidebatur a longe intueri. Deinde uero ad eum sibi propinqius uidebatur accedere et interrogabat ab eo quidnam uellet. Sed ille dicebat : « Uolo ut insimul coniungamus ut te forte cognoscam ». At illa dicebat Ulixi : « O quantum in hoc est tua grauis et amara peticio ! Tu enim petis a me ut tibi coniungar. Sed O quantum illa coniunccio erit infelix ! Nam ex tali coniunccione necesse est quod vnus nostrum exinde moriatur ». Deinde uidebatur sibi quod ymago illa eadem ferebat in manu quandam lanceam, in cuius lancee summitate uidebatur haberi quedam turricula tota ex piscibus artificiose composita. Deinde uidebatur sibi quod illa ymago recedere uellet ab eo. Que dicebat sibi : « Hoc est signum impie disiunccionis que inter nos duos est postremo futura ». Vlixes autem tunc sompno solutus ualde miratus est de ipsius sompni uisione; multum suo disquirit in animo ad quid sompnum ipsum tendat. Demum illucescente die perquirit augurios et diuinos et eos ad se uenire mandauit. Quibus uenientibus et recitata eis ipsius sompnii qualitate, ipsi dixerunt quod per significacionem ipsius sompnii aperte conicitur Vlixem per filium exilio uel morti tradendum.

Cuius rei causa Vlixes ualde perterritus Thelamacum filium suum capi fecit et eum mandauit fideli custodia detineri. Ipse uero elegit sibi locum in quo posset secure manere in quorundam suorum secretariorum fidelissima comitiua. Vallauit enim locum ipsum muris altis et fortibus, ad quem non nisi per pontem quendam uolticium haberi poterat accessus. Statuit eciam quod ad eum nul-lus accederet nisi esset aliquis de suis secretariis supradictis.

Factumque est quod cum Ulixes dudum ex Circe quendam filium suscepisset, Thelagonum nominatum, qui cuius esset filius a nemine sciebatur preterquam a Cyrce sua tantummodo genitrice. Factus est Thelagonus annorum xv, qui studiose querit a matre cuius fuerit filius et si viuit pater et in quo loco moretur. Diu negauit mater eum certificare de patre. Demum cum Thelagonus matrem super inquisicione patris diucius stimulasset, affecta tedio stimuli filialis filio pandit et reserat regem Vlixem esse patrem ipsium et eum de loco regni sui ubi moratur Vlixes diligenter instruxit. Telagonus autem in relacione matris est nimium factus letus. Desiderio tamen nimio in vno fluctuat patrem suum uidere uelle, et ad eum accedere desideranti animo exardescit. A matre igitur sua obtenta licencia, que de celeri reditu rogat illum, Thelagonus se accinxit ad iter, et tantum per dietas suas laboriose processit quod peruenit Acayam, ubi factus certus de loco ubi morabatur Vlixes ad ipsum locum accedit. Cunque quadam die lune in mane applicuisset ibidem, in introitu pontis inuenit custodes Vlixis, quos affectuose rogat ut eum ad Vlixem accedere sponte permittant. Negant illi, mandatum domini seruare uolentes. Instat Thelagonus humilibus precibus, at illi uiribus utentes repellunt eum et iniuriose et uiolenter impellunt. Quare Thelagonus, dum illatas sibi pati noliet iniurias, in vnum ex predictis custodibus irruit, et pugno clauso sic potenter in cathena colli percussit quod, eius fracta cathena colli, protinus expirauit. Alios uero custodes eius socios impellendo uiriliter a ponte deiecit et precipitauit in vallo. Fit ergo clamor maximus. Quare multi irruentes ad arma in Thelagonum irruunt, ipsum interficere sathagentes. Sed Thelagonus, facto impetu in vnum eorum qui aggressi sunt eum, ensem quem habebat in manu ab eo violenter extěrpat, et in alios irruens ense nudo quindecim interfecit ex eis et ipse ab eis est grauiter uulneratus. Deinde cum clamor fortius inualesceret, ad uoces clamoris surgit Vlixes, putans ne aliquis de familia Thelamaci detenti per domesticos suos inuaserit illos ut pro sui liberatione eos uulneret aut occidat. Quare iratus cum quodam iaculo quod ferebat in manu ad locum clamoris accelerat, ubi suos uidit ab illo adolescente sibi incognito interfectos. Cernit eum et in uindictam necis occisorum iaculum ipsum uibrauit in ipsum sic quod eum percussit. Ex eo non tamen multum lesit eundem. Sed Thelagonus contra Vlixem iaculum impetuose uibrantem, cum non cognosceret si esset Vlixes, arrepto illo eodem iaculo quod ipse uibrauerat et in terram ceciderat, ipsum impetu duriori retorsit sic quod ipsum ex eo letaliter uulnerauit, costas eius ex ipso uulnere perforando. Quare Vlixes ex ipso ictu uulneratus in terram decidit, seipsum sustinere non ualens, vtpote qui morti sentit se esse uicinum. Corporee itaque uires in ipso deficiunt, et cum ipse quasi defecerit in sermone, balbucientibus uerbis querit a Thelagono quisnam esset. Dum Vlixes tunc ad memoriam suam reducit 1etalem sui sompnii visionem, Thelagonus vero ad interrogacionem VIixis a circumstantibus querit quis ille sit qui ipsum interrogat. Dicunt ei Ulixem esse. Quo audito, Telagonus anxius exclamat dicens : - Ve michi ! Veni uidere patrem meum ut eo uiuente letarer cum eo, et nunc factus sum occasio mortis eius Et statim pre dolore nimio in terram cecidit ueluti semiuivus. Demum a terra consurgens, laniatis uestibus, cum esset inermis, facíem suani pugnis contundít in lacrimis et a suo uertice flauos capillos euellit. Prostratus itaque ad pedes Vlixis se dirigit, in singultibus lacrimarum dicit se esse Thelagonum infelicem Circes filium, « quem tu, Vlixes pater mi, ex ea infeliciter suscepisti. Si morieris, kare parer, dii faueant ut tecum moriar et post te me viuere non perrnittant ». Ulixes uero agnouít eum suum esse filium ex Circe, blanditus est ei in sui corporis debilitate maxima in qua erat, et mandat fractis eloquiis ut a lacrimis abstineat et dolore. Pro Thelamaco filio suo mittit, qui ueniens in Thelagonum querit irruere, quasi necem patris auidus vindicare. Sed Ulixes uerbis et nutu ut potuit Thelamaco inhibet ne insurgat in ipsum, ymo ut eum carum habeat utpote fratrem suum. Ducitur ergo Vlixes in Acayain fere mortuus, ubi triduo tantum uixit et post triduum expirauit, qui in Achaya honore regio sepelitur.

Post eius mortem statim Thelamacus paterni regni fuit assumptus in regem. Thelagonum fratrem suum multo fovet honore, per annum vnum et dimidium detinuit secum, in honore maximo fecit eum militem. Retinere uoluit eum magis, sed Thelagonus matris sollicitatus ad litteras, ut matri satisfaciat, ěnuitus recedit a fratre. In cuius recessu Thelamacus multum eum donis et muneribus honorauit et omni eo quod faceret ad apparatum recessus ipsius. Recessit ergo Thelagonus a fratre suo Thelamaco in multis lacrimis defluentibus ab utroque. Qui post rccessum eius in Aulidem insulam ad matrem sanus applicuit. De cuius reditu et aduentu ultra modum mater facta est ylaris, que multum fuerat de filio curiosa propter tanta fatorum discrimina que sic infeliciter emerserunt, prout ipsa preuiderat arte sua. Non post multos autem dies Circes letaliter egrotauit. De qua egritudine uiolenter oppressa diem clausit extremum. Thelagonus igitur in regem assumitur et uixit in regno suo annis feliciter lx. Thelamacus uero regnavit in Achaya annis lxx et multiplicatum est regnum Achaie sub eius gubernacione ualde nimis. Vlixes autem uixit annis lxxxxiii et feliciter mortuus est in regno suo.



Dante et la mort d'Ulysse

Un personnage comme Ulysse ne pouvait pas ne pas intéresser l'auteur de la Divine Comédie. Dante ne connaissait pas le grec, mais cependant bien des poètes et écrivains latins lui donnaient des notices du héros d'Ithaque. Il imagine qu'Ulysse n'est jamais revenu en sa patrie, mais qu'il est allé directement de l'île de Circé au-delà des colonnes d'Héraklès, poussé par son noble désir de tout connaître. Après cinq mois de navigation, il arrive près de la montagne du Purgatoire, dont Dieu veut faire connaître l'existence seulement après la venue du Christ rédempteur. Là le navire d'Ulysse s'enfonce dans l'Océan. Dante a-t-il tout imaginé par la puissance de son imégination, ou a-t-il été inspiré par une source inconnue, qui ne serait ni un poème du Cycle ni l'un de nos écrivains tardo-latins et médiévaux ?


Merci au professeur Francesco Chiappinelli, auteur de l'Impius Aeneas, de nous avoir fourni ces textes.
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