1- 2- 3- 4- 5- 6- 7- 8- 9- 10- 11-
I. Je vois,
pères conscrits, que tous vos regards sont
dirigés sur moi ; je vois que vous êtes
préoccupés non seulement du danger qui vous
menace vous et la république, mais encore, et n'en
existât-il plus d'autre, de celui que je cours (1). Votre
intérêt adoucit mes maux et console mes douleurs
; mais, au nom des dieux immortels, bannissez-le de vos
coeurs, je vous en conjure, et sans penser à mon
salut, songez à vous et à vos enfants. Car pour
moi, s'il est dans la destinée de mon consulat de
m'imposer toutes les amertumes, tous les chagrins, tous les
tourments, je ne les supporterai pas seulement avec courage,
mais même avec plaisir, pourvu que la gloire et le
salut du sénat et du peuple romain soient le fruit de
mes travaux.
Vous voyez en moi, pères conscrits un consul qui n'a
jamais cessé d'être exposé à la
mort et aux trahisons, ni dans le forum, sanctuaire de toute
justice (2) ;
ni dans le champ de Mars, consacré par les auspices
consulaires (3)
; ni dans le sénat, suprême asile de toutes les
nations ; qui n'a pu trouver un abri dans sa maison, refuge
assuré pour tous, ni dans la couche où chacun
trouve le repos, pas même sur ce siège
d'honneur, sur cette chaise curule. Silence (4),
résignation, sacrifices (5), rien ne m'a
coûté ; j'ai souffert bien des maux pour vous
épargner bien des craintes.
Aujourd'hui, si la volonté des dieux immortels me
destine, en terminant mon consulat (6), à vous
arracher, vous, pères conscrits, et le peuple romain
aux horreurs du carnage, vos femmes, vos enfants, les
vestales aux plus cruels outrages, les temples, les
sanctuaires, cette belle patrie que nous chérissons
tous à un affreux incendie, l'Italie entière
à la guerre et à la dévastion ; quel que
soit le sort que me réserve la fortune, je m'y
soumets. En effet, si P. Lentutus a cru, sur la foi des
devins, que son nom devait être fatal à la
république, pourquoi ne serais-je pas heureux que le
destin ait marqué mon consulat pour votre salut
?
II. Ainsi,
pères conscrits, songez à vous-mêmes,
veillez sur la patrie, sauvez vos personnes, vos femmes, vos
enfants, vos biens ; défendez le nom et l'existence du
peuple romain ; plus de ménagements, plus
d'inquiétudes pour moi. Car d'abord je dois
espérer que tous les dieux protecteurs de cette ville
accorderont à mes services une légitime
récompense ; ensuite, s'il m'arrive malheur, je
mourrai sans regret et sans faiblesse. La mort ne peut
être, en effet, ni honteuse pour un homme courageux, ni
prématurée pour un consulaire (7), ni malheureuse
pour un sage. Je n'ai cependant pas un coeur de fer, je ne
demeure pas insensible à la vue de la tristesse d'un
frère dont je partage la tendre affection (8), et des larmes de
tous ceux dont vous me voyez entouré (9). Ma pensée
me reporte souvent aussi dans ma maison près d'une
femme éperdue, d'une fille tremblante et d'un fils au
berceau, que la république semble adopter comme un
otage qui Iui répond des actes de mon consulat ; je
vois aussi dans cette enceinte un gendre qui attend l'issue
de ce grand jour. Oui, ces objets touchent mon âme,
mais pour m'inspirer le désir de les sauver avec vous,
fût-ce aux dépens de ma vie, plutôt que de
les laisser périr avec nous tous, avec la
république.
Veillez donc, pères conscrits, au salut de l'Etat ;
regardez autour de vous, voyez quels orages vous menacent, si
vous ne les conjurez. Ce n'est point un Tib. Gracchus,
voulant être une seconde fois tribun du peuple ; ce
n'est point un C. Gracchus, s'efforçant de soulever
les partisans de la loi agraire ; ce n'est point L.
Saturninus, meurtrier de C. Memmius (10), qui sont
amenés devant vous et qui attendent l'arrêt de
votre sévère justice ; vous tenez dans vos
mains les hommes qui sont restés dans Rome pour la
livrer aux flammes, pour vous immoler tous, pour ouvrir les
portes à Catilina. Vous avez leurs lettres, leurs
cachets, leur écriture, enfin l'aveu de chacun des
complices : on cherche à séduire les Allobroges
; on soulève les esclaves ; on appelle Catilina ; on
forme le projet d'un massacre général, auquel
ne survivra pas même un seul de nous pour
déplorer l'extinction du nom romain et gémir
sur le désastre d'un si grand empire.
III. Tous ces
complots vous ont été
révélés par des témoins, leurs
auteurs les ont avoués, vous-mêmes vous en avez
déjà fait connaître plus d'une fois votre
jugement (11)
: d'abord, lorsque vous m'avez rendu des actions de
grâces particulières, en déclarant que
mon courage et ma vigilance ont découvert ces complots
impies ; ensuite, lorsque vous avez forcé P. Lentulus
d'abdiquer la préture, et décidé qu'il
serait mis en prison avec ceux que vous aviez jugés
coupables ; mais surtout quand vous avez ordonné, en
mon nom, des prières publiques, honneur qu'avant moi
ne reçut aucun magistrat civil ; enfin, quand hier
vous avez décerné de magnifiques
récompenses aux députés des Allobroges
et à Titus Vulturcius. Tous ces actes ont un tel
caractère, que les accusés dont vous avez
prononcé la détention paraissent
évidemment condamnés par vous.
J'ai cependant voulu, pères conscrits, vous appeler,
comme si l'affaire était encore intacte (12), à
prononcer votre jugement sur le fait et votre
résolution sur le châtiment. Je vous parlerai
d'abord comme doit le faire un consul. Je voyais depuis
longtemps de coupables fureurs couver au sein de la
république et préparer l'explosion de malheurs
inconnus ; mais que des citoyens formassent une si vaste, une
si funeste conjuration, je ne l'aurais jamais pensé.
Maintenant, quoi qu'il en soit, et de quelque
côté que penchent vos sentiments et vos
opinions, il faut vous prononcer avant la nuit (13). Vous voyez
l'énormité du crime qu'on vous dénonce.
Si vous croyez qu'il ne s'y rattache qu'un petit nombre de
complices, vous êtes dans une grande erreur. Le mal
s'étend plus loin qu'on ne pense ; il n'a pas
seulement infecté l'Italie, il a aussi franchi les
Alpes, et, continuant sa marche secrète, envahi
déjà plusieurs provinces. En triompher par la
patience, par les lenteurs, c'est impossible. Quelque
remède que vous choisissiez, dans la promptitude seule
est le succès.
IV. Je vois
jusqu'à présent deux opinions en
présence : celle de D. Silanus (14), qui juge dignes
de la mort ceux qui ont voulu détruire la
république ; celle de C. César (15), qui, rejetant la
peine de mort, adopte toute la rigueur des autres supplices.
Tous deux, ainsi que le veulent leur rang et
l'énormité du crime, font preuve de la
dernière sévérité. Le premier ne
pense pas que des hommes qui ont voulu nous arracher la vie
à tous, exterminer le peuple romain, renverser
l'empire, effacer du monde le nom de Rome, doivent jouir un
seul instant de la lumière et de l'air que nous
respirons ; il nous rappelle que la république a
souvent frappé du dernier supplice (16) des citoyens
coupables. Le second se fait cette idée de la mort,
que les dieux immortels ne l'ont point établie comme
un châtiment pour le crime, mais comme une loi de la
nature et un repos après les misères de la vie
(17). Aussi le
sage la voit-il toujours approcher sans regret, et l'homme
courageux souvent avec plaisir. Mais les fers, les fers pour
toujours, furent inventés sans aucun doute pour la
punition expresse de quelque crime épouvantable. Il
veut qu'on distribue les condamnés dans les villes
municipales. Si l'on veut forcer celles-ci de les recevoir,
on commet une injustice (18) ; si on les en
prie, on aura peine à l'obtenir. Prononcez toutefois
cet arrêt, si vous le jugez à propos (19). Je prends sur
moi de chercher, et je trouverai, je l'espère, des
villes qui ne croiront pas de leur honneur de se refuser
à une mesure que vous aurez prise pour le saint de
tous. César prononce en outre des peines
sévères contre tout habitant qui briserait les
fers des coupables : il les entoure de gardes formidables et
défend, par une rigueur bien légitime envers
ces hommes pervers, que personne, après leur
condamnation, ne puisse demander au sénat ou au peuple
de l'adoucir ; il leur ôte jusqu'à
l'espérance, unique consolation des malheureux. Il
ordonne encore la confiscation de leurs biens ; il ne laisse
à ces scélérats que la vie, parce que
s'il la leur arrachait, il les délivrerait, par un
instant de souffrance, de toutes les douleurs de l'esprit et
du corps, de tous les tourments du crime. Aussi, pour
inspirer dans cette vie quelque terreur aux méchants,
les anciens ont-ils voulu qu'il y eût dans les enfers
des supplices réservés aux impies : ils
comprenaient qu'affranchie de cette crainte, la mort
même n'avait plus rien de redoutable.
V. Maintenant,
pères conscrits, je vois quel est mon
intérêt. Si vous adoptez l'avis de C.
César, comme il a toujours suivi dans sa vie publique
la route qu'on regarde comme celle des amis du peuple
(20),
peut-être aurai-je moins à redouter les orages
populaires pour un décret qu'il aura proposé,
qu'il aura soutenu lui-même (21) ; si vous vous
rangez, au contraire, à l'opinion de Silanus, je ne
sais s'il n'en résultera pas de plus graves embarras
pour moi. Au reste, l'intérêt public doit
l'emporter sur mes dangers personnels. C. César, par
un vote digne de son rang et de sa glorieuse naissance, nous
donne le gage de son attachement inébranlable à
la république. Il nous a fait comprendre quelle
distance sépare le futile harangueur qui flatte le
peuple et l'orateur vraiment populaire qui songe à le
sauver.
Je sais tel de ces hommes jaloux de passer pour amis du
peuple, qui ne siège pas au milieu de vous, sans doute
afin de ne pas porter une sentence de mort contre des
citoyens romains. Et il les a fait mettre en prison, il y a
trois jours, et il a voté des actions de grâces
en mon nom, et il décernait hier aux délateurs
de magnifiques récompenses. Or, celui qui a
décrété la prison pour les
accusés, des félicitations pour le magistrat
instructeur (22), des
récompenses pour les délateurs, ne laisse de
doute à personne sur la façon dont il juge le
fond même de la cause. Quant à C. César,
s'il sait que la loi Sempronia (23) fut
établie en faveur des citoyens romains, il sait aussi
que celui qui s'est fait l'ennemi de la patrie ne peut plus
être un citoyen, et qu'enfin l'auteur lui-même de
cette loi fut puni par l'ordre du peuple (24) de ses attentats
contre la république. Il ne pense pas non plus que
Lentulus, malgré ses largesses et ses
prodigalités, puisse être appelé l'ami du
peuple, lorsqu'il a, sans frémir, conçu le
dessein si barbare d'égorger tous les citoyens et
d'anéantir cette ville. Aussi, quoique le plus doux et
le plus clément des hommes, il ne balance pas à
plonger pour toujours P. Lentulus dans les
ténèbres et dans les fers, il menace du
châtiment de la loi quiconque voudrait plus tard se
faire un titre de la grâce du coupable et se rendre
populaire au risque de perdre le peuple romain. Il prononce
en outre la confiscation des biens de P. Lentulus, afin
qu'à tous les tourments de l'âme et du corps
s'ajoutent aussi l'indigence et la misère.
VI. Ainsi donc, en
vous rangeant à cette opinion, vous associerez
à ma cause devant l'assemblée un homme cher et
agréable au peuple ; en préférant celle
de Silanus, il sera facile de nous justilier tous du reproche
de cruauté, car l'on m'accordera que c'est le
châtiment le plus doux. Au reste, pères
conscrits, quelle cruauté peut-on commettre quand il
s'agit de punir un crime si horrible ? J'en juge, en effet,
par ce que je ressens. Puissé-je ne jamais jouir avec
vous du salut de la république, si l'extrême
sévérité que je montre dans cette cause,
bien loin de venir de l'inflexibilité de mon âme
(y a-t-il quelqu'un de plus doux que moi ?) n'est pas
plutôt la preuve d'un profond sentiment
d'humanité et de pitié. Je crois voir, en
effet, cette ville (25), la
lumière du monde, le rempart de toutes les nations,
disparaissant tout à coup dans un vaste embrasement ;
je me représente sous les cendres de la patrie nos
malheureux citoyens entassés sans sépulture ;
j'ai devant les yeux l'image de Céthégus, et je
le vois assouvir sa fureur dans votre sang. Mais quand je me
figure Lentulus revêtu de cette royauté dont il
avoue avoir fondé l'espérance sur des oracles,
un Gabinius honoré de la pourpre (26), Catilina
reçu dans Rome avec son armée ; alors je songe
avec horreur aux cris lamentables des mères, à
la fuite des jeunes filles et des enfants, aux outrages subis
par les vestales, et c'est parce que je trouve ces malheurs
cruels et déplorables, que je montre une rigueur
externe contre ceux qui ont voulu les amasser sur nous. Je
vous le demande, en effet, si un père de famille
voyait ses enfants assassinés par un esclave, sa femme
égorgée, sa maison livrée aux flammes,
et ne lui faisait pas subir le plus terrible supplice,
passerait-il pour clément et humain, ou ne serait-il
pas regardé comme le plus barbare et le plus cruel des
hommes ? Pour moi, je croirais sans coeur et sans entrailles
celui qui ne chercherait pas dans la douleur et les tourments
du coupable un adoucissement à sa douleur et à
ses tourments. Nous aussi, pères conscrits, en nous
montrant impitoyables envers des hommes qui ont voulu nous
massacrer avec nos femmes et nos enfants, qui se sont
efforcés de détruire à la fois et la
demeure de chacun de nous et le siége de la
république entière, qui ont voulu
établir les Allobroges sur les ruines de Rome, sur les
cendres fumantes de l'empire, nous paraîtrons humains ;
mais si nous voulons être trop indulgents, nous
n'échapperons pas au reproche d'une
insensibilité cruelle pour les désastres de la
patrie et les maux de nos concitoyens.
Est-ce que L.
César, cet homme si courageux et si
dévoué à la république, a
semblé trop cruel, lorsqu'il a dit, il y a trois
jours, que l'époux de sa soeur (27), femme d'un
mérite si distingué, devait être mis
à mort, lorsqu'il l'a dit devant lui ? lorsqu'il a
rappelé que son aïeul (28) avait péri
par l'ordre du consul avec son fils jeune encore, qu'il avait
chargé d'une mission, et qui fut tué dans la
prison ? Et ces hommes, qu'avaient-ils fait de comparable
à ce que nous voyons ? Avaient-ils formé le
projet d'anéantir la république ?
C'étaient des largesses promises (29), c'était
une lutte de partis, qui troublaient alors la
république. A cette époque, l'illustre
aïeul de Lentulus (30) poursuivit
Gracchus les armes à la main ; il reçut
même une grave blessure en repoussant toute atteinte
aux droits de la république et c'est pour la renverser
de fond en comble que son petit-fils amène à sa
suite les Gaulois, qu'il soulève les esclaves, qu'il
appelle Catilina, qu'il charge Céthégus
d'égorger les sénateurs, Gabinius de massacrer
les autres citoyens, Cassius de livrer Rome aux flammes,
Catilina de désoler et de piller l'Italie
entière. Ne craignez pas, croyez-moi (31), de
paraître trop sévères en face d'un
attentat aussi impie ; craignez bien plutôt de vous
montrer cruels envers la patrie par l'indulgence de votre
arrêt ; nul n'accusera votre rigueur, si vous frappez
d'une peine terrible nos plus mortels ennemis.
VII. Toutefois,
pères conscrits, je ne puis me taire sur ce que
j'entends dire autour de moi. Certaines paroles arrivent
à mon oreille ; on semble craindre que les moyens ne
me manquent pour exécuter le décret que vous
porterez aujourd'hui. Tout est prévu, tout est
préparé, tout est arrêté,
pères conscrits, moins encore par mes soins attentifs
et mon extrême vigilance, que par la ferme
volonté du peuple romain, décidé
à conserver son souverain empire, ainsi que la fortune
de tous les citoyens. Autour de nous sont réunis des
hommes de tous les ordres et de tous les âges ; ils
remplissent le forum, les temples environnants, toutes les
avenues qui conduisent à cette enceinte. C'est que
cette cause est la seule, depuis la fondation de Rome, qui
ait réuni tous les coeurs, à l'exception de ces
hommes qui, voyant leur perte inévitable, ont mieux
aimé nous entraîner tous dans leur chute que de
succomber seuls.
Je les excepte et je les mets volontiers à part ; car,
loin même que je les range dans la classe des mauvais
citoyens, je vois en eux nos plus cruels ennemis. Quant aux
autres, dieux immortels ! quelle affluence, quel zèle,
quel courage pour la gloire et le salut de la
république ! Que dirai-je ici des chevaliers romains,
qui, sans vous contester la prééminence du
rang, la supériorité du conseil (32), rivalisent avec
vous de dévouement pour la patrie ? Réunis et
réconciliés avec le sénat après
de longues années de dissensions (33), Ils s'associent
à vous en ce jour pour défendre la même
cause. Si cette union, affermie sous mon consulat, devait
durer toujours, désormais, je vous l'assure, la
république n'aurait plus à craindre aucun
trouble intérieur, aucune discorde domestique. Je vois
amenés ici, par un semblable zèle pour la
défense commune, les tribuns du trésor (34), ces courageux
citoyens ; j'y vois aussi tous les secrétaires
(35), qui
réunis par hasard au trésor public pour le
tirage au sort (36), négligent
tout pour ne songer qu'au salut général.
Nous avons autour de nous tous les hommes libres, même
ceux des rangs les plus obscurs. Quel est, en effet, le
citoyen pour qui ces temples, l'aspect de cette ville, la
possession de la liberté, cette lumière
même qui nous éclaire, cette terre de la patrie,
ne soient des biens aussi précieux qu'ils sont doux et
pleins de charme ?
VIII. Il est juste,
pères conscrits, de louer l'ardeur des affranchis ;
ces hommes qui ont acquis par leur mérite le droit de
cité (37), regardent comme
leur véritable patrie cette ville que d'autres,
nés dans son sein, et issus du plus haut rang (38), n'ont pas
traitée comme leur mère, mais comme une
ennemie. Que parlé-je des affranchis ?
l'intérêt de leur fortune, leur droit de
citoyens, l'amour enfin de la liberté, le plus doux
des biens, les animent la défense de la patrie. Il
n'est pas un esclave, pour peu que sa condition soit
tolérable (39), qui n'ait
horreur de cette audacieuse tentative, qui ne désire
la conservation de la république, et ne concoure de
tous ses voeux (40) et de tout son
pouvoir au salut commun.
Que personne ne s'alarme donc du bruit qu'on a
répandu, qu'un vil agent de Lentulus (41) parcourt les
boutiques dans l'espoir de séduire à prix
d'argent des citoyens pauvres et confiants ; cette tentative
a été faite, il est vrai, mais il ne s'est pas
trouvé d'hommes assez malheureux ou assez pervers pour
ne pas vouloir sauver cet asile où le travail fournit
à leurs besoins journaliers, cet abri de leur famille,
leur lit, le calme enfin de leur paisible vie. Le plus grand
nombre de cette classe industrieuse, ou, pour mieux dire,
cette classe tout entière n'aime rien tant que la
tranquillité. Tous les profits de son travail, tous
ses moyens d'existence, ont besoin pour être
assurés d'une grande population ; la paix seule
alimente l'industrie. Si ces avantages diminuent quand les
ateliers sont fermés (42), que serait-ce
s'ils devenaient la proie des flammes ?
Ainsi, pères conscrits, les secours du peuple romain
ne vous manquent point ; prenez garde qu'on ne croie pas que
vous manquez au peuple romain.
IX. Vous avez un
consul qui a échappé à des dangers,
à des pièges, à la mort même,
moins pour conserver ses jours, que pour sauver les
vôtres ; tous les ordres, rivalisant de courage et de
zèle, n'ont qu'une âme, qu'une volonté,
qu'une voix pour le salut de la république ;
menacée de la flamme et du fer par une conjuration
impie, la patrie suppliante tend vers vous ses mains ; elle
vous implore pour elle-même, elle vous recommande la
vie de tous les citoyens, la citadelle, le Capitole, les
autels des dieux Pénates, le feu éternel et
sacré de Vesta, les temples et les sanctuaires des
divinités, les murs et les maisons de Rome. Enfin
c'est sur votre vie, sur celle de vos femmes et de vos
enfants, sur la fortune, sur les biens, sur le foyer de
chaque citoyen (43) que vous allez
prononcer aujourd'hui.
Vous avez un chef qui ne s'occupe que de vous sans songer
à lui-même, ce qui est un avantage bien rare ;
vous avez, ce qui se voit aujourd'hui pour la première
fois dans une cause politique, tous les ordres, tous les
citoyens, le peuple romain tout entier uni dans un même
sentiment. Songez que de travaux il a fallu pour fonder cet
empire ; que de courage pour y affermir la liberté ;
quelle protection divine pour en étendre et en
agrandir la puissance, et une seule nuit a failli tout
détruire. Il faut empêcher aujourd'hui que
jamais, à l'avenir, de mauvais citoyens ne puissent,
je ne dis pas accomplir mais seulement former de semblables
projets. Et si je vous tiens ce langage, ce n'est pas pour
exciter votre zèle, qui prévient, pour ainsi
dire, le mien, mais pour remplir mon devoir de consul, qui
veut que ma voix se fasse entendre la première
à la république.
X. Maintenant,
pères conscrits, avant de revenir à l'objet de
la délibération, je vous parlerai quelques
instants de moi-même. Je vois que je me suis fait
autant d'ennemis qu'il y a de conjurés, et vous savez
qu'ils sont nombreux ; mais ce n'est, à mes yeux,
qu'une foule vile et impuissante, méprisable et
abjecte. Et si un jour, poussée par l'audace
criminelle de quelque factieux, elle venait à
prévaloir contre votre autorité et contre celle
de la république, jamais cependant, pères
conscrits, je ne me repentirai de ma conduite ni de mes
conseils. En effet, la mort, dont peut-être ils me
menacent, est le partage de tous les hommes ; mais la gloire
dont vos décrets m'ont honoré n'a
été donnée qu'à moi seul. Vous
avez décerné des actions de grâces
à d'autres pour avoir bien servi la république
; je suis le premier qui en reçoive pour l'avoir
sauvée.
Illustrons la mémoire du grand Scipion (44), dont le
génie et la valeur forcèrent Annibal de
retourner en Afrique et d'abandonner l'Italie ; payons un
magnifique tribut d'éloges au second Africain (45), qui
détruisit deux villes, les ennemies les plus
acharnées de notre empire, Carthage et Numance ;
regardons comme un héros L. Paul Emile, dont
Persée, ce monarque si puissant autrefois et si
renommé, décora le triomphe (46) ;
éternisons la gloire de Marius, qui deux fois
délivra l'Italie de l'invasion et de la crainte de la
servitude (47). Plaçons
au-dessus de tous ces héros Pompée, dont les
exploits et les vertus n'ont d'autres limites que celles
où s'arrête la course du soleil. Au milieu de
ces gloires, la mienne trouvera sans doute une place,
à moins qu'il ne soit plus beau d'ouvrir des provinces
où nous puissions nous retirer, que de conserver
à nos soldats absents et victorieux une patrie qui les
reçoive après leur triomphe (48).
Il est vrai que les victoires sur l'étranger ont un
avantage sur celles que l'on remporte dans les guerres
domestiques ; les ennemis du dehors, s'ils sont
subjugués, deviennent nos esclaves ; s'ils sont
reçus en grâce (49), ils se croient
enchaînés par la reconnaissance ; mais quand des
citoyens, égarés par le délire, se sont
une fois déclarés les ennemis de leur patrie,
lors même que vous aurez sauvé la
république de leurs coups, vous ne pourrez ni les
dompter par la force, ni les désarmer par la
clémence. Je sais donc bien que je m'engage dans une
guerre éternelle avec les mauvais citoyens ; mais
appuyé sur votre secours et celui de tous les gens de
bien, fort du souvenir de nos dangers. souvenir qui ne se
conservera pas seulement dans la mémoire de ce peuple
que j'aurai sauvé, mais qui se perpétuera dans
les annales et dans la reconnaissance de toutes les nations,
je suis sûr d'écarter facilement le péril
et de moi et des miens. Non, jamais aucune force ne
prévaudra contre l'union du sénat et des
chevaliers romains, et ne pourra rompre ou affaiblir cette
puissante ligue de tous les hommes de bien.
XI. Ainsi,
pères conscrits, pour le sacrifice que j'ai fait du
commandement (50) d'une
armée et d'une province, pour le triomphe et les
autres distinctions glorieuses auxquelles j'ai
renoncé, afin de veiller sur Rome et sur votre salut
à tous ; pour ces liaisons de clientèle et
d'hospitalité dans les provinces, liaisons que dans la
ville même je cultive (51) avec autant de
soin que je les recherche ; pour tous ces avantages perdus,
pour mon dévouement sans bornes à vos
intérêts, pour ma vigilance dont le salut de la
république vous montre les effets, je ne vous demande
rien autre chose que de conserver la mémoire de cet
événement et de tout mon consulat ; tant
qu'elle restera gravée dans vos âmes, je me
croirai entouré du rempart le plus sûr. Que si
la puissance des méchants trompait mon espoir et
triomphait de mes efforts, je vous recommande mon fils encore
enfant ; sa vie je n'en doute pas, ses honneurs mêmes
seront assurés, si vous n'oubliez pas qu'il est le
fils de celui qui se dévoua seul pour tout
sauver.
Vous allez donc décider de votre sort, pères
conscrits, du sort du peuple romain, de vos femmes et de vos
enfants, de la conservation de vos autels et de vos foyers
(52), des
sanctuaires et des temples, des édifices de Rome et de
vos maisons, de l'empire, de la liberté, du salut de
l'Italie et de la république entière ; ainsi
prononcez avec la réflexion et la fermeté que
vous avez déjà fait paraître. Vous avez
un consul qui ne balancera pas dans son obéissance
à vos décrets, et qui saura toute sa vie les
défendre et en assurer par lui-même
l'exécution.
(1) Si id
depulsum sit, de meo periculo... Cicéron
n'exprimait qu'un bien juste pressentiment de la haine
qu'il allait soulever contre lui, s'il se rangeait
à l'avis de Silanus, puisque, quelques
années plus tard, les partisans de Catilina, dont
Clodius était le chef, ayant repris le dessus, il
fut banni de Rome, sous le prétexte qu'il avait
fait exécuter les conjurés sans
jugement. |
|
(2) In quo
omnis aequitas continetur. C'était sur le
forum que les Romains tenaient la plupart de leurs
assemblées politiques, et qu'ils traitaient aussi
de leurs affaires particulières les plus
importantes. C'était là que le
préteur urbain avait un tribunal permanent
où il tenait ses audiences. Le forum était une grande place carrée, presque régulière, mais moitié plus longue que large, qui s'étendait entre le mont Palatin et le mont Capitolin. Tout autour s'élevaient des temples, des basiliques, des arcs de triomphe ; au milieu, des autels, des colonnes, des statues. |
|
(3) Auspiciis
consularibus. Les comices consulaires,
convoqués par centuries, se tenaient dans le Champ
de Mars et ne s'ouvraient jamais que par la
cérémonie des auspices. Ce
préliminaire était exigé aussi pour
les comices par curies, qui ne pouvaient se réunir
non plus que dans le Champ de Mars ; mais les comices par
tribus en étaient affranchis, et pouvaient se
tenir indifféremment, soit au forum, soit sur la
place du Capitole, soit dans le Champ de Mars, soit au
cirque Flaminius (Voir, dans le premier discours contre
Catilina, la note relative aux différentes sortes
de comices). |
|
(4) Multa
tacui. Cette réticence semble s'appliquer
à plusieurs personnages puissants que la rumeur
publique accusait d'être favorables aux projets des
conjurés, tels que Crassus, César et
quelques autres encore. |
|
(5) Multa
concessi. Cicéron, pour détacher
Antoine du parti de Catilina, lui avait
cédé la province de la Macédoine ;
c'est sans doute à cette circonstance qu'il fait
allusion. |
|
(6) Exitum
consulatus mei. Nous avons dit que ce discours avait
été prononcé aux nones de
décembre, qui tombaient le 5 de ce mois, et que
les nouveaux consuls devaient entrer en charge le 1er
janvier suivant. |
|
(7) Neque
immatura consulari. Arrivé au faîte des
honneurs, il avait assez vécu pour sa
gloire. |
|
(8) Fratris
carissimi. Quintus Cicéron qui, suivant
Plutarque, avait d'abord poussé son frère
à réclamer le supplice des conjurés,
s'était, après le discours de César,
rangé à l'avis de Silanus et avait, comme
beaucoup d'autres, voté contre la peine de mort et
demandé seulement la prison. |
|
(9) Horum
omnium. Tous les sénateurs amis de
Cicéron se pressaient en ce moment autour de lui,
pour lui représenter les dangers auxquels il
s'exposerait par une sévérité trop
inflexible. |
|
(10) C.
Memmius avait été tué par L.
Saturninus, tribun du peuple, qui redoutait de le voir
arriver au consulat. |
|
(11) Multis
jam judiciis. Cicéron caractérise ainsi
diverses circonstances par lesquelles s'était
manifesté le jugement que le sénat portait
sur la conjuration et sur ses auteurs. |
|
(12) Tanquam
integrum. Comme si l'affaire était encore
entière, intacte, c'est-à-dire comme si
vous n'aviez pas déjà prononcé sur
le fait (Burnouf). |
|
(13) Ante
noctem. Cicéron ne pressait probablement ainsi
le vote des sénateurs, que pour prévenir
les tentatives qui pouvaient être faites pendant la
nuit pour la délivrance des prisonniers. Toutefois
quelques commentateurs rappellent à propos de ce
passage que, suivant Varron, un sénatus-consulte
prononcé avant le lever ou après le coucher
du soleil n'aurait pas été valable. |
|
(14) ;D.
Silani. D. Silanus avait fait connaître le
premier son opinion, à titre de consul
désigné ; c'était un
privilège accordé à cette
dignité, de même qu'à celle de prince
du sénat. Les autres personnages consulaires
donnaient ensuite leur avis par ordre
d'ancienneté. |
|
(15) C.
Caesaris. César, alors préteur
désigné, avait plaidé contre la
peine de mort avec tant d'éloquence et
d'habileté, qu'il avait ramené à son
opinion un très grand nombre de sénateurs,
parmi lesquels D. Silanus lui-même et Quintus
Cicéron, le frère du consul. |
|
(16) Hoc
genus poenae. Pour en trouver des exemples, il
fallait remonter jusqu'à une époque
antérieure à la loi Porcia, qui avait
garanti d'une manière certaine la vie et la
liberté des citoyens romains. |
|
(17) Aut
laborum... quietem esse. On peut voir dans Salluste
(Cat, ch. LI) le développement de cette
pensée empruntée par César à
la doctrine d'Epicure, pour le besoin de sa cause. |
|
(18) Iniquitatem.
Les villes municipales ayant, en effet, leurs lois
propres et leurs magistrats particuliers, la proposition
de César leur imposait une obligation injuste et
les menaçait d'un grave danger en les constituant
ainsi, sous leur responsabilité, gardiennes des
conjurés. |
|
(19) Decernatur
tamen, si placet. Cette concession faite à
l'opinion de César, dont elle suppose le triomphe,
semblerait, au premier abord, accuser l'habileté
de Cicéron, si l'on ne voyait pas au contraire un
peu plus loin tout le parti qu'il tire de ces
ménagements mêmes. C'est, en effet, en
supposant que César n'a pas proposé la
peine de mort, parce qu'il la trouvait trop douce, que
Cicéron se trouve en droit de conclure que si l'on
ôte la vie aux conjurés, César ne
pourra pas trouver leur punition trop cruelle. |
|
(20) Quae
popularis habetur. Cicéron (oratio pro
Sextio) partage en deux classes les magistrats dont
l'ambition aspire aux premiers rangs, suivant qu'ils
s'attachent à flatter les passions de la multitude
ou celles des grands. Il appelle les premiers populares
et les seconds optimates. |
|
(21) Auctore
et cognitore. On donnait le nom d'auctor
à celui qui exprimait le premier une opinion, et
de cognitor à celui qui se chargeait de
défendre la cause d'une personne présente.
Le procurator était celui qui parlait pour
un absent. |
|
(22) Quaesitori.
On appelait quésiteurs ou questeurs
les magistrats chargés par le peuple de
l'instruction et de la poursuite d'une affaire
criminelle. C'était ordinairement aux consuls que
l'on confiait ce soin. |
|
(23) Legem
Semproniam. Loi proposée par C. Sempronius
Gracchus, et d'après laquelle le peuple seul avait
le droit de condamner à mort un citoyen
romain. |
|
(24) Jussu
populi. Cette assertion, qui fournissait un puissant
argument à la cause, n'était pas exactement
conforme à la vérité ; le peuple
n'avait pas ordonné la mort de C. Gracchus ;
seulement il n'avait rien fait pour s'y opposer et pour
le défendre lorsqu'il fuyait devant l'attaque de
ses ennemis et qu'il réclamait du secours (Voyez
Plutarque). |
|
(25) Videor
enim mihi... videre. César avait dit
ironiquement qu'on avait fait de magnifiques lieux
communs sur les horreurs de la guerre civile (Sall,
Cat., ch. LI). Cicéron semble s'attacher
à rendre tout leur éclat aux tableaux que
César avait mis tous ses efforts à
effacer. |
|
(26) Purpuratum
esse hunc Gabinium. Gabinius était le plus
intime ami de Lentulus. Celui-ci, en arrivant au pouvoir,
n'aurait pas manqué de l'élever à
l'une des dignités dont la pourpre était
l'insigne distinctif. |
|
(27) Sororis
suae ... virum. Julie, soeur de César,
après la mort de son premier mari M. Antonius
Créticus, avait épousé P.
Cornélius Lentulus. |
|
(28) Avum.
Cet aïeul était Fulvius Flaccus, compagnon de
C. Gracchus. Trouvé avec l'aîné de
ses fils dans la retraite où il s'était
réfugié après le massacre de ses
partisans, il y fut mis à mort avec ce fils. |
|
(29) Largitionis
voluntas. On sait que C. Gracchus demandait le
partage des terres et la distribution du blé au
peuple. |
|
(30) Hujus
avus Lentuli. C'était P. Lentulus, consulaire
et prince du sénat, qui avait combattu contre C.
Gracchus pour le parti de la noblesse. |
|
(31) Veremini,
censeo. Il n'est pas besoin de faire ressortir ici
l'ironie. |
|
(32) Summam
ordinis consiliique. C'est-à-dire le premier
rang dans les trois ordres et la plus grande part
d'autorité dans les
délibérations. |
|
(33) Ex
dissensione. C. Gracchus avait enlevé aux
sénateurs, pour le donner aux chevaliers seuls, le
droit de siéger dans les tribunaux, puis Sylla,
vainqueur du parti populaire, l'avait fait rentrer dans
les mains des premiers. De là, entre les deux
ordres, la mésintelligence et les dissensions
continuelles, véritables causes des guerres de
Marius et de Sylla. |
|
(34) Tribunos
aerarios. Les tribuns du trésor touchaient les
sommes nécessaires à l'entretien des
armées et à la paie des soldats, et les
versaient entre les mains des questeurs. Ils
appartenaient à l'ordre des
plébéiens et étaient admis à
prendre part aux jugements. |
|
(35) Scribas.
Les scribes ou greffiers qui transcrivaient les actes
publics, les lois et les décisions des magistrats,
étaient en grande partie des affranchis, et
cependant ils formaient une classe qui jouissait d'une
certaine considération. |
|
(36) Ab
exspectatione sortis. Les scribes tiraient au sort
les magistrats auxquels ils devaient être
attachés l'année suivante. Il paraît
qu'ils se trouvaient réunis ce jour-là pour
cet objet. |
|
(37) Qui...
fortunam hujus civitatis consecuti. Le droit de
cité était la plus grande faveur que le
peuple romain pût accorder, soit aux particuliers,
soit aux peuples étrangers ; c'était
toujours la récompense d'un grand service ou d'un
dévouement éprouvé. Ceux qui le
recevaient étaient assimilés en tout aux
citoyens romains, ou, pour mieux dire, devenaient
réellement citoyens romains. |
|
(38) Summo
nati loco. Lentulus et Catilina étaient issus
l'un et l'autre de familles patriciennes. |
|
(39) Tolerabili
conditione servitutis. Il y avait parmi les esclaves
de grandes différences de condition, suivant les
diverses fonctions qu'ils étaient appelés
à remplir, depuis celles de la plus basse
domesticité, jusqu'à celles qui exigeaient
des talents distingués ; car c'était
ordinairement parmi eux que l'on choisissait les
pédagogues, les secrétaires, les copistes.
etc. |
|
(40) Quantum
audet. Les esclaves, en effet, n'ayant pas le droit
d'intervenir dans une cause qui n'intéressait que
les citoyens seuls, ne devaient que former des voeux ;
ils ne pouvaient rien par eux-mêmes. |
|
(41) Lenonem
quemdam Lentuli. Voyez Salluste (Cat, ch. L).
Appien raconte aussi que, pendant la séance
même du sénat, les esclaves et les
affranchis de Lentulus et de Céthégus
formèrent des attroupements autour des maisons
dans lesquelles les accusés étalent
détenus, dans le dessein de les enlever ; mais que
Cicéron, averti sur-le-champ, courut avec des
troupes assurer la garde des prisonniers, et revint
ensuite au sénat pour presser leur jugement. |
|
(42) Occlusis
tabernis. Dans les moments de trouble comme dans les
jours de deuil public, les boutiques devaient être
fermées. |
|
(43) Focis
vestris. Les dieux Pénates étaient
représentés par des statuettes de pierre,
de bois ou d'argent. On les gardait, dans les maisons
ordinaires, sous les portiques de l'atrium, ou
quelquefois dans la chambre à coucher. Chez les
pauvres, leur place était dans la cuisine, au
foyer domestique, qui constitue essentiellement la
demeure du citoyen. Dans les habitations opulentes, on
leur consacrait un oratoire, un sacrarium. |
|
(44) Scipio.
P. Cornélius Scipion, le premier Africain, qui mit
fin à la seconde guerre punique. |
|
(45) Alter
Africanus. Le second Africain, fils de L. Aemilius
Paulus, d'où il avait pris le nom de Scipion
Emilien, après son adoption par le fils du premier
Scipion. Ce fut le destructeur de Carthage et de
Numance. |
|
(46) Cujus
currum. L. Aemilius Paulus, après sa
conquête de la Macédoine, amena à
Rome le roi Persée prisonnier, et le fit marcher
chargé de chaînes devant son char de
triomphe. |
|
(47) Metu
servitutis bis liberavit. La première fois par
la défaite des Teutons dans la Gaule Narbonnaise,
et la seconde par celle des Cimbres en Italie. |
|
(48) Quo
victores revertantur. Allusion à un mot de
Pompée lui-même, rapporté ailleurs
par Cicéron, De officiis, 1, 22 : Mihi
quidem Pompeius hoc tribuit, ut diceret, frustra se
triumphum tertium deportaturum fuisse, nisi meo in
rempublicam beneficio, ubi triumpharet, esset
habiturus. |
|
(49) Aut
recepti. Sous-entendu in gratiam. |
|
(50) Pro
imperio. Cicéron, comme nous l'avons dit plus
haut (note 5), dans l'espoir de détacher Antoine
du parti de Catilina, lui avait cédé la
riche et brillante province de Macédoine que le
sort lui avait donnée. Il avait certainement
perdu, par ce sacrifice fait à
l'intérêt public, tous les avantages dont il
parle, et il était bien en droit de s'en faire un
titre à la reconnaissance de ses concitoyens. En
échange de la Macédoine, il devait passer
au gouvernement de la Gaule Cisalpine, mais il y avait
aussi renoncé et l'avait fait donner au
préteur Métellus Céler. |
|
(51) Urbanis
opibus. Suivant le témoignage de Plutarque,
Cicéron réunissait autour de lui une plus
grande foule de clients et d'amis que les citoyens les
plus riches et les plus puissants. |
|
(52) De
aris ac focis. Ces mots, opposés à ceux
de fanis ac templis, ne doivent s'appliquer qu'aux
demeures particulières. |