I. Je sais combien il est difficile (1) et délicat de
donner des conseils à un roi, à un
général, à tout mortel enfin qui se voit
au faîte du pouvoir ; car, autour des hommes puissants,
la foule des conseillers abonde, et personne ne
possède assez de sagacité ni de prudence pour
prononcer sur l'avenir. Souvent même les mauvais
conseils plutôt que les bons tournent à bien
(2), parce que la
fortune fait mouvoir au gré de son caprice presque
toutes les choses humaines (3). Pour moi, dans ma
première jeunesse, porté par goût
à prendre part aux affaires publiques, j'en ai fait
l'objet d'une étude longue et sérieuse, non
dans la seule intention d'arriver à des
dignités que plusieurs avaient obtenues par de
coupables moyens, mais aussi pour connaître à
fond l'état de la république sous le rapport
civil et militaire, la force de ses armées, de sa
population, et l'étendue de ses ressources.
Préoccupé donc de ces idées, j'ai cru
devoir faire au dévouement que vous m'inspirez le
sacrifice de ma réputation et de mon amour-propre, et
tout risquer, si je puis ainsi contribuer en quelque chose
à votre gloire. Et ce n'est point
légèrement, ni séduit par l'éclat
de votre fortune, que j'ai conçu ce dessein, c'est
qu'entre toutes les qualités qui sont en vous, j'en ai
reconnu une vraiment admirable : cette grandeur d'âme
qui, dans l'adversité, brille toujours chez vous avec
plus d'éclat qu'au sein de la prospérité
(4). Mais, au nom
des dieux, votre magnanimité est assez connue, et les
hommes seront plutôt las de vous payer un tribut de
louanges et d'admiration, que vous de faire des actions
glorieuses.
II. J'ai reconnu, en effet,
qu'il n'est point de pensée si profonde, que chez vous
un instant de réflexion ne fasse aussitôt
jaillir ; et, si je vous expose mes idées en
politique, ce n'est pas avec une confiance
présomptueuse dans ma sagesse ou dans mes
lumières ; mais j'ai pensé que, au milieu des
travaux de la guerre, au milieu des combats, des victoires et
des soins du commandement, il serait utile d'appeler votre
attention sur l'administration intérieure de Rome.
Car, si vos projets se bornaient à vous garantir des
attaques de vos ennemis et à défendre contre un
consul malveillant (5) les bienfaits du peuple,
ce serait une pensée trop au-dessous de votre grande
âme. Mais, si l'on voit toujours en vous ce courage
qui, dès votre début, abattit la faction de la
noblesse ; qui, délivrant le peuple romain d'un dur
esclavage, le rendit à la liberté ; qui, durant
votre préture (6), a su, sans le secours
des armes, disperser vos ennemis armés ; et qui, soit
dans la paix, soit dans la guerre, accomplit tant de hauts
faits, que vos ennemis n'osent se plaindre que de vous voir
si grand, vous accueillerez les vues que je vais vous exposer
sur la haute administration de l'Etat ; j'espère
qu'elles vous sembleront vraies, ou du moins bien peu
éloignées de la vérité.
III. Or, puisque Cn.
Pompée, ou par ineptie ou par son aveugle penchante
vous nuire, a fait de si lourdes fautes, qu'on peut dire
qu'il a mis les armes à la main de ses ennemis, il
faut que ce qui par lui a porté la perturbation dans
l'Etat devienne par vous l'instrument de son salut. Son
premier tort (7) est
d'avoir livré à un petit nombre de
sénateurs la haute direction des recettes, des
dépenses, du pouvoir judiciaire, et laissé dans
la servitude (8) et
soumis à des lois injustes le peuple romain, qui
auparavant possédait la puissance souveraine. Quoique
le droit de rendre la justice ait été, comme
antérieurement, dévolu aux trois ordres,
cependant ce sont ces mêmes factieux qui administrent,
donnent, ôtent ce qui leur plaît ; ils oppriment
les gens de bien, ils élèvent aux emplois leurs
créatures : point de crime, point d'action honteuse ou
basse, qui leur coûte pour arriver au pouvoir ; tout ce
qui leur convient, ils l'obtiennent ou le ravissent ; enfin,
comme dans une ville prise d'assaut, ils n'ont de loi que
leur caprice ou leur passion. Ma douleur serait moins vive,
je l'avoue, s'ils fondaient sur une victoire due à
leur courage ce droit d'asservir qu'ils exercent à
leur gré ; mais ces hommes si lâches, qui n'ont
de force, de vertu, qu'en paroles, abusent insolemment d'une
domination que le hasard ou la négligence d'autrui
leur ont mise dans les mains. Est-il, en effet, une
sédition, une guerre civile qui ait exterminé
tant et de si illustres familles ? à qui la victoire
inspira-t-elle jamais tant de violence, tant d'emportement
?
IV. L. Sylla (9), à qui, dans sa
victoire, tout était permis par le droit de la guerre,
savait bien que la perte de ses ennemis ajoutait à la
force de son parti ; cependant, après en avoir
sacrifié un petit nombre, il a mieux aimé
retenir les autres par des bienfaits que par la crainte. Mais
aujourd'hui, grands dieux, avec Caton, L. Domitius et tous
les autres chefs de la même faction, quarante
sénateurs et une foule de jeunes gens de grande
espérance ont été frappés comme
des victimes ; et toutefois la rage de ces hommes
conjurés à notre perte n'est pas encore
assouvie par le sang de tant de malheureux citoyens :
l'abandon des orphelins, la triste vieillesse des
pères et des mères, les gémissements des
maris, la désolation des épouses, rien n'a pu
empêcher ces âmes inhumaines de se porter
à des attentats, à des accusations de plus en
plus atroces, pour dépouiller les uns de leur
dignité (10), les autres du droit
de citoyen (11). Et
de vous, César, que dirai-je ? de vous que ces hommes,
pour comble de lâcheté, veulent abaisser au prix
de leur sang ? moins sensibles qu'ils sont au plaisir de
cette domination, qui leur est échue contre toute
apparence, qu'au regret d'être témoins de votre
élévation ; et plus volontiers mettraient-ils
pour vous perdre la liberté en péril que de
voir par vos mains le peuple romain élevé au
faîte de la grandeur. Voilà donc ce qui vous
fait une loi d'examiner avec la plus profonde attention
comment vous pourrez établir et consolider votre
ouvrage. Je n'hésiterai point, de mon
côté, à vous exposer le résultat
de mes réflexions, sauf à votre sagesse
d'adopter ce qui vous paraîtra juste et
convenable.
V. La république
fut toujours divisée en deux classes, je le pense, et
la tradition de nos pères en fait foi : les patriciens
et les plébéiens. Aux patriciens fut
primitivement dévolue l'autorité suprême
; mais dans le peuple n'en résidait pas moins la force
réelle. Aussi y eut-il souvent scission dans l'Etat ;
et la noblesse ne cessa de perdre de ses privilèges,
tandis que les droits du peuple s'étendaient. Ce qui
faisait que le peuple vivait libre, c'est qu'il n'y avait
personne dont le pouvoir fût au-dessus des lois : ce
n'étaient ni les richesses, ni l'orgueil, mais la
considération et la valeur, qui mettaient le patricien
au-dessus du plébéien. Dans son champ ou
à l'armée, le moindre citoyen, ne manquant
jamais de l'honnête nésessaire, se suffisait
à lui-même, suffisait à la patrie. Mais,
lorsque, chassés peu à peu de leur patrimoine
(12), les citoyens
eurent été réduits par l'oisiveté
et la misère à n'avoir plus de demeure
assurée, ils commencèrent à compter sur
les richesses d'autrui, et à faire de leur
liberté et de la chose publique un trafic honteux.
Ainsi, peu à peu, le peuple, qui était
souverain et en possession de commander à toutes les
nations, est venu à se désorganiser (13); et, au lieu d'une
part dans l'autorité publique, chacun s'est
créé sa servitude particulière. Or cette
multitude, d'abord infectée de mauvaises moeurs, puis
adonnée à une diversité infinie de
métiers et de genres de vie, composée
d'éléments incohérents, est, à
mon avis, bien peu propre au gouvernement de l'Etat.
Cependant, après l'introduction de nouveaux citoyens,
j'ai grand espoir que tous se réveilleront pour la
liberté, puisque chez les uns naîtra le
désir de conserver cette liberté, et chez les
autres celui de mettre fin à leur servitude. Je pense
donc que, ces nouveaux citoyens mêlés avec les
anciens, vous pourrez les établir dans les colonies
(14) : ainsi
s'accroîtront nos forces militaires, et le peuple,
occupé des travaux honorables, cessera de faire le
malheur public.
VI. Mais je n'ignore pas,
je ne me cache pas combien l'exécution de ce plan
excitera la fureur et les emportements des nobles : alors ils
s'écrieront avec indignation que l'on bouleverse tout,
que c'est imposer une servitude aux anciens citoyens,
qu'enfin c'est transformer en royaume une cité libre,
si par le bienfait d'un seul une multitude nombreuse parvient
au droit de cité. Quant à moi, j'établis
en principe que celui-là se rend coupable d'un grand
crime, qui obtient la popularité au détriment
de la république ; mais, du moment où le bien
public tourne aussi à l'avantage particulier,
hésiter à l'entreprendre, c'est, à mon
avis, indolence, c'est lâcheté. M. Livius Drusus
(15), dans son
tribunal, eut constamment en vue de travailler de toute sa
puissance pour la noblesse, et, dans le commencement, il ne
voulut rien faire qui ne lui eût été
conseillé par les nobles eux-mêmes. Mais ces
factieux, pour qui le plaisir de tromper et de nuire
l'emportait sur la foi des engagements, n'eurent pas
plutôt vu un seul homme départir à un
grand nombre d'individus le plus précieux des biens,
que chacun d'eux, ayant la conscience de ses intentions
injustes et perverses, jugea de M. Livius Drusus
d'après soi-même. Craignant donc que, par un si
grand bienfait, il ne s'emparât seul du pouvoir, ils
réunirent contre lui leurs efforts et firent
échouer ses projets, qui n'étaient,
après tout, que les leurs. C'est donc pour vous,
général, une raison de redoubler de soins, afin
de vous assurer des amis dévoués et de nombreux
appuis.
VII. Combattre un ennemi
de front et le terrasser n'est pas difficile à un
homme de coeur ; ne savoir ni tendre des pièges ni
s'en défendre, telle est la disposition des gens de
bien. Lors donc que vous aurez introduit ces hommes dans la
cité, le peuple étant ainsi
régénéré, appliquez surtout votre
attention à entretenir les bonnes moeurs, à
cimenter l'union entre les anciens et les nouveaux citoyens.
Mais le plus grand bien, certes, que vous puissiez procurer
à la patrie, aux citoyens, à vous-même,
à nos enfants, à l'humanité enfin, ce
sera de détruire l'amour de l'argent, ou au moins de
l'affaiblir autant que possible : autrement on ne saurait,
soit en paix, soit en guerre, administrer ni les affaires
privées ni les affaires publiques. Car, là
où a pénétré l'amour des
richesses, il n'est plus d'institutions, d'arts utiles, de
génie, qui puissent résister : l'âme
elle-même, tôt ou tard, finit par succomber. J'ai
souvent entendu citer les rois, les villes, les nations,
auxquels leur opulence a fait perdre de grands empires acquis
par leur courage au temps de la pauvreté. Et cela n'a
rien d'étonnant : car, dès que l'homme de bien
voit le méchant, à cause de ses richesses, plus
honoré, mieux accueilli que lui, il s'indigne d'abord,
puis il roule mille pensées dans son coeur ; mais, si
l'orgueil l'emporte toujours de plus en plus sur 1'honneur,
et l'opulence sur la vertu, il perd courage et quitte les
vrais biens pour la volupté. La gloire, en effet, est
l'aliment de l'activité ; et, si vous la retranchez
(16), la vertu
toute seule est, par elle-même, pénible et
amère. Enfin, là où les richesses sont
en honneur, tous les biens véritables sont avilis, la
bonne foi, la probité, la pudeur, la chasteté :
car, pour arriver à la vertu, il n'est qu'un chemin
toujours rude ; mais chacun court à la fortune par
où il lui plaît, elle s'obtient
indifféremment par de bonnes ou de mauvaises voies.
Commencez donc par renverser la puissance de l'or ; que le
plus ou le moins de fortune ne donne point, n'ôte point
le droit de prononcer sur la vie, sur l'honneur des citoyens,
comme aussi que la préture, le consulat, soient
accordés, non d'après l'opulence, mais
d'après le mérite : on peut s'en rapporter au
peuple pour juger les magistrats qu'il doit élire.
Laisser la nomination des juges au petit nombre, c'est du
despotisme ; les choisir d'après la fortune, c'est de
l'injustice. Tous les citoyens de la première classe
doivent donc être appelés aux fonctions de juge,
mais en plus grand nombre qu'ils n'y sont admis aujourd'hui.
Jamais les Rhodiens, ni bien d'autres cités, n'ont eu
à se repentir de la composition de leurs tribunaux,
où, sans distinction et d'après la loi du sort,
le riche et le pauvre prononcent également sur les
plus grandes et sur les moindres affaires. Quant à
l'élection des magistrats, ce n'est pas sans raison
que j'approuve la loi promulguée par G. Gracchus dans
son tribunat, pour que les centuries fussent prises,
d'après le sort, dans les cinq classes sans
distinction. Devenus ainsi égaux en honneur (17) et en fortune, ce sera
par le mérite que les citoyens s'empresseront de se
surpasser l'un l'autre.
VIII. Voilà les remèdes puissants que j'oppose
aux richesses : car, aussi bien que toute autre chose, on ne
les loue, on ne les recherche que pour leur utilité :
ce sont les récompenses qui mettent en jeu la
perversité. Otez-les, personne absolument ne veut
faire le mal sans profit. Au surplus, l'avarice, ce monstre
farouche, dévorant, ne saurait être
tolérée : partout où elle se montre,
elle dévaste les villes et les campagnes, les temples
et les maisons ; elle foule aux pieds le sacré et le
profane ; point d'armées, point de murailles,
où elle ne pénètre par sa seule
puissance ; réputation, pudeur, enfants, patrie,
famille, elle ne laisse rien aux mortels. Mais, faites tomber
le crédit de l'argent, les bonnes moeurs triompheront
sans peine de toute cette grande influence de ia
cupidité.
Ces vérités sont reconnues par tous les hommes,
justes ou pervers ; vous n'aurez cependant pas de
médiocres combats à soutenir contre la faction
de la noblesse ; mais, si vous vous garantissez de leurs
artifices, tout le reste vous sera facile : car, s'ils
avaient un mérite réel, ils se montreraient les
émules des gens de bien plutôt que leurs
détracteurs ; mais c'est parce que l'indolence, la
lâcheté, l'apathie, les dominent, qu'ils
murmurent, qu'ils cabalent et qu'ils regardent la
renommée d'autrui comme leur déshonneur
personnel.
IX. Mais à quoi bon
vous parler d'eux encore, comme d'êtres inconnus ? M.
Bibulus (18) a fait
éclater son courage et sa force d'âme durant son
consulat : inhabile à s'énoncer, il a dans
l'esprit plus de méchanceté que d'adresse.
Qu'oserait celui pour qui la suprême autorité du
consulat a été le comble de la
dégradation ? Et L. Domitius (19) est-il un homme bien
redoutable, lui qui n'a pas un membre qui ne soit un
instrument d'infamie ou de crime : langue sans foi, mains
sanglantes, pieds agiles à la fuite, plus
déshonnêtes encore les parties de son corps
qu'on ne peut honnêtement nommer ? Il en est un
cependant, Caton (20), dont l'esprit fin,
disert, adroit, ne me paraît pas à
mépriser. Ce sont qualités que l'on acquiert
à l'école des Grecs ; mais la vertu, la
vigilance, l'amour du travail, ne se trouvent nulle part chez
les Grecs. Et croira-t-on que des gens qui, par leur
lâcheté, ont perdu chez eux leur liberté
fournissent de bien bons préceptes pour conserver
l'empire ? Tout le reste de cette faction se compose de
nobles sans caractères, et qui, semblables à
des statues, ne donnent à leur parti d'autre appui que
leur nom. L Postumius (21) et M. Favonius me
semblent des fardeaux superflus dans un grand navire : s'il
arrive à bon port, on en tire quelque parti ; mais, au
premier orage, c'est d'eux qu'on se défait d'abord,
comme de ce qu'il y a de moins précieux. Maintenant
que j'ai indiqué les moyens propres, selon moi,
à régénérer et à
réformer le peuple, je vais passer à ce qu'il
me semble que vous devez faire à l'égard du
sénat.
X. Lorsque avec
l'âge mon esprit se fut développé, assez
peu j'exerçai mon corps aux armes et à
l'équitation, mais j'appliquai mon intelligence
à la culture des lettres, consacrant ainsi aux travaux
la portion de moi-même que la nature avait douée
d'une plus grande vigueur (22). Or tout ce que m'ont
appris dans ce genre de vie la lecture et la conversation m'a
convaincu que tous les royaumes, toutes les cités,
tous les peuples, ont été puissants et heureux
tant qu'ils ont obéi à de sages conseils ; mais
qu'une fois corrompus par la flatterie, la crainte ou la
volupté, leur puissance a été
aussitôt affaiblie ; qu'ensuite l'empire leur a
été enlevé ; qu'enfin ils sont
tombés dans l'esclavage.
Il m'est bien démontré aussi que celui qui se
voit au-dessus de ses concitoyens par le rang et le pouvoir
prend fortement à coeur le bien de l'Etat. Pour les
autres, en effet, le salut de l'Etat n'est que la
conservation de leur liberté ; mais celui qui, par son
mérite, s'est élevé aux richesses, aux
distinctions, aux honneurs, pour peu que la république
ébranlée éprouve quelque agitation,
aussitôt son âme succombe sous le poids des
soucis et de l'anxiété. C'est tout à la
fois sa gloire, sa liberté, sa fortune, qu'il lui faut
défendre : il faut que partout il soit présent
et s'évertue. Plus, dans les temps heureux, il s'est
vu dans une situation florissante, plus, dans les revers, il
est en proie à l'amertume et aux alarmes. Lors donc
que le peuple obéit au sénat comme le corps
à l'âme, lorsqu'il exécute ses
dérisions, c'est dans la sagesse que les
sénateurs trouvent leur force ; le peuple n'a pas
besoin de tant de sagacité. Aussi nos ancêtres,
accablés sous le poids des guerres les plus rudes,
après la perte de leurs soldats, de leurs chevaux, de
leur argent, ne se lassèrent jamais de combattre
armés pour l'empire : ni l'épuisement du
trésor public, ni la force de l'ennemi, ni les revers,
rien ne fit descendre leur coeur indomptable à penser
que, tant qu'il leur resterait un souffle de vie, ils pussent
céder ce qu'ils avaient acquis par leur courage. Et
c'est la fermeté dans leurs conseils, bien plus que le
bonheur des armes, qui leur a valu tant de gloire. Pour eux,
en effet, la république était une ; elle
était le centre de tous les intérêts, et
il n'y avait de ligues que contre l'ennemi ; et, si chacun
déployait toutes les facultés de l'esprit et du
corps, c'était pour la patrie, et non pour son
ambition personnelle.
Aujourd'hui, au contraire, les nobles, vaincus par
l'indolence et la lâcheté, ne connaissent ni les
fatigues, ni l'ennemi, ni la guerre ; ils forment dans l'Etat
une faction compacte, armée, qui gouverne avec
insolence toutes les nations. Aussi le sénat, dont la
sagesse faisait autrefois le soutien de la république
en ses dangers, opprimé désormais, flotte
çà et là, poussé par le caprice
d'autrui, décrétant aujourd'hui une chose,
demain tout le contraire : c'est au gré de la haine et
de l'arrogance de ceux qui dominent qu'il prononce qu'une
chose est utile ou nuisible à l'intérêt
public.
XI. Si tous les sénateurs avaient une égale
liberté, et leurs délibérations moins de
publicité, le gouvernement de l'Etat aurart plus de
force, et la noblesse moins d'influence. Mais, puisqu'il est
difficile de ramener au même niveau le crédit de
tous (les uns ayant, grâce au mérite de leurs
ancêtres, hérité de la gloire, de
l'illustration, d'une nombreuse clientèle, et les
autres n'étant pour la plupart qu'une multitude
arrivée de la veille), faites que les votes de ces
derniers ne soient plus dictés par la crainte :
chacun, dès lors, protégé par le secret,
fera prévaloir sur la puissance d'autrui son opinion
individuelle. Bons et méchants, braves et
lâches, tous désirent également la
liberté ; mais, dans leur aveuglement, la plupart des
hommes l'abandonnent par crainte, et, sans attendre l'issue
d'un combat incertain, sont assez lâches pour se
soumettre d'avance aux chances de la défaite.
Il est donc, selon moi,
deux moyens de donner de la force au sénat : c'est
d'augmenter le nombre de ses membres (23), et d'y établir
le vote par scrutin secret (24). Le scrutin sera une
sauvegarde à l'abri de laquelle les esprits oseront
voter avec plus de liberté ; dans l'augmentation du
nombre de ses membres, ce corps trouvera plus de force et
d'action. En effet, depuis ces derniers temps, les
sénateurs sont, les uns astreints à
siéger dans les tribunaux, les autres distraits par
leurs propres affaires ou par celles de leurs amis ; ils
n'assistent presque plus aux délibérations
publiques : il est vrai qu'ils en sont écartés
moins par ces occupations que par l'insolence d'une faction
tyrannique. Quelques nobles, avec un petit nombre
d'auxiliaires de leur faction, pris dans les familles
sénatoriales, sont maîtres d'approuver, de
rejeter, de décréter, de tout faire enfin au
gré de leur caprice. Mais, dès que le nombre
des sénateurs aura été augmenté,
et que les votes seront émis au scrutin secret, il
faudra bien qu'ils laissent là leur orgueil, quand ils
se verront contraints de fléchir devant ceux que
naguère ils dominaient avec tant d'arrogance.
XII. Peut-être, général, après
avoir lu cette lettre, demanderez-vous à quel nombre
je voudrais porter les membres du sénat ; comment j'y
répartirais les fonctions nombreuses et variées
qui lui sont attribuées ; et, puisque je propose de
confier l'administration de la justice à tous ceux de
la première classe, quelle serait la limite des
différentes juridictions, le nombre des magistrats
pour chaque espèce.
Il ne m'eût pas été difficile d'entrer
dans ces détails ; mais j'ai cru devoir d'abord
m'occuper du plan général, et vous en montrer
la convenance : si vous le prenez pour point de
départ, le reste marchera de soi-même. Je veux
sans doute que mes vues soient sages, utiles surtout ; car
plus elles produiront d'heureux résultats, plus j'en
recueillerai de gloire ; mais je désire bien plus
fortement que, au plus tôt et par tous les moyens
possibles, on vienne au secours de la chose publique. La
liberté m'est plus chère que la gloire, et je
vous prie, général, je vous conjure, par cette
immortelle conquête des Gaules, de ne pas laisser le
grand et invincible empire romain tomber de
vétusté, s'anéantir par la fureur de nos
discordes.
Ah ! sans doute, si ce malheur arrive, votre esprit ne
trouvera plus, ni le jour ni la nuit, un seul instant de
repos : tourmenté d'insomnie, furieux, hors de vous,
on vous verra frappé d'un funeste égarement.
Car je tiens pour vrai que l'oeil de la Divinité est
ouvert sur les actions de tous les mortels ; qu'il n'en est
aucune, bonne ou mauvaise, dont il ne soit tenu compte ; et
que, suivant la loi invariable de la nature, les bons et les
méchants reçoivent un jour chacun leur
récompense. Quelquefois ce prix peut être tardif
; mais chacun peut déjà, dans sa conscience,
lire ce qui lui est réservé.
XIII. Si la patrie, si les auteurs de vos jours, pouvaient
prendre la parole, voici ce qu'ils vous diraient : «0
César ! nous les plus vaillants des hommes, nous
t'avons fait naître dans la première des villes
pour être notre gloire, notre appui, la terreur des
ennemis. Ce que nous avons acquis au prix de mille travaux,
de mille dangers, nous te l'avons confié dès ta
naissance avec la vie : une patrie grande aux yeux de
l'univers, et, dans cette patrie, une origine, une famille
illustre ; avec cela de grands talents, une fortune digne de
ton rang ; enfin tout ce qui honore dans la paix et
récompense dans la guerre. Pour prix de si grands
bienfaits, nous ne te demandons aucun crime, aucune bassesse,
mais de relever la liberté détruite : accomplis
cette tâche, et la gloire due à ton courage se
propagera parmi les nations. Car, aujourd'hui, malgré
tes belles actions dans la paix et dans la guerre, ta
renommée cependant est encore égalée par
celle de plusieurs vaillants capitaines ; mais, si à
ta patrie sur le penchant de sa ruine tu rends et tout
l'éclat de son nom et toute l'étendue de sa
puissance, qui, dans l'univers, sera plus illustre, plus
grand que toi ? Si, en effet, par son état de
consomption ou par les coups du sort, cet empire venait
à succomber, qui peut douter qu'aussitôt la
monde entier ne fût livré à la
désolation, à la guerre, au carnage ? Mais si,
animé d'une généreuse inspiration, tu
assures le repos de ta patrie, de ta famille, dès
lors, restaurateur de la chose publique, tu effaceras, de
l'aveu de tous, la gloire de tous les mortels, et ta mort
seule pourra ajouter à l'éclat de ta vie.
Ici-bas, en effet, exposés quelquefois aux coups du
sort, nous le sommes souvent aux attaques de l'envie ; mais,
avons-nous payé le tribut à la nature, l'envie
se tait, la vertu s'élève et brille de jour en
jour d'un nouvel éclat.
Telles sont, général, les vues qui m'ont paru
utiles et convenables à vos intérêts ; je
vous les ai indiquées le plus brièvement que
j'ai pu. Au reste, quel que soit le plan que vous adoptiez,
je prie les dieux immortels qu'il tourne à votre
avantage et à celui de la république.
(1) Je sais
combien il est difficile. Tacite a dit (Hist.,
liv. I, ch. xv) : Suadere principi quod oporteat,
multi laboris. |
|
(2) Tournent
à bien. Cicéron dans une de ses lettres
à Atticus : Eventum non virtus sed fortuna
moderatur : omnium rerum incerti sunt exitus multa male
consulta, quum adversarios inconsultiores nacta sunt,
felicem eventum habuerunt. |
|
(3) Presque
toutes les choses humaines. Déjà
Salluste a dit, dans la Guerre de Jugurtha (ch.
III) : Fortuna pleraque rerum humanarum regit ; et dans
sa Catilinaire (ch. VIII)- Fortuna in omni re
dominatur ; ea res cunctas ex lubidine magis, quam ex
vero celebrat obscuratque. |
|
(4) Qu'au sein de
la prospérité. Claudien a dit de
Stilicon (liv. I, v. 283) : Nil fessa remisit /
Officii virtus, contraque minantia fata / Pervigil,
eventusque sibi latura secundos / Major in adversis
micuit... |
|
(5) Contre
un consul malveillant. C. Claudius Marcellus et L.
Cornelius Lentulus Crus étaient consuls l'an de
Rome 705 (avant JC. 50-49), année à
laquelle se rapporte la date de cette lettre, et tous
deux ennemis de César : mais, selon de Brosses, il
s'agit plus particulièrement de C. Marcellus ; M.
Burnouf, au contraire, veut qu'il s'agisse de Lentulus,
et il renvoie le lecteur aux Commentaires de
César sur la guerre civile. Au surplus, ces deux
consuls ne contribuèrent pas peu, par leur
violence, à précipiter la guerre civile, et
à donner une apparence de justice aux plaintes de
l'agresseur. |
|
(6) Durant
votre préture. «La manière dont
Salluste s'exprime ici semble en dire là-dessus
plus que nous n'en savons». (De Brosses). En effet,
Plutarque, dans la Vie de César, se borne
à rappeler que la préture de César
n'apporta aucun trouble dans l'état ; mais, dans
la Vie de Caton, il se contredit lui-même,
en nous apprenant que César s'était
ligué avec un tribun factieux, Metellus Nepos, qui
voulut emporter par la violence une loi subversive de la
liberté publique ; elle avait pour objet de
rappeler à Rome Pompée avec son
armée, pour opérer la réforme de
l'Etat. Caton s'opposa, avec constance et au péril
de sa vie, aux efforts de Metellus et de César,
qui avaient aposté dans l'assemblée une
troupe de gladiateurs et d'esclaves armés. Cette
noble résistance rendit le courage au
sénat, qui arma les consuls du pouvoir
dictatorial. Suétone nous apprend que Metellus et
César furent interdits tous deux des fonctions de
leur charge. Metellus prit la fuite, et sortit de Rome.
César y resta, se soumit au décret du
sénat, renvoya ses licteurs, quitta la robe
prétexte, et rentra dans la vie privée ; il
se refusa même aux offres de la multitude, qui
voulait employer la force pour le
réintégrer dans ses fonctions. Cette
modération désarma le sénat, et,
à la sollicitation de Caton lui même, on
rendit à César et à Metellus
l'exercice de leur magistrature. |
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(7) Son
premier tort. Salluste parle bien
sévèrement du troisième consulat de
Pompée, lequel mérite des éloges
sous plusieurs rapports : il porta une loi très
sévère sur la brigue, rétablit
l'ordre dans Rome, et fit respecter les lois.
Cicéron, dans une lettre à Atticus, traite
de divin ce consulat ; mais on sait qu'il manque presque
toujours de mesure, soit dans le blâme, soit dans
l'éloge. |
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(8) Dans
la servitude. «Ce prétendu
asservissement du peuple, dit Bureau de Lamalle,
n'était autre chose que le silence imposé
à des cris factieux et le retranchement du salaire
infâme par lequel des candidats cupides et
ambitieux soudoyaient une vile plèbe, vendue
à tout ce qui l'achetait». |
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(9) L.
Sylla. «La manière dont Salluste
s'exprime au sujet de Sylla, semble d'autant plus
extraordinaire, dit un traducteur, que César,
parent de Marius et presque proscrit lui-même par
le dictateur, ne devait pas être flatté
d'entendre diminuer l'horreur due à ses crimes.
Mais il importait davantage de flétrir toute la
faction patricienne ; et, d'ailleurs, c'était
servir l'homme qui voulait arriver au pouvoir de Sylla
que de faire envisager une telle domination, non moins
funeste et non moins sanguinaire que celle des
sénateurs. Salluste s'exprime bien autrement dans
la seconde épître, où, comparant
à Sylla Pompée qui le servit, il inspire
l'indignation la plus vive pour les forfaits de tous deux
: c'est qu'à cette époque on avait combattu
non pour la patrie, mais pour l'élévation
de Pompée ou de César. César
était vainqueur : il fallait rendre odieux Sylla,
et surtout Pompée. En rappelant aux Romains ce
qu'ils avaient souffert de l'un, ce qu'ils eussent eu
à souffrir de l'autre, on les excitait à
bénir, à adorer la clémence de
César victorieux». |
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(10) Pour
dépouiller les uns de leur dignité.
Salluste parle ici de la censure d'Appius Claudius, qui
flétrit un certain nombre de sénateurs et
de chevaliers romains. La plupart de ces
flétrissures étaient méritées
: malheureusement elles étaient infligées
par un homme décrié, et qui, peu de temps
avant sa censure, impliqué dans deux accusations,
n'avait dû son salut qu'au crédit de
Pompée, et non point à son innocence.
Salluste fut une des victimes de la
sévérité d'Appius. Inde irae,
s'écrie M. Burnouf. Dureau de Lamalle
n'hésite point à blâmer ce censeur :
«Quelques galanteries avec des dames romaines,
dit-il, vice malheureusement trop commun dans ces temps
de dépravation, n'étaient point alors un
tort assez grave pour attirer à un homme tel que
Salluste une flétrissure aussi
humiliante». |
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(11) Les
autres du droit de citoyen. Dans le troisième
consulat de Pompée, Hypséus et Scaurus,
convaincus de brigue ; Q. Pompeius et Plancus Bursa,
tribuns séditieux, coupables de violences pendant
les troubles qui précédèrent et
suivirent le meurtre de Clodius ; Sextus Clodius, qui
avait mis le feu à la curie Hostilia, et quelques
autres citoyens, avaient été
condamnés à l'exil, qui emportait la
dégradation civique. La plupart
embrassèrent plus tard le parti de César,
et rentrèrent à sa suite dans Rome. |
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(12) Chassés
peu à peu de leur patrimoine. La même
idée se trouve reproduite dans la Guerre de
Jugurtha (en. XLI) : Interea parentes... sedibus
pellebantur. |
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(13) A se
désorganiser. Dans la Guerre de
Jugurtha, même chapitre : Plebis vis, soluta
atque dispersa in multitudine, minus poterat. |
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(14) Dans
les colonies. La plupart des conseils que Salluste
donne ici sur la formttion des colonies, sur
l'augmentation du sénat, furent suivis par
César, à son retour à Rome.
Suétone (ch. XLII) nous apprend que César
distribua quatre-vingt mille citoyens dans les colonies
d'outre-mer. |
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(15) M.
Livius Drusus. Tribun du peuple l'an de Rome 663
(92-91 av. J.-C), se ligua avec le sénat pour
détruire la loi des Gracques, qui avait
ôté l'autorité judiciaire au
sénat pour la donner aux chevaliers romains. Afin
de faire passer sa loi, qui éprouvait une grande
opposition, il essaya de gagner, d'un côté,
le peuple par des distributions de terres et de
blé, et par l'établissement de colonies ;
de l'autre, les peuples de l'Italie, en leur
conférant à tous le droit de cité ;
enfin, pour indemniser les chevaliers, il proposait de
porter à six cents le nombre des sénateurs,
dont la moitié serait choisie dans l'ordre
équestre. Drusus trouva ainsi moyen de
mécontenter à la fois les chevaliers, en
leur ôtant le pouvoir judiciaire ; le sénat,
en avilissant sa dignité par l'introduction
simultanée de trois cents membres ; enfin le
peuple romain, en lui assimilant les alliés. Aussi
Livius ne fit-il que ranimer le feu des séditions,
dont les Gracques avaient été victimes ; il
fut assassiné par les patriciens, et sa mort fut
suivie de la guerre Sociale. (LVIII, Epitome, lib.
LXXI ; Florus, lib. III, c. XVII ; Val. Max., lib.IX,
c.V, n° 2 ; Aurel. Victor, de Vir. illustr. ;
Cicero, pro Cluentio, LVI, enfin une notice
très détaillée du président
De Brosses, t, III, p. 265 et suiv. de son
Salluste.) |
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(16) Et,
si vous la retranchez. Tanto major famae sitis
est, quam / Virtutis ! quis enim virtutem amplectitur
ipsam,/ Praemia si tollas ? (Juv. Sat. X, v.
140.) |
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(17) Devenus
ainsi égaux en honneur. César ne suivit
pas entièrement, à cet égard, les
conseils de Salluste : Suétone nous apprend qu'il
n'attribua la judicature qu'aux sénateurs et aux
chevaliers, à l'exclusion des tribuns du
trésor, qui tenaient à la classe
plébéienne. Dion Cassius atteste le
même fait. |
|
(18) M.
Bibulus. Ici Salluste traite avec tout le
dénigrement de l'esprit de parti ce consul, qui
peut avoir été un homme médiocre,
mais qui fut un bon citoyen. Toujours sacrifié
à César, il fut avec lui édile
curule, et César retira seul de la
popularité des jeux qu'ils donnèrent
à frais communs. Ils furent ensuite
préteurs ensemble ; puis enfin consuls. Sous leur
consulat César proposa une loi agraire. Bibulus,
avec Caton, s'y opposa au péril de sa vie ; il ne
put empêcher que la loi ne passât. Bibulus se
renferma dès lors dans sa maison, déclarant
jours fériés tous ceux de son consulat :
mais lui seul les observa, et César ne tint aucun
compte de son absence. (Voyez, sur ce personnage,
Plutarque, Vie de César ; Appien, de la
Guerre civile ; Dion Cassius, liv. XXXVIII ; Velleius
Paterculus, liv. II, etc.) |
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(19) L.
Domitius. L. Domitius, surnommé Ahenobarbus,
trisaïeul de l'empereur Néron, fut consul
avec Appius Claudius Pulcher l'an de Rome 700. Ennemi
acharné de César, il fut tué dans la
déroute de Pharsale. M. Burnouf fait observer avec
beaucoup de justesse que la mention qui est faite ici de
L. Domitius est encore une preuve que cette lettre fut
écrite avant la bataille de Pharsale. |
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(20) M.
Caton. «Dans ce portrait de Caton, dit M.
Salverte, l'odieuse partialité ne peut
flétrir absolument le plus vertueux des hommes ;
Salluste est forcé de reconnaître sa
prudence et son éloquence. Les qualités
qu'il lui refuse, la vertu, la vigilance, l'habitude du
travail, appartenaient si éminemment à
Caton, qu'une telle imputation ne déshonore que
son auteur. A cette image mensongère opposez le
parallèle de César et de Caton tracé
par la même main (Catil.,
ch. LIV), et que termine ce trait profond plus
honorable qu'un long panégyrique : Il aimait mieux
être vertueux que de le
paraître». |
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(21) L.
Postumius. Personnage inconnu. - M. Favonius :
c'était un homme de bien, plein d'énergie,
grand admirateur de Caton, dont il copiait jusqu'aux
ridicules. Il fut fidèle à la cause de la
république ; mais il ne trempa point dans la mort
de César. Fait prisonnier à la seconde
bataille de Philippes, il fut tué par ordre
d'Octave. (Voyez Plutarque, Vie de Caton d'Utique,
Vie de Brutus, Vie de
Pompée ; Dion Cassius, liv. XLVII ;
Valère-Max., liv. VI, c. II, n° 7.) |
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(22) D'une
plus grande vigueur. Ce passage rappelle ce que
Salluste a dit de lui-même au quatrième
chapitre de la Catilinaire. |
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(23) C'est
d'augmenter le nombre de ses membres. C'est ce que
fit César ; il porta jusqu'à neuf cents le
nombre des sénateurs, et y introduisit même
des étrangers, ce qui donna lieu à cette
affiche assez plaisante : «Avis important : on est
prié de ne pas indiquer aux nouveaux
sénateurs le chemin du sénat». |
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(24) Le
vote par scrutin secret. Dion Cassius nous apprend
que Mécène donna le même conseil
à Auguste. |