Livre X - Lettres 46 et 47
PLINE A L'EMPEREUR TRAJAN Les habitants de Nicomédie, seigneur, ont dépensé, pour se faire un aqueduc, trois millions trois cent vingt-neuf mille sesterces, et cet ouvrage a été laissé imparfait, et même est détruit. On en a depuis commencé un autre, et on y a mis deux millions de sesterces. Il a été encore abandonné ; et il faut que ces gens, qui ont si mal employé leur argent, fassent une nouvelle dépense s'ils veulent avoir de l'eau. J'ai trouvé une source très pure, d'où il semble que l'on en pourra tirer, ainsi que l'on avait d'abord tenté de le faire, par un ouvrage en forme d'arc, afin que l'eau ne soit pas seulement portée aux lieux bas de la ville. Il nous reste encore quelques arcades de cet ouvrage. On peut en élever d'autres, les unes avec de la pierre carrée, tirée du premier édifice ; les autres, à mon avis, pourront être bâties de briques ; et cela sera plus aisé et à meilleur marché. Mais il est surtout important que vous vouliez bien nous envoyer un fontainier ou un architecte, de peur qu'il n'arrive de cette entreprise comme des précédentes. Je puis seulement vous répondre que, par son utilité et par sa beauté, elle est très digne de votre empire. TRAJAN A PLINE Il faut avoir soin que l'on conduise de l'eau à Nicomédie. Je suis très persuadé que vous y ferez travailler avec toute l'application que vous devez. Mais en vérité, vous n'en devez pas moins apporter à découvrir par la faute de qui les habitants de Nicomédie ont perdu de si grandes sommes, et si ces ouvrages commencés et laissés ne leur ont point servi de prétexte à se faire des gratifications mutuelles. Vous me ferez savoir ce que vous en aurez appris.
| © Agnès Vinas |