IV - Tullus Hostilius (an de Rome 91 et suiv.)

Chapitre 3SommaireChapitre 5

Tullus Hostilius, qui s'était distingué dans la guerre contre les Sabins (1) fut élu successeur de Numa. Peu après il déclara la guerre aux Albains. Elle fut terminée par un combat singulier entre trois frères jumeaux d'une armée, et trois frères jumeaux de l'autre. Quelques temps après, Métius Fufétius s'étant rendu coupable de trahison, Hostilius détruisit la ville d'Albe, et en força les habitants de se transporter à Rome. Ce prince fit ensuite bâtir pour les assemblées du sénat un édifice (2) qui, de son nom, fut appelé Hostilien, et comprit le mont Coelius dans l'enceinte de la ville. Comme il suivait les exemples de Numa Pompilius dans les sacrifices qu'il offrait aux dieux, un jour qu'il commençait d'en offrir un à Jupiter Elicius (3), il ne put l'achever, ayant été frappé d'un coup de foudre qui, en même temps, consuma son palais.

Ici Aurelius Victor, ou peut-être un copiste d'après Tite-Live, reprend la narration du combat des Horaces et des Curiaces, et celle de la trahison de Metius Fufetius.

La guerre étant déclarée entre les Romains et les Albains, Hostilius, roi des premiers, et Fufetius, général des seconds, jugèrent convenable de la terminer par le combat d'un petit nombre de guerriers. Du côté des Romains (4), trois frères jumeaux, nommés Horaces et du côté des Albains, trois autres frères jumeaux, nommés Curiaces, furent choisis en vertu d'une convention, pour défendre la cause des deux peuples. Dès le premier choc deux Horaces mordirent la poussière, et les trois Curiaces furent blessés. Le dernier Horace, se voyant incapable de se défendre contre trois, quoiqu'il n'eût reçu aucune blessure, fit semblant de prendre la fuite. Les Curiaces le poursuivirent à intervalles inégaux, et aussi vivement que leurs blessures le leur permettaient ; mais les uns après les autres, ils tombèrent sous ses coups. Comme il revenait victorieux et chargé des dépouilles des vaincus, sa soeur, qui était venue au-devant de lui, se mit à pleurer eu voyant sur ses épaules le manteau militaire de l'un des Curiaces, à qui elle était fiancée. Indigné de ses larmes, Horace lui donna la mort. Condamné au dernier supplice par les duumvirs (6), il en appela au peuple. Les larmes de son père lui obtinrent sa grâce, mais à condition qu'il passerait sous sle joug (7). Ce joug, placé au milieu d'une des rues de la ville, est encore aujourd'hui nommé le joug de la soeur.

Metius Fufetius, général des Albains, s'attira leur haine pour avoir consenti à ce que la guerre fût terminée par le combat de trois Romains contre trois Albains. Pour calmer les esprits, il excita les Véiens et les Fidénates contre Rome. Tullus l'ayant appelé comme auxiliaire (8), il plaça ses troupes sur le penchant d'une colline pour attendre l'événement de la bataille (9) et prendre un parti. Tullus, pénétrant ses intentions, s'écria que Metius n'avait pris cette position que par son ordre. Effrayés de ces paroles, les ennemis prirent la fuite. Le lendemain, Metius se rendit auprès de Tullus pour le féliciter de sa victoire ; mais ce prince ordonna qu'il fût attaché entre deux chars, par chaque extrémité de son corps, et ensuite écartelé.


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(1)  Tullus Hostilius était, suivant Tite-Live, le petit-fils de cet Hostilius, qui avait signalé sa valeur dans la guerre contre les Sabins. Il est donc à présumer qu'il existe ici une perturbation dans le texte de notre auteur, et qu'il faudrait lire, quia ejus avus bonam operam, etc. Voici les paroles de Tite-Live, 1. 1, c. 22 : Numae morte, res ad interregnum rediit. Inde Tullum Hostilium, nepotem Hostilii, cujus in infima arce clara pugna adversus Sabinos fuerat, regem populus jussit. Florus paraît être tombé dans la même méprise qu'Aurelius Victor.

(2)  Cet édifice était un temple où ce prince convoquait le sénat. Il y avait à Rome deux sortes d'édifices, nommés Curies : l'un où les prêtres exerçaient le culte des dieux ; un autre où le sénat réglait les choses humaines, sous les auspices de la divinité. Telle était la curie que bâtit le roi Tullus Hostilius.

(3)  Elicius vient du verbe elicio, j'attire, ou plutôt comme dit Plutarque du verbe grec eleeo, qui veut dire, j'ai pitié.

(4)  Tite-Live semble douter si les Horaces étaient Romains, et si les Curiaces étaient Albains. «Les auteurs, dit ce grand historien, sont partagés sur ce point : quant à moi, je me sens porté à croire, conformément à l'opinion du plus grand nombre, que les Horaces étaient Romains». L. 23, ch. 34.

(5)  Le manteau (paludamentum) était affecté au général d'une armée. Il était couleur de pourpre, et quelquefois blanc, étroit à sa partie supérieure, et large par le bas. Les soldats le portaient aussi dans quelques occasions. Quelques traducteurs en ont fait une cotte de maille, mais sans motif.

(6)  Ces deux juges furent alors institués pour prononcer sur le meurtre commis par le jeune Horace. Comme ils étaient en nombre pair, on appelait de leurs jugements à un autre tribunal dont les membres étaient en nombre impair.

(7)  Le joug était formé de deux solives perpendiculaires, et d'une troisième qui passait de l'une à l'autre. Horace fut obligé de passer sous cette espèce de porte en se baissant, et la tête voilée. C'était une peine infamante : mieux eût valu la mort pour un tel guerrier.

(8)  En vertu du traité qui avait eu lieu, après la victoire du jeune Horace.

(9)  Dans plusieurs éditions, et entre autres dans celle de Leipsik, après fortunam, on trouve entre deux parenthèses ces mots belli experiretur ac. Arntzen les a retranchés de la sienne, sur l'autorité de plusieurs manuscrits, et d'une ancienne édition où ils manquent.