XXIX - Dèce (an de Rome 1002)

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Monnaie de Dèce

Dèce, né dans un village de Sirmie, parvint à l'empire par tous les grades de la milice. Dans la joie que lui causa la mort de ses ennemis (1), il créa césar son fils Etruscus (2), et l'envoya en Illyrie. Pour lui, il fit quelque séjour à Rome, afin d'y dédier un édifice (3) qu'il avait fait élever. Il s'y trouvait encore lorsqu'on lui apporta, selon l'usage établi, la tête de Jotapien (4), qui, fier d'être un descendant d'Alexandre, avait formé en Syrie des entreprises séditieuses pour lesquelles les soldats l'avaient mis à mort (5). Dans ce même temps Lucius Priscus (6), gouverneur de Macédoine, usurpa la dignité impériale, et invoqua le secours des Goths (7), qui, après avoir pillé une grande partie de la Thrace, étaient entrés dans cette province. A cette nouvelle, Dèce se hâta de quitter Rome. Pendant son absence, Julius Valens (8), autorisé du voeu public, se saisit de l'empire. Mais le sénat ayant déclaré Priscus ennemi de la patrie, ces deux usurpateurs ne tardèrent pas à être punis de mort. Quant aux deux Dèces, pendant qu'ils poursuivaient les Barbares au-delà du Danube, ils périrent par la trahison de Brutus (9) après un règne de deux ans. Selon la plupart des historiens, leur mort fut plus glorieuse ; Dèce, le fils, fut tué dans une bataille, comme il combattait avec trop d'ardeur. Les soldats, frappés de sa mort, cherchèrent à consoler, par de longs discours, l'empereur, son père. «La mort d'un soldat, leur répondit ce prince sans paraître ému, me semble une perte légère». Après ces paroles il recommença le combat, où il périt, comme son fils, en donnant des preuves d'une grande valeur.


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(1)  Les deux Philippes.

(2)  Les médailles et les inscriptions portent Q. Herennius Etruscus, Messius Decius, Aug. Decii, Aug. Filius.

(3)  Un superbe palais sur le penchant du mont Viminal.

(4)  Suivant Zosime, ce Jotapien s'était fait empereur sous le règne des deux Philippes.

(5)  Il paraît qu'Aurelius Victor a emprunté ce passage aux auteurs de l'Histoire Auguste, qui rapportent, dans un de leurs livres qui nous manquent, les événements arrivés depuis le troisième Gordien jusqu'à Valérien.

(6)  Madame Dacier pense que ce Lucius Priscus, qui porte sur les médailles les titres d'imperator, de caesar et d'augustus, était frère de l'empereur Philippe, qui l'envoya commander les armées de Syrie. Madame Dacier n'a certainement vu aucune médaille de ce Romain, car les antiquaires n'en connaissent point ; ainsi son observation doit être regardée comme nulle.

(7)  Ces peuples, qu'on confond avec les Gètes, habitaient cette partie de la Scythie, située au-dessus du Pont-Euxin, vers le nord-est. Ce vaste pays est habité aujourd'hui par les Tartares Kalmouks.

(8)  Ni les historiens grecs, ni les latins, ne font mention de ce Valens, que l'auteur de l'Epitome surnomme Licinianus.

(9)  La plupart des critiques pensent que Victor a pris ici un nom de pays pour un nom d'homme. Selon Jornandès, Cassiodore et Eusèbe, les deus Dèces furent tués près d'Abrutum, ville de la Moesie ; et, selon madame Dacier, ce fut par la trahison de Gallus. Zozime rapporte que Dèce, le père, mourut près des bords du Tanaïs, et que son fils périt par la trahison de ce même Gallus mais Zozime confond le Tanaïs avec le Danube. Cet empereur périt avec son armée dans un marais qui défendait le front des Goths.