XXXIX - Dioclétien (an de Rome 1036)

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Monnaie de Dioclétien

Après que l'odeur, causée par la putréfaction, eut fait connaître la mort de Numérien, les chefs de l'armée et les tribuns élurent pour son successeur, à cause de sa sagesse, Valère Dioclétien, commandant des gardes de l'intérieur du palais (1). C'était un homme doué de grandes qualités, mais tellement amateur du luxe, qu'il fut le premier qui porta un manteau broché d'or (2), et une chaussure de soie et de pourpre, enrichie d'un grand nombre de pierreries. Quoique cette magnificence fût peu convenable à un citoyen romain, et qu'elle fût la marque d'un esprit orgueilleux et dissipé, c'était néanmoins un léger défaut en comparaison des autres qu'on pouvait justement lui reprocher. En effet, après Caligula et Domitien, il fut le premier qui souffrit qu'on lui donnât publiquement le titre de seigneur, qu'on l'appelât Dieu, et qu'on l'adorât en cette qualité. Je me suis convaincu, d'après ces exemples, du moins autant que la portée de mon esprit me l'a permis, que les hommes qui, de la plus basse condition, sont montés aux plus hautes dignités, ne mettent aucune borne à leur orgueil et à leur ambition (3).

Ainsi, Marius du temps de nos pères, et dans notre siècle, le prince dont nous parlons, après s'être élevés au-dessus de la condition de simples particuliers, laquelle ne leur donnait aucune autorité, devinrent insatiables de puissance, comme ceux que de longues privations, qui ont affaibli leurs forces, conduisent aux excès de l'intempérance. C'est pourquoi je m'étonne que plusieurs personnes reprochent à la noblesse un orgueil que lui inspire justement le souvenir de ses ancêtres, et une ambition modérée, qui la dédommage des peines auxquelles elle est souvent exposée (4). Les défauts de Dioclétien furent néanmoins balancés par de bonnes qualités car s'il se fit appeler seigneur, il se comporta comme un père à l'égard des Romains ; et c'est une chose assez constante que ce sage prince (5) voulut prouver quele crime est souvent moins dans les choses que dans les mots.

Cependant Carin ne pouvant plus douter de ce qui s'était passé, et persuadé qu'il apaiserait aisément les troubles qui venaient de s'élever, se hâta de se rendre en Illyrie en faisant un circuit en Italie. Ce fut alors qu'il fit trancher la tête à Julien, après avoir défait son armée. Ce Julien exerçait chez les Vénètes la charge de correcteur (6), lorsqu'il apprit la mort de Carus. Empressé d'arracher l'empire à son ennemi, il s'était avancé pour le combattre. Arrivé sur les frontières de la Moesie, Carin livra aussitôt bataille à Dioclétien près de Margus (7). Mais pendant qu'il poursuivait avec beaucoup d'ardeur l'armée vaincue, il fut tué par ses soldats dont son penchant effréné pour la débauche le portait à corrompre les femmes. Malgré leur indignation et leur douleur, ils avaient attendu l'événement de la guerre : mais la crainte que la victoire ne rendit Carin plus insolent encore, les poussa dans ce moment à satisfaire leur vengeance.

Telle fut la fin de Carus et de ses fils. Ils étaient de Narbonne (8), et leur règne avait duré deux ans. Pendant la première allocution (9) que Valère adressa à ses soldats, il tira son épée, et, regardant le soleil, il le prit à témoin qu'il n'avait eu aucune connaissance de la mort tragique de Numérien, ni le moindre désir de s'élever à l'empire ; ensuite se tournant du côté d'Aper, qui était debout fort près de lui, il le perça d'un coup d'épée (10). Ainsi fut puni de sa trahison cet homme qui avait fait mourir un jeune prince, bon, éloquent, et qui, plus est, était son gendre. Dioclétien pardonna à tous ses complices : il retint même auprès de sa personne la plupart de ses propres ennemis, entre autres Aristobule, personnage très considéré, et lui laissa la charge de préfet du prétoire. Ce fut, de mémoire d'homme, une chose nouvelle et incroyable que personne n'eût été dépouillé, ni de ses biens, ni de sa réputation, ni de ses dignités pendant la guerre civile, guerre que nous regardons comme douce et avouée par l'humanité, lorsque ceux qui la font, mettent des bornes aux exils, aux proscriptions, aux supplices et aux massacres. Dirai-je encore, à la gloire de Dioclétien, qu'il associa à sa puissance plusieurs citoyens et même des étrangers, soit pour défendre, soit pour étendre les droits de l'empire ? Qui ignore qu'ayant été averti qu'Elien et Amandus, après le départ de Carin, avaient rassemblé dans la Gaule un grand nombre de paysans et de brigands, nommés Bagaudes (11) par les habitants de cette province, et qu'après avoir ravagé au loin les campagnes, ils étaient sur le point d'entrer dans les villes ; qui ignore qu'aussitôt il se donna pour collègue Maximien, qu'il connaissait pour un ami fidèle, et qui à des moeurs rustiques joignait un grand talent pour la guerre et beaucoup de jugement (12). Bientôt après, ce Maximien prit le surnom d'Herculius, du nom d'Hercule, sa divinité favorite, comme Valère prit celui de Jovius. De là ces deux surnoms furent donnés aux légions qui, par leur bravoure, l'emportaient sur toutes les autres. Herculius se rendit ensuite dans la Gaule qu'il eut bientôt pacifiée entièrement, par la défaite ou par la soumission des ennemis. Pendant cette guerre, Carausius, citoyen de la ville de Menapie, qui se distinguait par des actions d'éclat, et dont on connaissait l'habileté dans la manoeuvre des vaisseaux, métier auquel il s'était adonné dès sa jeunesse pour subsister, fut chargé par les deux empereurs d'équiper une flotte et de dissiper les Germains (14) qui infestaient la mer. Enorgueilli de cette commission, il ne détruisit pas autant de ces Barbares qu'il aurait pu (15) ; et même, au lieu d'envoyer tout le butin qu'il avait fait au trésor impérial, il s'en appropria une partie. Ensuite, informé de l'ordre qu'Herculius avait donné de le mettre à mort, il se déclara empereur et s'empara de la Grand-Bretagne. Cependant les Perses ébranlaient fortement l'Orient ; Julien et les nations quinquegentanes (16), la province d'Afrique, et un certain Achilleus prenait à Alexandrie d'Egypte les ornements impériaux. Ces événements déterminèrent les deux empereurs à s'associer, en les créant césars, Jules Constance et Galerius Maximien, surnommé Armentarius. Le premier épousa la belle-fille d'Herculius ; le second, la fille de Dioclétien, après avoir répudié leurs premières femmes, ainsi qu'Auguste l'avait exigé de Tibère Néron, en lui donnant sa fille Julie en mariage (17). Tous ces princes avaient pris naissance en Illyrie. Quoique peu civilisés, ils rendirent d'assez grands services à la république, parce qu'ils s'étaient endurcis aux pénibles travaux de la campagne et de la guerre : ce qui prouve que les hommes deviennent vertueux et sages par le sentiment du mal ; au lieu que ceux qui n'ont jamais connu le malheur ne portent que de faux jugements, en n'estimant leurs semblables que d'après les richesses qu'ils possèdent. La bonne union qui régna entre ces princes prouva surtout que leur propre génie et leur habileté dans l'art militaire, qu'ils avaient appris d'Aurélien et de Probus, suffisaient presqu'en eux pour remplacer les qualités dont ils manquaient. J'ajouterai à cet éloge le respect filial qu'ils portaient à Valerius, et la vénération dont ils étaient pénétrés pour lui, comme pour le maître des dieux. Les crimes commis par des parents, les uns envers les autres, depuis la fondation de Rome jusqu'à notre siècle, mettent dans tout son jour l'excellence de tels sentiments.

Comme le poids des guerres, dont nous avons parlé plus haut, devenait de jour en jour plus difficile à supporter, les deux empereurs et les deux césars firent entre eux une espèce de partage de l'empire. Tous les pays situés au-delà des Alpes gauloises furent confiés à Constance ; Herculius eut pour lui l'Afrique et l'Italie, et Galerius toute l'Illyrie jusqu'au Pont-Euxin. Valerius se réserva le reste des provinces de l'empire. Après ce partage l'Italie fut soumise à un tribut qui lui devint bien onéreux. Auparavant elle était seule chargée de fournir des vivres à l'armée ou aux empereurs, qui toujours, ou presque toujours, y faisaient leur résidence : on fit une loi nouvelle pour l'augmentation de cet impôt, qui d'abord avait été perçu avec modération. Supportable néanmoins dans ce temps-là, parce qu'il n'était pas excessif, il est devenu dans notre siècle un vrai fléau pour les peuples. Jovius (18) ne tarda pas à se rendre à Alexandrie, après avoir confié les pays qu'il gouvernait au césar Galerius Maximien, afin qu'en abandonnant l'Illyrie, il se rendît en Mésopotamie pour réprimer les incursions des Perses. Très-maltraité d'abord par ces peuples, Galerius Maximien assembla à la hâte une armée de vétérans et de nouveaux soldats, avec laquelle il s'avança contre les ennemis, en traversant l'Arménie ; ce qui était le moyen le plus aisé et peut-être le seul de les vaincre (19). Ce fut là qu'il fit prisonniers le roi Narsès (20), ses enfants, ses femmes et toute sa cour. Sa victoire fut si complète, que, si Valerius, sans la volonté duquel rien ne se décidait, n'avait refusé d'y consentir, on ne sait par quel motif (21), une nouvelle province aurait été soumise aux faisceaux romains. Néanmoins la partie la plus utile de cette contrée nous resta : acquisition qui a été la cause d'une nouvelle guerre extrêmement dangereuse et funeste pour nous, par les efforts des Perses pour la recouvrer.

Dans le même temps, en Egypte, Achilleus, vaincu presque sans peine, recevait le châtiment de sa révolte. En Afrique, les armes romaines ne furent pas moins heureuses. Quant à Carausius, on lui laissa le gouvernement de la Grande-Bretagne (22), lorsqu'on se fut assuré que personne n'était plus que lui capable de résister à des nations belliqueuses, soit par les ordres qu'il donnait, soit par le secours des habitants de cette contrée. Il y avait six ans qu'il jouissait du pouvoir suprême, lorsqu'un nommé Alectus, qui exerçait une autorité immédiatement soumise à la sienne, le fit périr par une trahison. Cet homme, que la crainte d'être puni de mort pour ses crimes avait porté à commettre celui-ci, se déclara empereur aussitôt après l'avoir exécuté : mais il ne jouit pas longtemps de son usurpation (23). Asclépiodote, préfet du prétoire, fut envoyé contre lui par Constance avec une partie de la flotte et des légions, et le défit complètement. Ce fut aussi à cette même époque que les Marcomans furent taillés en pièces dans une bataille, et que la nation des Carpiens (24), dont une partie avait déjà été transportée par Aurélien sur les terres de l'empire, y passa tout entière. Lorsque la paix eut remplacé la guerre, les deux empereurs ne se livrèrent pas avec un moindre zèle aux fonctions du gouvernement civil, qu'ils en avaient montré pour les travaux guerriers. Non contents d'avoir fait des lois où brillait leur équité, ils destituèrent les agents des subsistances (25), véritables fléaux des peuples, avec lesquels ont trop de ressemblance ceux qui remplissent aujourd'hui les mêmes fonctions. Ces hommes, qui paraissaient avoir été placés dans les provinces pour observer les mouvemens séditieux qui pouvaient s'y élever, et en informer le prince, ne s'occupaient qu'à imaginer de fausses accusations, et par la terreur universelle qu'ils inspiraient, surtout aux citoyens les plus éloignés de Rome, ils exerçaient partout de honteuses rapines. Les empereurs ne montrèrent pas alors moins de sollicitude, relativement aux subsistances de la villes et au soulagement de ceux qui payaient les impôts. L'émulation des citoyens pour la vertu s'accrut par les places qu'ils accordèrent aux gens de bien, et par la punition de ceux qui étaient coupables de quelques crimes. Le culte antique des dieux fut maintenu dans toute sa pureté ; Rome et d'autres villes, telles que Carthage, Milan et Nicomédie furent embellies de nouveaux édifices d'une grande magnificence (26).

En tenant une conduite si louable, les deux empereurs n'étaient pas néanmoins exempts de vices. Herculius avait pour la débauche un penchant si effréné, qu'il ne rougissait pas même de corrompre les otages. Valerius faisait paraître à l'égard de ses amis une méfiance peu honorable pour eux, sans doute par la crainte qu'il avait que la discorde ne troublât la paix qui régnait entre eux, à la suite des rapports qu'ils se feraient les uns aux autres. Ce fut pour cette raison qu'il affaiblit la défense de la ville, en diminuant le nombre des cohortes prétoriennes et des citoyens armés (27), et pour laquelle, disent plusieurs historiens, il prit la résolution de se démettre de la dignité impériale. En effet, comme il s'appliquait à prévoir tous les dangers qui pouvaient le menacer, dès qu'il s'aperçut que l'empire allait devenir, par l'ordre des destinées, la proie des guerres civiles, et que, pour ainsi dire, il touchait à sa ruine, il célébra la vingtième année de son règne, et abdiqua le gouvernement de la république, quoiqu'il jouît encore de toutes ses forces. Herculius, qui avait régné un an de moins, suivit son exemple, non sans avoir eu beaucoup de peine à se conformer au conseil qu'il lui en donna. Quoique plusieurs personnes aient obscurci la vérité sur ce point, par la différence des opinions qu'elles se sont formées des motifs de cet empereur, nous pensons que ce ne fut que par l'excellence de son caractère (28) que, méprisant les grandeurs, il en descendit pour embrasser la vie d'un simple citoyen.


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(1)  On lit dans le texte domesticos regens. On appelait domestici des soldats qui ne combattaient point avec les autres, et dont les fonctions se bornaient à garder l'intérieur du palais impérial, et à marcher aux côtés de l'empereur. Les uns étaient cavaliers, et les autres fantassins. On appelait protectores ceux qui, pendant le combat, se tenaient aux côtés du prince.

(2)  L'auteur de l'Epitome dit pourtant qu'Aurélien fut le premier qui se vêtit d'un habit tout doré.

(3)  Claudien exprime à peu près la même pensée dans ce vers : Asperius nihit est humili cum surgit in altum. Nous avons été témoins de la vérité des réflexions d'Aurelius Victor ; et jamais l'histoire n'a fait mention ni d'une élévation aussi rapide, ni d'une ambition aussi illimitée, que celles dont la France a été la victime pendant près de quinze années.

(4)  Rien n'est plus sensé que cette réflexion d'Aurelius Victor. En effet, si l'orgueil le plus ridicule est celui des hommes de néant que d'heureuses circonstances ont élevés aux honneurs, il en est un autre que la raison approuve et que la morale permet. C'est celui de ces nobles dont l'illustration date de plusieurs siècles, et qui comptent parmi leurs ancêtres les personnages les plus recommandables par leurs grandes qualités, et par les services qu'ils ont rendus à l'état. Il est juste de leur pardonner une fierté si bien fondée, et qui souvent a pour objet le seul bien qui leur reste, leur nom et le souvenir de leurs aïeux.

(5)  L'éloge que Victor fait ici de Dioclétien, un des persécuteurs les plus acharnés des chrétiens, prouve suffisamment que cet auteur était païen. Lactance ne s'est pas ainsi exprimé. Cet empereur avait de grandes qualités ; mais sa cruauté envers les chrétiens a couvert son nom d'une éternelle flétrissure.

(6)  Un correcteur de province n'avait pas la même autorité qu'un gouverneur. C'était comme un inspecteur ou censeur que les empereurs romains envoyaient dans de petites provinces pour y veiller à l'exécution des lois de l'empire. La correcture était une charge de nouvelle création. Selon M. de Tillemont, les correcteurs étaient juges ordinaires avec les consulaires et les présidents ; il n'y en avait guère que pour l'Italie et les petites provinces.

(7)  Cette ville conserve des vestiges d'antiquité sous le nom de Kastolalz en Servie, quoique aujourd'hui à quelque distance au-dessous de l'embouchure de la rivière du même nom, par un changement arrivé au bas de son cours. Danville, géogr. anc. t.1

(8)  Ce n'est point de Narbonne, ville des Gaules, qu'il est ici question, comme on pourrait le croire d'après Sidoine Apollinaire et Zonare. Selon le savant Scaliger, Carus était né en Illyrie, où Pline et Ptolémée assurent qu'il existait une ville, nommée Narbonna ou Narona, que le premier place près du fleuve Naron, aujourd'hui la Narenta, en Dalmatie. C'est encore le sentiment de Saumaise, de Spanheim et d'Havercamp.

(9)  Le discours qu'un empereur adressait à son armée se nommait proprement allocution. On emploie aujourd'hui ce mot pour signifier un discours adressé par le pape au consistoire des cardinaux.

(10)  Vopiscus et d'autres historiens assurent que cet événement eut lieu avant l'arrivée de Carin en Illyrie.

(11)  Eutrope les nomme Bagaudes, Orose, Vacaudes, et Eusèbe, dans sa Chronique, Baccharides. Ces rebelles habitaient les Alpes et leurs environs. Selon Apollinaire, il faut leur joindre les Vargiens, Vargos, habitants de l'Auvergne, qui se livraient au brigandage. La révolte des Bagaudes s'était étendue si loin, qu'ils avaient un fort dans l'endroit où est situé aujourd'hui le village de Saint-Maur-les-Fossés, près Paris.

(12)  Eutrope fait de cet empereur un portrait beaucoup moins flatté. Voici ses termes : Herculius autem propalam ferus et incivilis ingenii, asperitatem etiam suam vultus horrore significans.

(13)  Selon Strabon, les Ménapiens étaient un peuple de la Gaule, voisin des Morins, qui habitaient sur les côtes de la Belgique. J'ai lu, dans le Dictionnaire des noms propres, etc., rédigé par Robert Etienne, à l'article Menapii : populi juxta Rhenum, fluvium in Gallia, juliacenses vulgo dicuntur. Danville place les Ménapiens entre l'Escaut et la Meuse.

(14)  Eutrope dit qu'il fut chargé de chasser les Francs et les Saxons, qui infestaient les côtes de la Belgique et de l'Armorique, c'est-à-dire, de la Flandre, de la Picardie, de la Normandie et de la Bretagne.

(15)  Schott, Grutter, Sylburge et madame Dacier, pensent qu'au lieu de ces mots du texte, cum parum multos opprimeret, il faut lire cum barbarum multas opprimeret. Cette leçon est conforme aux paroles d'Eutrope, multis barbaris saepe captis. Selon Arntzen, il faut lire paronum an lieu de parum. Le mot parones signifie ces bâtiments légers dont les Germains se servaient pour exercer leurs pirateries. Si cette leçon était admise, il faudrait dire que Carausius détruisit un grand nombre de bâtiments ennemis. Dans cette incertitude, j'ai cru devoir conserver la leçon parum multos, et j'ai traduit la phrase d'après l'explication de Juncker, parce qu'elle m'a semblé conforme aux desseins ambitieux de Carausius, qui voulait, sans doute, se faire des partisans parmi les Barbares, en les épargnant.

(16)  On nommait ainsi cinq peuples qui habitaient la Pentapole, contrée de l'Afrique Cyrénaïque, laquelle renfermait cinq grandes villes, savoir : Bérénice, Ptolémaïs, Arsinoé, Apollonie et Cyrène.

(17)  Auguste, voulant donner en mariage à Tibère sa fille Julie, exigea qu'il répudiât sa femme Agrippine, qui était enceinte. Suet. Aug. ch. 63. Tib. ch. 7.

(18)  Surnom de Dioclétien.

(19)  C'est que la Mésopotamie, qui était défendue des autres côtés par des fleuves, était ouverte du côté de l'Arménie ; ou peut-être qu'il était plus commode pour l'armée romaine de combattre, dans un pays de montagnes, contre un ennemi dont la cavalerie faisait la principale force.

(20)  Il n'était que prince d'Arménie.

(21)  Sans doute par un motif de jalousies ou peut-être Dioclétien était-il persuadé qu'une sorte de fatalité s'opposait à la conquête de la Perse.

(22)  Voici les paroles d'Eutrope à ce sujet : Cum Carausio tamen cum bella frustra tentata essent contra virum rei militaris peritissimum ad postrenum pax convenit. On laissa donc la Grande-Bretagne à Carausius, parce qu'en ne put faire autrement.

(23)  Alectus jouit de son usurpation pendant trois ans, et Carausius en avait régné sept. Ainsi la Grande-Bretagne était restée séparée, pendant l'espace de dix ans, des autres provinces de l'empire.

(24)  Ces peuples habitaient les environs du Danube. Voici comment Eutrope parle de cette expédition : Carpis et Basternis subactis, Sarmatis victis, quorum nationum ingentes captivorum copias, in romanis finibus locaverunt. Aurelius Victor est le seul qui dise qu'Aurélien avait déjà transporté sur les terres de l'empire une partie de la nation des Carpiens. Peut-être faudrait-il lire Caesa avant ou après erat, verbe qui n'est là que comme auxiliaire. Vopiscus, qui parle de cette défaite des Carpiens par Aurélien, ne fait nulle mention de l'événement rapporté par Aurelius Victor.

(25)  On appelait frumentarii des soldats ou officiers attachés aux légions, et établis pour présider au transport des subsistances, et veiller à l'approvisionnement des troupes. Ils avertissaient aussi le prince de tout ce qui se passait dans l'armée.

(26)  Les ruines des Thermes de Dioclétien, qui subsistent encore à Rome, annoncent l'ancienne magnificence de cet édifice. On dit que cet empereur employa pendant plusieurs années à leur construction quarante mille chrétiens. On y voyait les statues de ce prince, de Maximien, de Constance et de Galerius.

(27)  Il paraît qu'il faut entendre par ces citoyens armés les soldats des cohortes, préposées à la garde de la ville, parce qu'ils étaient tirés du peuple. Nous avons déjà vu que les cohortes urbaines étaient distinguées des prétoriennes. C'était une troupe à peu près semblable à nos gendarmes.

(28)  Cet éloge de Dioclétien prouve que cet empereur était doué de grandes qualités ; et le respect, la vénération même dont les princes, qui partageaient l'empire avec lui, étaient pénétrés pour lui, font croire qu'en persécutant les chrétiens, il fut abusé par une fausse politique, ou trompé par les gouverneurs des provinces.