España, sus monumentos y
artes
Catalunya, Piferrer/Margall (1884)
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Pour capter leur bienveillance, je les questionnais
moi-même longuement sur ce qu'était leur
village, sur les travaux qu'on y exécutait, sur
la contrebande, leur principale industrie, etc., etc.
Ils répondaient à mes questions avec la
loquacité ordinaire aux campagnards. Le
lendemain, nos gardiens étaient remplacés
par d'autres habitants du même village. «En
ma qualité de marchand ambulant, dis-je à
ces derniers, j'ai été jadis à
Cadaquès», et me voilà leur parlant
de ce que j'avais appris la veille, de tel individu,
qui se livrait à la contrebande avec plus de
succès que les autres, de sa belle habitation,
des propriétés qu'il possédait
près du village, enfin d'une foule de
particularités qui ne semblaient pouvoir
être connues que d'un habitant de
Cadaquès. Ma plaisanterie produisit un effet
inattendu. Des détails si circonstanciés,
se dirent nos gardiens, ne peuvent pas être
connus d'un marchand ambulant ; ce personnage que nous
trouvons ici, dans une si singulière
société, est certainement originaire de
Cadaquès ; et le fils de l'apothicaire doit
avoir à peu près son âge. Il
était allé en Amérique tenter la
fortune : c'est évidemment lui qui craint de se
faire connaître, ayant été
rencontré avec toutes ses richesses sur un
bâtitnent qui se rendait en France. Le bruit
grandit, prend de la consistance, et parvient aux
oreilles d'une soeur de l'apothicaire, établie
à Rosas. Elle accourt, croit me
reconnaître et me saute au cou. Je proteste
contre l'identité : «Bien joué ! me
dit-elle ; le cas est grave, puisque vous avez
été trouvé sur un bâtiment
qui se rendait en France ; persistez toujours dans vos
dénégations ; les circonstances
deviendront peut-être plus favorables, et j'en
profiterai pour assurer votre délivrance. En
attendant, mon cher neveu, je ne vous laisserai manquer
de rien.» Et, en effet, nous recevions, tous les
matins, M. Berthemie et moi, un repas confortable.
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