Louis, François, Pierre de Bonnefoy (1816-1887)

Issu d'une noble et ancienne famille du Languedoc, il naquit à Perpignan en 1816. Son père, Jean de Bonnefoy, était un chevalier de Malte qui, lors de la suppression de l'ordre par Napoléon 1er, était venu se fixer à Perpignan. Il avait épousé dans cette ville la fille du dernier président du Conseil souverain, Albert de Collarès.

Après de bonnes études faites aux Passages (Espagne), sous la direction des Jésuites, Louis de Bonnefoy rentra dans sa ville natale. C'était l'époque où se dessinait dans les milieux savants de notre pays un mouvement en faveur de l'histoire du Roussillon. Henry venait de publier son Histoire de Roussillon, en 1835 ; le Publicateur éditait chaque semaine des articles historiques et archéologiques de Puiggari, Campagne, des frères Saint-Malo, etc. Des prédispositions naturelles, un go&ucirct inné pour l'étude portèrent Louis de Bonnefoy à s'occuper aussi d'histoire locale. Ses recherches et ses travaux lui fournirent occasion de lier amitié avec J.-B. de Saint-Malo, ancien sous-préfet de Céret. Il ne tarda pas à choisir pour compagne de sa vie la fille de ce savant gentilhomme. Louis de Bonnefoy fut le continuateur des oeuvres de son beau-père et des érudits de l'école du Publicateur. Il est le trait d'union entre ces derniers et Alart. Quand la nombreuse pléiade de ces historiens roussillonnais disparut, en 1854, il resta seul sur la brèche, maintenant les traditions de ses illustres devanciers.

En 1851, il avait inséré, dans le VIII° Bulletin de la Société Agricole, Scientifique et Littéraire des Pyrénées-Orientales deux articles archéologiques ayant pour titre : Autel de Pézilla et Notes archéologiques sur Saint-Génis-des-Fontaines. Cinq ans plus tard, il se décida à publier l'épigraphie roussillonnaise, oeuvre capitale qu'on pourra compléter, mais dont les grandes lignes resteront, véritable manuel en la matière que tout archéologue devra étudier. On doit savoir gré à Louis de Bonnefoy d'avoir déchiffré les inscriptions lapidaires du département dont la plupart sont pour le vulgaire de véritables hiéroglyphes et surtout de les avoir mises à la portée de tout le monde. «Cette épigraphie, dit M. Brutails, a été publiée par fragments dans le Bulletin de la Société Agricole, Scientifique et Littéraire des Pyrénées-Orientales entre 1856 et 1866 ; il en a été fait un tirage à part à un petit nombre d'exemplaires... L'Epigraphie Roussillonnaise est un de ces travaux complets, aussi remarquables par l'érudition et la sagacité de l'auteur que par l'étendue de ses recherches et la forme heureuse dans laquelle il en a présenté les résultats. Il n'est pas une commune perdue dans la gorge la plus reculée du département que Louis de Bonnefoy n'ait courue. Dans son Epigraphie les moindres détails sont traités avec ce soin minutieux, cette conscience desquels il est permis de dire qu'ils sont la probité de l'historien». Les recherches furent longues et pénibles ; l'auteur a pu écrire avec raison dans la préface de son ouvrage : «J'ai interrogé les produits de la céramique, les métaux, les bois, les étoffes aussi bien que le marbre et la pierre». Les notes historiques qui accompagnent les diverses inscriptions sont de précieux commentaires, d'utiles auxiliaires pour ceux qui se livrent à l'étude de l'histoire du Roussillon.

En 1868, se réunit pendant quelques jours à Perpignan, sous la présidence de M. de Caumont, le XXXV° Congrès archéologique de France. Louis de Bonnefoy l'avait préparé ; il en fut l'âme pendant sa session. A tout instant c'était lui qu'on consultait ; il ne lut pas de volumineux mémoires, mais sur toutes les questions il apporta des explications, fournit des dates, rectifia des jugements précipités. L'année suivante, Louis de Bonnefoy quitta Perpignan pour se fixer définitivement à Toulouse, où il mourut le 21 mars 1887. Dans cette dernière ville il n'accepta qu'un seul honneur, celui d'être membre du comité de la bibliothèque dont il était l'hôte si assidu qu'il semblait en avoir fait sa seconde demeure. Travailleur infatigable, il étudiait sans relâche ; mais ce savant d'espèce rare fuyait la publicité et le renom. Les plus habiles reçurent de lui plus d'une fois le trait de lumière qui leur manquait, et ils savaient que lorsqu'il avait donné une affirmation ils pouvaient s'appuyer sur elle avec certitude. Ils go&ucirctaient dans sa causerie, avec le charme d'une bienveillance sans mesure, des aperçus variés, semés de traits dans leur bonhomie narquoise, parfois doucement railleuse pour les érudits improvisés.

VIII°, XXVIII° et XXXII° Bulletins de la Société Agricole, Scientifique et Littéraire des Pyrénées-Orientales. - Abbé Torreilles, Le mouvement historique en Roussillon pendant le XIXe siècle. - Abbé J. Capeille, Louis de Bonnefoy dans le 38° fascicule du Journal illustré des Pyrénées-Orientales. - Messager de Toulouse, n° du 24 mars 1887, article nécrologique.

Planches de l'Epigraphie roussillonnaise
imprimées par J.B. Alzine (1868)