XXXIV - Appius Claudius Caecus (an de Rome 441 à 473) | | | |
Appius Claudius (1) Caecus, ayant été nommé censeur, fit entrer dans le sénat des fils d'affranchis, et priva les joueurs de flûte du droit de manger (2) et de chanter en public. Deux familles, celle des Pinariens et celle des Politiens (3), présidaient au culte d'Hercule. Claudius engagea ceux-ci, à prix d'argent, à révéler à des esclaves publics les mystères de ce dieu. En punition de cette impiété, il fut frappé de cécité, et la famille des Potitiens périt tout entière. Ce même Appius s'opposa avec une grande vigueur à ce que la dignité consulaire fût communiquée aux plébéiens (4), et empêcha que Fabius ne fût seul chargé du commandement de l'armée dans la guerre contre les Samnites. Il soumit les Sabins, les Samnites et les Etrusques ; fit paver, depuis Rome jusqu'à Brindes (5), un chemin qui, de son nom, fut nommé la voie Appia, et conduisit jusque dans la ville les eaux de l'Anio (6). Il exerça seul la censure pendant cinq ans. Pyrrhus, voulant traiter de la paix avec les Romains, envoya Cinéas à Rome pour gagner par des présents les principaux membres du sénat. Tout vieux et tout aveugle qu'il était, Claudius se fit transporter dans cette assemblée, et, par un discours fort éloquent, fit rejeter les honteuses conditions que ce roi proposait.
| (1) Il est constant, d'après le témoignage de Tite-Live et de Suétone, que les Clausiens abandonnèrent le pays des Sabins pour venir s'établir à Rome, où ils prirent le nom de Claudiens. Il y avait deux familles Claudia l'une patricienne, et l'autre plébéienne.
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| (2) Selon une ancienne coutume, les joueurs de flûte avaient le droit de prendre leurs repas dans le temple de Jupiter. Ils assistaient à tous les sacrifices qu'offrait le peuple romain.
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| (3) Pinarius et Potitius étaient deux vieillards auxquels Hercule enseigna le culte dont il voulait être honoré. Ils devaient lui offrir un sacrifice le matin et le soir. Un jour qu'ils avaient sacrifié le matin, comme de coutume, Potitius arriva le premier pour offrir le sacrifice du soir ; mais Pinarius ne se présenta qu'après cette cérémonie achevée, et au moment où la victime venait d'être mangée. Indigné de sa négligence, Hercule ordonna que la famille des Pinariens servirait les Potitiens pendant leurs repas, et lorsqu'ils lui offriraient un sacrifice. Avant ce temps-là, Pinarius avait un autre nom. Voyez Servius sur le 1.8 de l'Enéide de Virgile.
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| (4) Ceci parait se rapporter au décemvir Appius Claudius Regillanus, qui vivait cent-ans auparavant. Tite-Live, l.10.
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| (5) Ville maritime de 1'Apulie, aujourd'hui la Calabre, avec un port à l'entrée de la mer Adriatique, de la forme d'une tête de cerf, animal que les Messapiens, habitants de cette province, nommaient Brundusium. La voie Appienne s'étendait depuis Rome jusque là, en passant par la Campanie. C'était là qu'on s'embarquait pour passer d'Italie en Grèce. Pompée, fuyant devant César avec le sénat, s'embarqua dans ce port pour passer en Epire. Agrippine, femme de Germanicus, y débarqua avec les restes de ce prince.
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| (6) Arntzen pense que la phrase latine, aquam anienem, etc., appartient au chapitre précédent, et qu'elle n'a été répétée dans celui-ci que par une distraction des copistes : mais ce serait une trop forte distraction. Il vaut mieux penser que Claudius acheva l'entreprise commencée par Curius.
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| (7) On lit ce discours dans Plutarque, Vie de Pyrrhus ; et Cicéron en fait mention dans sa première Philippique.
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