Taverne de Fortunata

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En quittant la maison de Pansa, on trouve un carrefour formé par la rencontre des rues des Thermes et Domitienne et de celle à laquelle j'ai assigné le nom de rue de Fortunata. Là se trouve une fontaine surmontée d'un bas-relief représentant un aigle tenant un lièvre dans ses serres. Derrière cette fontaine s'ouvre la taverne à laquelle une inscription a fait donner le nom de Fortunata.

Les tavernes, chez les Romains aussi bien que chez nous, avaient reçu des dénominations différentes, selon la classe de pratiques qui les fréquentait. Les popinae représentaient les gargotes modernes ; c'était là que se préparait la nourriture du peuple, et elles devaient leur nom à la manière dont elles s'approvisionnaient ordinairement en achetant aux popes ou sacrificateurs leur part des victimes. Les oenopoles ou tabernae vinariae étaient nos cabarets ; enfin les thermopoles répondaient à nos cafés ; on y débitait des boissons chaudes, du vin cuit, du vin doux et de l'hydromel (1).

C'est à cette dernière classe qu'appartenait la taverne de Fortunata ; elle présente, comme toutes celles que nous rencontrerons, un comptoir de maçonnerie dans lequel sont entièrement engagés plusieurs grands vases de terre cuite, et que recouvrait une tablette de marbre où l'on reconnut encore l'empreinte des tasses. Les liquides qu'elles contenaient devaient renfermer quelque principe acide qui avait attaqué le poli du marbre. Dans le fond, un massif plus élevé portait le brasier destiné à chauffer les diverses boissons.

Derrière la boutique était une pièce qui put contenir des sièges pour les buveurs, et au fond sont deux petites chambres.


(1)   PSEUDOLUS : «A-t-il de la douceur quand il en faut ?
CHARIN : Tu le demandes ? c'est alors du vin à la myrrhe, du vin cuit, de l'hydromel, du miel de toute sorte. Il avait commencé à établir dans son coeur un débit de boissons chaudes»
PSEUDOLUS : Quid, si opus sit, ut dulce promat indidem ecquid habet ?
CHARIN : Rogas ?
Murrhinam, passum, defrutum, mellinam, mel cujusmodi.
Quin in corde instruere quondam coepit tbermopolium.
(Plaute, Pseudol. II, 1).

Dans une autre comédie de Plaute, Labrax, échappé à un naufrage, se plaint qu'il n'y ait pas un seul thermopole dans le royaume de Neptune :
Ne thermopolium quidem ullum instruit. (Rudens, II, 6).

«Voyez, dit encore Plaute, voyez ces philosophes sans cesse au cabaret ; ont-ils accroché quelque argent, ils se cachent le visage et vont boire chaud».
Quos semper videas bibenteis in thermopolio.
Ubi quid subripuere, operto capitulo, calidum bibant
. (Curculio, II, 3).