La cour

La réputation de Rigaud est indissociable des commandes dont l'honora la famille royale : deux rois (Louis XIV et Louis XV), le frère du roi (Monsieur), la cousine du roi (la Grande Mademoiselle), le fils (le Grand Dauphin) et les petits-fils (le duc de Bourgogne, le duc d'Anjou) du roi, les bâtards du roi (le comte de Toulouse, Mesdemoiselles de Blois et Mademoiselle de Nantes), la bâtarde du fils du roi (la marquise d'Avaugour), le bâtard du neveu du roi (Mgr de Saint-Albin), le neveu (le duc de Chartres) et la nièce (la Palatine) du roi, soit au total 21 toiles originales. En cela, Rigaud se distingue fondamentalement de ses deux concurrents, François de Troy et Nicolas de Largillierre, non que ceux-ci n'aient pas eu à peindre des membres de la famille royale, mais jamais en aussi grand nombre et avec une telle régularité. Une autre de ses spécificités tient à l'excellence de sa clientèle : dans la noblesse d'épée comme chez les robins, Rigaud peint ce qu'il y a de mieux et ce qu'il y a de plus influent. Passées les premières années, les cadres subalternes de l'armée et de l'administration s'effacent au profit de la cour.

Arbre généalogique de la famille royale
 

Hyacinthe Rigaud - Louis XIV (1701)
Paris, musée du Louvre

En premier lieu viennent les militaires les plus haut gradés (22 % de l'effectif total), dont dix-neuf maréchaux de France - Luxembourg, Lorge, les deux d'Estrées, Villeroy, Boufflers, Noailles, Villars, Chamilly, Châteaurenault, Vauban, Bollwiller, Tessé, Montrevel, d'Harcourt, Berwick, Gacé, d'Artagnan, Belle-Isle -, si bien que le client type pourrait être défini comme un officier supérieur ayant participé aux guerres de la fin du règne de Louis XIV, âgé de 40 à 48 ans et qui choisit de se faire représenter seul.

Au plus près du souverain, mais sur un tout autre théâtre d'opération, plus pacifique celui-là, figurent les membres des différents conseils de gouvernement (2,6 %) : le chancelier (Daniel François Voysin), le garde des sceaux (Fleuriau d'Arménonville et Germain Louis Chauvelin), le contrôleur général des finances (Desmarets, Law, Dodun, Le Pelletier des Forts, Orry), les secrétaires d'Etat aux affaires étrangères et à la guerre (Colbert de Croissy, Colbert de Torcy, Saint-Florentin, d'Argenson), les grands commis de l'administration des Bâtiments, de la monnaie et du mobilier royal (Hardouin-Mansart, Berbier du Metz, Colbert de Villacerf, Rolland Pierre Gruyn, le duc d'Antin, Nicolas de Launay, Robert et Jules Robert de Cotte), le lieutenant général de police Marc René de Voyer de Paulmy d'Argenson, successeur de La Reynie, le directeur de la Librairie et garde de la Bibliothèque royale, Jean Paul Bignon, mais surtout les créatures du Régent et les principaux ministres de Louis XV, les cardinaux Dubois et Fleury.

Enfin, la vie à Versailles eut ses chroniqueurs et ses mémorialistes : le marquis de Dangeau, le duc de Saint-Simon et le marquis de Sourches. Or tous trois posèrent devant Rigaud.

Hyacinthe Rigaud
Philippe de Courcillon, marquis de Dangeau (1702)
Versailles, musée national du château
et des Trianons


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