Anne Louis Girodet-Trioson - La malédiction de Thésée - Illustration de l'édition Didot des œuvres de Racine en 1801



Si le théâtre de Sénèque est avant tout spectaculaire, c'est qu'il met en scène les ravages des passions qui précipitent les hommes à leur perte. Or la passion amoureuse n'est pas seule en cause : toutes les émotions violentes et incontrôlées peuvent elles aussi engendrer des catastrophes. A ce compte-là, Thésée n'est pas moins monstrueux que Phèdre et tombe sous le coup de la condamnation stoïcienne : bourreau des coeurs pendant sa jeunesse, il a séduit puis abandonné nombre de ses conquêtes, et c'est pour séduire Proserpine, la propre épouse de Pluton, qu'il est descendu aux Enfers et y a malgré lui séjourné plus longtemps que prévu. A son retour sur terre, Thésée ne semble guère avoir tiré la leçon de son expérience et réagit avec fureur à l'accusation de viol de Phèdre, sans prendre le temps de mieux s'informer et d"interroger le principal intéressé. Dans cette scène, dolor et furor s'enchaînent jusqu'à la malédiction qui constituera un nouveau nefas. Car tout ce dont Thésée accuse Hippolyte et la race des Amazones dont il est issu ne peut-il pas concerner tout autant Phèdre... et aussi celui qui juge et condamne avant d'avoir fait son propre examen de conscience ?


1. Texte à exploiter

2. Document complémentaire


3. Texte à comparer

Robert Garnier - Hippolyte - 1573

Enregistrement réalisé par les comédiens de la Comédie-Française lors d'une séance de répétition à la table, sans représentation sur scène, en 2020. Avec Loïc Corbery dans le rôle de Thésée et Adeline d'Hermy dans celui de Phèdre. Thésée, à peine revenu des Enfers, apprend que Phèdre veut mourir et ne parvient pas à tirer une explication de la nourrice. De l'incompréhension à la stupéfaction puis à la soif de vengeance, la fureur monte...




Jean Racine - Phèdre - 1677

Adaptation télévisée de Pierre Jourdan en 1968, avec Jacques Dacqmine dans le rôle de Thésée et Claude Giraud dans celui d'Hippolyte. Vous constaterez que, contrairement à Sénèque et Robert Garnier qui ne donnent même pas à Hippolyte une chance de se défendre devant son père de la fausse accusation de viol, Racine, lui, insiste dans un débat contradictoire sur la pureté du jeune homme, qui n'a rien de monstrueux au rebours de celle de ses prédécesseurs. Cette flagrante injustice rend la colère de Thésée d'autant plus tragique, et le pathétique de la condamnation du jeune homme en est accentué.