Temple de Jupiter |
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Temple de Jupiter |
A l'extrémité septentrionale du Forum, dont il formait la principale décoration, s'élevait un temple construit en pierres et en laves revêtues d'un stuc très dur. Sa position sur la place la plus importante de la ville, une tête colossale de Jupiter avec les cheveux et la barbe légèrement colorés en rouge, trouvée dans le sanctuaire lors de sa découverte en 1816 et 1817, ont fait supposer avec vraisemblance qu'il était consacré au maître des dieux. |
Tout indique que ce monument, renversé sans doute par le tremblement de terre de 63, était en pleine restauration à l'époque de la destruction de la ville ; sans cela, on ne saurait expliquer la disparition complète d'un grand nombre de colonnes qui n'ont point été retrouvées ; de plus, dans un souterrain existaient divers fragments d'architecture qui, évidemment, y étaient emmagasinés en attendant le moment d'être remis à leur place. Plusieurs de ces fragments paraissaient avoir appartenu à d'autres édifices.
Le temple de Jupiter était élevé sur un podium ou soubassement haut de 3 mètres, auquel on montait par un escalier de 18 marches partagé par un repos. Les dix premiers degrés n'étaient que deux petites rampes a a placées aux deux extrémités de la façade et séparées par une esplanade ou pulpitum b longue de 10m 35 et large de 3m 80, qui dut servir à l'accomplissement des cérémonies publiques. Le bas du perron était flanqué de deux larges piédestaux c c et de deux plus petits placés en arrière et plus haut, sur l'un desquels étaient encore les pieds d'une statue chaussée de cothurnes. Les huit degrés supérieurs règnent sur toute la largeur de la façade et conduisent au pronaos ou porche d qui présente à la façade six colonnes de 0m 90 de diamètre et trois en retour de chaque côté, plus les antes qui font saillie en continuant les murs latéraux de la cella. Ce pronaos était pycnostyle, c'est-à-dire que les entrecolonnements n'étaient que d'un diamètre et demi ; sa largeur est de 11m 87, et sa profondeur jusqu'au mur de la cella de 12m 10. Dans son pavé et dans celui de la cella sont, sur une même ligne, quatre ouvertures, quatre fentes, longues de 0m 90 et larges seulement de 0m 10, servant à éclairer les salles contenues dans le soubassement de l'édifice. Quatre autres soupiraux semblables se trouvent dans la cella entre la 2e et la 3e colonne et la 5e et la 6e de chaque côté. La longueur de la cella est de 18m 50 hors oeuvre, ce qui donne par conséquent 30m 60 pour la longueur totale du temple. Les colonnes du porche étaient d'ordre corinthien ; toutes étaient renversées, et il ne restait plus que leurs bases et la partie inférieure du fût, qui nulle part ne s'élevait à plus de 2 mètres au-dessus du sol. On les a égalisées récemment en plaçant quelques boisseaux sur plusieurs d'entre elles ; il en est même une que surmonte un chapiteau fruste. D'après leur diamètre, ces colonnes devaient avoir 9m 72 de hauteur. Près de l'une d'elles on trouva le squelette d'un malheureux qu'elle avait écrasé dans sa chute. Le sol du pronaos était formé de grandes dalles dont plusieurs sont en place. Une grande porte, en avant des pieds-droits de laquelle on reconnaît encore la trace des gonds, donnait accès à l'intérieur de la cella e, qui semble indiquer que ce temple était du nombre de ceux que Vitruve nomme hypètres, mot dont j'ai expliqué la signification au commencement de ce chapitre. Il était divisé en trois nefs par deux rangées, chacune de huit colonnes et deux pilastres ioniques qui portaient un entablement et un second rang de colonnes d'ordre corinthien, lesquelles ont entièrement disparu. Des quatre pilastres il ne reste que les bases et une partie de leur élévation en tuf ; sur celui qui existe au N.-0., au pied de l'escalier, est déposé un des chapiteaux de ces pilastres.
Les trois nefs étaient fort inégales, celle du milieu ayant 9m 30 de largeur, tandis que les autres n'ont que 1m 50. Le sol présente les restes d'un encadrement en mosaïque blanche et noire qui entourait un pavé de marbre. Les murs étaient couverts de peintures de couleurs éclatantes, mais sans sujet. Autant qu'on peut en juger par ce qui reste, le soubassement était noir avec des fleurs et des filets blancs ; les grands panneaux étaient rouges et séparés par des bandes peintes en marbre jaune, et encadrées de vert ; enfin, au-dessus d'une bordure en forme de grecque de diverses couleurs, s'étendait un frise verte, rouge, brune et amaranthe. Outre la tête de Jupiter, on a trouvé dans la cella un cadran solaire, une sorte de bouclier, un petit buste adhérant à la muraille, et un groupe de bronze composé d'un vieillard tenant par la main un jeune garçon et d'une femme portant un enfant dans ses bras.
Au fond du sanctuaire sont trois chambres voûtées ou opistodomes f, qui servirent probablement à renfermer l'aerarium, le trésor de la ville, et aussi celui du temple. Enfin, derrière ces salles, on voit un petit escalier dont l'entrée se trouve dans l'angle au fond de la nef de gauche ; il conduisait à la galerie élevée que formait le second ordre de colonnes de l'intérieur du temple.
Quelques antiquaires ont supposé que les décurions de Pompéi durent, à l'exemple des sénateurs de Rome, s'assembler dans cet édifice, et que le pulpitum du perron servit de tribune aux harangues ; en conséquence, ils lui ont donné le nom de senaculum. Nous admettons très volontiers cette hypothèse, car nous savons que chez les anciens, et surtout dans les villes de second ordre, on s'assemblait souvent dans les temples pour délibérer sur les affaires publiques, mais nous rejetons une dénomination qui impliquerait une idée fausse, en supposant au monument qui nous occupe une destination purement civile ; il nous paraît évident que c'était un temple, et si quelque doute subsistait encore il serait détruit par la présence dans le Forum, à 15 mètres environ en avant de la façade, d'un grand autel des sacrifices, massif aujourd'hui dépouillé des marbres dont il était revêtu.