Temple d'Auguste, dit le Panthéon

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Temple d'Auguste, dit le Panthéon


Parmi les édifices de Pompéi, il n'en est peut-être pas un seul dont la destination ait donné lieu à plus de controverses que celui qui s'élève au côté oriental du Forum et qu'on désigne ordinairement sous le nom de Panthéon, qu'on lui donna à l'époque de sa découverte en 1821 et 1822, parce que l'on supposa que les douze piédestaux qui s'y trouvent placés en rond avaient dû porter les statues des douze grands dieux, Dii consentes.

Quelques auteurs, frappés de sa ressemblance avec le monument de Pouzzoles connu sous le nom de Temple de Sérapis, ont pensé qu'on y devait reconnaître un temple dédié à cette divinité. D'autres archéologues ont cru que c'était un senaculum, lieu destiné à la réunion des magistrats municipaux, un hospitium consacré à la réception des ambassadeurs et des magistrats étrangers, ou enfin un local pour les fêtes publiques. L'opinion la plus vraisemblable nous paraît être celle de l'ancien directeur des fouilles, le savant Carlo Bonnucci, qui croit que ce dut être un temple consacré à Auguste. Cette supposition est d'autant plus plausible que plusieurs inscriptions trouvées à Pompéi, telles que celles des tombeaux d'Arrius Diomède, de Munatius, de Nistacidius et de Calventius, font mention d'Augustales, prêtres préposés au culte d'Auguste divinisé, et que jusqu'à présent on n'a découvert aucun autre temple qui puisse mieux que celui-ci lui être attribué.

La façade principale est tournée vers le Forum ; sous son portique a b, orné de piédestaux ayant dû porter des statues et que soutenaient des colonnes de marbre blanc, se trouvent les deux portes par lesquelles on entrait dans le temple. Ces portes sont séparées par un trumeau contenant une niche accompagnée de deux colonnes cannelées de marbre blanc. Aux côtés des portes sont plusieurs boutiques f dans l'une desquelles furent trouvées quatre-vingt-treize pièces de monnaie ; on en a conclu, sans preuve bien positive, que ces boutiques étaient des tabernae argentariae occupées par des changeurs, qui, en effet, avaient ordinairement leurs comptoirs dans le Forum. On trouva aussi dans une autre de ces boutiques une pierre-mesure, dont je parlerai à l'occasion d'une plus importante, découverte de l'autre côté du Forum. Le temple n'étant pas exactement perpendiculaire à celui-ci, on avait dissimulé cette irrégularité en donnant aux boutiques une profondeur inégale qui varie de 4m 80 au nord, à 1m 80 seulement au sud. Auprès de la plus petite et dernière de ces boutiques est, ainsi que l'indique le plan, un massif large de 4 mètres et en saillie sur le portique de 3m 80 ; on y voit encore quelques degrés de l'un des escaliers qui conduisaient aux portiques supérieurs du Forum, aux ambulatoria.

L'intérieur du temple présente une cour rectangulaire g h i k, longue de 37m 50 sur 27 mètres de largeur, que la plupart des auteurs, tout en s'étonnant de n'en trouver aucun vestige, ont supposé avoir été autrefois entourée d'un portique qui aurait été renversé par le tremblement de terre de 63. D'un examen attentif du monument il est résulté pour nous la certitude que, si ce portique a jamais existé, il ne put être qu'un toit en saillie ou une galerie provisoire en bois destinée à protéger les peintures murales, et qu'on s'occupait de remplacer par un portique de pierre au moment de la destruction de la ville. En effet, sur les bords de l'area, des côtés g i et i k et sur plus de la moitié du côté k h, l'area n'est entourée que d'un degré de tuf beaucoup trop étroit (0m 40) pour avoir servi de stylobate, et sur lequel d'ailleurs on ne voit aucune indication de l'existence de colonnes ; du côté g h, au contraire, et sur le reste du côté h k, le degré est formé de larges pierres calcaires (0m 80) sur la surface desquelles on voit, à des distances égales (2m 25), des trous carrés dans lesquels devaient être scellés les pivots en fer fixés au centre des colonnes. Un petit canal creusé dans la pierre devait conduire le plomb fondu dans cette cavité lorsque la colonne serait mise en place ; or dans ces trous de scellement on chercherait vainement quelques vestiges de fer ou de plomb ; les colonnes n'avaient donc point encore été dressées et n'avaient pas même été apportées ; elles ne devaient l'être que lorsque l'area entière aurait été entourée d'un semblable stylobate prêt à les recevoir. Un caniveau, régnant au pied du stylobate, réunissait les eaux dans une citerne où on pouvait puiser par une ouverture de marbre, encore munie de son couvercle et placée au S.-E. de l'area.

Les murailles au nord et à l'ouest étaient enrichies de belles peintures parmi lesquelles il en est une qui a beaucoup exercé la sagacité des antiquaires ; elle représente une femme assise près d'un jeune homme appuyant la main droite sur un rocher et tenant de la main gauche une épée dans son fourreau. On reconnut longtemps dans cette composition Thésée venant, en présence de sa mère Ethra, de soulever le rocher qui courrait l'épée de son père ; mais vint un jour où l'on s'aperçut que la femme portait au front de petites cornes et ne pouvait être autre qu'Io, ainsi symbolisée dans plusieurs sculptures et peintures antiques. Ce fut alors Io et Argus, qu'à notre avis il est difficile de reconnaître dans cette figure héroïque de jeune homme tenant une épée au lieu de la houlette, du pedum, attribut ordinaire du berger Argus. Une composition presque identique a été trouvée à Pompéi en 1828 ; il me semble que dans l'une comme dans l'autre nous devons voir Io écoutant le récit des aventures de son fils Epaphus, quand, après de longues et pénibles recherches, elle vient enfin de le retrouver, en Phénicie, chez la reine des Bibliens. Parmi les autres peintures que l'on admire encore au temple d'Auguste, où elles sont protégées par un toit moderne, on reconnaît encore Ulysse et Pénélope, l'Amour et Psyché, un Guerrier couronné par la Victoire, une Femme jouant de la lyre, et une apothéose figurée par un génie ailé portant une femme sur ses épaules. On y voit aussi des marines, des paysages, des chasses, des courses de char, des galères, des groupes de fruits, de gibier, de viande, etc. Les arabesques qui entourent ces divers tableaux sont au nombre des plus élégantes qui aient été trouvées à Pompéi.

Au côté méridional de l'enceinte existe une rangée de onze petites chambres ou cellules m, décorées uniformément de peintures rouges, et destinées probablement au logement des prêtres composant le collége des Augustales. A la suite est une petite porte n donnant sur une impasse. En face, au côté septentrional, les chambres sont remplacées par douze boutiques o, sans communication avec l'intérieur du temple et ouvertes sur la voie appelée aujourd'hui rue des Augustales ou du Temple d'Auguste. Au milieu du même côté est une entrée latérale du temple p, dont les parois étaient ornées de quatre intéressantes peintures sur fond jaune, malheureusement presque entièrement effacées.

Roux, tome II, planche 83

La première représentait des génies buvant et décorant deux ânes de guirlandes ; au fond est un moulin absolument semblable à ceux que nous verrons dans les diverses boulangeries de Pompéi.

Roux, tome II, planche 84

La seconde composition nous offrait des génies tressant des guirlandes. Ce rapprochement de deux arts d'une importance si différente en apparence n'a rien qui doive étonner les personnes versées dans l'étude des usages de l'antiquité. Chez les Romains comme chez les Grecs, les fleurs étaient d'une nécessité presque aussi grande que le pain lui-même ; on ne saurait guère trouver dans leur vie un acte qui ait pu s'accomplir sans l'emploi des fleurs. Une troisième peinture, la moins maltraitée aujourd'hui, représente de petits génies tissant de la toile. De la quatrième composition il ne reste plus de traces.

Au milieu de l'enceinte est un socle dodécagone l très peu élevé et de 12m 50 de diamètre, sur lequel se trouvent encore douze piédestaux carrés rangés en rond. Ces piédestaux durent porter les colonnes d'un temple monoptère, dans lequel était sans doute placée la statue de la divinité. Ce petit temple présente une particularité assez inexplicable : il ne se trouvait exactement ni au centre de l'enceinte, ni dans l'axe de l'entrée principale, ni dans celui de l'entrée latérale.

Au fond du péribole s'élève une aedicula ou chapelle q, composée d'un porche et d'un sanctuaire auxquels on monte par cinq degrés flanqués de deux espèces de piédestaux ou podia. Le porche était orné de belles peintures parmi lesquelles on reconnaît encore, à droite, une figure assise tenant un thyrse, et un héros nu armé d'une lance et d'un bouclier. Un autre héros, moins bien conservé, se voit sur le mur, à gauche, et une quatrième peinture est entièrement effacée.

Le sanctuaire renferme un piédestal de marbre sur lequel avait été une statue impériale, sans doute celle d'Auguste, dont on n'a trouvé qu'un bras tenant un globe. Quatre niches durent contenir les statues des membres de la famille de l'empereur ; deux seulement existaient encore, mais renversées et privées du bras droit ; on les attribue à Livie et à Drusus. La première est une des plus remarquables qui soient sorties des fouilles de Pompéi ; les draperies surtout sont magnifiques. Ces statues portées au Musée ont été remplacées par des copies en plâtre.

A gauche du sanctuaire est une grande salle r dont la façade devait être soutenue par deux piliers carrés qui eussent posé sur deux dés de marbre blanc encore en place, et dans lesquels, comme dans le stylobate entourant l'area, on reconnaît le trou et le petit canal pour le scellement. Au fond de la salle est une espèce de tabernacle s élevé de cinq degrés au-dessus du sol, et un autel t pour les offrandes ou les sacrifices. Les murailles étaient ornées d'élégantes peintures architecturales ; trois panneaux que nous avions vus encore assez bien conservés sont aujourd'hui presque effacés ; l'un porte, sur fond blanc, une guirlande de fleurs ; les deux autres offrent, sur fond jaune, deux compositions représentant des Amours dansant, jouant de divers instruments et donnant à manger à l'aigle de Jupiter. Sur le soubassement sont représentés divers animaux fabuleux.

En avant de cette salle, contre le mur septentrional, est une petite enceinte à hauteur d'appui que l'on croit avoir porté un orchestre ; on y trouva en effet quelques fragments de flûtes. Au-dessus est une peinture représentant Phryxus sur le bélier.

De l'autre côté du sanctuaire est une salle plus grande u qui, comme celle de gauche, présente à sa façade les deux dés de marbre qui devaient recevoir les piliers ; elle est entourée de trois côtés d'une grande table de maçonnerie revêtue de stuc, inclinée en dedans et au pied de laquelle règne un caniveau de marbre. Le voisinage de la petite porte n et la disposition de la salle portent à croire que ce lieu était destiné au débit de la chair des victimes que les prêtres vendaient au peuple. A côté de la porte était une caisse garnie de sa serrure, dans laquelle étaient enfermés une pierre gravée, un anneau d'or, 1036 pièces de monnaie de bronze et 41 d'argent qui, probablement, étaient le produit de la vente. On trouva aussi dans cette salle des fragments de grands carreaux de vitre. Des peintures qui décoraient les murailles il ne reste qu'une grande composition allégorique représentant l'Enfance de Romulus et Rémus, et dans le soubassement quelques animaux chimériques, un masque, des fruits, etc.